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Aujourd'hui le Maroc
Rama Yade, la femme qui a dit non à
Nicolas Sarkozy
Mustapha Tossa
Photo Aujourd'hui le Maroc
12 décembre 2008 Rama Yade se
trouve plus proche de la sortie et de la disgrâce que de la
promotion. Pourtant, elle faisait partie des ces personnalités
nouvelles du gouvernement à qui tout ou presque était pardonné.
En l’espace de quelques jours, Rama Yade , la très séduisante
benjamine du gouvernement, (elle fête ses trente deux ans
samedi), s’est retrouvée dans l’œil d’un cyclone enragé contre
sa fonction de secrétaire d’Etat aux droits de l’Homme et ses
choix de se chercher un destin national plutôt qu’une carrière
parlementaire européenne.
Elle se trouve donc plus proche de la sortie et de la disgrâce
que de la promotion. Pourtant, Rama Yade faisait partie des ces
personnalités nouvelles du gouvernement à qui tout ou presque
était pardonné. Un charme à faire fondre les plus dures des
résistances, une jeunesse d’âge à arracher la compréhension des
plus intraitables des opposants et surtout une bienveillance
affichée de Nicolas Sarkozy à faire clore toutes les audaces.
Telle était la situation de Rama Yade alors que se profilait à
l’horizon l’inévitable changement de gouvernement. A aucun
moment , l’Elysée n’avait donné l’impression de vouloir lâcher
Rama Yade, une protégée haut de gamme. S’il était question de
lui changer de mission, l’hypothèse de la renvoyer à l’ombre et
à l’anonymat n’a jamais été envisagée pour un symbole de la
diversité ethnique loué pour son désir de faire à défaut d’avoir
les moyens politiques de le réaliser.
Puis vint la tempête qui risque de remporter tous les rêves et
remettre les compteurs à zéro. L’intervention de Bernard
Kouchner considérant comme «une erreur» d’avoir proposé à
Nicolas Sarkozy la création d’une secrétariat d’Etat aux droits
de l’Homme, l’estimant incompatible avec une politique étrangère
de la France. Par cette simple déclaration, Bernard Kouchner
raye d’un trait tous les efforts fournis par Rama Yade, d’abord
pour exister, ensuite pour être crédible dans ses choix à venir.
Rama Yade sentit durement ce coup de pied de l’âne dans son dos.
Elle répondit à Bernard Kouchner avec une violence qui en dit
long sur sa détermination à se battre, à croiser le fer et
surtout à sortir par le haut : «Les Français savent que les
droits de l'Homme servent à quelque chose (…) Certes, personne
n'est assez naïf pour croire que la politique étrangère se
construit uniquement sur les valeurs (…) Mais pour moi et pour
le président de la République qui sait que les droits de l'Homme
restent des références fortes, actuelles, la France n'est pas la
France sans les valeurs (…) Vous savez qu'on ne construit jamais
rien sur le renoncement». Avant de brosser un tableau triste de
la situation qui risque de gêner aux entournures et l’ancien
champion du droit d’ingérence et l’actuel président de la
République : «On ne peut pas brader les droits de l'Homme, c'est
le rang de la France qui est en jeu (…) Si demain nous disons en
matière des droits de l'Homme il faut abdiquer, la France ne
serait plus la France. La France n'est rien sans les valeurs».
Cette tension ancienne avec son ministre de tutelle intervient à
un moment crucial où ses relations avec son parrain revendiqué
en politique, Nicolas Sarkozy, ont connu une nette dégradation.
Le refus de Rama Yade de mener la liste UMP aux prochaines
européennes de juin 2009 a été perçu comme une inexcusable
rébellion qui vaut disgrâce et sanction. Le courroux de Nicolas
Sarkozy lui a été transmis à l’état brut : «Quand on est
ministre, c'est pour s'engager et servir, pas pour se servir
(...) se planquer ou refuser de prendre des risques».
Rama Yade incarne la femme au gouvernement qui a dit non à
Nicolas Sarkozy, quitte à le mettre dans une situation politique
inconfortable. Ses tensions avec le palais de l’Elysée se
rajoutent à celles que le président de la République entretient
déjà avec un autre symbole de la diversité ethnique au pouvoir,
la ministre de la justice Rachida Dati.
A la veille de ce changement de gouvernement, Nicolas Sarkozy ne
semble avoir d’autres choix que de les garder avec le risque de
continuer à subir caprices de nouvelles stars et incompétences
des débutants ou les remercier avec le risque de renier sa
politique d’ouverture saluée dans le monde entier. La tentation
de les remplacer par d’autres symboles de la diversité est
grande, encore faut-il trouver les oiseaux rares capables de
relever ce défi.
Mustapha Tossa
DNCP à Paris Droits
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Aujourd’hui le Maroc 2008
Publié le 13 décembre 2008 avec l'aimable
autorisation de Aujourd'hui le Maroc
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