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Aujourd'hui le Maroc
Sarkozy
muscle son discours sur le Proche-Orient
Mustapha Tossa
Nicolas Sarkozy et Hosni Moubarak - Photo:
Xinhua
1er
janvier 2008 Le président
français est l’un des rares chefs d’Etat occidental à
afficher fièrement son amitié avec l’administration Bush et
prendre la distance indispensable à l’égard e la politique américaine
dans la région. L’exercice a nécessité
un immense talent de communication doublé d’un gigantesque
bagout : comment, en terre égyptienne, faire la synthèse
entre une amitié affichée et assumée pour Israël et une compréhension
solidaire avec les préoccupations arabes. Comment se présenter
comme l’un des rares chefs d’Etat occidental à afficher
publiquement et fièrement son amitié avec l’administration
Bush et prendre la distance indispensable à l’égard de la
politique américaine dans la région ? Ce fut l’exploit
tenté avec fougue et réussi selon beaucoup, au Caire par Nicolas
Sarkozy.
Cela ne fut pas une partie aisée. Les résistances étaient
lourdes et les préjugés épais. Attendu au tournant sur son
approche du conflit israélo-palestinien, le président français
a osé cette planche de salut sous forme de rappel : «J'ai
dit à plusieurs reprises (...) que c'était le moment pour Israël
de faire les gestes qui permettraient de prouver que la paix est
possible, y compris sur l'arrêt de la colonisation, de
l'implantation des colonies (…) Notre position (à l'égard
d'Israël), elle est constante, être un ami fidèle, ce n'est pas
être un ami complaisant». Et parce que la diplomatie française,
qui se présente comme n’étant «l’otage de personne», prête
encore à l’Egypte une puissante capacité amplificatrice que le
président français a ciselé cet appel : «Je veux être
entendu dans toutes les capitales arabes sur ce discours (...)
c'est ma position constante, et ça ne me gêne nullement de le
dire ici au Caire».
Si, sur la question palestinienne, Nicolas Sarkozy a fait dans le
rond et le consensuel, il a, par contre, fait des étincelles sur
le dossier libano-syrien. Les agences de presse se sont précipitées
pour relayer cette virile déclaration à l’encontre de Damas : «Nous
n’aurons plus de contact avec les Syriens tant que nous
n’aurons pas des preuves de leur volonté de laisser le Liban se
doter d’un président de consensus».
En adoptant cette position, Nicolas Sarkozy revient sur un des ses
actes de rupture majeurs avec l’ère Chirac. Tandis que
l’ancien président français avait fait de l’isolement de
Bachar Al Assad une stratégie de pression sur le régime syrien
après l’assassinat de Rafiq Hariri, Nicolas Sarkozy avait parié
sur la reprise du dialogue avec Damas pour adoucir ses mœurs et
l’amener à plus de coopération pour sortir de l’inextricable
impasse libanaise. D’où les voyages dans la capitale syrienne
de ses plus proches collaborateurs comme le secrétaire générale
de l’Elysée Claude Guéant et l’influent conseiller
diplomatique Jean David Levitte.
L’heure française n’est plus à la séduction ou à la
persuasion. La menace est d’une limpide clarté. Pour que le
message soit bien compris à Damas, Nicolas Sarkozy s’est dit «prêt
à mettre l’argent nécessaire» pour la création et la mise en
place du tribunal international chargé de juger les assassins présumés
de Rafiq Hariri pour que «personne ne le considère alors comme
une plaisanterie». Pour l’ensemble de la classe politique
syrienne, la référence à ce tribunal international est un
cauchemar permanent. Il constitue l’épée de Damoclès brandie
par leurs détracteurs pour exercer diverses pressions. Pour ne
pas subir les foudres françaises, les Syriens savent à quoi
s’en tenir avec Nicolas Sarkozy : «Il y a un seul
acte qui m'intéresse, l'élection d'un président au Liban (…)
Je jugerai de la respectabilité de chacun en fonction de cette décision-là
et pas d'une autre».
Mais était-ce le légendaire l’autisme syrien doublé d’un déficit
de traduction de cette détermination française on une manière
syrienne de laisser les portes du dialogue ouvertes ? Les
première réactions publiques des officiels syriens laissent
planer un léger parfum des surréalisme comme en témoigne la déclaration
du ministre syrien de l’Information Mohsen Bilal : «Nous
n'avons pas interprété (ces propos) comme une accusation
implicite. Les relations se poursuivent jusqu'à présent malgré
les déclarations et nous œuvrons avec les Français pour tirer
le Liban de cette crise». Et de se lancer dans une diatribe digne
des grandes envolées politiques locales «Avant, ils (les
Français) disaient que la Syrie était le problème, aujourd'hui,
ils invitent la Syrie à résoudre le problème, vu sa grande
influence chez son petit voisin (…) Qui s'ingère dans les
affaires libanaises? Si cette allégation est vraie, ce seraient
les Français qui s'ingèrent, et pas nous». Par :
Mustapha Tossa
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© Aujourd’hui le Maroc 2008
Publié le 3 janvier 2008 avec l'aimable autorisation de : Aujourd'hui le Maroc
Crédits photo : Xinhua
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