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Opinion - El Watan
Tunisie: Ben Ali
chassé du pouvoir
Mohand Aziri
Photo: El Watan
Samedi 15 janvier 2011
Independance day. Un vendredi de la catharsis en Tunisie. Un 14
janvier de folie, fait de bouleversements spectaculaires,
d’accélérations subites et violentes de l’histoire. Après près
d’un mois de révolte réprimée dans le sang, le peuple tunisien
s’est affranchi d’un des régimes les plus tyranniques d’Afrique
du Nord. Non sans avoir payé le prix fort. Hier, vers 18h30,
c’était l’épilogue tant attendu.
Une conclusion en apothéose des luttes des Tunisiens pour
leur émancipation. Après 23 ans de pouvoir absolu, le
général président Ben Ali quitte sur la pointe des pieds,
les fonctions usurpées de président de la
République tunisienne.
En raison de l’«incapacité temporaire du président Zine El
Abidine Ben Ali à assumer ses fonctions et conformément à
l’article 56 de la Constitution, j’assume à partir de cet
instant la charge de Président par intérim», a annoncé en
début de soirée Mohammed Ghannouchi, Premier ministre
sortant, à la télévision. Ghannouchi appellera aussitôt les
Tunisiens, «toutes sensibilités confondues à faire preuve de
patriotisme et d’unité». Dans son allocution prononcée
devant le président de la Chambre des députés, Fouad Mebazaâ,
et celui de la Chambre des conseillers (Sénat), Abdallah Kallal,
«le président par intérim» s’est engagé à «respecter
la Constitution et à mettre en œuvre toutes les réformes
sociales et politiques (...) qui ont été annoncées en
collaboration avec les partis politiques et les composantes
de la société civile».
Jusqu’au bout, Ben Ali s’accrochera aux rênes du pouvoir,
tentera de sauver les «meubles» de son régime qu’un petit
bout de bois de Sidi Bouzid, Mohamed Bouazizi, première
victime de la révolte, a fini par embraser. Ben Ali limogera
son gouvernement, convoquera des élections législatives
anticipées et chargera Mohammed Ghannouchi de former un
nouveau cabinet.
Le «Zinochet» proclamera également l’état d’urgence dans
l’ensemble du pays avec un couvre-feu de 18h à 6h du matin,
et a décidé d’interdire les rassemblements sur la voie
publique.
La veille, jeudi, dans une allocution télévisée, la
troisième depuis le début de la révolte prononcée en arabe
dialectal, Ben Ali promettra des réformes profondes, à
quitter le pouvoir au terme de son mandat en 2014. Il
s’engagera à… «baisser les prix des matières premières», à
accorder «toute liberté aux médias» et de cesser «la censure
sur internet».
Décidément, pas assez pour entraver la bonne marche de
l’histoire. Insuffisant pour sauver la tête de celui qui fut
le maître absolu de Carthage, encore moins à refroidir le
volcan tunisien. «Ben Ali dégage», «Ben Ali assassin»,
«Power to people», «You killed your people Ben Ali»… ont
scandé hier des Tunisiens déterminés à s’émanciper d’un
régime despotique et maffieux. A Tunis, mais aussi dans
plusieurs autres villes du pays, Sfax, Gafsa, El Kef, Ras El
Djabel… des manifestations monstres,réunissant des dizaines
de milliers de Tunisiens, avaient donné vendredi le coup de
grâce au régime. Ni les blindés de l’armée ni les
interventions musclées et les brutalités policières n’ont eu
raison de la détermination du peuple.
Un printemps tunisien, comme en rêvent depuis toujours des
millions d’Algériens, sevrés eux aussi, de liberté et de
démocratie. Vivement l’effet domino !
Ce que prévoit la Constitution :
Y a-t-il violation de la Constitution par la désignation
de Mohammed Ghannouchi président par intérim de la
République tunisienne ? Invoqué pour légitimer l’accession
de Ghannouchi à la présidence par intérim, l’article 56 de
la Constitution stipule : en cas «d’empêchement provisoire,
le président de la République peut déléguer, par décret, ses
attributions au Premier ministre (…).
Au cours de l’empêchement provisoire du président de la
République, le gouvernement (…) reste en place jusqu’à la
fin de cet empêchement. Le président de la République
informe le président de la Chambre des députés et celui de
la Chambre des conseillers de la délégation provisoire de
ses pouvoirs».
L’article 57 de la Constitution stipule tout autre chose :
en cas de vacance pour cause de décès, de démission ou
d’empêchement absolu, le
Conseil constitutionnel se réunit immédiatement et constate
la vacance définitive à la majorité absolue de ses membres.
Il en informe les présidents de la Chambre des conseillers
et de la Chambre des députés qui est immédiatement investi
des fonctions de la Présidence de l’Etat par intérim pour
une période variant entre 45 jours au moins et 60 jours au
plus. (…)
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