Mercredi 31 mars 2010
Où en est l’Unesco des agressions sur le patrimoine
architectural et religieux de la ville sainte de Jérusalem ? La
judaïsation et l’israélisation de tout ce qui est arabe et
musulman ont commencé à susciter la colère de l’opinion publique
mondiale de manière générale. D’ailleurs, nombreuses sont les
déclarations qui ont été émises de parties connues pour leur
alignement aveugle sur Israël, exprimant leur rejet des
agressions israéliennes sur les lieux sacrés à Jérusalem, en
plus du sanctuaire d’Abraham (le Caveau des patriarches).
Cette vague s’est manifestée dans la construction de colonies
juives à Jérusalem-Est occupée par Israël en 1967. L’Unesco,
quant à elle, n’a pas pris la position pour la condamnation de
ces crimes tout au long des derniers mois.
Je dis cela en prenant en considération la première mission de
l’Unesco en vertu de sa principale charte qui stipule la
sauvegarde du patrimoine. Toutefois, jamais un patrimoine humain
n’a fait l’objet d’une campagne aussi organisée pour sa
destruction et l’effacement de son identité arabe et musulmane,
comme c’est le cas actuellement à Jérusalem.
J’ai récemment rencontré Irina Bokova, directrice générale de
l’Unesco, à Riyad, lors du jubilé d’argent de la Janadireya
(festival culturel) auquel elle était invitée d’honneur. Je lui
ai parlé de ce silence inacceptable de la part de la première
organisation internationale concernée par le patrimoine humain.
J’ai ajouté que même le secrétaire général de l’Onu, à laquelle
est rattachée l’Unesco, s’était enfin exprimé, déclarant que la
construction de colonies israéliennes à Jérusalem déstabilisait
toutes les tentatives de règlement dans la région. Mais il
semble que l’Unesco n’est point concernée, lui ai-je dis pour
conclure. La directrice bulgare a rétorqué qu’au contraire,
l’Unesco est concernée et qu’elle prendrait une position à cet
égard.
Quelques jours plus tard, une déclaration décevante a été
publiée en son nom selon laquelle l’organisation internationale
ressent de l’inquiétude face aux événements de Jérusalem. A mon
sens, si tout ce que l’Unesco peut faire est de ressentir de
l’inquiétude, le monde n’a plus besoin de cette organisation qui
a été dépassée même par l’administration américaine, par le
biais de la secrétaire d’Etat Hillary Clinton, connue pour son
alignement sur Israël.
Le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a totalement
ignoré toutes ces déclarations et a annoncé que Jérusalem était
la capitale d’Israël et non pas une terre occupée. Ce qui veut
dire que son gouvernement peut agir comme bon lui semble. Dans
cet ordre d’idées, les Arabes de Jérusalem qui y vivaient bien
avant l’entrée des forces d’occupation israélienne sont devenus,
eux, les occupants. C’est en se servant de cette logique que
s’inscrivent les agissements d’Israël qui procèdent à
l’évacuation, à la confiscation des propriétés palestiniennes, à
la destruction des lieux de prière et au changement des noms des
rues. Tout ceci sans que l’Unesco ne fasse aucun pas positif.
L’organisation internationale s’est contentée de dire, des mois
plus tard, qu’elle était tout simplement « inquiète » à cause de
ces violations !
En réalité, je ne suis pas surpris par la position de Bokova.
J’avais d’ailleurs écrit à ce même endroit, durant la dernière
campagne électorale pour le poste de directeur général de
l’Unesco, que le lobby juif qui s’était opposé dès le début à la
candidature de Farouk Hosni ne se souciait aucunement de ces
quelques mots dits de manière spontanée à un moment d’émotion au
sujet des livres israéliens. J’avais dit que la raison
essentielle derrière le refus qu’un Arabe musulman accède à
l’Unesco est le dossier de Jérusalem qui avait besoin d’être
revu, à cause de la négligence qui a été de son ressort voilà
des années. J’avais également dit qu’Israël avait des plans
affichés pour changer la physionomie des lieux à Jérusalem et
pour la transformer en une ville israélo-juive et que les
opérations de judaïsation et d’israélisation allaient
s’accélérer, comme jamais cela n’avait eu lieu depuis
l’accession de Benyamin Netanyahu à la tête du gouvernement.
Il y avait effectivement ceux qui ont été assez naïfs et qui ont
cru les Israéliens sur parole en s’imaginant que la raison du
refus d’Israël et ses alliés à l’accession du ministre égyptien
de la Culture à la tête de l’organisation internationale était
le fait qu’ils craignaient que l’on brûle les livres israéliens
s’il se trouvait à la tête de l’Unesco. Parmi ceux-là, il y
avait des grandes puissances, telles que la France qui avait
exercé des pressions sur le candidat égyptien pour revenir sur
ses dires afin de pouvoir le soutenir. Des sources au sein de
l’Elysée avaient d’ailleurs déclaré que l’instance
présidentielle était avec le candidat de l’Egypte et du groupe
arabe et musulman. Mais que l’unique obstacle l’empêchant
d’afficher sa position était sa déclaration suscitant
l’inquiétude des cercles juifs.
Le candidat égyptien a alors pris l’initiative courageuse de
revenir sur cette déclaration qui n’était guère révélatrice de
sa position vis-à-vis des livres et de la culture en général.
Mais la déclaration précitée n’était pas l’origine du refus
manifesté à la candidature égyptienne par les cercles sionistes
alliés d’Israël, puisque la position juive à son égard n’a pas
changé. Même après que le quotidien prestigieux Le Monde eut
publié que cette déclaration était spontanée et que Farouk Hosni
ne croyait pas à l’autodafé. D’ailleurs, les trois chevaliers du
sionisme qui ont fait campagne contre le candidat arabo-musulman
dans les médias français sous la houlette de Bernard-Henri Lévy
qui aime à se qualifier de philosophe, avaient publié un autre
communiqué à la veille des élections, mettant en garde contre
l’élection du candidat égyptien qui s’était engagé
officiellement devant le Parlement égyptien — pour reprendre les
propos de Bernard-Henri Lévy rapporté dans un entretien à la
télévision française — de brûler tous les livres hébreux, de ses
deux mains. Toutefois, la campagne électorale a commencé et a
pris fin sans que la France n’affiche sa position officielle,
tel qu’elle l’avait promis.
Ce n’est pas uniquement la France qui s’est alignée et qui a cru
à la position juive, mais il y avait des Arabes qui se sont mis
à répéter, même après la fin de la bataille, que la raison
derrière l’échec du candidat égyptien était ses déclarations.
Quelques mois après l’accession d’Irina Bokova à la tête de
l’Unesco, Israël s’est empressé d’exécuter sur le terrain le
plan de judaïsation et d’israélisation de Jérusalem. Il défiait
ainsi le monde entier, y compris ses alliés traditionnels et il
était protégé par le silence attendu de l’organisation
internationale chargée de préserver le patrimoine humain et qui
a pris la peine de ressentir de l’inquiétude face à de tels
agissements.
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Publié
le 1er avril 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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