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Al-Ahram Hebdo
La révolution de janvier
encercle Israël
Mohamed Salmawy

Mercredi 8 juin 2011
Voilà des années qu’Israël n’a pas été
encerclée de cette manière sur le plan international,
et jamais l’intransigeance de son gouvernement n’a été
dévoilée au grand jour comme il en fut récemment. Le mérite
de ceci ne revient ni aux efforts de la diplomatie, ni à une
campagne politique, mais surtout à la révolution populaire
du 25 janvier.
Bien qu’à ses débuts, la révolution n’avait pas ciblé
Israël, ni n’a brandi de slogans sur la Palestine ou la
politique étrangère en général, il n’en demeure pas moins
que son appartenance arabe était évidente dès le départ. Les
foules qui sont sorties de la plupart des villes arabes ont
affiché leur soutien inébranlable à la révolution égyptienne
dès ses premiers jours critiques, en lui apportant un
soutien arabe et international.
Dès que la révolution a réussi à faire chuter l’ancien
régime, elle s’est mise aussitôt à s’élever contre ses
politiques odieuses. Elle a alors levé haut les pancartes de
la Palestine en pleine place Tahrir
et devant l’ambassade d’Israël. A ses premiers jours, la
révolution a focalisé ses revendications sur la chute du
régime, qu’elle a posée comme une condition sine qua non à
la réalisation de la liberté et de la démocratie et à
l’ancrage des bases de l’Etat civil. Tout de suite après,
nous avons vu cet intérêt se tourner à la cause
palestinienne, qui est, selon toute logique et toute
perspicacité, une partie intégrante de la cause de la
sécurité nationale égyptienne, même si la diplomatie
égyptienne sous l’ancien régime avait essayé de se
convaincre du contraire. Le rôle de l’Egypte s’était alors
transformé d’un défenseur du droit palestinien à un
intermédiaire entre lui et l’ennemi israélien que je
qualifie comme tel, malgré la signature par l’Egypte du
traité de paix. Bien que le conflit arabo-israélien n’ait
pas pris fin par la signature de ce traité, à un moment,
l’Egypte, qui était le défenseur incontesté du droit arabe,
vu son poids régional et son prestige international, est
l’ennemi n°1, comme le dit Israël. L’ennemi n°1 de l’Egypte
dans la région demeurera l’Etat occupant, dont l’activité
expansionniste ne cesse de prendre de l’ampleur, faisant fi
des traités qui n’interviendront jamais pour stopper ses
plans illégitimes, ses tentatives d’imposer sa mainmise et
sa suprématie militaire et nucléaire sur les peuples de la
région, à l’encontre de tous les traités internationaux et
des résolutions onusiennes.
Dans ce contexte, le rôle de l’Egypte s’est affaibli et sa
force s’est amoindrie avec son alignement jour après jour
sur le côté israélien. En fin de compte, elle s’est trouvée
en train d’encercler le peuple palestinien, à Gaza, voire
même en train de resserrer l’étau sur ses accès naturels.
Une politique qui a été exposée à une protestation populaire
élargie qui s’est exprimée par le biais des manifestations à
répétition et par les tentatives successives du peuple
égyptien de briser cet embargo auquel a participé l’Egypte.
Les Egyptiens avaient, en effet, effectué, un point de
passage verrouillé de Rafah, des tentatives de transporter
les munitions et les aides médicales qui étaient à maintes
reprises arrêtées par les forces israéliennes et
égyptiennes. Ceci a non seulement porté préjudice à l’image
arabe et internationale de l’Egypte, mais aussi à ses
intérêts stratégiques.
Il était donc tout à fait normal que la révolution, qui est
sortie pour rectifier le tir et pour restituer à l’Egypte
son prestige naturel, rouvre le dossier palestinien,
affichant son refus des anciennes politiques et appelant à
l’adoption d’une nouvelle politique plus élargie dans le
contexte du rôle naturel de l’Egypte dans la région. Lorsque
le ministre des Affaires étrangères, Nabil Al-Arabi,
a pris la décision historique de rouvrir le point de passage
de Rafah, il appliquait les politiques de la révolution de
janvier revendiquées par les foules ayant manifesté les
dernières années. Ainsi, cette décision fut l’une des plus
populaires du gouvernement de l’après-révolution.
Probablement l’un des résultats les plus importants de cette
nouvelle politique déclenchée par la révolution est cet embargo
international lancé contre Israël, à plus d’un niveau. La
révolution, qui a réussi avec son large impact moral à combler
la fissure palestinienne longuement qualifiée d’incurable par
l’ancien régime, est parvenue au même titre à ouvrir les points
de passage. Elle a alors mis Tel-Aviv dans une position de
défense devant l’opinion internationale. Le résultat a été que
le leadership palestinien a finalement décidé de recourir aux
Nations-Unies pour proclamer la création de l’Etat palestinien
longuement attendu. En conséquence, les voix officielles et
populaires se sont élevées de par le monde réclamant une
solution juste à la cause palestinienne. Plus d’une déclaration
et communiqué officiels se sont alors multipliés à ce propos,
dont le dernier discours du président américain
Barack Obama
au siège du secrétariat d’Etat américain, qu’il a consacré au
thème du Moyen-Orient.
Barack
Obama s’est trouvé dans l’obligation
de présenter une vision pour le règlement de la cause, surtout
après les événements de janvier dernier et ses retombées dans
les 4 coins des pays arabes, à savoir les révolutions arabes
successives qui se rangeront du côté de la révolution égyptienne
dans la défense du droit palestinien.
Israël fut le premier à pressentir le danger provenant de la
place Tahrir. Il a alors défendu
l’ancien régime et a essayé d’influencer les grandes puissances
pour entreprendre la même position. Et lorsque les pays n’ont pu
que suivre le cours de l’Histoire, Israël a gagné en
intransigeance et le discours de son premier ministre Benyamin
Netanyahu au Congrès était un exemple d’intransigeance et une
affirmation de l’isolement international que lui
a imposé la révolution de janvier et
ses retombées. En dépit du consentement du lobby sioniste aux
Etats-Unis à ce discours, il reste que l’attaque internationale
aux deux niveaux, officiel et populaire, a persisté, atteignant
même des cercles à l’intérieur d’Israël. Les revendications de
retrait des territoires occupés sont montés
d’un cran et dernièrement, un communiqué a été promulgué
secouant Israël, signé par 100 éminentes personnalités
culturelles, littéraires et politiques, appelant aux mêmes
revendications de Tahrir, à savoir
la création d’un Etat palestinien. Ainsi, la révolution du 25
janvier a-t-elle réussi, non pas uniquement à briser l’embargo
imposé à Gaza, mais à le remplacer par un autre étouffant
Israël, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
Droits de
reproduction et de diffusion réservés. ©
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Publié le 8 juin 2011 avec l'aimable autorisation de
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