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Les
méga-média-mensonges atteignent des
records
L'OTAN dans sa
guerre des menteurs et des lâches
Mohamed Bouhamidi
Photo:
La Tribune
Jeudi 25 août 2011
Les jubilations haineuses de la
presse coloniale arriveront-elles à
cacher cette question de politique
élémentaire : comment des supplétifs que
l’OTAN a si difficilement traînés à la
«victoire» de Tripoli pourront-ils faire
face au peuple libyen et à des
adversaires qui ont montré leur
détermination, leur pugnacité, leur
courage et leurs hautes convictions
nationales ? Notre propre presse
néocoloniale est la dernière du monde à
croire à une victoire des «rebelles»
alors même que depuis lundi leurs
maîtres occidentaux et leurs médias
s’évertuent à expliquer que la «chute de
Tripoli» est une prouesse de l’OTAN avec
quand même une prime spéciale de
triomphalisme cocardier de la presse
française. Combien de temps les forces
aériennes de l’OTAN et spécialement
celles de la France vont rester dans le
ciel libyen pour protéger «une
rébellion» incapable de se défendre, et
la preuve irréfragable de son incapacité
foncière est la présence de l’OTAN. Leur
propre appel à une intervention
étrangère reflète leur profonde et
insurmontable nature factice. On peut
arguer de la supériorité militaire des
forces nationales libyennes pour
justifier cet appel. N’a-t-on jamais vu
une rébellion populaire ou une
révolution authentique disposer des
armes de l’adversaire ou craindre pertes
et souffrances ? Faut-il rappeler
notre propre cas national et la
disproportion des forces entre les
bombardiers de l’OTAN - vous avez oublié
les bombardements par l’OTAN de nos
maquis et sa sollicitude pour l’action
de la démocratie française ? - et nos
fusils rudimentaires récupérés,
justement, pour la plupart en Libye ?
Vous n’avez quand même pas oublié les
cas les plus récents - les plus
immédiats devrait-on dire - de
l’Egypte et de la Tunisie ? Inutile de
revenir sur les mégas-médias-mensonges
et les fabrications d’images qui ont
stupéfait une opinion publique
occidentale - et ses assimilés indigènes
- qui n’attendaient que le prétexte pour
accompagner sur le mode symbolique la
reconquête coloniale de l’Afrique du
Nord. Le développement des faits montre
suffisamment - et montre, même à l’envi
- que l’OTAN avait engagé une vraie
guerre de reconquête coloniale en Libye
et qui doit s’étendre à l’Algérie après
avoir réussi à détourner à son profit
l’énergie et l’exaspération populaires
en Egypte et en Tunisie. Aujourd’hui, il
apparaît bien que cette guerre oppose
directement l’OTAN au peuple libyen et
ses organisations actuelles de
résistance. La jubilation de notre
presse néocoloniale qui a - redisons-le
- rivalisé dans les termes de mépris à
l’endroit de Kadhafi montre surtout
combien elle a eu peur d’un échec de
l’OTAN qui aurait signifié la ruine de
leurs espérances ici même dans notre
pays.La peur haineuse de nos apprentis
chouans à la mode Benghazi est à la
mesure de l’exploit réussi par l’Etat
national libyen. Il a réussi à
transformer au cours de sa résistance sa
nature d’Etat avec ce qu’implique un
Etat en mouvement de résistance. C’est
déjà très difficile à réaliser cette
mutation à cause des lourdeurs de
tout Etat et à cause de la mentalité des
fonctionnaires d’un Etat qui restent des
fonctionnaires. Il est évident que
Kadhafi a joué un rôle central dans
cette mutation en accentuant le
césarisme qui caractérisait son régime.
Alors, mort ou pas mort, Bab El Azizia
tombée ou pas tombée, la résistance de
l’Etat libyen s’est transmuée en
résistance du peuple libyen en ce laps
de temps très court. Le nombre
insignifiant de soldats et d’officiers
déserteurs peut déjà donner une
indication de la détermination au combat
de soldats et il est impossible que des
soldats gardent un haut degré de
fidélité et de courage face à une telle
adversité - vous avez mesuré l’ampleur
de la coalition, l’ampleur des moyens
utilisés et la férocité des
bombardements ? - sans cette capillarité
avec le peuple qui vous donne le courage
de résister à tous les adversités. Leur
grande peur d’un retour des idées qui
ont construit l’Etat national algérien.
Leurs jubilations ont accompagné celles
des bourses qui ont retrouvé des
couleurs par le sang des Libyens. Il en
a toujours été ainsi et depuis toujours
la bourse revit du sang des colonies ou
des néocolonies ou des territoires
ouverts aux délocalisations. La bourse
n’attend pour ses profits que la
dissolution des frontières devant les
marchés comme nos intellectuels
compradores et nos compradores tout
court n’attendent que la dissolution des
Etats nationaux pour s’extraire
mentalement de leur indigénat et se
servir au passage aux miettes de futures
royalties tirées d’un pétrole enfin
rendu aux étrangers. Cette jubilation
haineuse cache mal une attente fébrile.
On lit presqu’en clair : «Maintenant que
Sarkozy en a fini avec le dictateur, on
va voir ce qu’on va voir !» Ils rêvent
déjà de monter à El Mouradia derrière
les bombes de l’OTAN et après ils vont
nous montrer ce qu’ils vont nous
montrer. En fait, ils l’ont déjà
commencé. Ils ont recueilli et publié
avec ferveur et un courage retapé à neuf
les propos de proconsul tenus par le
nouvel ambassadeur US. Ils nous
resservent en pleine crise du
capitalisme les «potions miracles» de
l’économie de marché en redoublant
de conseils aux décideurs et en
regrettant que le pouvoir ait raté les
chances infinies de gagner en misant à
la bourse mais en oubliant les chances
de se planter sont tout aussi infinies
que les possibilités de la martingale.
Nous, nous imaginons, tout juste, ce que
seraient devenus nos dollars investis
dans des fonds qui auraient offert une
vie de casino aux candidats flambeurs.
Nous essayons d’imaginer à quelle
monnaie de singe vont être réduits nos
bons du trésor américain. Mais nous
essayons d’imaginer encore plus
simplement si - au contraire de la Chine
grande puissance quand même et par
ailleurs - nous aurions la témérité de
demander au Trésor US de nous rembourser
ou de nous laisser juste l’utiliser pour
acheter quoi que ce soit aux USA. Que
serait devenu notre argent en cas de
conflit avec une puissance étrangère
alors que dans le cas de l’Iran et de la
Syrie, les USA gèlent des avoirs selon
leur bon plaisir. La crise économique va
bien accentuer ces tendances agressives.
La guerre de Libye - les historiens
l’appelleront certainement comme cela
car il s’agit d’une guerre et par sa
durée et par l’ampleur des moyens
mobilisés par des super puissances
contre un petit pays - marque un
tournant dans l’histoire du monde. Dès
le départ, les Anglais et les Français
ont refusé toute idée de médiation et
toute initiative africaine qui aurait
préservé l’unité de la Libye. Ils
voulaient apparemment la tête de Kadhafi
; ils voulaient en réalité mettre fin
aux ambitions d’indépendance de ce
dirigeant avec ses projets de monnaie
or, de développement de l’Afrique, de
coopération accrue avec la Chine et avec
son espoir que se développe la
coopération sud-sud et interafricaine.
La question de savoir si les supplétifs
de Benghazi peuvent tenir la Libye sans
l’OTAN a dû être pesée et soupesée par
les puissances coloniales. Et ces
puissances ne peuvent écarter le risque
d’une somatisation de la Libye ; Il ne
nous reste qu’une seule conclusion
possible : ils visent délibérément cette
somalisation, cette situation
d’instabilité générale dans laquelle
l’Algérie deviendra la cible de choix
car elle représente au plus haut point,
à cause de son histoire, l’idée d’Etat
national et l’idée d’indépendance même
si du cœur du pouvoir lui-même se
développent des initiatives pour nous
faire dégoûter sciemment de notre
indépendance, mais tout comme hier nous
nous sommes battus pour l’indépendance
et pas pour nos chefs, nous nous
battrons demain pour notre Etat
indépendant et pas pour nos dirigeants
dont certains auront rejoint une
Benghazi algérienne. La Libye se bat
pour l’indépendance de tous les pays du
tiers monde. Elle se bat même pour celle
des puissances émergentes y compris la
Chine la cynique qui n’est pas loin
d’inventer le social impérialisme. La
Russie de Medvedev qui a donné à sa
diplomatie la légèreté des dandys semble
se réveiller à la grande arnaque qu’elle
a cautionnée et se retrouve dindon de la
farce - vous avez le choix de termes
plus appropriés - et s’éveille à la
réalité politique et sociale qui a donne
à Kadhafi la force de tenir tête à une
coalition conçue pour la pulvériser.
Pour cette Russie, Kadhafi était un
homme fini il y a six mois. Il est
aujourd’hui une force réelle sur le
terrain. Cela veut beaucoup dire non sur
la réalité de Kadhafi mais sur les
intentions des USA d’élargir
immédiatement son agression vers la
Syrie puis l’Iran. L’Algérie aura le
Qatar pour s’en occuper en supputant
tous les ennuis que peuvent nous créer
des pays désormais alliés de l’Emirat
aux dents longues. Quel bonheur alors
pour les Bourses : le pétrole à celui
qui sait le trouver, aucune frontière
sur les mouvements des marchandises et
des capitaux et beaucoup de postes de
police pour les migrants illégaux !
Enfin débarrassée de l’Etat national,
notre bourgeoisie compradore pourra
accéder aux royalties sur le pétrole des
élites mondialisées qui pourront prouver
qu’elles sont sorties de l’indigénat en
montrant aux maîtres du monde qu’elles
savent tenir le souk et faire suer le
burnous. Elles nous taperont sur la tête
pour nous éveiller à l’erreur du
patriotisme économique et nous
expliquer le «réalisme économique».A
Tripoli, la bataille n’est pas gagnée du
tout pour l’OTAN. En Libye, elle est
déjà perdue pour elle et pour Sarkozy.
Un peuple qui a tenu sous ce déluge de
feu et une armée qui n’a pas connu de
désertion dans cet enfer ne se réduisent
pas avec quelques bombes
supplémentaires. Avec ou sans Kadhafi,
l’agression de l’OTAN butera sur la
résistance d’un peuple héroïque, comme
tous les peuples qui se battent pour
leur indépendance. Serons-nous capables
de développer de telles capacités à
l’heure de vérité qui s’approche avec la
politique du chaos, seule politique qui
reste à des USA en déclin et à ces états
vassaux face à la montée des BRICS et
pour se sortir de la crise.
Publié sur La Tribune
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