L’"Association des
Avocats et Juristes de la
Méditerranée" a organisé les
12 et 13 juin une mission
d’observation à Tripoli en
Libye. Le but était de
dénoncer l’intervention de
l’OTAN. En tant que partisan
fidèle de l’OTAN, le
gouvernement Belge – et par
extension tout le parlement
– a participé à l’offensive.
Il était donc logique que 4
Belges se rendent également
à Tripoli. Mario Franssen a
interviewé Mohamed Hassan
sur la situation en Libye.
Des
délégations de Tunisie,
France, Grande-Bretagne,
Maroc et Italie ont
participé à la mission. La
délégation belge était
composée de Mohamed Hassan
(spécialiste de l’Afrique),
Michel Collon (journaliste),
Frédéric Dahlmann et Mario
Franssen (porte-parole intal).
Mohamed Hassan suit de
près la situation en Afrique
et en Libye. Il n’a donc pas
hésité lorsqu’il a eu
l’occasion de partir à
Tripoli. Les trois jours
qu’il a pu y passer l’ont
éclairé quant à la réalité
de la guerre à Tripoli et
environs. C’était également
une occasion unique pour lui
de nouer des contacts avec
l’importante communauté
Africaine en Libye.
Mohamed
Hassan: "Ce que l’on a pu
voir à Tripoli m’a étonné.
Le calme régnait dans la
ville. Il n’y avait pas de
militaires en vue, ni de
rebelles. Le moral des
Libyens était bon et ils
comprennent parfaitement ce
que désire l’OTAN. Ils nous
ont expliqué que les
rebelles sont en fait des
bandes criminelles qui avec
l’OTAN veulent voler les
richesses Libyennes. Ils
veulent donc protéger leur
pays. Il est clair que
Kadhafi a encore beaucoup de
soutien parmi la population
de Tripoli et des environs.
Le représentant de quelques
200 clans a exprimé son
soutien au gouvernement tout
comme les 17 Soefi-Zawia,
comparables avec les ordres
religieux avec leurs abbayes
dans la chrétienté. Kadhafi
a également armé la
population. Environ
2.000.000 Libyens ont reçu
une Kalachnikov ainsi qu’une
formation pour pouvoir
l’utiliser. Ceci prouve que
les autorités ne craignent
pas leur propre population."
Lors de la conférence sur
la guerre et les droits de
l’homme, Mohamed Hassan a
rencontré le président et le
vice-président de
l’Organisation Générale
Africaine en Libye. Il nous
raconte: "Tripoli est une
ville très cosmopolite. Il
ne faut pas oublier qu’avant
la guerre, 1.000.000
Egyptiens, 850.000
Tunisiens, 500.000 Algériens
et des centaines de milliers
d’Africains noirs
demeuraient en Libye. La
grande communauté Africaine
de Libye condamne
l’agression de l’OTAN, et
cela n’est pas étonnant. La
Libye est un pays africain
et les leaders Libyens ont
une vue panafricaine comme
la plupart des autres pays
Africains. Les Africains du
Soudan, Niger, Tchad.....que
l’on a rencontré en rue nous
ont confirmé ces dires. Ils
n’ont pas besoin d’un permis
de travail pour se mettre au
boulot en Libye. Qu’il
s’agisse du privé ou des
autorités. Ils profitent de
soins de santé gratuits et
leurs enfants vont à l’école
tout comme les enfants
Libyens. Dans l’enseignement
supérieur, la plupart des
étudiants en dehors des
Libyens sont des Soudanais."
La mère de l’Afrique
Mohamed Hassan: "Lors
d’une des promenades à
travers Tripoli, nous avons
visité un souk. Nous avons
bu du café avec quelques
Soudanais propriétaires de
magasins et ils nous ont
raconté la même histoire.
Pendant plus de 15 ans ils
n’ont connu aucun problème
en Libye. Ils font leurs
achats en Chine et en
Turquie. Le gouvernement ne
prélève pratiquement aucune
taxe à l’importation et ils
n’ont pas non plus d’ennuis
avec la bureaucratie. Ils
sont mieux traités en Libye
que dans leur propre pays.
Pour eux la Libye est la
mère de l’Afrique.
La guerre a néanmoins
changé beaucoup de choses.
Par crainte des
bombardements de l’OTAN,
beaucoup d’Africains ont
renvoyés femmes et enfants à
la maison. Des 4.000.000
Africains qui travaillaient
en Libye, beaucoup sont
rentrés chez eux. Avec comme
conséquence par exemple
l’accumulation des détritus
dans les rues de la ville.
Les Africains qui restent en
Libye sont aussi très
critiques vis-à-vis de
l’attaque de l’Otan. A cause
de cette attaque, le pays
est disloqué. L’OTAN
soutient Al Qaeda qui fait
partie des soi-disant
rebelles dans l’est du pays.
La Libye risque ainsi de
devenir un port d’attache
pour les extrémistes
musulmans de toute la
région. Ils expliquent
clairement que, dans ces
conditions, l’OTAN peut
garder sa démocratie pour
elle-même."
Les
trois stratégies de l’OTAN
L’OTAN veut avoir la
mainmise sur les richesses
de la Libye. Tout sera donc
fait pour déstabiliser le
pays. Les Libyens en sont
parfaitement conscients et
distinguent 3 stratégies qui
sont appliquées par les
Etats-Unis et leurs alliés.
Mohamed Hassan:
"Premièrement ils veulent
créer un conflit interne
entre les tribus. Cela se
voit très clairement à
Misrata. Les bandes armées y
ont fait de l’épuration
ethnique. Toutes les
personnes non originaires de
Misrata ont été terrorisées
et ont dû quitter la ville.
Cela vaut autant pour les
Libyens que pour les
étrangers.
Deuxièmement, des
attaques sont organisées
contre les Libyens noirs et
les autres Africains noirs.
C’est une autre façon de
créer des problèmes internes
parmi les Libyens. A
Benghazi par exemple, 3
Somaliens ont été tués par
les rebelles. Ceci n’est pas
sans importance lorsque l’on
sait que la région riche en
pétrole autour de Brega est
l’endroit où habitent
principalement des Libyens
‘noirs’. Si l’OTAN arrive à
diviser le pays de cette
manière, elle peut continuer
à le déstabiliser, situation
similaire au Darfour.
Pour conclure, l’économie
Libyenne est fauchée. Les
bombardements autour de
Tripoli par exemple visent
principalement les
infrastructures et les
cibles civiles. C’est
surtout le développement du
pays qui est paralysé. Les
projets en cours en Libye se
montaient de 70 à 100
milliards de dollars. Toutes
les entreprises étrangères
ont néanmoins quitté le pays
et la main d’oeuvre
étrangère est également
partie."
(Photos: Fréderic
Dahlmann)