Opinion
Il était une fois
... 1789 (3)
La souveraineté des peuples et la
Bastille des Etats
Manuel de Diéguez
Manuel de
Diéguez
Dimanche
16 octobre 2011
1 -
Les monarques du
ciel de la démocratie
Dans le
solennel discours d'adieu à la nation
américaine que le Président Dwight David
Eisenhower a prononcé il y un
demi-siècle, le 17 janvier 1961, on
entend un écho précurseur du naufrage de
la souveraineté des peuples dits
démocratiques: "Nous n'avons pas
l'expérience de la conjonction d'une
gigantesque force militaire et d'une
immense industrie de l'armement. (…) Ne
laissons jamais le poids de cet
entrelacement mettre nos libertés en
danger." (Cité par Jean-Luc Pujo,
Président des clubs "Penser la France"
in Les conséquences politiques des
attentats fabriqués de septembre 2001.)
La tâche
décisive qu'il appartient à la
démocratie mondiale d'aujourd'hui
d'entreprendre est d'éduquer les peuples
demeurés pieusement parqués dans un
suffrage universel aveuglé. Comment
élèverait-on jamais des élites placées
"sous influence" dès le berceau au rang
de dirigeants éclairés du monde? Ce sont
les citoyens qu'il faut émanciper dès
l'enfance de la tutelle des idéalités
griffues qui les catéchisent et qui ont
seulement mis en place d'autres crocs
d'un langage de la force masqué sous
d'autres patenôtres de la Liberté que
ceux de la monarchie de droit divin.
Pour l'instant, l'instruction publique
habilement idéalisée au sein des
démocraties demeure au service des
nouvelles mâchoires de la parole
mythifiée. Le séraphisme nouveau est
arrivé. Il se cache derrière les mêmes
décors d'une délivrance seulement vocale
que le mythe de la rédemption posthume
d'autrefois. Quand la pédagogie
verbifique qu'exercent les idéaux de
1789 prend simplement la relève des
monarchies théocratiques, la
civilisation de la Liberté entre dans un
onirisme politique aussi acéphale que le
précédent.
C'est
pourquoi je ne cesse tirer mon lecteur
par la manche: qu'il vienne se promener
avec moi dans les souterrains religieux
des Etats modernes, tellement des idoles
du langage fournissent désormais leurs
déguisements doctrinaux aux potentats
d'ici bas - en allemand, Dieu s'appelle
à la fois le Herrgott, le
souverain et le Erlöser, le
délivreur. Si l'on n'instruit pas les
peuples des secrets antropologico-religieux
de la politique des démocraties, jamais
on ne fera d'un vrai suffrage universel
le tremplin de la civilisation de la
raison et de la pensée de demain. C'est
cela que pressentent à la fois les "indignés"
et les électeurs d' Arnaud Montebourg,
quand il présente M. Hollande et Mme
Martine Aubry en "impétrants d'une
même médaille" et souligne qu'ils
ont décroché la même timbale d'une
parole vide de sens.
2 - Un nouveau
type d'intellectuels
L'anthropologie
critique esquisse le profil d'un type
d'intellectuels encore dans les limbes.
Sachant que le cerveau simiohumain est
un organe inachevé, le clerc de demain
évitera le double piège de réfuter sans
succès la croyance des ancêtres aux
idoles de bois de leur temps et
d'ignorer les causes politiques du
succès des totems cérébraux du
simianthrope. Dès lors que la science
historique et la géopolitique actuelles
se trouvent toutes deux à la recherche
d'une assise méthodologique plus
cohérente que celle des
pithécanthropologues d'hier et
d'aujourd'hui, il s'agit d'éviter à la
fois l'indifférence et l'agressivité à
l'égard de l'ignorance du siècle dans
lequel on se trouve immergé. Le seul
souci du clergé de la raison à venir est
de mettre sous les yeux des lecteurs
d'avant-garde l'échiquier et la
problématique d'une connaissance du
genre simiohumain moins anté-philosophique
que celle dont une moitié ou les deux
tiers du champ du réel faisaient les
frais.
3 - La démocratie et la pesée des
cerveaux
A ce
titre, le pithécanthropologue appelle
l'attention de ses congénères sur le
prix exorbitant que nous payons depuis
la Renaissance pour le renoncement pur
et simple de la pensée occidentale à
l'ambition focale qui inspirait la
discipline socratique. Le XXIe siècle ne
comprend goutte à la vie onirique de
notre espèce. Elle est demeurée
asthénique et partielle, l'espèce
d'intelligence abstraite que nous avons
conquise tant de notre l'histoire que de
notre politique. Depuis Platon, la
philosophie avait vocation de peser la
boîte osseuse du genre simiohumain.
L'anthropologie critique nourrit
l'ambition de faire débarquer la
connaissance des mythes sacrés, des
constructions doctrinales et des
hiérarchies sacerdotales dans la science
historique et dans la géopolitique de
demain, afin d'éviter un naufrage de la
philosophie aussi irrémédiable que celui
du Moyen Age, mais qui arborerait le
pavillon décérébré des idéalités
politiques et des floralies culturelles.
4 - La
démocratie, tribunal de l'humanité
Croit-on
vraiment qu'une entreprise illégale par
nature - la conquête systématique de la
Cisjordanie par Israël - se trouvera un
jour validée par la force et pour
toujours? Croit-on vraiment que la
démocratie du droit, donc la
civilisation mondiale tout entière
reniera un jour les principes fondateurs
de son éthique au seul profit du peuple
juif? Impossible de feindre plus
longtemps et sous les yeux de la planète
entière de peser sur une même balance le
poids des revendications respectives des
deux peuples, alors qu'on les a rendus
inégaux avec une effronterie affichée,
impossible d'évaluer leurs intérêts
opposés aux yeux d'une justice dont la
balance se trouve tellement faussée
qu'elle demeurera à jamais
inconstructible et que tous les ateliers
du droit de la planète devront déclarer
forfait. Cette évidence juridique
soulève la question de la nature même de
la notion de légitimité politique
appliquée aux jugements moraux
prononcés par les Etats d'aujourd'hui.
Le tribunal devant lequel ces souverains
de l'injustice seront appelés à
comparaître sera celui d'une humanité
dont la magistrature fera débarquer une
jurisprudence internationale nouvelle
dans les livres d'histoire.
5 - La raison démocratique et la peur
C'est se demander
si les peuples, j'y reviens, (-
Il était une fois
... 1789 (2) - La souveraineté des
peuples et la Bastille des Etats,
9 octobre 2011
) sont
progressivement éducables, sinon
majoritairement, du moins dans des
proportions suffisantes pour que leur
civisme les porte avec patience et
ténacité à assumer la solitude cérébrale
indispensable aux guides futurs de
l'ordre politique mondial. Depuis 1789,
l'expérience n'a cessé, hélas, de
démontrer le contraire: les citoyens
dont les droits se trouvent bafoués
demeurent, de génération en génération
et d'un siècle à l'autre tellement
ignorants que leurs affolements
momentanés les jettent dans des
répressions aveugles. On a vu les
insurrections populaires les plus
légitimes conduire des nations entières
au désastre.
De plus,
les peuples livrés au chaos politique
dans lequel ils se sont précipités se
blottissent derechef sous le sceptre
d'un dompteur bien aimé; et leur effroi
s'apaise en raison même du respect qu'un
glaive nouveau leur inspire. "Si le
Dieu n'est pas terrible", rappelle
Diderot, "ses prêtres ne seront pas
honorés". Quel est le poids pithéco-anthropologique
de l'adage des Grecs selon lequel la
crainte des dieux enfante la sagesse en
douceur?
6 -
L'abbaye de monte-à-regret
Une
expression argotique savoureuse avait
baptisé la guillotine d'"abbaye-de-monte-à-regret".
Si l'éducation nationale moderne
réduisait les peuples du XXIe siècle à
l'inaptitude de jamais exercer une
souveraineté autre que nominale, les
peuples du IIIe millénaire
inviteront-ils seulement quelques
despotes des masses et quelques
banquiers insatiables à visiter l'abbaye
de monte-à-regret ? Mais si le mythe de
la souveraineté des peuples est appelé à
servir de jouet aux tyrans, quelle tâche
immense d'éduquer des citoyens que leur
indignation vertueuse, mais inorganisée
et privée de toute efficacité politique
condamne depuis 1789 à tomber dans la
fureur aveugle et stérile de la Terreur!
Voyons donc si un
plan général est concevable qui
meublerait des têtes catéchisées par des
démocraties encore décervelées, faute
d'avoir donné un contenu réel au
principe de la "souveraineté des
peuples".
7 - Le rousseauisme
Si l'on étudie de
près le risque que courent les nations
de se livrer corps et âme à des rêves
politiques irréalisables par nature et
de substituer seulement des utopies
parareligieuses aux audaces et aux
espérances d'une saine raison, on
s'aperçoit que le XVIIIe siècle a
quelque peu aplani les sentiers d'une
pesée pré-anthropologique de
l'intelligence moyenne de l'humanité;
mais l'anthropologie de l'époque ne
disposait pas encore d'une science
expérimentale des obstacles que
rencontreront des éducations nationales
ambitieuses de donner un contenu réel à
la notion demeurée creuse de
"souveraineté des peuples".
Placez
l'œuvre galopante de Rousseau sur les
plateaux d'une balance de ce genre et
vous découvrirez la pauvreté de
l'entendement politique dont disposaient
les pré-romantiques, puis les
romantiques du siècle suivant: le
Contrat social du célèbre
Genevois se présente comme une
construction de la raison suffisamment
abstraite pour mettre à son aise le
concept mythique d'égalité entre
un rêve cérébral certes désirable des
citoyens d'un côté et, de l'autre, les
exigences du bien public, lesquelles
reposent nécessairement sur les têtes
les plus solides.
Quant à
l'onirisme calviniste, il semble que son
ascèse se montre plus irréaliste encore
sous les vêtements du rationnel que la
mythologie doctrinale plus relâchée du
catholicisme et de sa panoplie de
prodiges théologiques époustouflants,
mais peu coercitifs. Il suffit de lire
Necker et sa fille, Mme de Staël, tous
deux rousseauistes naïfs, pour découvrir
que les tentacules du bucolisme
politique ne sont pas moins cancérigènes
et porteuses de la tyrannie que les
chaînes d'un dogmatisme romain
stupéfactoire, tellement un citoyen qui
se proclamera le galérien de Dieu sur la
terre, mais toujours du bout des lèvres
seulement et qui se rendra pardonnable
jour après jour à l'école de ses
confessionnaux bienveillants assurera à
moins de frais une discipline sociale
sans heurts qu'une confession pleine de
célestes ardeurs, mais dont les
obédiences politiques se nourriront de
redoutables métastases du mythe sacré
dans les dialectiques de la grâce
contraignante: sitôt que vous élevez la
puissance de l'idole à l'absolu, comment
n'anéantirait-elle pas votre liberté en
retour et comment ne vous mettrait-elle
pas aux poignets des menottes plus
serrées que celles des juristes romains
de la divinité, qui soumettaient l'idole
au bon sens politique des sénateurs de
la république.
8 - Israël et
l'avenir de la démocratie mondiale
Voyez comme
l'anthropologie critique met les
théologies à l'école de la géopolitique:
deux siècles seulement après la
proclamation de la République de 1793,
la tragédie que le régime démocratique
vit jour après jour est devenue
planétaire. N'assistons-nous pas sur les
cinq continents à la disqualification
morale et politique progressive de la
classe dirigeante du monde ? De plus, le
premier siècle de notre ère se répète en
ce que le foyer de la course de notre
civilisation à l'abîme n'est autre que
la maladie sans remède qui a conduit
l'empire romain aux funérailles de la
justice.
Il y a deux
millénaires, le christianisme originel
bouleversait la philosophie des droits
respectifs de la pensée et de la force
physique. Aujourd'hui, Israël pose à
nouveau au cœur de l'histoire du monde
la question des relations du droit avec
la morale et de l'esprit de justice avec
la politique. Comment l'abaissement
planétaire de la religion de la liberté
serait-elle filmée jour et nuit sans
dommage? Aucun siècle ne saurait
installer sous les yeux de l'humanité
tout entière une caméra dont la
pellicule déroulerait en permanence le
spectacle des bûchers sur lesquels se
consumaient les relaps et les renégats
du XVIe siècle. Et maintenant, nous
voyons la classe dirigeante mondiale des
démocraties creuser de ses mains le
fossé dans lequel Israël ensevelit non
seulement une ville d'un million sept
cent mille d'habitants, mais une nation
entière, la Palestine.
9 - Comment
enfanter une nouvelle classe dirigeante
Face à une
mappemonde convertie au culte de la
gigantesque potence sur laquelle la
justice est clouée, la génération des
indignés se fait une gloire politique de
demeurer "horizontale", dit-elle,
c'est-à-dire privée de hiérarchie
interne et de commandement. Le Golgotha
des modernes nous reconduirait-il au
XVIIIe siècle, où seul Jean-Jacques
Rousseau refusait tout net que la
démocratie future fût dirigée par de
prétendus "représentants du peuple
souverain", parce que les élus,
pensait-il, se chargeraient rapidement
de revêtements pseudo apostoliques et se
dresseraient bientôt en fortins et en
forteresses des privilégiés et des
potentats du mythe de la Liberté. Puis,
les nouveaux oligarques défendraient
leur évangélisme redevenu régalien sur
le modèle de la noblesse et du clergé du
XVIIIe siècle finissant, à cette
différence près qu'aux escadrons du
trône et de l'autel succèderait un
monarque plus trompeur que tous les
précédents - le mythe ecclésial d'une
Liberté assortie de ses liturgies
sacerdotales.
10 - La
généalogie des élites
Mais comment former
une classe dirigeante mondiale plus
instruite que celle des démocraties des
XIXe et XXe siècles? Les élites
cérébrales ne tombent pas du ciel, les
élites de la raison émergent lentement
au sein des oligarchies mentales
fatiguées de leurs cérémonies. Leur
avance sur les encéphales de leur temps
a besoin de guerriers dont la vaillance
se forge à l'école et à l'épreuve des
progrès de l'anthropologie
expérimentale. Leur principal allié
n'est autre que le terreau de la
dégénérescence politique des patriciats
usés par un trop long abus de leurs
prérogatives. Au XVIIIe siècle, les
richesses du clergé et les blasons de
l'aristocratie avaient sécrété une
cuirasse qui fissurait de bataille en
bataille le crâne de la monarchie. Au
XXIe siècle, les grands dignitaires de
la démocratie se sont alourdis sous la
cotte de mailles d'Israël. Les nouveaux
pilotes de l'univers ressemblent aux
princes du sang et aux grands
connétables qui se partageaient
autrefois les honneurs et les charges du
royaume; aujourd'hui les ducs et pairs
de la République président les mégapoles
et les conseils généraux, les nouveaux
féodaux dirigent l'Etat aux côtés du roi
élu.
11 - L'interruption de grossesse d'une
raison sur le retour
Israël est devenu,
en secret, le vrai maître des nations.
La démocratie du Nouveau Monde ne hisse
plus au faîte du pouvoir que des
effigies en grand apparat d'une
présidence de la nation devenue un
hochet. On a vu le Congrès américain
couper de sa propre initiative les
vivres au peuple palestinien. Le
malheureux s'était rendu coupable de
désobéissance aux ordres de Tel-Aviv. La
Maison Blanche tente en vain de ramer à
contre courant du burlesque, mais elle
échoue à mettre au pas les nouveaux
maîtres du pays.
Ce type d'agonie
de la classe dirigeante au sein de la
plus grande mascarade démocratique du
monde ne répond pas au même modèle des
simulacres que celle dont la chute de la
noblesse et du clergé de l'Ancien Régime
avaient présenté le spectacle à la fin
du XVIIIe siècle, parce que la décadence
mondiale de l'autorité du suffrage
universel sous le soleil se révèle le
fruit tardif d'une paralysie générale
des encéphales inscrite dans la
postérité intellectuelle du Moyen Age:
de même que la Renaissance n'a pas
accédé à la connaissance des racines
anthropologiques du sacré, les
intellectuels bourgeois de la démocratie
ont échoué depuis deux siècles à
féconder le véritable héritage cérébral
du XVIIIe siècle - celui d'un regard
nouveau sur l'humanité en tant que
telle. Il en résulte que, faute de
connaître les secrets religieux du genre
simiohumain et d'abord du mythe
messianique des Hébreux, un second Moyen
Age guette une science historique et une
politologie menacées de quadriplégie.
Mais déjà la classe dirigeante de demain
fait germer dans l'ombre les cerveaux
qui prendront la relève de la
rationalité bancale de la Renaissance et
de la Révolution française et qui
donneront aux peuples de 1789 non
seulement leur véritable postérité
cérébrale, mais leur nouvelle fécondité
intellectuelle, tellement il est évident
que l'humanisme actuel est victime d'une
interruption de grossesse, donc d'une
panne planétaire de son "Connais-toi".
Mais, quelle résurrection des âmes et
des cervelles que de replacer l'aventure
mondiale du regard intérieur au cœur de
l'avenir conjoint des âmes et de la
pensée!
12 - Les Galilée
de la démocratie
Quel
spectacle que celui de la ménopause de
Clio, mais aussi quelle revanche des
astronomes d'observer de haut et de loin
la division des pithécanthropes entre
leurs télescopes et leurs microscopes !
Voyez les vues basses avertir les
presbytes que M. Barack Obama dressera
un obstacle insurmontable, celui de son
veto, à toute manifestation éclatante de
la vérité au Moyen Orient, tandis que
Copernic, l'œil vissé à la longue vue de
la géopolitique, fait remarquer aux
lâches et aux sots qu'Israël est un Etat
messianique par nature et par définition
et que l'homo messianicus est
encore un martien aux yeux de la
politologie moderne.
Savez-vous
que ce type de cerveaux va son chemin
droit devant lui? Savez-vous qu'on n'a
jamais mis la main au collet d'une
eschatologie et que celle-ci ne voit pas
les obstacles qui se dressent sur son
chemin, parce que son rêve est un écran
de fumée qu'elle ne peut écarter de la
main? Savez-vous que la démocratie des
chapelets de la Liberté est tombée en
panne ? Alors les myopes du mythe de la
rédemption frottent les verres de leurs
bésicles et répondent aux géants qu'il
faut "laisser du temps au temps" et
qu'il serait discourtois en diable
d'embarrasser le colosse américain de la
"Justice" et du "Droit". Mais, les
presbytes éclatent de rire ; pour une
fois, disent-ils, le temps travaille
pour leurs jumelles et Galilée est sur
le point de l'emporter sur Ptolémée. La
philosophie est rigolarde. Elle enseigne
aux Pygmées de la politique que leur
scolastique aux verres fumés fera
débarquer sur les planches de l'histoire
du monde une tragi-comédie dont les
actes auront été rédigés par des
connaisseurs du destin de l'humanité.
La planète des ramifications et des
excroissances du messianisme israélien
se trouve à la croisée des chemins,
parce que l'éthique internationale est
appelée à prendre la relève de la
vacuité cérébrale et du naufrage moral
dont souffre la classe dirigeante des
casuistes de la démocratie.
13 - Primo,
secundo, tertio, etc…
Quelle
bénédiction que l'histoire de la planète
des songes soit pilotée alternativement
par des nettoyeurs et par des pollueurs
du genre humain et que cette tragique
oscillation de la démocratie entre ses
saints et ses scolastiques illustre
l'évidence que les théologies, même
laïcisées, demeurent non seulement les
clés anthropologiques de la politique
simiohumaine, mais qu'elles illustrent
sans le savoir les rouages premiers de
l'histoire du monde.
Primo,
voyez comme l'embarras politique des
Etats messianisés par les codages
mythologiques qui sous-tendent la
démocratie planétarisée - leurs
dirigeants prétendument apostoliques se
sont mis au service d'un ciel
génocidaire - ne fera que croître au fil
de leurs prières, parce qu'il se trouve
qu'un droit international nouveau est
entré en vigueur, lequel qualifie
désormais l'occupation même biblique et
la colonisation même sacrée de crimes de
guerre, d'où il résultera qu'il
deviendra peu enviable, le sort des
confesseurs trop ardents à protéger les
délinquants des foudres du Tribunal
pénal international.
Secundo,
voyez comme l'étalage public de la
complicité que les idéalités
confessionnelles de la démocratie
mondiale entretiennent avec un
conquérant sanglant changera les faux
apôtres de la Liberté en auteurs d'un
crime au plein sens du terme, puisque
les droits pénaux, même nationaux,
traitent les complices en coupables non
moins punissables, que les exécutants
d'un crime ou d'un délit capturés les
armes à la main.
Tertio,
voyez comme tout l'évangile de la
planète dite des droits de l'homme
s'écroulera aux yeux de l'opinion
publique mondiale quand les Etats
démocratiques qui se seront mis au
service des intérêts territoriaux et
financiers d'Israël se présenteront en
falsificateurs planétaires des idéaux de
1789.
Quarto,
voyez comme le spectacle de la trahison
des casuistes de la Liberté provoquera
un schisme au sein de la catéchèse des
démocraties, et voyez comme ce seront à
nouveau les peuples les plus instruits
qui prendront la tête de la Réforme de
la religion de la justice. Certes, les
hiérarques d'une démocratie fatiguée
tenteront de prendre la tête de
l'obscurantisme des modernes - mais, ici
encore et comme au premier siècle de
notre ère, puis au XVIe, puis au XVIII,
l'humanité s'obstinera à se révéler
mutante à titre cérébral.
Quinto,
voyez comme les réformateurs de la
philosophie mondiale auront leurs
Luthers et leurs Calvins et comme leurs
prophètes tenteront de nettoyer les
écuries d'Augias des démocraties de
Curie.
Sexto,
voyez comme il deviendra évident qu'au
premier chef, l'histoire réelle du monde
est toujours un théâtre de l'alliance de
la pensée avec l'éthique et que c'est
l'appel aux innocents de l'esprit de
justice qui redresse les âmes, les
intelligences et les cœurs.
J'oubliais un détail: la démocratie
vivante posera la même question que
toutes les religions ascensionnelles:
"Votre prochain, vous connaissez?"
14 - Le continent
des marmots de la politique et l'avenir
de l'intelligence des peuples
Le continent de la
politique du sommeil est entré en
transes : il est question de signer à la
hâte un nouveau traité économique afin
de sauver au prix de quelques bons de
caisse un continent des cercueils
subitement menacé de naufrage monétaire
par-dessus le marché. Mais déjà les
conducteurs des corbillards de nos
finances s'apprêtent à commettre la même
erreur de nabots et de marmots de la
politique que celle dont nous tenons les
cordons du poêle depuis des décennies.
Ces pataugeurs se font une panacée d'un
moteur bancaire mieux lubrifié, ces
simples d'esprit s'imaginent que
l'Histoire n'aura pas besoin d' un
moteur politique, ces enfants des
paludes se sont convaincus qu'une
civilisation marécageuse se passera de
propulseur des ambitions et des
volontés, ces nourrissons se disent
qu'une machinerie fiduciaire bien huilée
éclairera les âmes et les intelligences.
15 -
Ouvrez l'oeil
L'Europe d'aujourd'hui se trouve
infantilisée à un point tellement
inexorable que si les bases militaires
américaines quittaient physiquement nos
dépouilles mortelles, une panique des
linceuls s'emparerait subitement de la
classe funéraire tout entière; et sans
doute faudrait-il plusieurs heures à la
jeunesse instruite pour qu'elle se
frottât les yeux et revînt de son
ahurissement. Puis les peuples
ouvriraient un œil soupçonneux sur leurs
propres funérailles. Comment, se
diraient-ils les uns aux autres, nous
n'étions protégés contre personne, nous
n'avions aucun ennemi mortel à craindre,
toute cette foudre ne servait qu'à
répandre un nuage de fumée devant une
civilisations aux yeux clos, nous étions
livrés sans le savoir et les paupières
baissées à des fantômes savamment
nourris et nos dirigeants étaient de
mèche avec un occupant habile à
entretenir les spectres tapageurs de nos
effrois ridicules? Comment se fait-il
que, dans le monde entier, les peuples
soient déclarés souverains et traités de
benêts, d'ignorants et d'enfants en bas
âge?
16 - Un
électrochoc anthropologique
Peut-être l'heure
est-elle favorable comme jamais au
déclenchement d'un électrochoc
anthropologique dont la décharge de
plusieurs milliers de volts permettrait
à une jeunesse européenne plus éclairée
que les précédentes de porter remède à
la cécité intellectuelle et à la
vassalité larvée des classes vieillies
de la démocratie mondiale. Ce miracle
politique semble à portée de main, parce
que le bon sens comprend d'instinct que
la démission rampante d'un Vieux
Continent occupé depuis soixante cinq
ans par cinq cents bastions, garnisons
et forteresses de l'étranger sur son sol
est nécessairement l'expression d'une
civilisation à bout de souffle et
attachée aux chaînes de sa propre
médiocrité cérébrale.
Louis XIV disait que dans les longs
discours, on dit toujours quelque chose
de trop. Dans son discours du 23
septembre 2011 à l'ONU, M. Netanyahou
réclamait le droit pour Israël
d'implanter des bases militaires sur le
territoire du futur Etat palestinien,
qui serait néanmoins proclamé souverain,
puisque le Japon, l'Allemagne, l'Italie
occupés par des centaines de bases
américaines sont tenus pour des Etats
souverains par le droit international
actuel. On ne saurait vendre plus
maladroitement la mèche.
Une
Europe qui ne brandit plus que pour la
forme une souveraineté des peuples
devenue toute verbifique est déjà
trépassée: et c'est du fond de son
tombeau qu'elle entend la voix de tous
les résurrecteurs: "Le royaume de
l'Eveillé est en vous".
17 - Moi, le peuple…
Décidément, se disent les peuples
réveillés en sursaut, le seul flambeau
de notre bon sens nous suffit, la seule
bougie de notre raison naturelle nous
enseigne que nos dirigeants sont à
enfermer à l'asile. Notre flammèche nous
fait voir clair comme le jour que les
abasourdis tardifs se mettent le doigt
dans l'œil jusqu'au coude. Oui, notre
simple entendement retrouvé nous éclaire
sur la faiblesse de leur cervelle : à la
vérité, il y a belle lurette que notre
raison politique dépasse la leur de cent
coudées. Nous verrons bien si le
désarroi momentané de quelques-uns
d'entre nous, nous verrons bien si la
taie que nous avions sur les yeux, nous
verrons bien si notre hébètement d'un
demi-siècle, nous verrons bien si tout
cela se trouvera rapidement effacé ou
s'il nous faudra un long apprentissage
pour apprendre à donner un contenu à
notre souveraineté. Mais du moins
sommes-nous sûrs que la maturité à venir
de nos démocraties passera par le regard
informé que les simianthropologues
porteront enfin sur notre planète. Si
nos yeux demeuraient fixés sur nos
arpents, notre classe dirigeante, elle
aussi, demeurerait à l'échelle de nos
lopins, parce que c'est moi, le peuple,
qui enfante mes chefs, c'est moi, le
peuple, qui accouche des guides de ma
liberté, c'est moi, le peuple, qui dis à
mes classes dirigeantes que leur ciel
est un marmot et que ce sont eux, les
enfants ! . .
Reçu de l'auteur pour
publication
Les textes de Manuel de Diéguez
Les dernières mises à jour
|