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Uruknet.info

La Bible antichrétienne du sionisme
Maidhc Ó Cathail *


Mercredi 25 novembre 2009

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 « Toute nation qui commettrait le péché d’antisémitisme attirerait sur elle la damnation divine ».
The New Scofield Study Bible

La campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) devrait élargir son champ afin de cibler des entreprises non-israéliennes qui contribuent de manière indéniable à l’oppression des Palestiniens. Dans le cadre de cette stratégie élargie, une priorité devrait être donnée à l’une de ces entreprises parmi les plus coupables, la prestigieuse maison d’édition britannique Oxford University Press. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, la plus importante maison d’édition universitaire au monde est responsable de l’un des pires obstacles entravant la justice qui doit être rendue aux Palestiniens, j’ai nommé la Bible Scofield.

Depuis sa première édition de 1909, la Scofield Reference Bible a fait de dizaines de millions d’Américains des sionistes fanatiques. Lorsque John Hagee, le fondateur de l’association pro-sioniste Christians United for Israel a déclaré que « Cinquante millions de chrétiens évangélistes croyant à la Bible sont unis avec cinq millions de juifs américains dans leur soutien à Israël », c’était, de fait, à cette Bible Scofield qu’il faisait allusion.

Bien que la Bible de Référence Scofield renferme le texte de la version canonique de la bible du Roi Jacques [King James Authorized Version], ce n’est pas la Bible protestante traditionnelle qui pose problème, mais bien, en revanche, les commentaires qui y ont été ajoutés par Cyrus I. Scofield en notes de bas de page. Plus que tout autre facteur, ce sont les notes de Scofield qui ont induit des générations d’évangéliques américains à croire que Dieu exige qu’ils soutiennent perinde ac cadaver l’Etat moderne d’Israël.

Bénédiction d’Israël

Central, pour l’idéologie sioniste, nous relevons ce commentaire de Scofield sur Genèse 12:3 (pour plus de clarté, les notes de Scofield ont été mises en italiques, dans l’extrait ci-après) : 

« ‘Je bénirai ceux qui te béniront’. Accomplissement étroitement lié à la proposition suivante, ‘et je maudirai ceux qui te maudiront’. Magnifiquement accompli dans l’histoire de la dispersion [des juifs, ndt]. Les peuples qui ont persécuté les juifs ont tous très mal fini – et ceux qui les ont protégés ont prospéré. Le futur apportera la preuve de ce principe d’une manière encore bien plus remarquable ».

Excipant de l’interprétation spéculative de Scofield, John Hagee affirme : « Tout homme ou toute nation qui élèverait [ne serait-ce que] la voix ou [pire] la main sur Israël attirerait sur lui la colère de Dieu ». 

Toutefois, comme le fait observer Stephen Sizer, dans sa critique sans appel intitulée « Christian Zionism : Road-map to Armageddon ? » [Le sionisme chrétien : une feuille de route pour l’Apocalypse ?] : « La promesse, en référence aux descendants d’Abraham [tous…, ndt] évoque Dieu, qui les bénit [tous, ndt], et non pas des nations entières « bénissant » la nation hébraïque, et encore moins l’Etat contemporain et séculier d’Israël ». 

Ignorant manifestement cette lecture plus orthodoxe, la New Scofield Study Bible publiée par Oxford University Press en 1984 a encore renforcé l’interprétation scofieldienne, en ajoutant : « Pour une nation, le fait de commettre le péché d’antisémitisme attire sur elle le jugement [divin] inévitable ». A la lecture de commentaires aussi tendancieux, un chrétien croyant en la Bible [sic…, ndt] pourrait aisément présumer, par exemple, que Dieu va punir les cent-quatorze pays qui ont avalisé le Rapport Goldstone…

« Soutenu par une exégèse douteuse de textes bibliques dûment sélectionnés », conclut Stephen Sizer, « la lecture particulière de l’histoire et des événements contemporains que fait le sionisme chrétien… place Israël et le peuple juif [sic, ndt] à part des autres peuples du Moyen-Orient… Cela justifie le racisme endémique inhérent au sionisme, cela exacerbe les tensions entre juifs et Palestiniens et cela sape toutes les tentatives pour trouver une solution pacifique au conflit israélo-palestinien, le tout, parce que la Bible ‘leur dit qu’il en va ainsi’ ».

Cet incroyable Scofield…

Dans son ouvrage publié en 2008 The Rise of Israel : A History of a Revolutionary State [Naissance d’Israël : Histoire d’un pays révolutionnaire], Jonathan R. Adelman qualifie le soutien crucial qu’Israël reçoit de la part de chrétiens fondamentalistes de « totalement fortuit ». Mais l’incroyable carrière de celui qui a écrit la « Bible du Fondamentalisme » jette un doute considérable sur cette assertion.

Deux ans après la conversion alléguée de Scofield au christianisme, en 1879, le journal Atchison Patriot n’était absolument pas impressionné. Qualifiant celui qui avait été un de ses employés de « dernier des avocaillons, des politicards et des hommes d’affaires véreux de manière générale », un article de l’Atchison Patriot a en effet raconté quelques-uns des « nombreux comportements malveillants » de Scofield. Parmi ceux-ci, une série de faux, dans la ville de St Louis, pour lesquels Scofield fut condamné à six mois de prison.

Le fait d’être un prédicateur « né deux fois » n’empêcha toutefois pas Scofield de devenir membre du très sélect New York men’s club, en 1901. Dans sa biographie dévastatrice intitulée The Incredible Scofield and His Book (Cet Incroyable M. Scofield et son bouquin), Joseph M. Canfield commente : « l’admission de Scofield au sein du Club Lotos, dont il est tout à fait invraisemblable que Scofield l’ait ambitionnée de lui-même, renforce le soupçon (qui s’était fait jour bien auparavant) que quelqu’un dirigeait en sous-main la carrière de C. I. Scofield ».

Ce ‘quelqu’un’, soupçonne Canfield, était associé à l’un des membres du conseil d’administration du club, l’avocat de Wall Street Samuel Untermeyer. Comme le suggère Canfield, la théologie scofieldienne a considérablement « contribué à inciter les chrétiens fondamentalistes à soutenir l’intérêt international pour un des projets fétiches d’Untermeyer : le mouvement sioniste ».

D’autres auteurs, toutefois, ont été plus explicites au sujet de la nature des services rendus par Scofield à l’agenda sioniste. Dans son ouvrage Unjust War Theory : Christian Zionism and the Road to Jerusalem [La Théorie de la guerre injuste : le sionisme chrétien et la route vers Jérusalem], le Professeur David W. Lutz affirme ceci : « Untermeyer s’est servi de Scofield, un simple avocat de Kansas City sans aucune formation particulière en théologie, pour injecter les idées du sionisme dans le protestantisme américain. Untermeyer et d’autres sionistes fortunés et influents, qu’il a présentés à Scofield, ont promu et financé la carrière de celui-ci, notamment en lui offrant des voyages en Europe. » 

En l’absence d’un tel entregent, il est extrêmement difficile d’imaginer que « ce petit merdeux bon à rien » eût pu obtenir un contrat avec Oxford University Press [OUP] pour la publication de « sa » bible… Néanmoins, la raison pour laquelle la prestigieuse OUP a décidé d’avaliser un ouvrage aussi sectaire demeure un mystère…

Demande de pardon

Si la Bible Scofield n’avait pas existé, des présidents américains influencés par le sionisme chrétiens, tels que Truman, Johnson, Reagan et George W. Bush, auraient vraisemblablement eu moins de sympathie pour les exigences israéliennes et ils auraient, par conséquent, été plus attentifs aux (réels) intérêts nationaux des Etats-Unis. De plus, le peuple américain se serait vu épargner les ragots pro-israéliens bien publicisés d’un John Hagee, d’un Pat Robertson ou du non regretté Jerry Falwell, sans parler de la « prophétie » de la lucrative série des End Times vendue par les colporteurs marchands de soupe Hal Lindsey et Tim LaHaye.

Mais ce sont les peuples du Moyen-Orient qui ont le plus souffert du fait d’un Israël expansionniste ragaillardi par l’allégeance inflexible des chrétiens sionistes d’Amérique, qui furent amenés (par la tromperie) à croire que les slogans (sionistes) de Scofield étaient la volonté de Dieu.

Bien qu’énormément de souffrances inutiles aient d’ores et déjà été causées par la Bible Scofield, il n’est peut-être pas trop tard pour que les éditions Oxford University Press désavouent leur bouquin vénéneux. Parmi ses innombrables victimes figurent trois millions et demi de réfugiés palestiniens, dont le droit à retourner chez eux est contré avec ferveur par les sionistes chrétiens, qui croient que la terre de la Palestine appartient exclusivement « au peuple choisi par Dieu ». La moindre des choses, ce serait que les éditions OUP fassent montre de remords pour leur rôle dans la promotion de l’épuration ethnique en dédommageant ces réfugiés palestiniens avec les profits considérables qu’elles ont amassés tout au long du vingtième siècle en vendant leur bible sioniste.

[*Maidhc Ó Cathail, qui réside au Japon, rédige une chronique mensuelle pour le magazine Kansai Time Out. Il contribue également à un magazine en langue irlandaise sur Internet].

 

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier



Source et traduction : Marcel Charbonnier


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