Opinion
Le massacre du
vendredi 22 (2ème partie): Breivik
l'anticommuniste
Israël Adam Shamir
Israel
Adam Shamir
Vendredi 29 juillet
2011 Un aspect bizarre dans la vision du
monde de l'assassin de masse Breivik,
c'est son extraordinaire
anticommunisme. En tant
qu'idéologie, l'anticommunisme est
mort au moins depuis 1991, mais
probablement même plus tôt.
Aujourd'hui c'est quelque chose qui
peut mobiliser quelques ringards à
Washington DC, et encore.
Alors qu'il est admis que l'URSS a
perdu la Guerre froide et a été
brisée, Breivik écrit:
"Les USA mais plus particulièrement
l'Europe occidentale ont perdu la
Guerre froide parce que nous n'avons
pas pourchassé les marxistes après
la Seconde Guerre mondiale. Si nous
avions exécuté chaque marxiste, un
par un, et banni les doctrines
marxistes (pas seulement en matière
économique, mais aussi culturelle,
l'internationalisme, le féminisme
extrême, l'égalitarisme extrême, l'anti-élitisme,
l'anti-nationalisme) nous ne serions
pas dans la situation actuelle. Mais
nos dirigeants traîtres et faibles
d'esprit ont permis aux marxistes
d'infiltrer graduellement bien des
strates de la société après la
guerre, particulièrement nos
universités et nos media (voir le
début de mon livre pour la
description complète de ce
processus). Les premiers pionniers
marxistes léninistes ont eu le feu
vert pour endoctriner la génération
de 68, ceux-là mêmes qui sont aux
commandes aujourd'hui."
Le recueil de Breivik débouche sur
la conclusion inattendue que tant
l'Union Européenne que les USA sont
désormais des Etats "socialistes"
voire même "communistes", l'EURSS et
l'USSR", organisés selon les
enseignements de Marx. Je ne savais
pas que Marx envisageait une société
avec des centaines de milliardaires
et des millions de pauvres. Il
faudrait être fou pour décrire les
USA et l'UE en termes de "dictatures
communistes", car ces sociétés sont
extrêmement inégalitaires, les
travailleurs sont tout en bas de
l'échelle, alors que les super
riches ont un style de vie
ostentatoire inouï, même par
comparaison avec le temps de la
splendeur des Medici à Florence.
La raison de cette conclusion
démente c'est que Breivik choisit
ses mots pour leur faire dire ce
qu'il veut, comme dirait Lewis
Carroll. Pour lui, le marxisme
léninisme nest pas l'idéologie
dominante de l'Union soviétique et
de la Chine, mais l'idéologie
occidentale néo-marxiste de Fromm et
Adorno, Marcuse et Lukacs. Sans
vouloir vexer quiconque, rappelons
que la Guerre froide n'avait rien
contre eux, mais que c'était une
guerre contre l'URSS et ses alliés,
une guerre avec ses facettes
géopolitiques et idéologiques. Mes
néo-marxistes occidentaux se sont
conduits plutôt en alliés de
l'Occident capitaliste dans cette
guerre, et leur contribution à la
chute de la citadelle orientale du
communisme a été considérable,
puisqu'ils ont réussi à miner la foi
des élites russes dans leur propre
idéologie. Les marxistes occidentaux
qualifiaient leurs frères de l'Est
de "staliniens" et ce sont eux qui
ont bricolé la dénonciation de
Staline à courte vue par Kroutchev
en 1956.
Breivik souligne les origines
communistes des fondateurs de
l'Ecole de Francfort, de Theodor
Adorno et de Georg Lukacs, mais les
néo-conservateurs aussi, étaient des
rejetons plus ou moins rouges, à
l'époque, ou des trotzkystes actifs,
avant de virer de bord. Gramsci
rêvait bien de l'hégémonie
culturelle, comme le moyen pour
parvenir au socialisme. Il pensait
qu'un nouvel "homme communiste"
pouvait être façonné avant toute
révolution politique. Mais il se
trompait. La théorie de Gramsci a
été utilisée pour prêcher la voie
non-révolutionnaire, pour éviter la
prise violente des banques et des
usines. L'idée a été mise en œuvre
par les Eurocommunistes, et après
l'effondrement de l'Union soviétique
elle a disparu aussi vite que les
partis eurocommunistes.
Lénine avait raison, et Gramsci
avait tort: il faut retirer aux
capitalistes à la fois leurs carnets
de chèques et leurs usines, leurs
armes et leurs journaux, leur
parlement et leur gouvernement, sans
quoi ils retourneront n'importe
lequel de vos mots d'ordre à leur
profit. Un communiste peut être
d'accord avec la critique de l'école
de Francfort, mais il faut être un
doux rêveur pour s'imaginer que
c'était le vivier des ennemis de
l'Occident pendant la Guerre froide.
Les néo-marxistes de l'Ouest se sont
comportés comme cet homme proverbial
qui cherchait sa pièce de monnaie
sous le lampadaire. Il l'avait
perdue ailleurs, mais on y voyait
mieux au pied du lampadaire. Ils ne
savaient pas interagir avec les
travailleurs, et préféraient
travailler avec les minorités, les
étudiants, les féministes. C'était
plus facile, mais cela ne conduisait
nulle part, comme nous le constatons
aujourd'hui. Les travailleurs
d'Espagne et de Grèce se sont
soulevés le mois dernier, mais les
néo-marxistes se sont fait remarquer
par leur invisibilité. Ils n'ont pas
pris la tête d'une véritable révolte
populaire, parce qu'ils ont servi à
faire de la révolution un joujou
sémantique.
Les dirigeants de l'école de
Francfort et leurs compagnons ont
renoncé à la révolution, au
socialisme, aux travailleurs, et en
échange ils ont préféré travailler à
ce qu'aucun "nouvel Holocauste ne
puisse avoir lieu". Kevin McDonald
de l'université d'Etat de Californie
a écrit qu'ils avaient choisi de
s'en tenir à leur agenda juif plutôt
à celui du communisme. Breivik n'a
pas lu McDonald le terrible, ou en
tout cas n'en a jamais fait mention,
parce que c'est un bon élève des
mandarins juifs. L'explication KMD
lui était interdite. Il a juste
entonné la ritournelle selon
laquelle ce que ces gens-là avaient
fait est à proprement parler le
communisme.
Il faudrait rappeler au lecteur que
ce n'est pas ça, le communisme. Nous
n'avons pas avancé d'un pas vers le
communisme en faisant avancer le
mariage gay et le multiculturalisme.
Combattre le christianisme et la
famille ne fait rien avancer non
plus. Toutes ces dynamiques, le
capitalisme se les est appropriées,
et les a utilisées contre les
travailleurs. En fait, les objectifs
d'une révolution socialiste et le
slogan "plus jamais d'Holocauste à
aucun prix" s'excluent mutuellement.
Pour le premier objectif, il nous
faut des hommes braves et audacieux,
et pour le deuxième, ne mentionnons
aucun type d'homme, car les hommes
sont imprévisibles.
Une preuve que Breivik dit des
absurdités (même selon ses propres
critères) se trouve dans sa
compilation, où il range les Etats
européens selon leur degré
d'acceptation du politiquement
correct et d'autres éléments de ce
qu'il appelle "marxisme culturel".
Sans surprise, la Russie et d'autres
pays du bloc communiste sont les
plus libres de ce dogme, alors que
l'Allemagne, la Suède et la Norvège
y sont les plus soumis.
Certes, les théories occidentales
néo-marxistes destructives n'ont
jamais été populaires à l'Est, où le
capitalisme a été démantelé au sens
propre, et où on n'éprouvait aucun
besoin d'une pseudo-idéologie
soi-disant communiste pour couronner
une économie capitaliste.
Et pour ce qui est de 68, ce n'était
pas, comme le dit Breivik, le jour
de la victoire pour le marxisme,
mais le début du virage vers le
talon d'acier. Nos libertés ont
connu leur zénith juste après cette
lointaine année 1968. 1968 a été un
point de non-retour pour l'Amérique.
En 1968, les Américains les plus
riches contribuaient à hauteur de
90% de leurs revenus à soutenir
l'Etat, alors que maintenant cela ne
dépasse pas 30%. Et n'en tenez même
pas compte, puisqu'il y a les
boucliers fiscaux, fonds de
placement et autres astuces. C'est
en 1968 que le salaire minimum de
l'ouvrier américain a connu son
point culminant, en termes réels. Si
l'on regarde en arrière, 1968 est le
moment historique où l'humanité a
été le plus proche du firmament.
Nous les enfants de la révolution
vaincue de 1968 étions libres de
fumer, d'aimer, de penser et d'agir.
Nous pouvions voyager et prendre
l'avion sans nous retrouver à poil
dans chaque aéroport, et on ne nous
confisquait pas nos petites ribotes.
Nous pouvions faire l'amour et fumer
dans les bistrots. Depuis lors,
c'est la chute libre: plus le droit
de fumer, et la libre pensée a été
incarcérée par le politiquement
correct, tandis que l'action
politique se limite maintenant à
rejoindre un groupe sur facebook.
Aux USA, comme me le disait Noam
Chomsky, le virage avait eu lieu
juste au moment de la grève des
enseignants à New York, qui a
rappelé aux juifs que leurs intérêts
bien compris n'étaient pas forcément
servis au mieux par les tactiques
progressistes et révolutionnaires.
En conséquence, les idéologues
révolutionnaires de 68 acceptèrent
d'apaiser les masses, et les chances
d'un nouvel holocauste ou simplement
d'une perte d'influence ont
certainement diminué.
Pour Breivik et ses mentors juifs,
c'était quelque chose d'impossible à
comprendre. Il préférait appeler à
une nouvelle croisade contre les
marxistes.
Traduction: Maria Poumier
Le sommaire d'Israel Shamir
Les dernières mises à jour
|