|
Free Arab Voice
La solidarité des juifs « pro-palestiniens » revisitée
Ibrahim Alloush
on Free Arab Voice, 28 mai 2008
www.freearabvoice.org
Aucun Arabe palestinien ne disputera jamais de la question de
savoir si la solidarité internationale avec notre cause est, ou
non, la bienvenue. De fait, il est de notre devoir de fédérer un
tel soutien, où que nous nous trouvions dans le monde. De plus,
nous ne saurions en aucun cas négliger l’obligation qui est
nôtre de contrer la propagande sioniste mondialement et de
dézinguer les mythes sionistes dans toutes les langues et sous
tous les innombrables déguisements qu’ils peuvent bien adopter.
Jusqu’ici, TOUS les militants palestiniens seront d’accord avec
moi, je pense.
Demeure toutefois la question de savoir ce qui, au juste, est
constitutif d’un soutien à la cause palestinienne : la sympathie
avec des Palestiniens-victimes, comme on peut sympathiser avec
les tués et les blessés sur les routes, par exemple ; un soutien
politique conscient à un programme de libération ? Ou un mix,
quelque part entre les deux ?
Beaucoup de personnes dans le monde affirment être
« pro-palestiniens » ou soutenir les « droits des
Palestiniens ». Et beaucoup parmi nous sont touchés par ces
gens, en particulier en raison du fait que nous sommes un
certain nombre (nous, les Palestiniens) à avoir un faible pour
les Occidentaux, ce qui fait que nous fondons littéralement
quand nous en voyons un pencher un tant soit peu dans notre
sens… (D’aucuns appellent cela ‘complexe d’infériorité’, mais je
ne vais pas débattre de cette problématique ici).
Néanmoins, tous ceux qui clament nous soutenir ne sont pas
nécessairement des soutiens. Beaucoup de ces prétendus
partisans, en réalité, s’opposent à certaines des choses les
plus cruciales que nous défendons, sauf qu’ils n’apprécient pas
certaines des violations des droits de l’homme que les sionistes
nous font subir. Ainsi, ils : 1) reconnaissent le (soi-disant)
droit d’ « Israël » à exister, ainsi que le prétendu droit des
juifs à coloniser la Palestine ; 2) ils s’opposent à notre
stratégie de libération de la Palestine et, enfin, 3) ils
s’opposent tout particulièrement à la lutte arme des
organisations de la Résistance palestinienne. De tels
« soutiens », en réalité, ne nous soutiennent nullement. Non,
simplement, ils tentent désespérément d’avoir un peu moins la
gueule de bois…
Dans certains cas, vous trouverez des juifs qui prétendent
soutenir la cause palestinienne. Mais quand vous examinez
attentivement leur position, vous constatez qu’ils veulent
simplement ce qui reviendrait à une « occupation soft », par
opposition à l’occupation brutale réellement existante. En
réalité, ils souhaitent, tout simplement, qu’il puisse y avoir
une occupation sans détentions administratives, sans assassinats
extrajudiciaires ciblés, sans confiscations de terres, sans
démolitions de maisons, etc. etc. Par ailleurs, ces mêmes
« sympathisants » font le maximum d’effort pour convaincre les
Palestiniens de présenter leur cause d’une ‘manière civilisée’,
excluant le recours aux attentats-suicides et aux opérations
militaires, en particulier contre ce qu’ils qualifient au moyen
de l’oxymore « civils israéliens ». Un de ces soi-disant
sympathisants est, par exemple, Noam Chomsky, qui affirme qu’il
serait immoral, pour les Palestiniens, de prendre pour cible y
compris un soldat « israélien » en permission !
Cela nous amène à nous demander si ces « sympathisants » juifs
ne sont pas tout simplement en train d’essayer de blanchir
l’occupation au moyen de leur propre culpabilité affichée, en
tant que juifs, ou bien s’ils ne sont pas en train de tenter de
nous vendre un autre visage, « positif », du sionisme !?!
Certains, parmi nous, sont tellement heureux de voir un juif ou
un Occidental critiquer l’oppression sioniste qu’ils en sont
tourneboulés au point d’en oublier l’essence du MESSAGE
POLITIQUE que dissimule une telle pseudo-« critique » du
sionisme. Mais, nom d’une pipe : les sionistes se critiquent
mutuellement entre eux vingt-quatre heures sur vingt-quatre !
Cela ne les rend pas plus ‘pro-palestiniens’ ! Pas plus que le
fait qu’ils passent leur temps à se chamailler ne fait des
Arabes, nécessairement, des pro-sionistes !
Résumons le problème, dans une « coquille de noix » : la
Palestine est occupée. La Palestine est occupée, non seulement
par une armée régulière, mais par une armée de colons. Dans
n’importe quel pays soumis à une occupation étrangère, la
réaction naturelle, c’est la libération. Personne de sensé
n’aurait demandé aux Européens de tolérer, ou de coexister avec
l’occupation nazie de l’Europe orientale ou de la France.
Pourtant, c’est exactement cela que « nos sympathisants »
exigent des Palestiniens. Ces soutiens, fondamentalement, sont
en train de nous demander soit de céder davantage de Palestine à
des colons, dans le cadre d’une « solution » à deux Etats, soit
d’adhérer au droit des colonialistes à vivre en Palestine, dans
le cadre d’une « solution » à un seul Etat. Cette dernière
« solution » revient, de fait, à reconnaître rétrospectivement
les fruits vénéneux du sionisme, le sionisme n’étant rien
d’autre que le projet politique d’édifier une colonie juive en
Palestine.
Aussi n’avons-nous nul besoin de tels « sympathisants », qui ont
la prétention de nous dicter ce que devrait être notre stratégie
politique.
Notre cause est claire comme de l’eau de roche, et la seule
chose qui peut nous faire perdre nos véritables soutiens, c’est
de permettre à de faux sympathisants de la cause palestinienne
de mystifier celle-ci.
Quand il y a occupation, la question du jour, c’est la
libération. Point barre. Si vous êtes antisioniste, cela doit
signifier, par définition, que vous êtes contre la colonisation
juive en Palestine qui est venue dans les fourgons du projet
sioniste. Cela signifie aussi que vous soutenez notre programme
en vue de libérer la Palestine, à notre manière, et pas un
quelconque programme alternatif visant imposer aux Palestiniens
de mieux blairer les juifs en faisant parader une poignée de
juifs soi-disant « pro-palestiniens » !
Voyez-vous, à travers les siècles, nous ne nous sommes jamais
opposés à ce que des juifs viennent, individuellement, vivre en
Palestine, avant l’apparition du projet sioniste. Si vous
étudiez les annales de l’histoire, vous constaterez que les
Palestiniens ne se sont opposés à l’immigration juive en
Palestine QUE CONSECUTIVEMENT à la proclamation du projet
sioniste. Mais inutile de trop bla-blater là-dessus. La
Palestine nous appartient, partant, notre prérogative est de
décider qui nous voulons accepter dans notre pays, comme le fait
n’importe quel peuple normalement constitué sur la
planète-Terre.
Par conséquent, chaque juif/ve en Palestine, aujourd’hui, fait
partie intégrante du projet sioniste. Il/elle occupe par la
force un espace d’où un Palestinien a été évincé. Qu’un/e tel/le
juif(ve) vienne, par-dessus le marché, affirmer, sur mon terrain
et à l’intérieur de ma propre maison, qu’il/elle est
antisioniste, cela signifie soit qu’il pense que nous devons
être des idiots complets…, soit que nous sommes totalement
demeurés. Cela reviendrait, exactement, à croire aux prêches de
George Deubeuliou Bush sur la « paix mondiale », par exemple.
PREMIER POINT : l’antisionisme implique nécessairement, pour un
juif, qu’il le pratique EN-DEHORS de la Palestine. Aucun juif
vivant aujourd’hui en Palestine ne saurait être, par définition,
antisioniste.
Mais il y a plus : si vous prenez les historiens révisionnistes
de l’entité sioniste, par exemple, vous constaterez que même
chez ceux qui ont méticuleusement documenté les atrocités
sionistes contre les Palestiniens ne pensent pas que cela
équivaut au soi-disant « Holocauste ». Prenez par exemple Ilan
Pappé. Il a répété, dans mout articles et interviews, que la
Nakba est une épuration ethnique, mais que l’ « Holocauste » est
un génocide, et que par conséquent, aussi horrifiante la Nakba
puisse-t-elle être, elle ne saurait être comparée à
l’ « Holocauste » ; et que seuls les juifs étaient susceptibles
de s’en tirer à si bon compte avec un crime tel que la Nakba en
raison de la sympathie qu’ils s’étaient gagnée, en Occident, en
raison de l’ « Holocauste ». Par essence, des colonialistes
juifs tels Ilan Pappé justifient la colonisation sioniste de la
Palestine, rétrospectivement, en y voyant une réponse naturelle
aux persécutions nazies. De fait, si vous consultez son site
ouèbe, vous constaterez qu’il explique la venue de ses parents
en Palestine en invoquant cet argument. Il conclut en exhortant
les Palestiniens à admettre le sionisme, rétrospectivement, sous
le mince vernis d’une « solution à un unique Etat ».
Le danger est grand, quand notre vision politique devient
tellement nébuleuse que nous sommes incapables de faire le
distinguo entre des colonialistes usurpant notre terre et notre
identité et d’authentiques soutiens à notre cause.
Cette myopie politique, toutefois, demeure rampante chez
certains intellectuels arabes, chez certains responsables de
régimes arabes et de l’Autorité nationale palestinienne et chez
tous les Arabes qui se transforment en serpillières pour être
acceptés par les Occidentaux et/ou par les juifs. Mais on ne
voit qu’extrêmement rarement ce genre de drague pathétique de
l’ennemi chez les Arabes ordinaires de la rue arabe,
c’est-à-dire, chez l’écrasante majorité des Arabes. Les Arabes
de la rue arabe, très généralement, continuent à considérer
TOUTE TRACTATION avec l’envahisseur, quel qu’en soit le
prétexte, comme un acte de normalisation. La normalisation,
est-il besoin de le rappeler, c’est le fait de composer avec un
ennemi, comme s’il n’était pas l’oppresseur, l’envahisseur,
l’assassin de notre peuple et l’usurpateur de notre Haïfa, de
notre Saint-Jean d’Acre et de notre Galilée.
Bien souvent, les Palestiniens se laissent embarquer dans des
embrouilles culpabilisantes. Ils doivent démontrer qu’ils ne
haïssent point les juifs. En apporter la preuve est un processus
sans fin, jusqu’à ce que finalement vous n’adoptiez la doctrine
de la sécurité d’ « Israël ». Mais, vraiment : les Palestiniens
N’ONT RIEN à prouver à l’envahisseur. C’est exactement le
contraire, qui est vrai. Un juif qui clame être antisioniste :
voilà celui qui a quelque chose à prouver (à lui-même, avant
tout), et non pas un Palestinien qui lutte contre une occupation
juive !
Si quelqu’un te soutient, ça signifie que ce quelqu’un soutient
ta cause : la libération de ton pays d’une occupation étrangère.
Cela ne signifie pas que tu doives changer d’objectif
stratégique en abandonnant la libération, de façon à ce qu’il
puisse te soutenir ! Autrement, tu as déjà perdu, et perdu ta
cause, avant même d’avoir commencé à la défendre.
Un « soutien » attaché avec des ficelles qui font de toi une
marionnette, ça n’est absolument pas un « soutien ».
C’est un boulet.Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier
http://www.freearabvoice.org/articles/SolidarityfromPro-PalestinianJewsRevisited.htm
|