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IRIN
Israël-TPO:
Un petit village palestinien exposé à une mort lente

Abdullah Daraghmeh a été dépossédé de ses terres en 1984
Photo:
Shabtai Gold/IRIN AQABA,
CISJORDANIE, 5 mai 2008 (IRIN) A l’entrée du petit
village, des ouvriers continuent de travailler à la construction
d’un muret en ciment, destiné à diviser la route en deux
voies, de sorte qu’elle soit plus sûre ; de son côté, dans une
petite salle annexe, près de l’école maternelle du village, Haj
Sami Sadiq, qui dirige le conseil du village, continue de gérer divers
projets de développement agricole pour ses administrés.
Pour M. Sadiq, c’est une « journée de travail comme les autres
». Ou du moins, c’est ce qu’il prétend, car il sait qu’à
tout moment, les soldats israéliens peuvent arriver et commencer
à démolir la plupart des constructions du village et même certaines
de ses rues.
Le mois dernier, la Haute Cour israélienne a débouté les habitants
d’Aqaba de leur demande d’annulation des ordonnances de démolition
émises par l’armée, qui concernent la maternelle, la mosquée,
un centre de santé et plusieurs résidences.
« Les premières ordonnances de démolition ont été émises en
1997. En 2003, 13 autres ont été émises, et depuis lors, chaque
année, ils nous en ont donné plus [...] Il y a 45 constructions
dans l’ensemble du village et 35 d’entre elles font l’objet
d’ordonnances [de démolition] », s’est-il indigné.
Le village, situé dans la section nord-est des Territoires palestiniens
occupés, au sommet de la vallée du Jourdain, a eu un passé agité
depuis l’occupation de la Cisjordanie par Israël en 1967.
Après l’occupation, qui a incité de nombreux habitants à
fuir, la région a été déclarée zone militaire, et des camps d’entraînement
ont été créés dans le village et aux alentours, pour les besoins
de l’armée israélienne. Selon le conseil du village, huit villageois
ont été tués et 42 ont été blessés au cours d’exercices
militaires. 
Salem Jabar, 85 ans, a reçu une ordonnance lui
interdisant
de poursuivre les travaux de construction de sa maison
Photo:
Shabtai Gold/IRIN
Engins non-explosés
« Il nous arrive encore de trouver des engins non-explosés autour
du village, et nous disons aux enfants de ne jamais toucher à rien
», a expliqué un villageois. Récemment, en travaillant dans les
champs, des villageois ont notamment découvert plusieurs petites
roquettes, ainsi que des obus et des balles.
« Quand j’avais 12 ans, j’ai trouvé un obus de char
non-explosé. Je ne savais pas ce que c’était, et j’ai joué
avec. Il a explosé et m’a brûlé aux mains et au visage »,
s’est souvenu un homme, aujourd’hui âgé d’une quarantaine
d’années.
En janvier 2008, des villageois ont également retrouvé le corps
d’un homme « déchiqueté », selon les propos d’une personne
qui a vu le cadavre, par un explosif que les soldats avaient laissé
derrière eux.
Sadiq lui-même fait partie des personnes blessées au cours des
exercices militaires. Les balles qu’il a reçues dans le torse
au début des années 1970 l’ont condamné à passer le restant
de ses jours dans un fauteuil roulant. « Ils ont également détruit
nos récoltes en traversant nos champs avec leurs tanks », a ajouté
Sadiq, ne s’attardant pas sur son propre sort.
Les bases militaires ont été retirées en 2003, après que des
villageois eurent déposé une requête auprès de la Haute Cour
israélienne, affirmant qu’elles constituaient un risque pour
leur sécurité.
Pas de nouveaux bâtiments
À la lisière du village, Abdullah Daraghmeh loue un petit terrain
pour sa femme et ses quatre enfants. En 1984, la famille a été
dépossédée de ses propres terres, plus loin dans la vallée.
Abdullah Daraghmeh et sa famille vivent dans des tentes de fortune
car « l’armée [israélienne] a menacé de démolir tout ce que
je pourrais construire », a-t-il dit.
C’est exactement ce qui est arrivé à Salem Jaber, 85 ans. Imam
(prêtre musulman) d’une mosquée de la basse vallée du Jourdain
pendant plusieurs décennies, M. Jaber a décidé il y a plusieurs
mois de prendre sa retraite et de retourner dans son village
natal.

Une cour d’école maternelle, qui fait
l’objet d’une ordonnance de démolition
Photo:
Shabtai Gold/IRIN
« Dès que j’ai commencé à construire une maison ici, pour
moi-même et ma famille, ils ont émis des ordonnances d’arrêt
des travaux », a-t-il expliqué.
« Cette terre appartenait au grand-père de mon grand-père.
Pourquoi m’empêchent-ils d’y construire une maison ? Je
n’ai nulle part d’autre où vivre », a-t-il ajouté.
L’administration civile israélienne en Cisjordanie a expliqué
à IRIN que la Haute Cour avait approuvé les ordonnances émises,
bien que pour l’instant, la mosquée et le jardin d’enfants
ne seraient probablement pas rasés.
« Il n’y a pas de plan d’ensemble pour ce village. Les
habitants ont demandé des permis après avoir déjà construit
», a affirmé un porte-parole. « Il y a une solution : ils
peuvent aller vivre à Taiyser [un village situé à quelques
kilomètres de là] », a-t-il suggéré.
Selon les habitants, il est vrai que dans certains cas, les
permis ont bel et bien été demandés rétroactivement, mais il
existe un processus spécifique pour ce type de cas, qui ne sont
pas inhabituels. De toute façon, ont-il indiqué, même les
permis ayant fait l’objet de requêtes en bonne et due forme
n’ont pas été accordés.
« Ils veulent que nous quittions ces terres, un point, c’est
tout. Ils trouveront toujours une excuse », a conclu M. Sadiq
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