Opinion
La délocalisation
de la guerre d'Iran
Hedy
Belhassine

Dimona -
Israël
Dimanche 4 mars
2012
L’Iran est au ban
d’infamie depuis plus de trente ans.
L’insoumise ne veut pas rejoindre le «
concert des nations ». Son crime est de
relever la tête pour dire non à la
globalisation. Elle vit dans un monde à
part et ne veut le quitter. Comme les
Soviets, les Mao, les Gaullo, les
Castro. Le harcèlement de la communauté
bienpensante internationale est une
constante à laquelle elle répond par
l’invective et la provocation.
Contre des mots déjà en 1980, l’Occident
avait armé l’Irak supplétive pour
saigner plus d’un million d’adolescents
sur pieds.
Contre des mots, l’Occident a militarisé
le Golfe et la Péninsule arabe. Des
missiles et des canons par milliers, des
avions par centaines, des porte-avions
par dizaines, des bases plus nombreuses
que les doigts de la main. Jamais, le
monde n’aura connu une concentration de
puissance de destruction équivalente. Le
tiers de la production d’armement des
USA, GB et France (membres du conseil de
sécurité) protège les cours du pétrole
arabe et l’impunité de l’Etat hébreu.
Contre des mots Israël veut lancer ses
trois cents bombes nucléaires pour
prévenir la fabrication d’une seule. Les
sionistes préparent méthodiquement le
bombardement de l’Iran distante de mille
sept cents kilomètres sous prétexte
d’une improbable attaque nucléaire dont
ils sont pourtant protégés par un
bouclier humain de quatre millions
d’otages palestiniens.
Les défenseurs du bien contre le mal
jouent à se faire peur et dressent leurs
opinions vers un conflit où nul
va-t-en-guerre ne veut aller se faire
tuer.
Car la première bataille sera
suicidaire. Le Golfe persique est une
pataugeoire en cul de sac où manœuvrent
des centaines de tankers inflammables à
la merci d’un jet d’allumette. Ce n’est
pas le théâtre d’opération idéal ! La
géographie est une menace bien plus
dissuasive que la bombe !
En un mois de conflit, les experts
prédisent que les cinq émirats arabes
unis plus Bahrein, le Qatar et même
l’Arabie retourneraient à l’état du
Moyen âge, c'est-à-dire quarante ans en
arrière !
Mais ce n’est pas ce qui inquiète
l’Occident. A peine Téhéran menace t-il
de fermer le détroit d’Ormuz que les
cours s’envolent et les marchés
s’affolent. C’est du sérieux, il faut
d’urgence calmer le jeu et donner des
signes discrets d’apaisement.
Justement, en Mer Rouge, une petite
escadre iranienne est autorisée à faire
escale au port islamique de Jeddah où
elle est accueillie courtoisement par la
marine royale saoudienne ; puis à sa
propre surprise, elle obtient le feu
vert de l’Egypte pour franchir le Canal
de Suez et aller visiter ses amis russes
à Tartous en Syrie. Le retour de
croisière sera paisible. Les Iraniens
dépassent les armadas d’une dizaine de
nations qui se préparent à lui faire la
guerre. Tous les commandants saluent à
coup de sirène les équipages iraniens,
sauf les Israéliens qui s’affranchissent
de la tradition, mais c’était shabbat.
A Téhéran, pour répondre à ce geste de
détente, un ayatollah ayant de la
religion déclare que l’arme nucléaire
est incompatible avec la charia.
Le Golfe devenant subitement tempéré, le
théâtre s’est déplacé vers la Syrie où
le lion (en arabe assad) dévore son
peuple depuis des lustres sans que
personne à l’ONU ne s’en soit jamais
offusqué. Récemment, il était encore
célébré dans toutes les capitales,
paradant aux cotés des Présidents
tricolores et étoilés.
Contre leur ami d’hier les chefs d’état
aux bras croisés ont fini par hausser le
ton. Téméraire, le Président Marzouki a
osé expulser l’ambassadeur de l’animal;
geste qui a permis aux autres chefs
d’état d’emboiter le pas de
l’inexpérimenté bouc émissaire. Monsieur
le plénipotentiaire du lion, dégage ! Ah
mais !
Mais justement, dans l’ombre, la Chine
et la Russie ont sifflé le report des
hostilités. Alors Washington a convoqué
à Tunis une conférence des « amis » de
la Syrie, façon de dire que le pays du
lion n’avait pas d’ennemis. Et le lion
en a profité pour reprendre sa croisade
sanglante sur les droits de l’Homs.
Dans l’intermède, les géo stratèges ont
été priés de chercher un autre terrain
de manœuvre.
Le Liban a déjà donné en 2008 et le
Hezbollah veille. L’Irak est
disqualifié. Le Yémen a provisoirement
capitulé. La Somalie pirate est trop
dangereuse. L’Algérie est prématurée. Le
Soudan divisé. Il y a bien l’Erythrée,
bagne à ciel ouvert où l’admirable
population crève doucement, le fer au
pied, sans faire de bruit. C’est une
option, mais le Qatar pour des raisons
complexes n’est pas d’accord.
L’Asie Centrale a des avantages, on
cherche un prétexte du coté de
l’Ouzbékistan qui n’en manque pas ; le
Turkménistan non plus.
Pour embêter la Turquie et la Russie, le
Caucase reste une hypothèse
intéressante. Justement, l’Azerbaïdjan,
pays pétrolier voisin de l’Iran et
peuplé de chiites vient d’acquérir pour
1,6milliards d’armement à Israël ! Ah !
Si les musulmans chiites pouvaient
s’entre-tuer avec des munitions juives !
Pendant ce temps, la Grèce est en feu,
le Portugal est dans la rue, l’Espagne
reste grande, l’Allemagne arrogante et
la France dans l’attente du grand soir.
Mais l’Europe est sereine ; elle pense
–peut-être à tort- que la guerre du
pétrole ne peut être délocalisée chez
elle. Espérons que l’avenir lui donnera
raison !
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