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Le Web de l'Humanité
Georges
Habache inhumé à Amman
Hassane Zerrouky
L'adieu à George Habache dans le camp de ayn el
helwe
Photo Rim
Mardi 29 janvier 2008 Palestine
. Le fondateur du FPLP aura été jusqu’au bout fidèle à une
certaine idée de l’avenir politique de son peuple.
Georges Habache, 82 ans, aimait à se définir comme « chrétien,
socialiste et marxiste ». « Peut-être est-ce ce qui
me distingue de cette idéologie qui glorifie le suicide »,
déclarait-il récemment (1). Les obsèques de l’homme que des médias
occidentaux qualifient toujours de « chef terroriste »
ont eu lieu, hier, à l’église grecque orthodoxe de Swaiifieh,
à Amman, avant un enterrement au cimetière chrétien de Sahab,
dans la capitale jordanienne. Après Yasser Arafat disparaît
l’une des grandes figures du mouvement national palestinien.
L’itinéraire politique de Georges Habache se confond avec la
tragédie du peuple palestinien. « Il a vécu pour son
peuple et il est mort pour son peuple », a déclaré son épouse
Hilda. Et l’on ne peut comprendre son intransigeance vis-à-vis
d’Israël si on la sépare du vécu historique des Palestiniens.
Fils de commerçants palestiniens chrétiens, né à Lydda en
1925, Habache n’est plus retourné dans sa ville natale depuis
ce 11 juillet 1948 quand les milices israéliennes ont, selon le
correspondant du Chicago Sun Times, tué plus de 300 civils, et
ce, avant que le colonel Yitzhak Rabin, qui les commandait,
n’ordonne l’expulsion de tous les Palestiniens de la ville.
L’exil de la famille Habache vers le Liban date de cette époque.
Étudiant en médecine à Beyrouth, George Habache, âgé de
vingt-trois ans, et dont la soeur est morte au cours de cet exil,
décide alors de s’engager dans la lutte en créant, en 1951, le
Mouvement des nationalistes arabes dont sera issu, en 1967, le
FPLP d’obédience marxiste.
Son nom est devenu célèbre, synonyme de terrorisme, quand au
début des années 1970 il avait commandité des détournements
d’avion - en fait, il n’y en a eu que quatre - que les
militants du FPLP avaient fait exploser dans le désert de Zarka,
en Jordanie, après avoir fait évacuer les passagers. Pour
Habache, qui avait ordonné par la suite l’arrêt des détournements
pour se consacrer aux seules cibles militaires israéliennes, c’était
le seul moyen de faire con- naî- tre la tragédie palestinien-
ne.
Acteur du mouvement national palestinien, ami mais adversaire sur
le plan politique d’Arafat, Georges Habache, que le Mossad n’avait
pas réussi à atteindre, plaidait pour un État binational démocratique
et laïc où cohabiteraient juifs, chrétiens et musulmans comme solution
à la crise israélo-palestinienne. Lors du congrès de l’OLP,
à Alger, en 1988, il expliquait son opposition aux négociations
avec Israël par les concessions à sens unique faites par Arafat.
Il reprochait à ce dernier d’avoir prôné une stratégie ayant
pour but la création d’un État palestinien avec Jérusalem-Est
pour capitale sans préciser les conditions de son établissement.
Selon lui, ce mini État palestinien ne devrait pas être une fin
en soi, mais un moyen pour l’établissement d’un État
binational.
De même qu’il reprochait au chef de l’OLP de maintenir
« son entourage dans une certaine opulence » en les
achetant, allusion au train de vie de certains dirigeants actuels
de l’OLP (Organisation de la libération de la Palestine dont le
FPLP est mem- bre). Condamnant le coup de force du Hamas à Gaza,
il n’en reste pas moins qu’il en a fait porter la responsabilité
au Fatah. Et pour sortir de la crise interpalestinienne, il a préconisé
une large coalition englobant tous les courants palestiniens dont
celui incarné, à ses yeux, au sein du Fatah, par Marwan
Barghouti.
Jusqu’au bout, même si on ne partage pas toutes ses
positions, Georges Habache aura été fidèle à une certaine idée
de la Palestine. Au crépuscule de sa vie, au vu de la montée de
l’islamisme, le marxiste et laïc Habache reconnaissait que son
mouvement, le FPLP, n’a sans doute pas assez fait pour éviter une
telle évolution au sein de la société palestinienne.
L'adieu à George Habache dans le camp de ayn el
helwe
Photo Rim
(1) Lire Les révolutionnaires ne meurent jamais, conversations
avec George Malbrunot, Éditions Fayard, 2008, 20 euros.
© Journal l'Humanité
Publié le 30 janvier 2008 avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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