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Une base navale française face à l'Iran
Hassane Zerrouky
Le Mirage 2000-5 - Photo: avionique.free - © Sirpa Air
Mercredi 27 mai 2009
Abou Dhabi . Cette implantation permanente dans le détroit
d’Ormuz place la France, intégrée à la stratégie de Washington,
en première ligne dans une région sous haute tension.
Nicolas Sarkozy a inauguré hier une base navale militaire
permanente à l’entrée du détroit d’Ormuz, située à 225 km des
côtes iraniennes. À côté de cette base abritant un quai de 300
mètres de long pouvant accueillir des navires de guerre, les
Émirats arabes unis dont fait partie Abou Dhabi mettent à la
disposition de la France la base aérienne d’Al Dhafra où trois
avions de combat Mirage 2000-5 y stationneront en permanence,
ainsi qu’une base terrestre où une centaine de militaires
français sont déjà sur place.
Des tensions toujours croissantes
Cette présence militaire française devrait s’accroître dans
les semaines et mois à venir, dans une région - les pays du
Golfe - où les tensions sont croissantes. Paris apparaît donc
déterminé à seconder militairement Washington dans cette zone
qui pullule déjà de bases militaires US. Nicolas Sarkozy donne
ainsi l’impression de se préparer à un conflit avec l’Iran, qui
semble donc jugé comme inévitable. D’autant qu’un accord de
défense lie les Émirats arabes unis et la France. Toutefois le
chef d’État français se garde bien de répondre à la question de
savoir quel profit compte tirer la France à se porter ainsi en
première ligne en cas d’aggravation de la situation régionale.
Ce positionnement stratégique dans cette partie du monde
s’explique aussi par le fait que l’Afghanistan, théâtre d’un
conflit dans lequel elle est indirectement impliquée, le
Pakistan voisin où la situation risque de s’envenimer et l’Irak
où elle cherche à être présente, ne sont pas très éloignés
d’Abou Dhabi. Un positionnement qui s’inscrit en droite ligne de
cet infléchissement atlantiste de la politique extérieure
française depuis que Paris a réintégré pleinement l’OTAN, une
structure de défense chapeautée par les États-Unis et où la
France ne dispose que d’une marge de manoeuvre bien mince !
Bien sûr, les préoccupations commerciales n’étaient pas non
plus absentes du voyage officiel de Nicolas Sarkozy. Celui ci
comptait vendre aux Émirats arabes unis une soixantaine d’avions
de guerre Rafale pour un montant estimé entre 6 et 8 milliards
d’euros. La conclusion d’une éventuelle vente d’appareils
restait cependant en suspens hier au moment où Nicolas Sarkozy a
quitté Abou Dhabi. Sur ce dossier, le ministre des Affaires
étrangères des Émirats, cheikh Abdallah ben Zayed Al Nahyane, et
la présidence française se sont bornés à faire état de
« progrès ». Sans plus.
Il faut dire que, dans ce domaine du matériel militaire, la
concurrence est rude : la France devra compter avec les
États-Unis et leurs avions F-16. En revanche, la coopération
culturelle, inaugurée sous l’ère Chirac, est bien le seul
domaine où les choses progressent rapidement. Hier le chef de
l’État français a donné le coup d’envoi de la construction du
Louvre d’Abou Dhabi, sur l’île de Saadiyat. Conçu par
l’architecte français Jean Nouvel, le musée, un édifice de 24
000 m², dont 6 000 m² pour l’exposition principale, est surmonté
d’un dôme, inspiré de l’architecture traditionnelle arabe. Et
selon l’accord signé en mars 2007 pour trente ans, ce projet
devra rapporter à la France un milliard d’euros.
© Journal L'Humanité
Publié le 28 mai 2009 avec l'aimable autorisation de
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