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L'Humanité
L’immense désarroi
des Palestiniens
Hassane Zerrouky
Photo Al-Ahram
26 juin 2007 Proche-Orient
. Dans les territoires occupés, entre mur d’annexion et contrôles
quotidiens de l’armée israélienne, les habitants ont du mal à
croire en l’avenir.
Cisjordanie, envoyé spécial.
Le sommet israélo-arabe de Charm el-Cheikh, qui démarrait
hier soir (voir ci-contre), laisse perplexe la rue palestinienne.
Les Palestiniens ont la tête ailleurs. Leur quotidien n’a guère
changé. L’armée israélienne n’a pas l’intention
d’assouplir les mesures de sécurité. Les personnes se rendant
d’une localité à une autre distante d’à peine quelques
kilomètres mettent plus d’une heure, parfois le triple, pour
arriver au lieu où ils doivent se rendre. Alors qu’il faut à
peine vingt minutes pour se rendre de Bethléem à Jérusalem,
dimanche, il a fallu attendre près de deux heures sous un soleil
de plomb pour passer les deux barrages de contrôle situés juste
à la sortie de la ville.
« Les fins de mois sont très difficiles »
Dans leur cabine climatisée, devant laquelle
passent les automobilistes, les militaires israéliens font durer
le plaisir. « Ça dépend des jours, dit Yahia, assistant à
la Croix-Rouge internationale. Mais depuis les événements de
Gaza ils multiplient les tracasseries. » Yahia, qui parle
couramment l’hébreu, s’adresse aux soldats dans cette langue.
« Beaucoup de ces soldats, notamment ceux d’origine russe,
éthiopienne, où fraîchement arrivés des États-Unis, ne
parlent même pas l’hébreu. Ils sont souvent surpris quand je
leur parle dans cette langue. Pour moi, ça facilite les choses »,
dit-il d’un air malicieux.
Hier, selon le quotidien Haaretz, des responsables
des services de sécurité ont annoncé qu’Israël
n’assouplira pas les mesures prises dans les territoires occupés
tant que l’Autorité palestinienne ne prendra pas de mesures
pour réprimer les « terroristes ». Pas plus qu’il
ne débloquera tout l’argent - montant estimé à plus de 800
millions de dollars - provenant des taxes sur les produits importés
et gelés depuis l’arrivée au pouvoir du Hamas. Certes, Olmert
s’est engagé à débloquer 300 millions de dollars. « C’est
déjà ça de gagné. Mais pourquoi ne débloque-t-il pas tout
l’argent », dit Aïssa, employé à la municipalité de
Bethléem ? À l’instar d’Aïssa, ils sont près de 300
000 fonctionnaires, forces de sécurité comprises, qui ne
touchent que 50 % de leur salaire tous les quatre mois. « Je
vis à crédit. Les fins de mois sont très difficiles »,
assure-t-il.
Samir, quarante-cinq ans, guide touristique,
guette tous les jours les autocars déversant les touristes venant
visiter la basilique de la Nativité. Pour ce chrétien, père de
quatre enfants, « les touristes sont moins nombreux
qu’avant, on gagne moins d’argent, et la construction du mur a
encore compliqué les choses ». Du sommet de Charm el-Cheikh,
il n’attend pas grand-chose. « Le mur sera encore là. Et
l’Occident ne lèvera pas le petit doigt », dit-il.
Peu de crédit accordé au sommet
Nadia, assistante sociale, est, quant à elle,
interdite de sortie de Bethléem. Elle ne possède pas cette
fameuse carte de résident lui permettant de se rendre à Jérusalem.
En effet, en 2006, selon l’ONG israélienne de défense des
droits de l’homme, B’Tselem, 1 363 Palestiniens natifs de Jérusalem
se sont vu retirer cette carte sous divers prétextes. Cela
signifie concrètement qu’ils n’ont plus aucun droit dans la
ville et leurs habitations seront confisquées au profit des
colons nouvellement arrivés. Elle ne cache pas son pessimisme :
« Je crois que cela va être encore plus difficile
qu’avant. Les gestes d’Olmert, soi-disant pour aider l’Autorité
palestinienne, c’est du pipeau. »
Dans toute la Cisjordanie, il est bien rare de
rencontrer un Palestinien accordant un quelconque crédit au
sommet de Charm el-Cheikh. « Il y a eu les accords d’Oslo
que Sharon a remis en cause, puis je ne sais combien de sommets
entre Israéliens et Palestiniens sans aucun résultat positif,
ensuite la feuille de route, et notre situation n’a fait
qu’empirer. Israël ne veut pas la paix, il ne veut pas d’un
État palestinien. Et le coup de force du Hamas est du pain béni
pour Olmert », explique un responsable du Fatah de Beit
Hanine, près de Jérusalem, qui, pourtant, soutient Mahmoud Abbas
© Journal l'Humanité
Publié le 27 juin 2007 avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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