Allume le feu que je puisse voir
mes larmes
En cette nuit de massacre...
— Samih al-Qasim, 1939 – present
On a entendu les mêmes mots :
"précision extrême", "frappe
chirurgicale". Il y a eu les mêmes
"inévitables erreurs tragiques",
"bévues", "efforts scrupuleux pour
éviter", etc... Bla, bla, bla...
Mais comme a dit le colonel anglais
Richard Kemp, en parlant de la
1400ième victime du massacre de Noël
et Nouvelle année 2008-09 à Gaza : "Les
erreurs ne sont pas des crimes de
guerre".
Le colonel Kemp qui a des liens
impeccables avec les services
secrets anglais, a, depuis
Jérusalem,
prononcé à la BBC des paroles
tout aussi sanguinaires, le 21
novembre, à propos des dernières 24
heures de bombardement de la
minuscule bande Gaza emmurée où la
moitié des habitants sont des
enfants. Mais le Colonel Kemp a
assisté à de nombreux carnages au
cours de sa vie, depuis Belfast
jusqu’aux Balkans, en passant par
l’Iraq, l’Afghanistan et ailleurs.
Il semble qu’à force, les morts et
les estropiés fassent partie de la
routine.
En huit jours, l’assaut — à coup
d’attaques impitoyables contre des
familles qui n’avaient nul part où
se cacher — a fait 163 morts
palestiniens. Il y a eu 993 blessés.
865 maisons ont été détruites ou
endommagées.
6 centres de santé ont été
endommagés ainsi que 30 écoles, 2
universités, 15 bureaux d’ONG, 27
mosquées, 14 bureaux des médias, 11
usines, 81 magasins et un centre de
distribution de nourriture de
l’UNRWA (United Nations Relief and
Works Agency).
Et aussi, 7 bureaux de
Ministères, 14 postes de police ou
des forces de sécurité, 5 banques et
deux maisons de la jeunesse. Le
complexe sportif où les athlètes
palestiniens des jeux olympiques et
paraolympiques s’étaient entraînés
pour les jeux olympiques de Londres
en 2012 est en ruines de même que le
beau et combien nécessaire ministère
de l’Intérieur.
Le 20 novembre, Journée
Universelle des Enfants, une frappe
aérienne a détruit le jardin
d’enfants Al Bajan, financé et géré
par Oxfam, et
endommagé le jardin d’enfants Al
Housna. Sara Almer de Oxfam a
déclaré que plus de 150 enfants
fréquentent ces écoles. "Les enfants
sont indemnes mais les bâtiments et
les cours de récréation sont en
ruines." Ici, "Les enfants sont déjà
profondément traumatisés..."
C’est à cause de la dévastation
provoquée par “Operation Cast Lead”
( 27 décembre 2008-17 janvier 2009)
qu’Oxfam a construit cette école et
a aussi remis en état l’arrivée
d’eau et les installations
sanitaires qui viennent d’être à
nouveau détruites.
Il manque 250 écoles à Gaza,
selon cette organisation —et comme
il est interdit d’y importer du
matériel de construction, les 32
écoles supplémentaires et les 2
universités qui viennent d’être
endommagées ne seront pas
reconstruites ni d’ailleurs rien
d’autre.
Ironiquement, le jour où les
jardins d’enfants ont été détruits,
le Secrétaire Général de l’ONU avait
annoncé que l’ONU lançait un nouveau
projet, "L’éducation d’abord" en
l’honneur de la Journée Universelle
des Enfants. Cette journée commémore
l’adoption de la Déclaration de
l’ONU sur les Droits des Enfants de
1959 et de la Convention de l’ONU
des Droits des Enfants de 1989. La
Convention de 1989 est entrée en
application le 2 septembre 1990,
moins d’un mois après le début de
l’embargo de l’ONU contre l’Irak qui
interdisait de vendre à ce pays même
le lait pour les bébés.
"Les enfants... ont besoin de
soins attentifs et d’une protection
toute particulière et ils doivent
même pouvoir bénéficier de
protection légale avant comme après
leur naissance", lit-on dans
le préambule de ce beau
document.
Les jumeaux de 4 ans, Suhaib et
Muhammed Hijazi, ne sauront jamais
que, selon l’ONU, ils avaient le
droit "d’être protégés." Ils ont été
tués quand leur maison a été
bombardée juste avant l’aurore du
Jour Universel des Enfants. Leurs
parents, Fouad et Amna sont morts à
l’hôpital.
Saraya, 18 mois, ne pourra pas
non plus lire ces belles paroles.
Elle est morte d’une crise
cardiaque, de terreur littéralement,
sous les bombardements.
Au moment où les lumières
s’éteignaient dans les hôpitaux de
Gaza parce qu’on avait plus de
carburant pour les générateurs,
Gilad Sharon — le plus jeune fils de
l’ancien premier ministre Ariel
Sharon, 84 ans, qui bénéficie des
excellents services de santé
israéliens et est médicalement
assisté depuis 2006 — a déclaré :
"Il faut raser des quartiers
entiers de Gaza. Raser Gaza tout
entier. Les Américains ne se
sont pas arrêtés après Hiroshima
—les Japonais ne se rendaient
pas assez vite, alors ils ont
aussi bombardé Nagasaki."
Le ministre l’Intérieur
israélien, Eli Yishai, a dit que le
but de l’attaque était de "...
renvoyer Gaza au Moyen Age."
La Palestine n’a pas d’armée, ni
de Marine, ni d’armement lourd.
Israël est une puissance nucléaire
non déclarée qui est considérée
comme la 4ième puissance militaire
mondiale.
Gaza était, bien sûr, bombardée
par des F-16 et autres armes fournis
par les Etasuniens. Mais le 22
novembre, pendant que les Gazaouis,
endeuillés, pleuraient, les
Etasuniens se réjouissaient,
mangeaient de la dinde, et priaient
pour leurs repas de fête de
Thanksgiving (journée d’action de
grâce).
Ce qu’ils devraient plutôt faire
; dans toutes les villes, c’est
brûler la Déclaration et la
Convention de l’ONU sur les Droits
des Enfants, la Déclaration de l’ONU
sur les Droits Humains, la
Convention de Genève, les Principes
de Nuremberg, et faire un grand feu
de tout ces mots qui ne servent à
rien puisqu’ils ne peuvent ni
empêcher ni dissimuler la barbarie
et l’inhumanité internationales,
oui, faire un énorme feu de joie
pour éclairer le mensonge et
l’hypocrisie meurtrière des "états
démocratiques" autoproclamés.
Felicity Arbuthnot
Felicity Arbuthnot est une
journaliste spécialiste de l’Irak.
Elle a écrit avec Nikki van der Gaag,
"Baghdad" dans la série des Grande
Villes de World Almanac books. Elle
a aussi été responsable de la
recherche pour deux documentaires
sur l’Irak qui ont obtenu des prix,
Paying the Price : Killing the
Children of Iraq de John Pilger et
Returns que Denis Halliday a réalisé
RTE (Irlande).
Pour consulter l’original :
http://dissidentvoice.org/2012/11/gaza-the-international-com...
Traduction : Dominique Muselet
© LE GRAND SOIR -
Diffusion non-commerciale autorisée et
même encouragée.
Merci de mentionner les sources.
Publié le 26 novembre 2012