Présidentielles
post-Serval
Retour de la
Françafrique au Mali ?
Djamel Bouatta
© aBamako.com par
SA
Dimanche 28 juillet 2013
Les électeurs sont donc appelés à
choisir, aujourd’hui, entre 27
candidats. Ils étaient à l'origine 28,
mais l'un d'eux, Tiébilé Dramé, l'un des
grands artisans de l'accord de
Ouagadougou, a préféré jeter l'éponge,
en dénonçant un scrutin «ni libre, ni
équitable». «Je constate que Laurent
Fabius est devenu le directeur des
élections au Mali», a-t-il lancé,
pronostiquant un Mali sous tutelle
française. Des élections après
l’opération Serval. Il est clair que la
France, qui a entretenu sa lune de miel
avec Bamako depuis qu’elle a repris pied
au Mali dans le sillage de sa guerre
contre les djihadistes dans le nord du
pays, n’aura pas fait ce forcing pour
des prunes. Il est loin le temps où
Modibo Keita, le père de l’indépendance,
a dit niet au général de Gaulle, le
temps où Alpha Oumar Konaré boudait
Jacques Chirac à Dakar, et le temps où
Amadou Toumani Touré (ATT) tenait tête à
Nicolas Sarkozy sur ses velléités de
revenir au Mali et sur son dossier des
sans-papiers maliens en France. La
plupart des candidats aux
présidentielles de ce dimanche, surtout
les favoris Ibrahim Boubacar Keita ou
Choguel Maïga, n’avaient pas arrêté de
rendre hommage à François Hollande qui
«a réconcilié l’Afrique et la France».
Pour tous, l’opération Serval est un
capital exceptionnel qu’il ne faut
surtout pas dilapider ! Visiblement, la
Françafrique à de beaux jours dans ce
pays stratégique au cœur du Sahara
sahélien. François Hollande a, par
ailleurs, entendu le message en lâchant
les Touareg du Mnla. L’ami français a
pesé de tout son poids en faveur d’un
retour des autorités maliennes dans le
fief touareg de Kidal. L’élection se
tient à la date fixée par François
Hollande, peu importe si les listes
électorales n’ont pas toutes été
révisées et que les cartes ne sont
pas toutes distribuées, que beaucoup de
Maliens du nord et de l’étranger ne
pourront pas voter. Comment les Maliens
vont se retrouver avec les 27 candidats
qui eux se sont fait une raison. Tiébilé
Dramé s’est retiré après avoir dénoncé
durant des semaines «un scrutin qui ne
sera ni libre ni équitable. Laurent
Fabius, le ministre français des AE,
s’est immiscé dans la vie politique
intérieure du Mali en devenant le
directeur des élections au Mali»,
rappelant à tout bout de champ cette
petite phrase de François Hollande du 28
mars : «Nous voulons qu’il y ait des
élections au Mali avant la fin du mois
de juillet, et ça, nous serons
intraitables là-dessus.» Pour le
président socialiste français, il
s’agissait de battre le fer tant qu’il
est chaud. Récupérer le Mali au plan
légal et légitime et surtout effacer la
hantise de l’enlisement. L’Élysée ne
veut pas que ce pays devienne pour la
France ce que l’Afghanistan est devenu
pour les États-Unis, un piège sans fin.
Selon son locataire, et selon son
homologue de la Maison-Blanche, seul un
président élu aura la légitimité
nécessaire pour faire la paix avec les
Touareg et neutraliser définitivement
les ex-putschistes de mars 2012. D’où
cette élection au pas de charge. Par
dessus tout cela, la France cherche à «relégitimer»
sa présence militaire en Afrique.
Le 14 juillet, en voyant des troupes
africaines défiler sur les
Champs-Élysées, l’association française
Survie, une Ong anticolonialiste, s’est
écriée : «C’est la Françafrique new look
que Paris veut.» François Hollande a
répliqué que son action c’était pour
faire face à la menace djihadiste sur
Bamako, sur le Sahel, et qu’il n’avait
pas d’autre choix que d’intervenir.
C’est qu’au Mali comme en France, tout
le monde ou presque a applaudi. Et sur
la scène internationale, seul
l’ex-président égyptien, le Frère
musulman Mohamed Morsi, s’y était
opposé. Le vrai Hollande l’Africain,
c’est celui qui a refusé d’envoyer des
troupes en Centrafrique pour sauver
Bozizé chassé par les rebelles de la
Seleka, a contrecarré l’Élysée. On
verra si la France ne veut plus être le
gendarme de ses anciennes colonies en
décembre prochain. Le chef de l’État
français a invité tous ses homologues
africains à Paris pour assister à un
sommet sur «la sécurité en Afrique».
À ce moment-là, Hollande dévoilera mieux
son africanitude.
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Publié le 28 juillet 2013 2013 avec
l'aimable autorisation de Liberté
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