Opinion
N'est-il pas temps de revoir -
enfin sérieusement
le plan de partage de la Palestine ?
Daniel Vanhove
Benjamin Netanyahou - Photo RIA Novosti
Samedi 19 juin 2009
Une fois encore, les
dirigeants occidentaux se félicitent d’un « important pas en
avant » que constitue la déclaration politique du 1er
Ministre israélien, B. Netanyahu. Ce dernier ayant susurré dans
son premier discours de politique étrangère, sa vision
d’un futur État palestinien indépendant. Mais de quel « pas »
s’agit-il donc ?
Jamais en
reste, les médias occidentaux relayaient en chœur les propos de
B. Netanyahu, allant même jusqu’à titrer que cet État projeté
par le nouveau prophète hébreu n’était soumis à quasi aucune
condition « préalable ». Ce qu’il faut lire parfois !
Or, à la
lecture détaillée de la proposition du 1er Ministre
israélien, force est de constater qu’il en va de son exact
contraire, sinon que les conditions au lieu d’être préalables
se succédaient les unes aux autres.
Ainsi,
cette vision – il conviendrait de dire ce cauchemar –
d’État moribond, croupion, mort-né tel qu’envisagé pourrait
obtenir de son occupant – merci pour tant de magnanimité – son
drapeau et son hymne national. Merveilleuse bienveillance… sauf
qu’il a déjà l’un et l’autre.
En
revanche, il ne pourra bénéficier d’aucun contrôle sur son
propre espace maritime, ni aérien et devra être démilitarisé.
L’ensemble de ces matières relevant toujours du strict contrôle
des forces israéliennes d’occupation. Quelle aubaine pour les
Palestiniens de pouvoir ainsi compter sur les attentions
protectrices de leur voisin.
Ce futur
État ne pourra pas plus envisager d’alliance avec l’Iran qu’avec
le Hezbollah.
De même,
inutile de revenir sur la Résolution 478 du Conseil de sécurité
dénonçant l'annexion de Jérusalem-Est lors de la
guerre de 1967 comme violation du droit international,
la ville sainte étant une fois encore et pour toutes –
comprenez, pour l’éternité – déclarée indivisible et sous
souveraineté… du peuple élu.
Dans la
foulée, le Droit au retour des innombrables réfugiés –
Résolution 194 de l’ONU – est lui aussi une nouvelle fois,
exclu. Tout comme le gel – illusoire – de l’extension des
colonies… malgré l’insistance de la Maison Banche sur la
question.
Sans
oublier, l’inévitable rengaine de la reconnaissance par
l’Autorité palestinienne, du caractère juif de l’État d’Israël… etc, etc…
Bref,
cette vision cauchemardesque, résulte manifestement de la
perpétuation d’une mentalité s’apparentant vraiment à ce qui se
pratiquait de pire sous le régime de l’apartheid en Afrique du
Sud, mais condamné alors par l’ensemble des nations, alors
qu’elle semble cette fois, encensée par nos éminences. Ce
patchwork de villages épars, divisés, écartelés, emprisonnés
entre les colonies tentaculaires et leurs murailles de
séparation ressemble à tout sauf à un quelconque État viable,
digne de ce nom.
Il n’est
qu’une condition qui n’ait pas encore été officiellement
adressée aux Palestiniens : un État qui existerait sans le
moindre habitant arabe sur son territoire !
Mais
patience, avec Avigdor Lieberman comme chef d’une diplomatie
israélienne de couleur de plus en plus brune,
dont nos représentants à la probité exemplaire n’hésitent pas à
serrer la main, cela ne saurait tarder
Qu’en
tirer comme perspectives pour le peuple palestinien ?
Que loin
de se rapprocher, l’émergence de leur État semble toujours
promise à de funestes et sordides calculs qui entérinent
d’autant son éloignement.
Que malgré
les pressions de Washington, l’envahisseur israélien mène bien
son jeu et teste les réactions d’un Occident toujours aussi
servile et complaisant.
Que rien,
ab-so-lu-ment rien ne change dans la politique menée par Israël
à l’encontre de son voisin, quels que soient le parti, la
coalition et les responsables à la tête du pays.
Qu’en
marge de ces déclarations péremptoires, la situation dans la
Bande de Gaza – dont presque plus aucun média ne parle – ne
cesse de se dégrader depuis les deux ans que le siège israélien
impose lentement mais sûrement son asphyxie, son agonie à un
peuple à exténué ne survivant que par approvisionnement
clandestin à travers un réseau de galeries souterraines telles
des ratières – mais n’allez surtout pas qualifier cet
enfermement inhumain de camp d’extermination, vous seriez tout
aussi tôt méprisé, voire traité d’antisémite.
Que pour
maquiller ce qui n’est finalement qu’une énième déclaration
hostile et méprisante au peuple palestinien, le 1er
ministre israélien a sournoisement détourné l’attention de la
communauté internationale sur le résultat contestable des
élections iraniennes et des menaces qui en résultent.
Et que
face à ce qui n’est qu’une série de dictats imposés par
l’occupant, et l’engouement honteux que ceux-ci semblent avoir
suscités auprès des dirigeants de nos pays toujours enclins à
envisager le rehaussement de l’UE avec cet État profondément
raciste, les Palestiniens devront se rappeler, encore et
toujours, qu’ils ne peuvent vraiment compter que sur eux-mêmes
pour résister à leur brutale occupation.
Il ne
faudra pas s’étonner que lorsque quelque désespéré n’ayant plus
rien à perdre, se radicalisera et se révoltera violemment face à
cet état de choses, nos médias et nos grands penseurs – aux
petites idées – ne résisteront pas à stigmatiser ces
Palestiniens décidément incorrigibles et définitivement
terroristes.
Comme déjà
écrit à plusieurs reprises, tant au travers d’articles que de
livres, la situation des Palestiniens, loin
de s’améliorer, n’a de cesse de se détériorer, jour après jour,
dans une indifférence quasi générale.
Qu’en
tirer comme conclusion, sinon que depuis les décennies d’efforts
et de sacrifices consentis par la population opprimée de
Palestine pour aboutir à une solution équilibrée, aucun progrès
ne semble à l’ordre du jour du côté israélien ? Aucune
concession sérieuse, aucune réelle ouverture, pas le moindre
sens d’une élémentaire justice. Que du contraire, puisque son
étreinte sur les territoires palestiniens se fait de plus en
plus cruelle, violente et odieuse et que le nombre de victimes
augmente quotidiennement.
Dès lors,
et avant que le pire n’advienne, n’est-il pas temps de conclure
que les accords de partage de la Palestine pour l’établissement
de ces deux États vivant côte à côte tels que décidés en 1947 ne
sont manifestement pas viables et définitivement caduques ?
Et d’avoir
enfin le courage politique de les revoir de fond en comble avec
cette fois, la présence des premiers intéressés – c'est-à-dire
les Palestiniens dont on veut confisquer une part importante du
territoire – autour de la table…
Daniel
Vanhove
Observateur civil
Membre du
Mouvement Citoyen Palestine
Co-auteur
de Retour de Palestine – 2002 – aux Ed. Vista
Auteur de
Si vous détruisez nos maisons, vous ne détruirez pas nos âmes
– 2005
et de
La Démocratie Mensonge
– 2008 – parus aux Ed. Marco Pietteur – coll. Oser Dire
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