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Cirepal
Sayyid
Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hizbullah:
« Nous avons empêché l'exécution du plan américain au Liban
»
Sayyid hassan Nasrallah
4 janvier 2008
Dans
une longue interview accordée à la chaîne NBN, le secrétaire général
du Hizbullah a longuement décrit la situation libanaise en la
rattachant à la situation régionale et internationale. Nous
traduisons ici une partie de cette interview. Nous avons mis entre
parenthèses les explications nécessaires à la compréhension de
certains passages, et avons résumé certains autres.
Le
plan américain
Question :
Les gens sont de plus en plus perdus, au Liban, ils ne savent plus
qui croire, ne savent plus quel est le fond du problème. Est-ce
que l’opposition a manqué dans sa tâche d’éclaircir la
situation ?
Sayyid
Nasrullah : Concernant le projet américain, nous avons
toujours besoin de rappeler aux gens, ce que soit au public du
(groupe du) 14 mars (les partis du pouvoir, nommé également 14 février),
à l’ensemble du peuple libanais et tous les peuples de la région,
qui suivent l’évolution de la situation et des événements au
Liban, pour faire connaître la réalité de ce qui se déroule au
Liban. Le projet américain au Liban fait partie du projet américain
dans la région. Au Liban, tels que nous le voyons, il signifie
quatre points qu’il nous faut connaître au moment où nous lui
faisons face. Ces points sont :
1 –
L’administration américaine veut qu’il y ait au Liban un
pouvoir qui lui soit inféodé, qui exécute ses ordres et réalise
ses objectifs dans la région. Ce qui veut dire que si les
Etats-Unis souhaitent y avoir des bases (militaires), ce pouvoir
leur faciliteront la tâche, comme ce qui existe dans les Etats de
la région. Mais s’il y a un pouvoir qui refuse la présence de
ces bases américaines au Liban, il sera un obstacle au projet américain.
Par conséquent, s’il y a des forces politiques ayant une
dimension nationale, qui font passer les intérêts nationaux
avant les intérêts américains et qui ne sont pas prêts à être
les outils du projet américain, elles n’ont aucune place dans
ce pouvoir.
2 – Le
projet américain au Liban est dépourvu de toute résistance, ni
le Hizbullah, ni autre que le Hizbullah. Quiconque pense affronter
les ambitions israéliennes et les agressions israéliennes, sa présence
sera interdite au Liban, que ce soit au niveau de la pensée, de
la culture ou des armes.
3 –
L’installation définitive des Palestiniens, non pas pour résoudre
la dimension humaine, mais pour liquider le droit au retour, pour
supprimer la question palestinienne au profit de l’entité
sioniste.
4 –
Utilisation du Liban pour faire pression sur la Syrie, exercer un
chantage sur ce pays et le pousser à se plier aux exigences des
Etats-Unis, au niveau régional, au niveau du règlement global et
au niveau du projet du nouveau moyen-orient.
La preuve de
ce que j’avance :
1 – la résolution
1559 qui stipule l’élection d’un président sans intervention
étrangère, sauf américaine, ce qui signifie que les Etats-Unis
veulent recomposer le pouvoir qui lui est inféodé, c’est
pourquoi les Américains ont refusé de donner un délai, même
deux mois, pour légiférer sur une nouvelle loi électorale, ils
ont insisté sur la date des élections (législatives) parce que
George Bush avait déclaré qu’il fallait que les élections
aient lieu avant telle date, et c’est pourquoi ils ont accepté
une loi électorale dont ils disaient qu’elle est injuste et non
équitable, l’ayant même nommé la loi de Ghazi Kanaan
(renseignements syriens), car ils étaient pressés de mener ces
élections, et d’être un pouvoir qui réalise ce but.
2 – Désarmer
la résistance sous le prétexte de désarmer les milices.
3 – La
question palestinienne devant conduire à l’installation définitve
(tawtîn).
4 – La
pratique depuis deux ou trois ans, en ce qui concerne l’attitude
envers la Syrie. Personne au Liban ne souhaite que la Syrie dirige
ou administre le Liban, ce sont les Libanais qui doivent
administrer le Liban, ni la Syrie ni les Etats-Unis, ni la France,
ni l’Arabie Saoudite, ni l’Iran, ni personne. Mais il n’est
pas de l’intérêt du Liban qu’il devienne un ennemi ou un
adversaire de la Syrie, mais dès le début, cela est allé dans
cette direction.
C’est le
projet américain qui se résume en : pouvoir inféodé, pas
de résistance au Liban, pas de forces nationales refusant de
prendre le train du projet américain, et il y a des forces
nationales autres que le Hizbullah qui refusent et insistent à
mettre en avant l’intérêt national, qui refusent
l’installation définitive des Palestiniens, bien que certains
présentent cette question dans sa dimension religieuse, soit
l’augmentation du nombre des musulmans par rapport au chrétiens,
ou dans le cadre confessionnel, l’augmentation des sunnites par
rapport aux autres musulmans. Nous considérons, par contre,
qu’il s’agit d’une liquidation du droit au retour en préalable
de la liquidation de la question palestinienne. Car l’un des nœuds
les plus complexes posés dans les négociations palestino-israéliennes
est celui du droit au retour. Les Américains agissent pour réaliser
ce but, soit par leurs activités politiques soit par les
assassinats qu’ils commettent, selon mon explication et mon
analyse, et je suis prêt à discuter de ce sujet, ces assassinats
derrière lesquels se trouve, le plus probablement, Israël, ou
soit par la guerre de juillet (2006) et toutes les pratiques des
Etats-Unis.
En face, la résistance,
dans sa dimension militaire ou l’opposition nationale dans sa
dimension politique intérieure, mènent une lutte non pas contre
ce courant ou ce parti appartenant au 14 mars, mais contre George
Bush qui déclare suffoquer, ces jours-ci, et contre
l’administration américaine, avec Abrams, Welsh, Condolizza
Rice, et contre le projet américain qu’ils veulent imposer aux
Libanais. C’est notre vision, nous devons l’expliquer et la
clarifier. Les forces de l’opposition en sont conscientes, mais
pour les forces du 14 mars, une partie est convaincue du projet américain,
considérant que c’est pour l’intérêt du Liban, et une autre
partie n’écoute pas, d’autres ont déjà écrit leur réponse
à cette interview avant même d’en connaître le contenu, ou
des communiqués d’insultes…
Le
gouvernement d’union nationale
Question :
les forces du pouvoir affirment que l’opposition ne veulent pas
l’Etat tel qu’il est conçu ?
Sayyid Hassan
Nasrullah : Ceci n’est pas vrai, la preuve étant qu’en
2005, lors des élections électorales, bien que nous n’étions
pas convaincus de la loi électorale qui a été appliquée, nous
avions accepté d’y participer, et nous n’étions pas
convaincus de la date mais nous y sommes allés car au Liban, le début
correct pour former un nouveau pouvoir part des élections législatives.
Si les élections avaient eu lieu selon une loi électorale
correcte, les résultats des élections auraient été sains, et
le pouvoir aurait été sain également, mais nous avions accepté
cela car nous voulons qu’il y ait un pouvoir au Liban et nous ne
voulons pas le vide, notamment après le départ de la Syrie dont
la présence était voulue au niveau international et arabe. Nous
avions accepté le règlement, comme nous avions accepté
l’accord quadripartite et sommes allés vers les élections au
moment où nous n’étions pas convaincus, ni pour la date, ni
pour la loi électorale, et pour prouver notre sérieux, nous
sommes allés au gouvernement, et c’était la première fois où
nous participions directement. Au début, nous avions soutenus le
gouvernement, mais lorsque nous y sommes rentrés, ce n’était
pas sur la base du tiers garant, nous y avions participé sur la
base d’un accord politique, pour construire un pouvoir et un
Etat et surmonter le vide existant.
Mais lorsque
nous y sommes allés, nous nous sommes aperçus qu’il y a un
projet qui se réalise par le biais du gouvernement et par le
biais du pouvoir, et que nous étions uniquement des témoins
incapables, ne pouvant rien changer ni au niveau politique ni au
niveau administratif et économique.
Au début,
nous sommes allés vers tout ce qui consolide l’Etat et forme le
pouvoir, malgré les dangers, et lorsqu’il y a eu crise
politique, nous sommes allés vers le dialogue, nous avions essayé,
par le dialogue, de régler les questions essentielles en suspens,
mais il y a une partie qui veut réaliser certains objectifs et se
diriger sans les autres partenaires du pays, ce qui a conduit à
la crise politique actuelle.
Question :
est-ce qu’à votre avis, les Etats-Unis ont besoin d’une base
au Liban ?
Sayyid
Nasrullah : Les Américains ont besoin de bases n’importe où,
car cela fait partie des priorités du projet américain, surtout
après l’effondrement de l’Union soviétique, ils ont besoin
d’une présence directe dans la région, ils ont besoin de tenir
le pouvoir au Liban, les appareils sécuritaires et l’armée.
C’est le projet réel pour que le Liban soit soumis à la
politique américaine, qu’il fasse la concorde avec Israël,
mette fin à l’état de résistance, installe définitivement
les Palestiniens et que le Liban devienne un outil du projet américain
dans la région.
….
Question :
Est-ce que l’accord de Taëf manque d’un mécanisme pour régler
les dissensions entre les Libanais ?
Sayyid Hassan
Nasrullah : Cela exige de longues discussions, est-ce que le
problème se situe au niveau des mécanismes ? Je ne le crois
pas, le problème est qu’il y a un groupe au pouvoir qui veut
s’en accaparer et qui refuse la participation de l’autre
partie. C’est pourquoi nous considérons que ceux qui disent que
le tiers garant, ou annulateur ou qui fait tomber le gouvernement
soit, accorder le tiers du gouvernement à l’opposition est un
suicide politique, que c’est étrange. Dans tous les Etats du
monde, lorsqu’il y a une crise interne, ou aux lendemains
d’une guerre, ou dans le cadre de défis au niveau régional, ou
international, ces Etats forment un gouvernement d’union
nationale. Mais ici, au Liban, le gouvernement d’union nationale
devient un suicide politique. Certains parlent de suicide
politique, d’autres disent que cela est impossible et non
envisageable, pendant qu’un troisième parle de cadavres…..
Aujourd’hui, le problème réel, c’est que le principe de la
participation, soit le tiers garant, veut dire que l’opposition
devient associée dans la formation du pouvoir et dans
l’administration du pays, cela veut dire qu’il n’y aura pas
d’installation définitive des Palestiniens (tawtîn).
Question :
est-il possible qu’ils dipalident le pays à ce point ?
Sayyid Hassan
Nasrullah : Oui, et lors de la guerre de juillet (2006), ils
l’ont fait : est-ce qu’il y a un Libanais qui demande aux
Etats-Unis qu’Israël déclenche une guerre contre le Liban,
qu’il détruite des régions entières ?
Question :
En êtes-vous certains ?
Sayyid
Nasrullah : Oui, nous en sommes certains et j’en fais
serment. La pratique au cours de la guerre confirme les
accusations que nous portons. S’il y a une opposition, un tiers
garant, cela veut dure qu’il y a un effort libanais officiel
pour traiter les dossiers en suspens avec la Syrie, et de ce fait,
ne pas utiliser le Liban pour la guerre et les pressions sur la
Syrie. S’il y a une opposition et un tiers garant, cela signifie
que la question de la résistance se traite dans le cadre d’une
stratégie de défense nationale qui consolide la force du Liban
et non sur la base de la suppression de la résistance pour le
profit d’Israël. S’il y a une opposition et un tiers garant,
cela signifie qu’il y a une politique économique nationale non
soumise aux conditions du Fonds monéraire international et de la
Banque mondiale. S’il y a une opposition et un tiers garant,
cela signifie qu’il y a des institutions militaires et sécuritaires
nationales et non une armée et des appareils sécuritaires refondées
et dont l’idéologie est refondée pour être, en fin de compte,
des appareils de renseignements au service du FBI et de la CIA.
C’est cela, le tiers garant.
Ils nous
voulaient comme décor
Question :
Vous étiez au pouvoir. Pourquoi n’êtes-vous pas restés et
gardé le tiers garant ?
Sayyid
Nasrullah : Il est d’abord important de rappeler que
lorsque nous sommes entrés au gouvernement, il n’y avait aucune
discussion sur le tiers garant, et nous ne sommes intervenus ni
par une part, ni dans des négociations menées par le parti
al-Mustaqbal (Harîrî) avec le courant national libre (Aoun), ni
dans les négociations entre le président (gouvernement) Sanioura
et le président (république) Lahoud autour du nombre des
ministres…. Amal et le Hizbullah sont entrés au gouvernement
sur la base d’un accord politique qui avait commencé avant les
élections législatives. Ils ont rompu cet accord. De quoi
parlait-il ? Un accord politique sur les armes de la résistance
et sur la participation. Ce furent les points essentiels….
Mais lorsque
nous entrés au gouvernement, les questions essentielles n’étaient
plus discutées, ni dans le cadre de l’alliance quadripartite
des partis, ni dans le gouvenement. Par exemple, la question de
l’énergie, qui est un des principaux dossiers du pays (eau, électricité et
pétrole). Le ministre de l’énergie est l’un des nôtres, il
découvre que le chef du gouvernement a constitué un groupe de
travail qui met les plans, les programmes et les politiques dépendant
du ministère de l’énergie, sans qu’il en soit au courant,
alors qu’il avait également constitué un groupe de travail.
Les ministres de Amal et du Hizbullah découvrent aussi que le
plan économique et financier du gouvernement était prêt, sans
qu’ils ne soient consultés. L’équipe de la majorité avait même
fait un plan pour l’agriculture, alors que le ministre de
l’agriculture n’était pas au courant. Pour la question de la
sécurité, il a été décidé, et le texte a été montré par
le ministre Fneish qu’il sera constitué un bureau de
renseignements avec la présence d’officiers internationaux, ce
bureau aura pour tâche le contrôle des appareils sécuritaires
libanais et la discussion de ses plans, de ses programmes, de son
développement, de son équipement et financement. Au temps des
Syriens, cela n’existait pas !.... Il s’est donc avéré
que nous étions là pour le décor, afin de dire que toutes les
confessions sont représentées dans le gouvernement, et c’est
pourquoi nous avons préféré le quitter.
Nous ne
leur accorderons pas la légitimité de gouverner seuls
Question :
il leur reste un an et demi au pouvoir. Pourquoi ne pas les
laisser gouverner jusqu’aux prochaines élections électorales ?
Sayyid
Nasrullah : S’ils gouvernent pendant un an et demi sans
l’opposition, ce sera un grave danger sur le liban… Le problème
n’est pas dans la présidence de la république, que ce soit
Michel Sulayman ou Michel Aoun, la situation sera la même et
sans le tiers garant, le général Aoun ne pourra rien faire non
plus. Vous dites que la situation antérieure était stable, oui,
parce que le Liban, pendant 15 ans, a été tenu par un ordre régional
et international. Maintenant, on nous dit : vous les
Libanais, réglez vos problèmes vous-mêmes, quelle que soit
l’intervention américaine ou étrangère.
Nous nous sommes retrouvés confrontés aux problèmes réels,
lors de notre présence au gouvernement… Il y a un groupe qui
emmène le pays vers une voie dangereuse… Et je m’adresse aux
Libanais, leur disant : la question est posée, est-ce que
nous les laissons gouverner encore, est-ce que nous leur
facilitons la tâche, par notre générosité ?
L’opposition a facilité beaucoup de choses, à tel point que la
base reproche beaucoup et je comprends ce reproche, mais c’est
un autre problème. On nous dit : pourquoi insistez-vous sur
le tiers garant, laissez élire le général Sulayman, qu’ils
forment leur gouvernement, et dans un an et demi, ce seront les élections
législatives. De mon point de vie, s’ils prennent le pouvoir
sans faire participer l’opposition avec le tiers garant, et quel
que soit le président de la république, cela constituera un
danger sur le pays, dans différents domaines : politique,
jurisique, économique, et même sécuritaire. Cela exige évidemment
quelques explications.
Nous savons
que le gouvernement fait la loi électorale. Qu’est-ce qui nous
garantit que ce gouvernement que nous allons laisser gouverner
pendant un an et demi, ne reviendra pas avec la nouvelle loi électorale,
renouvelant la crise pour quatre ans supplémentaires ? La
majorité veut une loi électorale qui lui permette de revenir,
elle fera une loi lui garantissant la majorité au parlement, pour
quatre ans.
Pour la
question économique, les lois qui seront appliquées pendant un
an et demi comportent de graves dangers pour les paysans, les
industriels, la main d’œuvre et les fonctionnaires de l’Etat,
avec l’augmentation des impôts et des taxes. Le programme économique
de ce gouvernement est la conséquence de la conférence de Paris
3, et les conditions du Fonds monétaire international. La présence
de l’opposition au gouvernement avec le tiers garant limite les
effets de ce plan. Concernant la sécurité, en un an et demi, les
appareils sécuritaires et l’armée seront recomposés et reformés
de manière à constituer un danger sur le pays. Même si nous
avons confiance dans la présence de Michel Sulayman à la présidence,
le gouvernement, dans sa majorité écrasante (sans tiers garant),
peut prendre des décisions relatives aux appareils sécuritaires
et militaires, et si le président n’est pas d’accord, il sera
isolé comme l’a été le président Emile Lahoud, le
gouvernement pourra prendre des décisions concernant la
refondation de l’appareil judiciaire. Il peut le faire en un an
et demi. Ils peuvent organiser l’Etat pour garantir leurs
propres intérêts et les intérêts de ceux qui sont derrière
eux…
De notre côté,
nous considérons le gouvernement actuel comme illégal, et ce
qu’il fait est illégal. Cela est très dangereux, mais reste
beaucoup moins dangereux que si nous leur remettons le pouvoir,
car quand nous leur remettons le pouvoir, nous reconnaissons son
caractère constitutionnel, légal, ce qui veut dire que nous lui
donnons la possibilité de gouverner le pays d’une manière très
dangereuse, et je ne parle pas ici du parti, car ils ne peuvent
rien faire à ce niveau, mais il s’agit du pays en entier ;
la situation actuelle reste beaucoup moins dangereuse que si le
gouvernement gouverne sans opposition et sans tiers garant.
Par ailleurs,
nous étions prêts à agir si jamais le pouvoir avait procédé
à l’élection du président avec la formule de la moitié + 1
(nombre de députés, et non des deux tiers comme le réclame
l’opposition et des députés de la majorité). Mais la période
des fêtes est venue, nous avons donné le temps aux négociations.
Nous avons la patience, nous avons attendu jusqu’à la fin de la
période des fêtes. A notre avis, la médiation française
n’est pas finie, malgré les déclarations de Sarkozy, et des
efforts arabes sont en cours. Nous attendons de voir si ces médiations
amèneront quelque chose de nouveau. Si ces médiations s’achèvent,
et si le gouvernement persiste à vouloir exercer les
responsabilités de la présidence, et s’il n’y a plus rien à
l’horizon, nous prendrons le temps, une semaine ou dix jours,
pour la consultation et la discussion entre les forces de
l’opposition pour trancher. Qu’allons-nous faire ?
Aujourd’hui, je ne peux rien dire, le parti n’est pas le seul
dans l’opposition. Ce qu’adoptera la direction de
l’opposition sera annoncé, sera fixé et par conséquent, mis
en route. Mais que l’Mais que l’opposition garde son silence
et ne bouge pas ? Non, si l’opposition est calme, c’est
parce qu’il y a des médiations, et nous tenons à donner une
chance à ces médiations.
Question :
Nous avions déjà entendu cela il y a un an. Les forces du
pouvoir affirment que votre capacité ne va pas au-delà ce ce qui
est, puisque vous ne déclarez que la guerre interne est interdite ?
Sayyid
Nasrullah : J’affirme une fois encore qu’il s’agit
d’un point de force pour l’opposition, cela montre son honnêteté,
elle ne veut ni guerre civile ni guerre interne, elle tient à la
paix civile, à la stabilité… En réalité, c’est ce souci
qui a empêché l’opposition à aller vers l’avant, et les médiations
étaient encore actives. Nous avons attendu jusqu’aux élections
présidentielles. L’opposition a offert de grandes facilités,
comme l’initiative du président (de l’assemblée nationale)
Nabih Berri, où elle a abandonné sa condition de formation
d’un gouvernement d’unité nationale avant les élections présidentielles.
Question :
et pourquoi n’a-t-il pas élu ?
Sayyid
Nasrullah : parce qu’ils disent nous voulons un président
qui forme son propre gouvernement, et non un gouvernement d’unité
nationale, ils ont pris une partie de la proposition et ont laissé
l’autre, qui est aussi important que le premier. Il y aura un président
s’il y a un gouvernement d’unité nationale, c’est ce qui résoudra
le problème au Liban.
Ils ont arrêté
le dialogue interne, ne voulant pas discuter avec le général
Aoun, qui représente l’opposition. Quand ils discutaient avec
Nabih Berri, représentant l’opposition, ils disaient que le chrétien
dans l’opposition n’était qu’une annexe, et quand Nabih
Berri a remis la responsabilité des négociations au général
Aoun, ils ont dit qu’il est un outil utilisé par l’opposition
et ont refusé de poursuivre les négociations avec lui. Il y a un
problème de moralité au Liban : ils ont arrêté les négociations
internes, les médiations arabes ont été arrêtées, et aussi
les médiations internationales. Alors, l’opposition est
contrainte de prendre des mesures, des moyens civils et légaux,
pour y faire face.
La position
syrienne
Question :
qu’en est-il de la Syrie ? Est-ce que la communauté
internationale souhaite ou non l’intervention de la Syrie au
Liban ?
Sayyid
Nasrullah : une grande pression était exercée sur la Syrie
pour qu’elle n’intervienne pas, elle était accusée
d’intervenir, et aujourd’hui, il y a une demande de la
communauté internationale pour qu’elle intervienne. Tantôt, on
veut punir la Syrie parce qu’elle intervient au Liban et tantôt,
il lui est demandé d’intervenir. Cela montre d’abord l’échec
de la politique américaine, qui voulait décider seule au Liban.
Qu’est-il demandé de la Syrie ? Ils lui demandent de faire
pression sur l’opposition pour que cette dernière abandonne sa
revendication naturelle et logique, concernant le gouvernement
d’unité nationale et la loi électorale. Les Européens sont
intervenus, à plusieurs reprises, et notamment le président
Sarkozy. Les Français ont voulu alléché la Syrie par plusieurs
propositions : les relations normales avec la Syrie, les
relations euro-syriennes. Mais les dernières paroles du président
Sarkozy, menaçant au sujet du tribunal international, signifient
la politique de la menace aux côtés de la promesse.
En tant
qu’opposition libanaise, il faudrait témoigner devant
l’histoire : la Syrie qui a un intérêt certain dans la
reprise des relations syro-françaises, et la reprise des
relations arabo-syriennes, qui a un intérêt certain dans la
reprise des relations syro-européennes, et éloigner la menace
d’un tribunal qui la vise. Si la Syrie veut considérer ses
propres intérêts, elle fait pression sur l’opposition, lui
parlant d’intérêts régionaux. Mais, en fin de compte, est-ce
que la Syrie peut exercer une pression ? Est-ce que
l’opposition se soumet à une telle pression ? Elle le peut
et l’opposition peut la refuser, mais les Syriens sont venus et
ont discuté avec l’opposition, nous disant que les propositions
sont telles et telles, qu’acceptez-vous et que refusez-vous ?
En tant qu’opposition, nous avons dit, nous acceptons tel et tel
points, ce dont nous parlons aujourd’hui. Ce que nous
recherchons, c’est l’intérêt du Liban, un Liban indépendant
et libre, non soumis à l’administration américaine, un Liban
qui refuse la guerre civile. Nous avons accepté l’élection
d’un président de concorde, mais accompagnée d’un groupe de
revendications, qui sont le gouvernement d’unité nationale, etc…
La
Syrie a mis en avant les intérêts de l’opposition nationale
libanaise avant ses propres intérêts, prouvant qu’il s’agit
d’une relation de respect et non de dépendance, car l’intérêt
de la Syrie était de faire passer toute proposition, au détriment
de l’opposition, afin de récupérer sa situation régionale et
internationale, remettant à plus tard la question du Liban. Il y
a de fortes pressions actuelles sur la Syrie, des menaces contre
elle, une résolution du conseil de sécurité, ou ce dont a parlé
Sarkozy, aucun président ne parle ainsi. Malgré tout, la Syrie
n’a aucunement fait pression sur nous. Elle a les moyens de le
faire, elle peut fermer les frontières, etc… mais elle a considéré
que son rôle n’est pas de faire pression, mais de discuter avec
l’opposition, car la décision est finalement celle de
l’opposition.
Question :
comment le problème syro-saoudien sera résolu ?
Sayyid
Nasrullah : La réconciliation syro-saoudienne aidera à résoudre
la crise libanaise, mais c’est surtout le facteur américain qui
est principal, ce ne sont ni le facteur syrien, ni le facteur
saoudien. Ce sont surtout les Etats-Unis qui empêchent une
entente entre les Libanais.
Pas de
victoire décisive, mais nous avons empêché l’application du
plan américain
Avant de clore
le dossier interne, une conclusion :
Ni le pouvoir
ni l’opposition n’ont remporté de victoire décisive ou subi
de défaite décisive, même si certains du pouvoir considèrent
que donner le tiers garant à l’opposition signifie une victoire
de celle-ci. Nous ne recherchons pas de victoire morale ou
politique, nous recherchons une solution sérieuse à la crise
actuelle du Liban, qui ne peut être résolue que par la
participation.
Mais d’autre
part, je voudrai m’adresser au peuple libanais, et plus spécifiquement
au public de l’opposition : la chose dangereuse qui devait
être accomplie au cours de ces trois dernières années, nous
l’avons empêchée dans une grande mesure, le projet américain,
qui menace le Liban. Au cours de ces trois années, ce projet
n’a pu voir le jour, la résistance est toujours là, elle était
visée par le projet américain et la résolution 1559, la résistance
a été ciblée pour l’isoler politique, elle a été visée
pendant la guerre de juillet, qui était une guerre à cent pour
cent américaine, et par décision américaine.
Ensuite, il
n’y a aucune chance, à cause de la présence d’une opposition
forte, pour exécuter le plan de l’installation définitive des
Palestiniens, qui sera appliqué s’ils prennent le pouvoir,
selon un marchandage précis : nous vous accordons 40
milliards de dollars, et peut-être maintenant 60 milliards de
dollars, donnez la nationalité à 250.000 Palestiniens, et
trouvons une solution pour les 50.000 autres. Ils considèrent
cette question à partir du salut national. Troisième point,
l’opposition a empêché que le Liban devienne une partie du
camp américain, jusqu’à présent. Est-ce que nous pouvons donc
affirmer que les Etats-Unis ont échoué à réaliser leur projet ?
Oui, il a échoué, et c’est la réalisation de l’opposition.
Mais
l’opposition n’a pas réalisé son objectif, parce qu’elle
est en situation défensive. Le problème n’est pas les forces
du 14 février (14 mars, les deux sont utilisés, ce sont les
forces du pouvoir), car l’opposition mène une lutte politique
mondiale, comme la résistance a mené au cours de la guerre de
juillet une guerre mondiale. Il y a une guerre mondiale (menée
par) les Etats-Unis et la communauté internationale qui veulent
imposer une formule précise sur les Libanais.
….
Nahr
el-Bared et les plans de liquidation du droit au retour des réfugiés
Question :
est-ce que vous craignez une autre (guerre) de Nahr el-Bared, au
Liban ?
Sayyid
Nasrullah : Je suis inquiet au sujet de la situation dans les
camps. Dans quel sens ? Dans celui où l’ensemble de la
question de la (présence) palestinienne est en discussion, et par
conséquent, nous ne pouvons pas dire que le sujet est loin de
tout projet dans la région. Je ne parle pas selon la logique
d’un complot, mais je dis qu’il y a un effort concernant le
sujet palestinien dont ils veulent finir, ils veulent finir avec
le conflit israélo-palestinien. Le problème essentiel est celui
des réfugiés, et le projet de l’installation définitive des
Palestiniens au Liban est un projet très sérieux, très très sérieux,
et je possède des indices et des éléments.
Le problème,
c’est si on fait intervenir dans des conflits les camps
palestiniens, à l’intérieur des camps ou avec son entourage,
ou avec l’armée libanaise, par le biais de groupes inflitrés
ici ou là. Je n’aborde pas ce problème pour faire peur, mais
pour dire aux organisations palestiniennes, celles de l’OLP ou
de l’alliance, aux habitants des camps et de l’entourage, à
l’Etat libanais et à l’armée libanaise : le dossier
palestinien, le dossier des camps, doit être notre souci à tous,
afin qu’on ne soit pas entraîné vers l’erreur.
Question :
vous aviez considéré à l’époque que le camp est une ligne
rouge. L’armée a cependant réussi à dominer et à trancher le
conflit ?
Sayyid
Nasrullah : A quel prix ? Des pertes importantes, pour
l’armée et les Palestiniens. Il y avait une possibilité de régler
le problème sans payer ce prix et c’est ce que nous cherchions.
Jusqu’à présent, les conséquences de Nahr el-Bared ne sont
pas finies, ni ses conséquences humaines et sociales, la
souffrance des habitants du camp de Nahr el-Bared, qui s’en aperçoit ?
Mais également les souffrances des soldats qui ont offert tous
ces grands sacrifices, et les conséquences sécuritaires. Qui a
dit que ce dossier est clos ? Il était possible de régler
cette question avec moins de coût, et tout ce que nous avions
voulu dire à l’époque, était notre souci envers l’armée et
envers les palestiniens, et le peuple palestinien dans les camps,
c’est ce qui nous a fait dire que c’est une ligne rouge.
Une autre
guerre israélienne ?
Question :
est-ce qu’Israël peut lancer une attaque, à partir du rapport
de la knesset disant que son armée a été impuissante ?
Sayyid
Nasrullah : Du point de vue théorique, tout est possible,
mais dans les faits, un mois, deux, trois, quatre ou cinq, cela
exige une longue discussion. Les Israéliens parlent de guerre,
Ashkinazî parle de la guerre prochaine contre le Liban qui serait
victorieuse, mais aussi Ehud Barak. Les manœuvres menées dans la
région nord, mais aussi les manœuvres partielles qui se mènent
toutes les semaines, certains Libanais n’en entendent pas
parler. Les Israéliens font également l’effort de recomposer
leur armée, tous ces faits disent, et c’est normal vu sa nature
agressive et expansionniste, qu’il pense à reprendre une guerre
un jour ou l’autre, mais quand ? On ne le sait pas. De
plus, ce n’est pas une question locale ou régionale. Est-ce que
la guerre de juillet avait des considérations israélo-libanaises ?
Non, elle était essentiellement américaine, et sa décision américaine.
Par conséquent, les Etats-Unis peuvent donner l’ordre à tout
moment à une attaque. Nous, par contre, nous sommes concernés en
étant attentifs, à nous y préparer, à ne pas dormir sur l’idée
que les israéliens ne feront rien. Nous faisons en sorte d’empêcher
la guerre, et le moyen de l’empêcher consiste à s’y préparer,
soit dire aux Israéliens que nous sommes prêts. Quand nous
disons aux Israéliens que nous sommes capables de toucher tout
point en Palestine occupée, nous ne faisons pas seulement de la
guerre psychologique, mais nous disons : la guerre coûtera
très cher. Ils ont dit beaucoup de choses pendant la guerre, nous
n’avions pas répondu, mais aujourd’hui, tout se dévoile avec
les enquêtes, comme lorsqu’ils ont dit, au début de la guerre,
qu’ils avaient touché la capacité de lancement des fusées du
Hizbullah, ce n’était pas vrai. Actuellement, les officiers supérieurs
reconnaissent qu’ils avaient prétendu faussement avoir remporté
une victoire au début de la guerre. Donc, nous nous préparons
tous les jours, pour empêcher la guerre, mais si elle est déclenchée,
nous y sommes prêts.
Question :
qu’en sera-t-il des résolutions internationales ?
Sayyid
Nasrullah : Que ceux qui les violent en supportent les conséquences.
Nous de notre côté, nous ne déclencherons pas la guerre. Nous
serons critiqués, comme nous sommes critiqués quand nous disons
que nous ne voulons pas déclencher une guerre, ou critiqués
quand nous disons que nous ferons la guerre. Cela nous est égal,
nous assumerons notre responsabilité et défendrons notre pays et
sa dignité. Nous ne voulons pas la guerre, mais si elle est déclenchée,
nous défendrons notre pays.
Question :
Vous vous défendrez ou bien laisserez ce soin à l’UNIFIL et à
l’armée libanaise ?
Sayyid
Nasrullah : L’UNIFIL n’est pas dans une position de défendre
le pays, d’ailleurs il ne considère pas que telle est sa
mission. Ils écrivent des rapports, comme sur les violations aériennes
actuelles. Quant à l’armée libanaise, toute seule, (elle en
est incapable), elle a besoin de toutes les forces, sécuritaires,
résistance populaire, etc..
Personne ne
peut imposer quoi que ce soit à l’opposition
Question :
quelle est votre position aujourd’hui ?
Sayyid
Nasrullah : Si le monde entier se coalise pour imposer quoi
que ce soit à l’opposition, comme en juillet 2006, qui ne soit
pas de l’intérêt du Liban, ils ne peuvent l’imposer à
l’opposition. Le monde entier, le conseil de sécurité, les
Etats-Unis, la France, tous les Arabes, l’Iran et la Syrie,
l’opposition est solide et certaine de ses droits, elle a
confiance dans sa base populaire et dans sa force, et n’a peur
de rien, sauf de Dieu. Ses revendications sont justes, modestes,
elle ne veut supprimer personne. De ce fait, la menace de faire
intervenir le conseil de sécurité, ou les décisions
internationales, ne change rien. Nous n’affronterons pas pire
que ce qui est arrivé en juillet 2006.
Pour les
Libanais, nous leur disons que malgré la situation difficile,
nous n’abandonnerons pas le pays pour ce qui est pire et plus
dangereux. Les Libanais doivent savoir que malgré la situation
que nous vivons, nous sommes en meilleure situation que la
Palestine, que l’Irak, que l’Afghanistan, et même si nous
comparons notre situation à celle du Pakistan, si nous voulons
comparer notre situation à celle de tous les lieux où les
Etats-Unis sont intervenus et voulu prendre en main les affaires.
Jusqu’à présent, l’opposition a réussi à diriger la crise
politique et le conflit politique avec le moindre dégât.
Question :
Où en est-on quant au problème des prisonniers ?
Sayyid
Nasrullah : Nous sommes toujours en négociations, il est
possible d’avoir des surprises positives ou négatives. Après
l’échange partiel qui a eu lieu, nous faisions des pas de façon
positive et avancée, mais il semble qu’il y ait eu intervention
sur la ligne. Vous êtes au courant des cris émis par certains :
que faites-vous ? Vous négociez avec le Hizbullah et leur
accordez une victoire. J’ai personnellement insisté pour tempérer
cette question, et c’est une réalisation partielle et limitée,
mais plus d’une voix se sont élevées, alors que le dossier était
en cours. Mais nous avons été surpris plus tard par la lenteur
des négociations. Elles sont toujours là, mais certaines choses
positives qui étaient fixées ont été remises en cause par les
Israéliens.
Question :
pourquoi ? Est-ce sous la pression des Américains ?
Sayyid
Nasrullah : Je n’ai pas d’explications claire, mais ce
que je peux dire, c’est qu’à un moment, nous avons senti que
les Israéliens étaient sérieux, mais aujourd’hui, nous
sentons qu’ils ne sont pas intéressés, ni d’avoir des
renseignements sur les soldats, ni sur autre chose, car nous avons
des parties de corps de soldats. Nous voulons proposé, lors des négociations,
de les remettre, mais la partie israélienne n’était pas intéressée,
sachant qu’auparavant, tout a été négocié, comme lors de
l’opération d’Ansariyyé. Dans tous les cas, tout est
possible, les négociations sont en cours, et il est possible que
d’ici quelques semaines, des résultats apparaissent pour savoir
si les négociations auront des conséquences positives ou négatives.
Traduction Cirepal (Centre d'Information sur
la Résistance en Palestine)
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