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L'EXPRESSIONDZ.COM
NO I CAN'T ! DIXIT OBAMA
La Terre palestinienne en peau de
chagrin
Chems Eddine
Chitour
Lundi 13 décembre 2010
«Il était une fois un loup qui se servait
chaque nuit dans la bergerie en dévorant 4 ou 5 agneaux: ´´ça
peut pas continuer comme ça´´, lui dit le berger, je ne vais
bientôt plus avoir de moutons! ´´Négocions sur le nombre
d’agneaux que tu pourras prélever sans dommages pour moi´´.
´´D’accord´´, dit le loup, mais je continue à en dévorer 4 ou 5
en attendant de parvenir à un accord´´. Six mois plus tard, les
négociations continuaient, mais plus de moutons.»
Parabole
du loup et des moutons
Mardi 7 septembre 2010, un jour à marquer
d’une pierre noire dans l’histoire. Pour la première fois l’hyperpuissance
américaine, selon le mot d’Hubert Védrine ancien ministre
français des Affaires étrangères, met un genou à terre non pas
devant un adversaire qui lui est supérieur mais devant un petit
Etat, petit par le nombre, mais à l’évidence, assez puissant
pour faire plier les Etats-Unis, pour les faire reculer sur le
dossier de la colonisation des terres palestiniennes.
Crispian Balmer de l’agence Reuters écrit: «Comme ses
prédécesseurs, le président américain Barack Obama semble
s’être, à son tour, cassé les dents sur le conflit du
Proche-Orient qui perdure depuis plus de 60 ans. Son incapacité
à obtenir une reprise sous égide américaine du dialogue direct
entre Israéliens et Palestiniens, met fin à l’illusion qu’il
pourrait être réglé d’un coup de baguette magique - qui plus est
dans un délai d’un an. Ce dernier épisode voué à l’échec de la
diplomatie proche-orientale, remonte au mois de septembre,
lorsque Barack Obama a jugé possible d’obtenir un règlement
global au terme d’un an de rencontres directes entre les deux
camps. Les Etats-Unis ont formulé une série d’offres à Israël
pour le convaincre de prolonger de trois mois ce moratoire, dont
la livraison de 20 chasseurs F-35 d’une valeur globale de trois
milliards de dollars. Le secret espoir de Washington était qu’en
90 jours les deux parties feraient assez de progrès sur la
question des frontières de la future Palestine pour rendre la
question des colonies superfétatoire. Yasser Abd Rabbo, un
proche collaborateur du président palestinien, Mahmoud Abbas, en
est arrivé à se demander si les Etats-Unis, censés être le
médiateur le mieux placé entre les deux camps, pourront jamais
arracher un règlement. Si Washington est incapable d’obtenir de
l’Etat juif un arrêt de la colonisation «pour une période
limitée», comment pourrait-il «faire accepter par Israël une
solution équilibrée fondée sur les résolutions internationales
et une solution à deux Etats?», s’est-il interrogé».(1)
«L’erreur d’obama»
Mieux encore, les Israéliens renvoient aux calendes grecques un
règlement éventuel: «On ne doit pas présumer ou supposer que
nous sommes la génération qui résoudra le problème ou parviendra
à mener à bien les négociations», souligne Daniel Reisner,
membre de l’équipe de négociateurs israéliens. (...) «Tant qu’il
n’y a pas de conséquences en termes de maintien du statu quo,
pourquoi diable quiconque attendrait que quelque chose de
différent se produise?», se demande Daniel Levy.»(1)
Pour leur part, les colons israéliens exultent.
«L’administration Obama a fini par comprendre que le soutien
qu’elle avait apporté à la précondition posée par les
Palestiniens, n’était pas justifié... et que c’était une erreur
politique», explique Dany Dayan, président de Yesha, la
principale organisation de colons israéliens.. (...) La question
centrale étant aujourd’hui celle de l’alternative aux
négociations: les Palestiniens vont-ils se tourner vers les
Etats-Unis et l’ONU pour demander une reconnaissance
internationale de leur Etat dans les frontières de 1967?
Conscients de leur faiblesse, les Etats-Unis affirment qu’ils
n’abandonnent pas la partie mais changent de tactique. «Ce n’est
pas un «changement de stratégie» mais «il pourrait s’agir d’un
changement de tactique», selon les mots du porte-parole du
département d’Etat américain, Philip Crowley. (...) Evoquant
également l’attente d’une potentielle «nouvelle voie pour
avancer dans le processus de paix au Proche-Orient», le
quotidien de gauche israélien Haaretz est plus définitif quant
aux raisons de cette «impasse» sur un gel des nouvelles
constructions. Selon les informations divulguées par un
diplomate israélien, anonyme lui aussi, l’Etat hébreu «est
arrivé à la conclusion que ce n’était pas le moment de faire des
négociations directes en renouvelant le moratoire». (...) Pour
l’analyste politique d’Al Jazeera Marouan Bishar, l’incapacité
américaine est «humiliante pour une administration déjà
affaiblie». «Même si les diplomates parlent d’un retour aux
discussions indirectes -appelées aussi discussions de proximité
-, c’est trop petit et ça arrive trop tard. (...) Les Etats-Unis
sont obligés de s’en remettre au Quartette (...). Israël est
peut-être une question américaine, mais la Palestine occupée est
la responsabilité de toute la communauté internationale qui l’a
trop longtemps abandonnée», poursuit-il. Même constat pour le
président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas qui, en
déplacement en Grèce, en appelle à l’Union européenne pour
régler cette énième «situation de crise».(2)
On apprend qu’au total, ce sont quelque 150 pays qui
maintiennent des relations diplomatiques avec la Palestine sous
une forme ou une autre. La Palestine détient un statut
d’observateur à l’ONU et le président américain Barack Obama a
indiqué en septembre dernier qu’il espérait qu’elle devienne
membre de plein droit en 2011. Le négociateur palestinien Saëb
Erakat a déclaré le mois dernier à Tanger (Maroc) que si les
Etats-Unis n’arrivaient pas à imposer à Israël l’arrêt de la
colonisation, les Palestiniens pourraient leur demander la
«reconnaissance de l’Etat de Palestine dans ses frontières de
1967». Obama disait le 24 septembre 2010 espérer un Etat
palestinien d’ici un an.(3)
Cependant, il ne faut pas que les Palestiniens proclament un
Etat! «Pour Yossi Shain, directeur de la faculté de diplomatie
de l’université de Tel-Aviv, Washington est mal placé pour ce
faire et risquerait s’il essayait et échouait de perdre encore
un peu plus de son crédit diplomatique. De même, il ne pense pas
que les Palestiniens mettront à exécution leur menace de tenter
de forcer la main d’Israël en essayant d’obtenir la
reconnaissance de l’indépendance de la Palestine aux Nations
unies. Les Palestiniens ne proclameront jamais leur
indépendance» parce que non seulement Israël y est complètement
hostile mais aussi que «les Américains ne permettront pas car il
ne veulent pas le chaos», prédit Yossi Shain. Le plus probable,
c’est que le statu quo ne va pas évoluer sensiblement dans un
avenir proche, du moins en surface.
Si les Américains se plient aux exigences de Netanyahu, c’est
parce qu’Israël est redevenu une carte essentielle dans leur
politique moyen-orientale. Hazem Sahgieh nous explique
l’arrogance d’Israël par le fait que c’est Washington qui a
besoin d’Israël...«Il n’est pas exagéré écrit-il, de penser que
les modalités des futures négociations de Washington seront
conformes aux désirs du Premier ministre israélien, Benyamin
Netanyahu, même si le passé récent a pu faire penser que le
président Barack Obama aurait souhaité qu’il en aille autrement.
Ce triomphe des volontés israéliennes s’explique par des
facteurs qui relèvent de la vie politique américaine: l’approche
des élections de mi-mandat en novembre prochain, mais aussi la
conduite d’une guerre compliquée et coûteuse en Afghanistan, le
retrait des troupes d’Irak et l’aggravation de la crise
économique. Le tout dans le contexte d’une opposition acharnée
des républicains contre les réformes d’Obama. Cela n’explique
pas tout. D’autres éléments, liés à d’autres facteurs, sont à
prendre en considération. Les Israéliens, dont les dirigeants
actuels oscillent entre la vantardise et une approche totalement
sécuritaire, ont réussi à constituer une citadelle unie et prête
à toute éventualité. Ils ont obtenu l’arrêt des tirs de
roquettes du Hamas sur le front sud et la résolution 1701 de la
part du Conseil de sécurité, qui prend en charge la surveillance
du front nord [face au Hezbollah libanais], d’une stabilité
exemplaire (à peine perturbée par un accrochage frontalier, le 3
août 2010). Et cela tranche avec le spectacle de déliquescence
offert par les Palestiniens, de plus en plus divisés entre la
Cisjordanie et Ghaza. Mais le plus important réside ailleurs.
S’il est vrai que le retrait d’Irak est un préambule nécessaire
pour préparer une intervention contre l’Iran, cela veut dire que
les Américains ont davantage besoin des Israéliens que les
Israéliens des Américains.»(4)
Contrairement à ce qui se passe quand il s’agit de mettre à
genou un pays faible, il y a un silence inquiétant de la
communauté internationale s’agissant de l’échec américain à
faire entendre raison à Israël.
Le Conseil de sécurité est en vacances au complet, Russie et
Chine comprises. Quant aux Nations unies, Ban Ki-moon est aux
abonnés absents. Quant aux pays arabes tétanisés par l’arrogance
d’Israël, impuissants, ils regardent ailleurs, surveillant leurs
peuples. Tout au plus, l’Union européenne s’est fendue d’un
communiqué sans lendemain: «Nous constatons avec regret que les
Israéliens n’ont pas été en mesure d’accepter une prolongation
du moratoire comme le demandaient l’Union européenne, les
Etats-Unis et le Quartette» sur le Proche-Orient, a pour sa part
souligné la porte-parole de la chef de la diplomatie de l’UE,
Catherine Ashton, dans une déclaration envoyée à l’AFP. C’est
bien le lobby pro-israélien qui dirige la politique américaine;
le droit est bafoué une fois de plus...Cet aveu de faiblesse
justifie et justifiera hélas! tous les extrémismes...On dit que
depuis l’attaque du Liberty, en 1967, les États-Unis obéissent à
Israël.
Et maintenant ?
Avec les vetos systématiques des Etats-Unis qui autorisent tous
les excès pour Israël, l’indifférence de la communauté
internationale, la lâcheté des pays arabes, du fait de leur
faiblesse militaire, les Palestiniens sont-ils condamnés à
mourir? Le droit est clair pourtant...Rappelons pour les
amnésiques occidentaux la ´´Résolution 471 du 30/06/80»: Le
Conseil de sécurité réaffirme la nécessité impérieuse de mettre
fin à l’occupation prolongée des territoires arabes occupés par
Israël en 1967, y compris Jérusalem».
Un éditorial du journal le Monde nous paraît indiqué, car après
une analyse lucide de la morgue israélienne, rapporte quelques
propositions faites par des ténors de la politique aux
Etats-Unis. Nous lisons: «(...) L’Amérique, dont Israël dépend
largement pour sa sécurité, ne veut pas être davantage humiliée.
Pour obtenir ce geste de M.Netanyahu, les Etats-Unis avaient
offert à Jérusalem des contreparties substantielles. M.Nétanyahu,
qui dirige un gouvernement de droite, a dit non. Il préfère les
implantations. Il a profité de la victoire des républicains aux
élections de mi-mandat pour renforcer ses positions au Congrès
des Etats-Unis. Il sait jouer des aléas de la politique
américaine. Sans l’arrêt de la colonisation, il n’y a pas de
Palestiniens à la table de négociations. (...) On ne discute pas
partage territorial - les frontières d’un Etat palestinien - si
la surface à découper continue à être modifiée au profit
d’Israël pendant les négociations. M.Obama doit changer
d’approche. Comme le lui suggèrent nombre d’anciens responsables
américains - Warren Christopher, Zbigniew Brzezinski, Henry
Kissinger, rien de moins -, il doit brusquer les choses, forcer
le destin, placer chacun face à ses responsabilités.»(5)
L’analyse va plus loin: «Washington doit mettre un plan sur la
table: tracé des frontières, échange de territoires, s’il le
faut; arrangement sur Jérusalem; règlement politico-financier de
la question des réfugiés palestiniens; dispositifs de sécurité
pour empêcher que le futur Etat palestinien ne se transforme en
base de tir de missiles contre Israël. Pareil document aurait le
mérite de fixer les grandes lignes de la négociation. Le tracé
des frontières réglerait, a priori, la question des
implantations: interdites ici, permises dans la partie revenant
à Israël. Passé un certain délai, le plan pourrait être soumis
au Conseil de sécurité de l’ONU. Cela lui conférerait une
légitimité de nature à l’imposer.»(5)
La situation israélo-palestinienne révèle au grand jour les
limites des atermoiements de toute la communauté internationale.
La colonisation est un acte en violation totale du droit
international. A partir de là, quelles seront les lois qui
régiront la paix au Proche Orient? Celles du plus fort? Israël
dit être le seul à vouloir vraiment négocier, être prêt à mettre
toutes les questions sur la table, même celle des frontières,
mais comment négocier sur des frontières alors que pendant que
nous parlons, les Israéliens tentent de grappiller autant de
terrain (et d’eau) que possible. Pendant ce temps, les
Palestiniens ne peuvent ni acheter ni louer en Israël, ils
peuvent par contre, vendre leur terre. On apprend à ce propos,
qu’Amnesty International a condamné mardi 7 décembre un document
religieux signé par plusieurs dizaines de grands rabbins
municipaux d’Israël, qui interdit la location et la vente de
logements aux non-juifs. «la Torah interdit de vendre à un
étranger une maison ou un champ de la terre d’Israël».
Les Etats-Unis envisageraient un retour à des discussions de
paix indirectes entre Israéliens et Palestiniens. Hillary
Clinton presse les deux parties de négocier. A ce rythme et si
on fait crédit à la Parabole du Loup et du berger, il n’y aura,
pour les Palestiniens, plus rien à négocier. Sur la Palestine
historique, il ne reste presque rien, moins d’un cinquième (18%)
à négocier. De négociations en capitulations, l’Occident a
réussi à problématiser l’existence d’un peuple sous le regard
indifférent des potentats arabes rivés à leurs fauteuils.
Pourtant, c’est toute la communauté internationale qui se doit
de défendre les droits des Palestiniens qui sont aussi, des
hommes avec leurs souffrances, leur détresse et leurs espoirs
comme le dissident chinois dont on défend les droits avec un
acharnement suspect.
1.Crispian Balmer: Obama se casse les dents sur le conflit du
Proche-Orient, Reuters 8.12.2010
2.Les Américains ´´affaiblis´´ sur la question de la
colonisation israélienne. Le Monde.fr 8.12.2010
3.Proche-Orient: l’échec d’ Obama sur le gel de la colonisation
08 Décembre 2010
4.Hazem Sahgieh: C’est Washington qui a besoin d’Israël, Al
Hayat 02.09.2010
5.Editorial Proche-Orient: Washington doit changer de cap, Le
Monde 10.12.2010
Pr Chems Eddine Chitour,
Ecole nationale polytechnique
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Publié le 13 décembre 2010 avec l'aimable autorisation de l'Expression
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