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L'EXPRESSIONDZ.COM

L'ATTAQUE DE L'IRAN
Une 3e guerre mondiale se prépare
Pr Chems Eddine Chitour


George Bush

6 décembre 2007

Une escalade politique, diplomatique et médiatique sans précédent est attendue contre ce pays et son programme nucléaire.

«Pour nous unir, nous avons besoin d’un ennemi commun», disait récemment Condoleezza Rice. Et comment y arriver? Voici la réponse de David Rockefeller, (dirigeant d’Esso, de la Chase Manhattan Bank, mais aussi du tout-puissant Council for Foreign Relations où le gratin des industriels et politiciens de la planète élabore la stratégie générale pour diriger le monde): «Nous sommes à la veille d’une transformation globale. Tout ce dont nous avons besoin est la bonne crise majeure, et les nations vont accepter le Nouvel ordre mondial.» Nous y voilà! Une attaque de l’Iran serait le prélude à une troisième guerre mondiale que les faucons de l’administration américaine appellent de leurs voeux. Abd Al-Bari Atwan, directeur du quotidien nationaliste panarabe Al-Quds Al-Arabi, énumérait en septembre dernier, neuf indices tendant à prouver qu’une guerre va avoir lieu au cours des six prochains mois. Ecoutons le: «Après l’été, les affaires sérieuses redémarrent. La diplomatie occidentale se remet en branle, et tout indique qu’elle se focalisera à nouveau sur le Moyen-Orient. Dans les mois à venir, le point de fixation sera l’Iran, prochaine cible des Américains. Nous devons nous attendre à une escalade politique, diplomatique, médiatique et militaire sans précédent contre ce pays et son programme nucléaire. Car le temps qui reste au président George Bush est désormais compté pour traiter ce dossier».(1)

Dix indices

Premier indice: pour parler du danger nucléaire iranien, George Bush a utilisé les termes d’´´holocauste nucléaire´´, avertissant ainsi clairement Téhéran de ne pas aller plus avant dans son programme d’enrichissement d’uranium, comme s’il voulait à la fois accentuer la menace contre l’Iran et préparer l’opinion publique américaine, voire internationale, à l’éventualité d’un usage d’armes nucléaires américaines contre ce pays.
Un deuxième indice est relatif à la position du nouveau président français, Nicolas Sarkozy, qui commence à occuper la place laissée vacante par Tony Blair, à savoir celle du meilleur allié de Washington. Il a donc abandonné la ligne chiraquienne au profit d’une américanisation de ses positions à propos du Moyen-Orient.(1)
Comme troisième indice: Le journaliste américain Seymour Hersh a affirmé devant un groupe de confrères français rencontrés il y a quelques semaines à Paris qu’il avait appris de la part de sources à la Maison-Blanche que la décision de frappes contre l’Iran avait déjà été prise, que le dernier mot dans ce dossier revenait désormais au camp proche du vice-président, Dick Cheney, et que le ministre de la Défense, Robert Gates, présenterait prochainement sa démission en raison des conséquences catastrophiques auxquelles il s’attend en cas de guerre.
Quatrième indice: un des vice-secrétaires d’Etat américains, Nicholas Burns, a expliqué à Roger Cohen, du New York Times, que la plupart des pays sunnites de la région considèrent l’Iran comme un trublion soutenant le terrorisme et comme une menace pour la stabilité régionale.
Cinquième indice: les Etats-Unis ont fait inscrire les gardiens de la révolution iraniens [les pasdarans] sur la liste internationale des organisations terroristes.
Sixième indice: l’Arabie Saoudite a signé un contrat d’un montant estimé à quelque 5 milliards de dollars avec une société américaine pour entraîner et équiper quelque 35.000 hommes chargés de protéger ses installations pétrolières. L’Iran, en revanche, aurait les moyens de les attaquer avec un avion suicide ou avec ses missiles Shihab.
Septième indice: la précipitation avec laquelle Washington prépare une conférence internationale de paix, prévue pour l’automne, et presse Mahmoud Abbas et Ehud Olmert de se rencontrer pour annoncer un accord de principe. Huitième indice: le soudain revirement de George Bush au sujet du Premier ministre irakien, Nouri Al-Maliki. Après avoir laissé entendre qu’il souhaitait sa démission, il lui a ensuite délivré un satisfecit. L’explication la plus plausible de ce changement est que les plans concernant l’Iran ont été accélérés et que l’administration américaine estime ne plus avoir assez de temps pour provoquer un changement gouvernemental en Irak.
Neuvième indice: le tout récent retrait des troupes britanniques de Bassorah, qui signifie, d’une part, que la Grande-Bretagne est désormais convaincue que la victoire en Irak est impossible, d’autre part, qu’elle souhaite soustraire ses troupes au risque de représailles iraniennes en cas de frappes aériennes américaines. Face aux deux défaites en Irak et en Afghanistan, Bush estime que la seule possibilité qui lui reste pour sauver sa présidence et préserver les chances de son parti aux prochaines élections consiste à tenter le tout pour le tout, c’est-à-dire à attaquer l’Iran.(1)
On pourrait ajouter un dixième indice. Dans une de ses dernières interventions en octobre dernier, le président Bush a carrément parlé d’une troisième guerre mondiale si l’Iran n’était pas désarmé. Pourtant, la Russie, par la voix de son vice-ministre russe des Affaires étrangères, Alexandre Lossioukov, il n’existe aucune solution militaire au problème iranien «On a l’impression, dit-il, que plus l’Iran coopère avec l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), plus cela irrite Washington, comme cela avait été le cas à l’époque avec l’Irak». Même la France, jadis si modérée, en rajoute: La crise du nucléaire iranien impose de «se préparer au pire», selon Bernard Kouchner, le va-t-en guerre sans frontière. Mieux encore, le président français évoque la possibilité de bombarder l’Iran si on ne veut pas accepter la bombe iranienne.
Pour rappel, Mohamed El Baradei avait lancé un appel au calme après les déclarations controversées du ministre des Affaires étrangères français, Bernard Kouchner, qui évoquait, la veille, une possible «guerre» contre l’Iran. «Je demanderai à tout le monde de ne pas se laisser emporter avant que nous ne soyons arrivé au bout de la procédure. [...] Laissez-nous-la en main et nous verrons où nous en serons en novembre», a-t-il lancé à l’adresse des Occidentaux.
Le diplomate égyptien, Prix Nobel de la paix 2005, est l’objet de vives critiques depuis qu’il a dévoilé, fin août, un ultime «plan d’action» négocié avec la République islamique, qui prévoit, en échange de concessions, que l’Iran apporte d’ici novembre des précisions sur l’ensemble de son programme nucléaire clandestin depuis 1985. Les critiques à l’encontre d’El Baradei sont très virulentes (le Washington Post est allé jusqu’à le qualifier de «contrôleur voyou»).(2)
Il n’est pas étonnant dans ces conditions que le rapport favorable de l’AIEA en octobre 2007, soit accueilli avec une certaine froideur parce qu’il parle de coopération avec l’Iran et qu’il n’incite pas à la guerre. On comprend sans peine pourquoi El Baradei est dans le collimateur des Israéliens qui exigent son départ. Javier Solana, le représentant de l’Europe pour les Affaires étrangères, s’est déclaré pour la première fois déçu par le manque de coopération de Téhéran suite aux discussions qu’il a eues avec le représentant de l’Iran. De son côté, l’Iran n’arrête pas de déclarer que son programme nucléaire est civil. Elle multiplie, cependant, les déclarations pour une riposte éventuelle et elle annonce, après la mise en place des 3000 centrifugeuses, la réalisation pour la première fois du combustible enrichi pour ses centrales.(3).
Pourquoi l’Iran est-elle la prochaine cible? Parce que ce pays possède des réserves pétrolières importantes, parce que c’est la principale puissance de la région refusant de se soumettre à Israël, parce que les récents efforts pour faire capituler Téhéran ont échoué. Attaquer l’Iran vise en réalité à contrôler l’ensemble du pétrole du Moyen-Orient, comme de la planète, d’ailleurs. Pour permettre aux USA d’exercer un chantage sur l’approvisionnement pétrolier des rivaux: Europe, Japon, Chine. Qui veut dominer le monde, doit contrôler toutes ses sources d’énergie. On sait que l’Iran a de robustes capacités militaires comme cela a été démontré pendant les manoeuvres militaires d’août 2006. Les bases iraniennes disposent de stations radar sophistiquées de détection avancée, de fabrication russe, de lance-missiles anti-aériens, de missiles longue distance Fajr et de missiles Shahab, d’aires de lancement de missiles de croisière dispersées le long des frontières iraniennes, de sous-marins et de bateaux lanceurs de missiles qui pourraient facilement toucher un porte-avions et bloquer le détroit d’Hormuz; et enfin l’Iran est équipé de 14 terrains d’aviation militaires sophistiqués de fabrication russe et de chasseurs iraniens. Il a déjà été dit que l’Iran a produit des avions sans pilote avec un rayon d’action de 700 kilomètres et qui sont indétectables par des radars.
L’Iran est en train d’ajouter à sa puissance aérienne 250 avions multimodes russes à longue portée, les Sukhoi-30, qui peuvent aussi bien servir de patrouilleurs aériens de défense, pour des attaques au sol ou des combats aériens. L’arme iranienne la plus redoutée et la plus efficace est le sizzler. La marine américaine n’a aucune certitude que son système Aegis est capable de détecter, dépister et arrêter ce sizzler. Cependant, l’Iran est fort dans le sens qu’il ne peut pas être envahi facilement, mais il ne peut pas faire grand-chose contre des bombardements sur une longue période, accompagnés de menaces nucléaires.

Trois raisons

Tous les ingrédients idéologiques pour attaquer l’Iran sont en place. Indépendamment de l’alibi de soutien au terrorisme et du programme nucléaire, trois autres raisons sont à citer. On sait que la Russie et l’Iran avaient pensé lancer une Opep du gaz le 9 avril 2007 pour parer le contrôle américain de l’Opep du pétrole.
C’est une raison possible. Deux autres raisons expliqueraient cette attaque: d’abord la décision de l’Iran de vendre son pétrole en euros, ce qui affaiblit le dollar -comme l’avait tenté Saddam Hussein six mois avant l’invasion de l’Iran- et aussi et surtout la «prétendue menace» de l’Iran sur Israël qui, on l’aura compris, sera le seul bénéficiaire de la destruction de l’Iran. Témoignant devant la commission sénatoriale sur les relations avec l’étranger en février dernier, Zbigniew Brzezinski, conseiller à la sécurité nationale dans le gouvernement du président Jimmy Carter, a émis une critique acerbe de la guerre en Irak et averti que la politique de l’administration Bush menait inexorablement à la guerre avec l’Iran, avec des conséquences incalculables pour l’impérialisme américain au Moyen-Orient et internationalement. «Argumenter, dit-il, que les Etats-Unis sont déjà en guerre dans la région contre une menace islamique plus large, dont l’Iran est l’épicentre, consiste à faire la promotion d’une prophétie dont on provoque la réalisation.» Ce qui est encore plus étonnant et inquiétant, c’est sa description d’un «scénario plausible de conflit militaire avec l’Iran.» Cela impliquerait, a-t-il suggéré, «le fait pour l’Irak de ne pas atteindre les objectifs fixés, suivi d’accusations sur la responsabilité de l’Iran dans cet échec, puis, enfin, par une provocation en Irak ou par un attentat terroriste aux Etats-Unis attribué à l’Iran, culminant en une opération militaire "défensive" des Etats-Unis contre l’Iran qui plonge une Amérique solitaire dans un bourbier toujours plus vaste et plus profond finissant par englober l’Irak, l’Iran, l’Afghanistan et le Pakistan.» Qu’une personnalité comme Brzezinski, qui a des décennies d’expérience aux plus hauts échelons de l’establishment des Affaires étrangères des États-Unis et qui entretient des liens des plus étroits avec l’armée et les services de renseignement, lance une telle mise en garde lors d’une audience publique du Sénat américain, est extrêmement sérieux et significatif.(4).
Silencieusement, écrivait Alain Gresh en juillet, furtivement, à l’abri des caméras, la guerre contre l’Iran a commencé. De nombreuses sources confirment que les Etats-Unis ont intensifié leur aide à plusieurs mouvements armés à base ethnique -Azéris, Baloutches, Arabes, Kurdes, minorités qui, ensemble, représentent environ 40% de la population iranienne-, dans le but de déstabiliser la République islamique. Début avril, la télévision ABC révélait ainsi que le groupe baloutche Jound Al-Islam («Les soldats de l’Islam»), qui venait de mener une attaque contre des gardiens de la révolution (une vingtaine de tués), avait bénéficié d’une assistance secrète américaine. Un rapport de The Century Foundation révèle que des commandos américains opèrent à l’intérieur même de l’Iran depuis l’été 2004. (...) La préoccupation fondamentale de la République islamique est ailleurs, comme le prouve l’accord signé le 14 novembre 2004 avec la «troïka» européenne (France, Royaume-Uni, Allemagne): l’Iran acceptait de suspendre provisoirement l’enrichissement de l’uranium, étant entendu qu’un accord à long terme «fournirait des engagements fermes sur les questions de sécurité». Ces engagements ayant été refusés par Washington, l’Iran reprit son programme d’enrichissement (...) La diabolisation de l’Iran, facilitée par la posture de son président, s’inscrit dans cette stratégie, qui peut déboucher sur une nouvelle aventure militaire. Ce serait une catastrophe, non seulement pour l’Iran et pour le Proche-Orient, mais aussi pour les relations que l’Occident, et en premier lieu, l’Europe, entretient avec cette région du monde.(5)
La situation actuelle est explosive, les croiseurs destroyers et porte-avions américains croisent dans le détroit d’Ormuz. Lors d’une interview sur Fox News, Ron Paul, candidat présidentiel républicain et congressiste du Texas, affirme que la Maison-Blanche utiliserait un incident à la «Golfe du Tonkin» pour lancer une guerre contre l’Iran. Dit autrement, la menace d’une attaque est une option qui est toujours sur la table. L’Occident ne veut pas d’un Iran développé et toutes les manoeuvres visent à freiner le développement de ce pays, pays émergent par excellence et qui dispose de tous les atouts: une civilisation plusieurs fois millénaire, des réserves énergétiques les deuxièmes plus importantes du monde en pétrole et gaz.
Une population jeune, un grand pays et des universités développées. L’affaire du nucléaire est à n’en point douter, l’arbre qui cache la forêt. Il y a trente ans, tout le monde occidental se pressait à Téhéran pour vendre la technologie nucléaire. Il est à espérer que l’Iran ne soit pas un second bourbier pour le monde occidental qui aura là, à n’en point douter, une victoire à la Pyrrhus.(6)

1.Abd Al-Bari Atwan: Pourquoi Washington attaquera Téhéran Courrier international hebdo, n°880-13 sept. 2007
2.Mohamed El Baradei fait cavalier seul sur l’Iran: Courrier international, 17 sept. 2007
3 Dépêche AFP 30 novembre 2007
4.Barry Grey.: La bombe de Zbigniew Brzezinski: Bush cherche un prétexte pour attaquer l’Iran.http://www.legrandsoir.info/article.php3?id_article=4711
5.Alain Gresh.. Compte à rebours Le Monde Diplomatique, juillet 2007
6.C.E.Chitour: De La Perse de Darius à l’Iran d’Ahmadinjad. L’Expression, août 2007.

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Publié le 7 décembre avec l'aimable autorisation de
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Source : L'Expression
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