Libye
Libye: le visage
criminel de l'impérialisme
Bill
Van Auken
Tripoli,
23 août 2011
Mercredi 31 août
2011
L’attaque de l’OTAN contre la Libye
qui a été, dès son début il y a plus de
cinq mois, une guerre impérialiste
criminelle est devenue un exercice
totalement meurtrier avec la traque du
dirigeant libyen Mouammar Kadhafi par
les agents des forces spéciales et du
renseignement.
Dès le début, les principaux
objectifs de cette guerre ont été de
s’emparer du contrôle des réserves
pétrolières de la Libye, les plus vastes
du continent africain, et de faire une
démonstration de force impérialiste dans
le but de réprimer et de détourner les
mouvements de masse populaires qui, il y
a quelques mois seulement, avaient
renversé les régimes de Moubarak en
Egypte et de Ben Ali en Tunisie,
soutenus par les Etats-Unis et l’OTAN,.
L’OTAN a appelé son assaut militaire
« Protection des populations et des
zones civiles » (« Operation United
Protector »), mais il aurait été plus
approprié de le nommer « Opération de
viol collectif impérialiste ». Les
Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la
France et l’Italie, qui poursuivent tous
leurs propres intérêts en Libye et dans
la région en général, ont réussi à
s’unir pour l'objectif commun de «
changement de régime. »
A cette fin, des avions de combat de
l’OTAN ont effectué plus de 20.000
sorties, détruisant des écoles, des
hôpitaux et des logements et abattant un
nombre incalculable de soldats libyens,
nombre d’entre eux de jeunes appelés.
Bafouant les termes de la résolution
des Nations unies autorisant « l’usage
de tous les moyens nécessaires » pour
protéger les civils, les puissances de
l’OTAN, dont les Etats-Unis, la France
et la Grande-Bretagne, ont envoyé des
soldats des forces spéciales, des
mercenaires militaires et des agents du
renseignement engagés par contrat dans
le but d’armer, d’organiser et de
diriger les soi-disant « rebelles » dont
la tâche essentielle était d’attirer les
forces gouvernementales libyennes dans
des combats afin de les éliminer à
l’aide de l’aviation.
La prétention que cette guerre serait
une guerre pour protéger des civils a
été démasquée comme étant une obscénité
morale. Le bilan s’élève rien qu’à
Tripoli à des milliers de morts alors
que les bombes et les missiles de l’OTAN
continuent de s’abattre dans des régions
fortement peuplées.
Pour trouver des parallèles
appropriés il faut se reporter aux
années 1930 où le capitalisme mondial,
tout comme aujourd’hui, était frappé par
une crise économique désespérée. A
l’époque, l’humanité était sidérée par
l’agression sauvage déclenchée par
l’invasion italienne de l’Ethiopie, le
soutien accordé par Hitler aux Allemands
des Sudètes pour découper la
Tchécoslovaquie et le bombardement de
l’Espagne par la Légion Condor allemande
au nom de l’insurrection fasciste de
Franco.
A cette époque, ces actes d’agression
brutaux étaient regardés comme
l’expression de la plongée du
capitalisme mondial dans la barbarie. De
nos jours, des actes identiques en Libye
sont présentés comme étant
l’épanouissement de « l’humanitarisme »
et de la « démocratie. »
A l’époque, le président Franklin
Delano Roosevelt avait fait appel aux
sensibilités démocratiques du peuple
américain – tout en préparant bien sûr
les Etats-Unis à la poursuite de leur
propres objectifs impérialistes –
réclamant une mise en « quarantaine » de
l’agression fasciste.
En 1937 Roosevelt avait déclaré, «
Sans déclaration de guerre et sans
avertissement ou justification d'aucune
sorte, les civils, dont un grand nombre
de femmes et d'enfants, sont
impitoyablement assassinés par des
bombes tombant du ciel… Des pays
fomentent des guerres civiles ou
prennent parti dans ces guerres dans des
pays qui ne leur ont jamais fait de mal.
Des pays réclamant la paix pour
eux-mêmes la refusent aux autres. Des
gens innocents, des nations innocentes,
sont cruellement sacrifiés pour le
pouvoir et la suprématie qui sont
dépourvus de tout sens de justice et de
considération humaine. »
Ces paroles datant d'il y a trois
quarts de siècle se lisent comme un
réquisitoire contre le gouvernement
Obama et les gouvernements de Cameron,
de Sarkozy et de Berlusconi.
Après la Deuxième Guerre mondiale,
les procès de Nuremberg ont défini la
guerre d’agression comme le « crime
international suprême, ne différant des
autres crimes de guerre que du fait
qu’il contient les maux de tous. »
Cette conception avait été incorporée
aux Nations unies qui excluent « de
recourir à la menace ou à l’emploi de la
force, soit contre l’intégrité
territoriale ou l’indépendance politique
de tout Etat. »
Et pourtant, de nos jours, il n’y a
presque pas de critiques au sein de
l’establishment politique contre la
guerre d’agression menée par les alliés
de l’OTAN. La canaille des médias s’est
totalement intégrée à la machine de
guerre impérialiste, marchant, au sens
propre du terme, par dessus les cadavres
et dissimulant les chiens de guerre
occidentaux qui fuient les caméras pour
pouvoir mieux façonner leur propagande
sur la « révolution » et la « libération
» en Libye.
La force motrice derrière la guerre
en Libye est l’impérialisme, ce que
Lénine a judicieusement décrit comme
réactionnaire sur toute la ligne. C’est
une guerre qui a été menée dans les
intérêts prédateurs du capital
financier. Elle est conçue pour produire
ce que la presse économique appelle
généralement une « aubaine » non
seulement pour les principaux groupes
énergétiques mais pour les banques et
les entreprises tout en consolidant, de
plus, les vastes fortunes accumulées par
l’élite dirigeante par le biais de la
spéculation financière, de la réduction
des coûts de la main-d’œuvre en Amérique
et en Europe et de l’exploitation de la
main d’œuvre à bas salaire dans le monde
entier.
Le banditisme international va de
pair avec la criminalité économique et
politique à l'intérieur du pays.
L’agressivité à l’étranger est
inséparable de l’attaque sans merci
contre le niveau de vie et les droits
fondamentaux des grandes masses de la
population laborieuse en Europe, en
Amérique et pratiquement tous les grands
pays. Alors que partout on dit aux
travailleurs qu’il n’y a pas d’argent
pour l’emploi, l’éducation, les soins de
santé, les retraites ou les services
sociaux vitaux, des milliards sont
dépensés pour bombarder et envahir la
Libye sans que soit posée la moindre
question.
Un trait frappant de la guerre en
Libye est la manière dont elle a
mobilisé derrière elle une certaine
couche socio-politique comprenant des
ex-gauchistes de la classe moyenne, des
universitaires libéraux et d'anciens
militants. C’est un processus qui s’est
développé durant plusieurs décennies et
qui s'est accéléré par la démoralisation
d’une section de cette couche dont le «
gauchisme » s’appuyait fortement sur la
bureaucratie stalinienne et qui a
commencé à se disperser avec
l’auto-liquidation de celle-ci. D’autres
s’étaient ralliés à l’intervention
impérialiste dans les Balkans, attirés
alors, comme maintenant, par les fausses
affirmations que les plus grands
agresseurs du monde menaient une guerre
pour les « droits de l’homme. »
Il faudrait être aveugle aujourd’hui
pour ne pas voir le profond changement
qui se produit au sein de cette couche.
L’on y trouve les vauriens
universitaires comme Juan Cole,
professeur d’histoire du Moyen-Orient à
l’université du Michigan qui se sert de
sa réputation de critique de la guerre
du gouvernement Bush contre l’Irak pour
vendre la guerre contre la Libye du
gouvernement Obama.
En Europe, des groupes comme le
Nouveau Parti anticapitaliste (NPA)
français ont utilisé la guerre pour
forger des liens plus étroits avec leurs
propres gouvernements et pour promouvoir
les intérêts de leurs propres élites
dirigeantes. Ils représentent toute une
strate de la classe moyenne privilégiée
qui est recrutée comme la nouvelle
couche de soutien de l’impérialisme.
Leur politique est pour l’essentiel
exactement la même que celle d’Obama et
de la CIA.
La guerre en Libye ne jouit d’aucun
soutien populaire significatif dans
aucun des pays agresseurs. Les
travailleurs soupçonnent instinctivement
que cette guerre, comme celles qui l’ont
précédées, est menée au profit de
l’oligarchie financière et aux dépens
des masses.
La lutte contre la guerre et
l’impérialisme ne peut être victorieuse
que si elle est centrée sur la classe
ouvrière. Le combat contre la guerre et
la lutte contre la destruction des
emplois, du niveau de vie et des droits
fondamentaux sociaux et démocratiques
sont aujourd’hui inséparables. Le
militarisme à l’étranger et la
contre-révolution à l’intérieur du pays
ont des racines objectives communes dans
la crise insoluble du capitalisme
mondial. Tous deux ne peuvent être
vaincus que par la mobilisation
politique et l’unité internationale de
la classe ouvrière en lutte pour le
socialisme.
(Article original paru le 27 août
2011)
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Publié le 31 août avec l'aimable
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