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RIA Novosti
Ahmadinejad
ou l'antisionisme nucléaire
Andreï Kolesnikov

En Iran, dont le programme nucléaire tourmente toute l'humanité
progressiste, a pris fin une conférence "scientifique"
de deux jours organisée par le ministère iranien des Affaires étrangères
dans les murs de l'Institut d'études politiques et
internationales (IPIS) de Téhéran.
Ce rassemblement de deux jours d'antisionistes et d'antisémites,
auquel a même participé l'ex-dirigeant du Ku Klux Klan David
Duke, était intitulé de façon politiquement correcte (autant
qu'il est possible s'agissant de sujets aussi délicats): "L'Holocauste
dans la mémoire transnationale". Le programme de la conférence,
plus précisément les questions soumises à la discussion, ont été
exposées sur le site de l'institut. Par exemple: "Liberté
de parole et situation de ceux qui contestent l'Holocauste en
Occident", "Chambres à gaz: éléments pour et
contre", "Nazisme et sionisme: coopération ou hostilité".
Si l'on fait abstraction de la démagogie à propos de
l'Holocauste en tant "qu'instrument politique" et des
"aspects sombres et clairs du problème", il est évident
qu'il s'agit d'une nouvelle action publicitaire cynique de Mahmoud
Ahmadinejad qui conteste le génocide de 6 millions de Juifs
d'Europe, et même l'existence des chambres à gaz.
Il y a six mois, Mahmoud Ahmadinejad avait déjà organisé une
exposition de caricatures sur l'Holocauste, mais l'aspect
scientifique du problème ne le préoccupait pas. A présent, le
slogan de la révolution de 1979 "Israël doit être rayé de
la carte du monde" réanimé par le président iranien est
enveloppé d'un brouillard quasi-scientifique. Les organisateurs
de la conférence ont appelé à abandonner "les tabous
occidentaux et les restrictions imposées à l'examen de ce problème
en Europe", ils ont nié les accusations d'antisémitisme, en
le qualifiant de phénomène purement occidental, ils ont mentionné
avec une tristesse cynique que la conférence coïncidait avec la
journée des droits de l'homme et ont écouté attentivement les
interventions des rabbins antisionistes ultra-orthodoxes.
Faut-il vraiment s'étonner que les organisateurs de la conférence
n'aient pas cité les noms des 67 participants de 30 pays sans
leur autorisation: il est indécent de contester ce qui a été
prouvé à Nüremberg, et de commettre ainsi un crime du point de
vue de la législation de l'Autriche, de l'Allemagne et de la
France.
Le turcologue Viktor Nadéïne-Raïevski, chercheur de
l'Institut russe d'économie mondiale et de relations
internationales, a participé à la conférence au nom de la
Russie. Il ne figure pas parmi ceux qui contestent l'Holocauste,
mais il n'apprécie pas la politique actuelle d'Israël qui, selon
lui, provoque des réactions antisémites. S'il estime que c'est
une raison suffisante pour participer à cette conférence qui par
définition n'est pas scientifique, s'entretenir avec un membre du
Ku Klux Klan et avec des individus condamnés pour la négation de
l'Holocauste, passer impassiblement devant des photographies représentant
des tas de cadavres, exposées dans le hall et accompagnées
d'indications expliquant qu'il s'agissait des victimes du typhus
et non pas des camps de concentration: Allah le jugera...
On peut dire que le monde est las de vivre sous la menace
permanente d'actes terroristes et d'attaques nucléaires, que la
politique des "atlantistes" et des "sionistes"
ne fait qu'accentuer la sensation de fragilité de la paix et
qu'elle provoque une guerre terroriste. Cela étant, les limites
de l'éthique, de ce qui est permis et des doutes spéculatifs sur
des faits historiques prouvés sont repoussées de plus en plus
loin. Par conséquent, nous devons admettre que n'importe quels
crimes peuvent être justifiés, comme ils sont justifiés par le
leader iranien actuel, joueur global, dont le terrain de jeu est
l'histoire mondiale et la physique nucléaire appliquée.
Mahmoud Ahmadinejad représente un type de leader absolument
nouveau, ce qui vient d'être confirmé par la conférence. C'est
un leader globalement dangereux et insolent qui se trouve
constamment à la limite du supportable. Personne ne sait comment
se conduire avec lui: ni le Département d'Etat américain, ni le
ministère russe des Affaires étrangères. La moindre imprudence
peut provoquer une réaction inadéquate de Mahmoud Ahmadinejad
qui retient le monde entier en otage. D'autre part, on peut
comprendre ceux qui ne veulent plus tolérer sa politique
insidieusement provocatrice. En tout cas, il sait parfaitement ce
qu'il fait en organisant une conférence sur l'Holocauste dans le
contexte de l'apogée de nouvelles discussions que les
gouvernements du monde entier mènent sur le programme nucléaire
iranien. On est en présence d'un antisionisme à l'arrière-goût
nucléaire. Un antisionisme nucléaire à tous les égards.
Un "comité de recherche de faits" sur l'Holocauste a
été institué à la conférence. "Quels nouveaux
"faits" veulent découvrir, publier et présenter de façon
caricaturale les "chercheurs" de 67 pays? Quelle
nouvelle action publicitaire veut lancer Mahmoud Ahmadinejad, ce
leader d'un type nouveau, et quelles paroles adressera-t-il après
la conférence au monde civilisé à des fins provocatrices?
L'opinion de l'auteur peut ne pas coïncider avec celle de la rédaction.
© 2005 RIA
Novosti
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