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Monde arabe

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L’écueil
des questions de fond
Rania Adel
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Palestine.
Palestiniens et Israéliens ont entamé de nouvelles discussions
de paix dans un climat alourdi par les désaccords de fond, que la
récente visite de Bush n’a pu résoudre.

Photo Al-Ahram
Mercredi 16 janvier 2008
Israéliens
et palestiniens ont entamé lundi des négociations de fond, semées
d’embûches, en vue d’un règlement de paix que George W. Bush
espère arracher avant la fin de sa présidence, en janvier 2009.
Mais le premier ministre, Ehud Olmert, s’est d’emblée déclaré
sceptique sur leurs chances d’aboutir. La chef de la diplomatie
israélienne, Tzipi Livni, et le chef de l’équipe des négociateurs
palestiniens, Ahmad Qoreï, ont discuté pendant près de deux
heures à Jérusalem de questions liées à « un règlement
permanent » du conflit.
Les
questions sur lesquelles ont buté toutes les négociations précédentes
portent sur le tracé des frontières d’un futur Etat de
Palestine, le démantèlement de colonies de peuplement, le statut
de Jérusalem et le sort des réfugiés palestiniens de 1948. Or,
sur tous ces dossiers, qui avaient déjà été au cœur du sommet
avorté de Camp David en juillet 2000, l’écart entre les
positions des deux parties reste considérable. De plus, le
gouvernement israélien, qui s’est montré incapable de démanteler
des colonies sauvages construites sans même son feu vert, est
affaibli par les menaces de scission de son aile droite s’il cède
notamment sur Jérusalem.
Dans
ce contexte, le premier ministre, Olmert, s’est déclaré
sceptique sur les chances de succès, a rapporté un haut
responsable israélien. « Je ne suis pas sûr que nous puissions
parvenir à un accord et que nous puissions l’appliquer », a déclaré
M. Olmert, cité devant la commission des affaires étrangères et
de la défense du Parlement.
Côté
palestinien, l’Autorité palestinienne présidée par Mahmoud
Abbass a perdu l’an dernier le contrôle de la bande de Gaza au
profit du mouvement islamiste Hamas, qui ne se considère pas lié
par tout accord de paix qui serait conclu avec Israël. « La
rencontre Qoreï-Livni est vouée à l’échec en raison de la
poursuite des crimes sionistes contre notre peuple », a affirmé
dans un communiqué le porte-parole du Hamas, Sami Abou-Zouhri. Le
président Abbass a pour sa part réaffirmé dimanche que les
Palestiniens ne « pouvaient négocier alors que la colonisation
se poursuit ».
La
rencontre Livni-Qoreï fait suite à la visite du président Bush
en Israël et en Cisjordanie la semaine dernière, au cours de
laquelle il a fixé pour objectif la conclusion, avant la fin de
son mandat en janvier 2009, d’un accord menant à la création
d’un Etat de Palestine aux côtés d’Israël. Les Palestiniens
réclament un retrait israélien de Cisjordanie sur les lignes
d’armistice d’avant la guerre de 1967, n’acceptant que des
« modifications frontalières » minimales dans le cadre d’échanges
territoriaux. Israël exclut en revanche un retour aux frontières
d’avant 1967. Il entend aussi annexer les blocs de colonies de
Cisjordanie, où vivent la grande majorité des 270 000 colons
installés dans ce territoire. Les divergences sont encore plus
nettes sur Jérusalem, à cause de la dimension religieuse du
conflit. Le désaccord est non moins profond sur la question des réfugiés.
Israël refuse d’accepter un « droit de retour » aux réfugiés
palestiniens qui sont plus de 4 millions avec leurs descendants.
Bilan
en demi-teinte
La
visite de Bush n’a pas pu faire avancer les choses. Il a énoncé
des mots et n’a rien dit qui, effectivement, conforte l’idée
de deux Etats vivant côte à côte, égaux et souverains. C’est
la conclusion qu’ont tirée les observateurs de la tournée au
Moyen-Orient du président américain George W. Bush. Les déclarations
du premier ministre israélien Ehud Olmert, dimanche dernier,
confirment aussi ce constat : les Israéliens ne procéderont à
un règlement avec les Palestiniens que si leur sécurité est
garantie.
Rien
n’a donc émané de cette visite, à part les déclarations
diplomatiques dont le but était de redorer le blason du chef américain.
Pour lui, c’était l’occasion de donner l’image d’un président
impliqué dans une affaire qu’il a souvent été accusé
d’avoir négligée jusqu’à la dernière de ses huit années
de présidence. George W. Bush a tracé les grandes lignes d’un
accord de paix entre Israéliens et Palestiniens qu’il espère
voir signé avant la fin de son mandat en janvier 2009. Il a
reconnu qu’un tel accord réclamerait des concessions politiques
douloureuses de part et d’autre. Il a confié au président
palestinien Mahmoud Abbass sa conviction qu’« un traité de
paix » serait conclu avant son départ de la Maison Blanche, dans
un an. Il a aussi promis la création d’un Etat palestinien. Et
d’ajouter qu’Israël devait démanteler ses colonies sauvages
mais aussi avoir des frontières sûres. Les Palestiniens pour
leur part doivent faire cesser les attaques contre l’Etat hébreu.
Néanmoins, il n’a pas dit comment il voyait M. Abbass mettre
fin aux tirs de roquettes sur Israël à partir d’une bande de
Gaza qui échappe au contrôle de l’Autorité palestinienne. M.
Bush a aussi admis que le statut de Jérusalem représenterait «
l’un des défis les plus difficiles sur la route de la paix »,
sans proposer de solution. Et tout en reconnaissant la nécessité
des barrages militaires en Cisjordanie pour assurer la sécurité
d’Israël, Bush a reconnu qu’ils suscitaient des «
frustrations massives » parmi la population palestinienne. Ainsi,
il a proposé pour la première fois un mécanisme international
d’indemnisation pour les réfugiés palestiniens. Il a par
ailleurs minimisé le problème des réfugiés palestiniens, apte
à être résolu grâce à « un mécanisme international
d’indemnisation » pour régler, selon lui, la « querelle » du
retour des réfugiés palestiniens. Le choix même du mot querelle
ne convenant en rien à l’ampleur de cette question : les réfugiés
palestiniens et leurs descendants étant estimés à 4 millions de
personnes.
En
fait, le président américain a prononcé des mots qui
n’engagent en rien le chef de la Maison Blanche ou
l’Administration américaine. Somme toute, la visite de George
W. Bush au Proche-Orient n’aura été qu’un alibi qui
n’apporte aucune ouverture sérieuse à la problématique israélo-palestinienne.
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Hebdo
Publié le 17 janvier 2008 avec l'aimable
autorisation de AL-AHRAM Hebdo

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