Opinion
L'islamité des
révolutions arabes... A l'épreuve
palestinienne !
Akil
Cheikh Hussein
Mardi 20 décembre
2011
On compare
communément les révolutions arabes aux
grandes révolutions dans le monde, de la
révolution française à la révolution
bolchévique. Mais en raison de la grande
emprise occidentale sur les mass médias,
c'est sous la désignation du "printemps
arabe" qu'on se plaît à présenter ces
révolutions qui sont ainsi placées dans
le sillon des événements qui ont été
couronnés par l'effondrement de l'union
soviétique et le pacte de Varsovie.
Seuls les Iraniens
ont dès le début considéré ce qui se
passe dans le monde arabe comme un
réveil islamique. Effectivement, les
Frères musulmans et autres mouvements
islamistes ont gagné les élections
législatives en Tunisie et en Egypte,
les deux pays qui ont, les premiers,
renversé leurs présidents.
Les mouvements
islamistes les ont emportées également
au Maroc et il semble qu'ils ne
tarderont pas à le faire en Jordanie.
Aussitôt, des mass
médias occidentaux et arabes se sont
montrés déçus. Ils ont commencé à parler
de l'"hiver arabe", et ce dans le cadre
d'une campagne organisée qui s'est
focalisée sur des questions sensibles en
liaison avec la vie personnelle, la
liberté de la femme, le mode
vestimentaire islamique, le
fondamentalisme et le terrorisme.
Ils ont ainsi
utilisé un discours hérité du discours
provoquant qui a été utilisé lorsque le
Front Islamique du Salut avait remporté
les élections municipales, puis
législatives, en Algérie à la fin des
années quatre-vingt et au début des
années quatre-vingt-dix.
Ce même discours a
été utilisé après la victoire de Hamas
dans les élections législatives en
Cisjordanie et Gaza. Dans les deux cas,
ces évolutions ont été attaquées par ce
qu'on ne voulait pas permettre à des
mouvements non démocratiques d'accéder
au pouvoir grâce aux moyens
démocratiques.
Mais brusquement, la campagne s'arrête
et on commence à entendre l'expression
"pourquoi pas ?"… les Frères musulmans
jouissent d'une large base populaire…
Pourquoi ne pas reconnaître leur droit
d'accéder au pouvoir ?
Ce changement
d'attitude est intervenu suite à des
informations récurrentes parlant de
rencontres ici et là entre des
dirigeants des Frères et des
responsables et émissaires américains ou
autres. Certaines rumeurs parlent même
de rencontres avec des responsables
israéliens.
L'impact de ces
rencontres a été perceptible au niveau
des premiers communiqués et déclarations
donnés par des dirigeants d'Al-Nahda
tunisien qui ont mis l'accent sur la
tolérance et les libertés personnelles,
évitant ainsi toute référence au
discours de l'application de la Chari'a
particulièrement prioritaire chez les
islamistes.
Il a également été perceptible dans
l'instance du Conseil Militaire Egyptien
à respecter les traités de Camp David et
dans le silence des islamistes égyptiens
à l'encontre de ce genre de propos.
Ainsi que dans les déclarations de
certains Frères syriens sur le sort noir
qu'ils préparent pour le Hezbollah au
Liban, sur les négociations comme voie
unique pour libérer le Golan ou sur la
raison, la sagesse et l'intérêt comme
critères qui devraient présider tout
échange avec l'Occident et l'entité
sioniste.
Au-delà de la
simple suspicion, tout cela justifie
l'inquiétude non seulement pour le sort
des révolutions arabes, mais pour le
sort des peuples arabes, face à ce qui
paraît comme le prélude à une longue
période de chaos et de bouleversements
susceptibles de secouer, en premier, les
mouvements islamistes.
Si certains
dirigeants de ces mouvements avaient
conclu un marché avec les Américains ou
autres, cela signifierait-il que les
masses des islamistes qui ont été
éduqués dans l'esprit du caractère
sacrée de la cause palestinienne, qui
ont toujours espéré prier un jour dans
la Mosquée al-Aqsa, accepteront
facilement le fait de voir leurs
dirigeants serrer la main aux dirigeants
israéliens à la manière de Sadate et de
Moubarak ?
Et après les
mouvements islamistes, l'ensemble des
sociétés arabes : Sont récurrentes -
dans les déclarations des dirigeants
islamistes au sujet des solutions aux
problèmes sociaux dans leurs pays- des
expressions comme les banques
islamiques, les investissements
extérieurs, le Fond Monétaire
international et le secteur touristique.
Et bien sûr la bulle du modèle turc.
Cela trahit leur
manque de visions différentes de celles
qui ont largement contribué à la
destruction des économies des pays
arabes non pétroliers. A l'acception de
la Syrie qui continue, dans une certaine
mesure, à adopter le mode de l'économie
dirigée.
Il est clair
qu'avec ce genre de visions, et au
moment où l'on parle de connivences en
Egypte entre les Frères musulmans et le
Conseil militaire et son gouvernement de
Janzouri, l'ancien combattant au service
de Moubarak, les révolutions arabes ont
encore un long parcours à faire.
N'est-ce pas que les manifestations de
protestations se poursuivent de plus
belle dix mois après la chute des deux
tyrans en Tunisie et en Egypte ?
N'est-ce pas que la répression
sanguinaire bât son plein dans les deux
pays ?
De mouvements
spontanés qui exigent le départ des
régimes corrompus et qui subissent des
tentatives de détournement en raison de
l'insuffisance de la conscience
révolutionnaire, les révolutions arabes
sont appelées à se purifier par
l'approfondissement de leur conscience
des grands événements régionaux et
internationaux qui se déroulent autour
d'elles.
Elles devraient
surtout approfondir leur conscience de
leur identité et ses dimensions
historiques et culturelles qui sont les
seuls à même de rajuster la marche et de
définir les options.
En d'autres termes,
politiques par excellence, les
révolutions arabes ne pourront
s'affirmer sans la relecture approfondie
et consciencieuse de l'Histoire de
Tabari et de Mas'oudi, de la Sira d'Ibn
Hicham et autres Sihah et Sunan… Et ce
après le Livre de Dieu et Nahj al-Balagha.
Avec une telle relecture, on constatera
que les révolutions arabes ne pourront
s'affirmer que dans la mesure où elles
se font le lieu où se fondent leur
arabité, leur islamité et leur fidélité
à la cause palestinienne.
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