Opinion
Syrie : la
catalyse des ruptures
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 30 août
2012
Pour le
commun, il y a incontestablement une
entreprise étatsunienne de mise en coupe
réglée du monde, il n'y a qu'à voir
l'agitation effrénée d'Hillary Clinton
et de ses supplétifs britannique,
français et arabe dominer l'actualité.
Pourtant, cela n'est pas évident pour
tout le monde, notamment au sein des
milieux traditionnellement réactifs aux
événements politiques. A cet égard, ce
que l'opération de l'Alliance atlantique
en Libye a permis d'initier, la
situation en Syrie est en phase de
l'accomplir. Elle est en train de
constituer un catalyseur de toutes les
ruptures au sein des courants admis
comme étant des marxistes
révolutionnaires. Entre
anti-impérialistes et soutiens à la
«révolution syrienne», les clivages ont
atteint le point de non-retour. Au
milieu, un marais de militants
désemparés est ballotté entre les
arguments des uns et des autres. Et ce
n'est pas le flot d'informations des
médias de l'OTAN qui peut aider à se
faire une idée claire des forces en
présence sur le terrain, sauf à prendre
pour argent comptant ce que disent les
grands groupes de presse. C'est-à-dire,
en toute simplicité, qu'il y aurait un
peuple en mouvement contre la dictature
de Bachar Al Assad qui le réprime. Exit
le fait que la moitié des morts soient
des «pro-régime» et l'implication
massive de combattants étrangers. Exit
les manifestations massives des Syriens
en défense de leur pays contre la
volonté d'agression. Un pas est vite
franchi par la majorité de l'extrême
gauche européenne, selon le principe qui
veut que toute contestation populaire
est bonne à prendre contre un pouvoir
considéré comme liberticide,
conformément aux critères de la
démocratie occidentale. Cette attitude
ancrée dans ses certitudes n'est pas
trop perturbée par la formidable machine
de guerre mise en branle par les
Etats-Unis et leurs vassalités
européennes et arabes, principaux
acteurs d'une «révolution»,
«représentée» par un CNS, dont on sait
la composante interlope et le rejet dont
il fait l'objet, y compris par les
bandes armées. La difficulté est tournée
par la dénonciation de l'ingérence
impérialiste (en filigrane) qui sonne
comme un alibi en marge d'un engagement
franc aux côtés de «révolutionnaires»
invisibles et inaudibles, qui ne sont
pas islamistes et qui ne sont pas ces
milliers de miliciens infiltrés par
l'OTAN et par ses dépendances. Ainsi, le
confort intellectuel est assuré puis
conforté par le fait que les
anti-impérialistes sont rejoints par
l'Iran, par le Hezbollah et par des
personnalités qui flirteraient avec
l'extrême-droite nationaliste. A
contrario, le fait de se trouver, en
tant qu'anti-Bachar, dans le même camp
que l'OTAN et les monarchies du Golfe,
ne semble pas déranger la conviction
d'être du bon côté des choses. Pour la
tendance anti-impérialiste, les éléments
mis en jeu sont beaucoup moins
emberlificotés. A aucun moment il n'y a
de caution donnée au pouvoir syrien, qui
de son point de vue ne diffère en rien,
par sa nature, de tous les pouvoirs au
service de l'argent et du marché
mondial. Ce qui rend, de fait, infondée
l'accusation de soutien à Bachar Al
Assad et rend suspectes les attaques
enrobées, qui occultent
l'anti-impérialisme fondateur d'une
opposition à l'ingérence étrangère et
aux atteintes à la souveraineté d'un
pays, sous n'importe quel prétexte et,
encore moins, du fait d'une coalition
impérialiste, dont les objectifs sont,
on ne peut plus, évidents. Ceux de
choisir les gouvernements à la place des
peuples. Une coalition
OTAN/pétromonarchies plus déterminée que
jamais à imposer son diktat.
Article publié sur
Les Débats
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