Opinion
France : quand le
fascisme s'invite
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Jeudi 26 avril
2012
Le fascisme n'est pas fait que de
racisme. On est même loin de ce mythe
utilitaire et de ce schéma à
consommation de masse. Le fascisme est
d'abord et avant tout beaucoup de
populisme, de promesses de justice et de
protection sociale et, aussi, du
racisme, quand la culture de ce
sentiment peut servir. C'est pour cela
que les tentatives de Nicolas Sarkozy de
" copier " les Le Pen, père et fille,
ont toutes lamentablement échoué. En
stigmatisant les minorités " visibles "
le président pensait entrer dans les
bonnes grâces des électeurs FN. Il a
fait tout faux. Les électeurs FN sont en
grande majorité des gens du petit
peuple, des ouvriers, des précaires, des
chômeurs, des vieux et des vieilles, qui
peuvent, le cas échéant, être effrayés
par l'étranger, le nord-africain, le
noir ou le gitan. Mais qui vivent, avant
tout, une situation d'exclusion
socioéconomique et un abandon de l'Etat.
Au Front national, ils trouvent
accessoirement le racisme, mais surtout
la perspective de sortir de la misère et
celle de la sécurité économique. Le
Front National leur offre un Etat fort,
sécurisant et attentif à leurs
souffrances. Le FN se présente comme
l'ennemi déclaré de l'ultralibéralisme
et des diktats de la finance
internationale. Tout juste ce
qu'attendent de lui des électeurs un peu
plus nombreux que d'habitude. Les
ouvriers ont d'ailleurs voté plus pour
Marine Le Pen que pour Jean-Luc
Mélenchon. Des aspects occultés dans les
discours et dans la presse. La candidate
a donc tout à fait raison de se moquer
de "la drague un peu lourdingue" du
président sortant. Sarkozy lors de son
mandat avait déjà orienté son discours
de façon à recentrer sa gouvernance, en
fonction des exigences de la conjoncture
de crise et de faillite budgétaire.
L'objectif étant de modifier le mode de
gestion de la société, afin de se donner
les moyens de gérer efficacement la
montée de la grogne sociale, qui ne
manquera pas de se radicaliser
proportionnellement à la radicalité des
mesures d'austérité projetées. Les
maillons faibles de la société étant
constitués par les minorités, il fut
adopté tout le répertoire de
l'extrême-droite. Marine Le PEN avait
rappelé, à ce propos, que l'original
valait mieux que la copie et elle ne
disait pas tout. En tant que personnel
politique, elle comprend tout à fait que
Sarkozy cherche à se maintenir comme
favori du bloc social dominant contre un
parti concurrent qui n'a plus de
socialiste que le sigle, même s'il
draine, ou parce que, justement, il
draine les illusions sociales. Elle
comprend que la partie se joue à ce
niveau et qu'une grande partie de la
population doit se détacher et du PS et
de l'UMP, sans rejoindre
l'extrême-gauche. Le FN ira alors aux
prochaines législatives en soutenant les
revendications des démunis, en défendant
la souveraineté nationale contre la
dictature des banques et les dérives
atlantistes et en rassurant le capital
national. D'ici là les Français auront
expérimenté François Hollande, qui est
le plus probable gagnant. Ce faisant,
ils auront fait le tour des deux partis
qui se repassent le pouvoir depuis des
décennies. Et Hollande ne sera pas plus
différent que ce qu'aurait été Sarkozy.
Les défections de cadres de l'UPM,
devançant l'appel, en faveur du PS ne
disent pas plus que cela. Comme, en leur
temps, les défections du PS vers Sarkozy
l'ont dit. Reste le degré d'attirance du
Front de gauche et l'éventualité qu'il
soit vécu en tant qu'alternative, malgré
la configuration du champ politique que
semblent imposer les scores électoraux.
Article publié sur
Les Débats
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