Opinion
Le temps des
oracles politiques
Ahmed
Halfaoui

© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 25 décembre
2011
Un sondage
d'opinion ne coûte certainement pas plus
qu'il n'en faut, pour construire de
savants plateaux sur les tendances de
vote qui traversent la population
algérienne. Pourtant, la presse
s'empresse de recourir à des avis de
personnes qu'elle croit habilitées à
prédire des résultats de scrutins, en
économisant la voie royale qui a cours
depuis près d'un siècle. Ces personnes
qui ne savent pas plus que le quidam
anonyme, nourri aux commentaires de la
presse, ou moins que le jeune de
quartier ou de village qui nage dans
l'Algérie réelle, ne se formalisent pas
pour s'ériger, eux-mêmes, en détenteurs
de l'opinion publique, qu'ils ne doivent
pas beaucoup croiser, en dehors de sa
partie confinée dans les cercles étroits
de leur entourage socioculturel. A la
place de l'information, on a alors droit
aux élucubrations hasardeuses
d'individus, dont le moins qu'on puisse
dire est qu'ils n'ont que le label
d'être les coqueluches des médias. Des
sortes de voix supérieures pour ne pas
dire des oracles infaillibles. Il
suffirait d'interroger les gens
eux-mêmes. Mais il y a ce syndrome qui
perdure et qui pousse à se fier aux
paroles de «prophètes» et à ignorer les
concernés, ceux qui vont décider de ce
que sera fait le Parlement et le reste
des Assemblées élues. Ceux-là,
n'intéressent pas. Une foule, au plus,
qui obéit à des péristaltismes primaires
qu'il est aisé de déceler, en humant les
atmosphères des salons angoissés et en
palpant les appréhensions des
«spécialistes», attentifs aux attentes
de leurs solliciteurs et soucieux de
coller à la doxa ambiante. Le résultat
est que l'on reste sur sa faim, pendant
que les médias font monter la
mayonnaise. Et dire que la liberté
d'expression est au cœur des
revendications de journaux, qui méprise
celle du peuple. A moins qu'ils sachent
un peu plus qu'il n'en faut sur
l'électorat et que la chose ne les agrée
pas du tout. Je parle, bien sûr, de ceux
qui ont les ressources suffisantes pour
réaliser des enquêtes appropriées. A
moins que, de même, il y a cette peur de
ne plus pouvoir se réclamer de
l'opinion, comme on nous y a habitués.
Auquel cas, il est évident qu'il sera
hors de question de recueillir des
données, qui feraient voler en éclats
tout le construit sociopolitique de la
propagande actuelle. Se pose, sur ce
plan, la question sur la raison qui a
mené à épiloguer sur les islamistes,
quand c'étaient les «démocrates» qui
devaient porter les revendications
populaires. Il y a comme un malaise à
suivre les méandres des «faiseurs
d'opinion». Et pour cause, en janvier
dernier, les mêmes exactement donnaient
au Algériens une tout autre orientation.
Le «peuple» réclamait la «démocratie».
Tout le monde s'en rappelle, il suffit
de relire les coupures de presse de
l'époque. Sans crier gare, les
propositions sont inversées. Le peuple
serait devenu islamiste, en l'espace de
quelques mois. Seule la misère
intellectuelle, alliée à la mauvaise
foi, est capable de tels errements et ce
sera l'une des tares à combattre.
Article publié sur
Les Débats
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