Opinion
Algérie : deux
classements, deux impressions
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Samedi 23 mars
2013
Grâce à la
vigilance de certains organes de presse
algériens, spécialisés dans la levée de
lièvres contre le «régime», à l'affût de
la moindre appréciation venue
d'ailleurs, qui pallie leurs incapacités
d'analyse et à être crédibles, nous
avons pu avoir accès à une information
de taille. Il s'agit du classement de
notre pays sur l'une des innombrables
échelles qui ont la prétention de
mesurer les états des lieux à travers le
monde. Nous avions l'habitude des
positions pas «reluisantes» en matière
de «climat des affaires» et tout ce qui
tourne autour de la «liberté
d'entreprise», de la «transparence
économique», de la «visibilité
politique», enfin aux choses que le
pouvoir algérien tente tant bien que mal
d'améliorer, sans parvenir à amadouer
complètement les insatiables exigences
des maîtres du marché. Rendons donc lui
grâce, car ce n'est pas faute de se
soumettre, d'avoir essayé de plaire,
mais d'en avoir peut-être trop fait, au
point d'aiguiser des appétits qui ne
cessent de croître. Le drame est qu'il
ne semble pas avoir appris la leçon. Le
classement dont il s'agit, qui vient
probablement d'un sondage auprès des
partis politiques (b'rata en algérien),
de «personnalités» (si ça se trouve) et
de certaines associations bien en vue,
place l'Algérie parmi les 51 pays où
règnent la dictature, l'absence de
liberté de la presse et le reste des
restrictions démocratiques. Retenons que
le Maroc, lui, est classé parmi les pays
«hybrides», beaucoup plus libres, qui
ont déjà reçu les bons points qu'il
faut. Le classement a été réalisé par l'Economist
Intelligence Unit (EIU), une «entreprise
indépendante» appartenant au The
Economist Group. Franchement, sans faire
forcément dans le «nationalisme
ombrageux», il y a de quoi se poser des
questions sur la qualité du travail et,
surtout, sur la fiabilité des méthodes
utilisées, sauf à se résoudre à un
procès d'intention très aisé à étayer. A
contrario, il y a eu un autre
classement, cette année, il n'y a pas
longtemps, fait par… l'Economist
Intelligence Unit, la même entreprise.
Cette fois-là, l'Algérie a été classée à
la 54e place des pays où il vaut mieux
naître, loin devant… le Maroc. Les
questions posées visaient, d'après EIU,
«le niveau de vie, la criminalité, la
confiance dans les institutions, la
situation géographique, les services de
santé ou la vie familiale». Impossible
de ne pas relever la contradiction.
Cependant, elle peut avoir une
explication. Dans le deuxième cas, ce
sont les Algériens ordinaires qui ont
fait l'objet de l'étude. Eux, ils n'ont
pas les mêmes états d'âme que les
interviewés de la première étude, ils
ont répondu en conséquence. Non pas
qu'il s'agit de leur donner raison, mais
ils semblent vivre en décalage des
élites qui veulent les représenter. A
tout le moins, ils vivent dans la
réalité, sont plus objectifs, plus
nuancés, de fait plus perspicaces sur ce
qu'ils ont et sur ce qui manque. Une
explication, entre autres, du divorce
d'avec la politique. D'ailleurs EIU
gagnerait en crédibilité à changer de
terrain d'écoute. Après, en s'adressant
aux citoyens lambda, cela serait bien
qu'il y ait une enquête sur la
démocratie en Europe du Sud, à Chypre
par exemple, où les économies du petit
peuple sont bloquées d'autorité en
banque, en attendant qu'ils soient
ponctionnés sur injonction de l'Union
européenne et du Fonds monétaire
international (FMI).
Article
publié sur
Les Débats
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