Opinion
Chair de combat en
Syrie
Ahmed Halfaoui

© Ahmed
Halfaoui
Dimanche 22 septembre 2013
Le fait
que de jeunes tunisiennes servent de
bêtes de somme sexuelles en Syrie n'est
plus un élément de propagande, comme
l'on pouvait le penser des semaines
durant, depuis que des informations sur
le sujet ont commencé à filtrer. Le
ministre tunisien de l'intérieur, Lotfi
Ben Jeddou, a fini par confirmer
l'horrible réalité, le jeudi 19
septembre devant l'Assemblée nationale
constituante. " Elles ont des relations
sexuelles avec 20, 30, 100 djihadistes "
nous dit-il. Nous ne pouvons pas relier
cela aux précédents historiques, où les
soldats des armées coloniales, en
particulier, avaient droit à ce qu'on
appelait les " bordels de campagne ". Il
s'agissait de fournir la troupe en
cargaison de femmes pour satisfaire
leurs pulsions sexuelles et pour
entretenir le " moral de la troupe ".
Ces bordels ambulants étaient constitués
de prostituées payées, mais le plus
souvent victimes des réseaux mafieux
spécialisés dans la " traite des
blanches ", en référence appropriée à la
traite esclavagiste des noirs. Car il
est bien établi que ces femmes étaient
soumises à un esclavage qui faisait
d'elles des objets au main de la
soldatesque. Mais, pour le cas des
Tunisiennes, nous sommes en présence
d'un engagement volontaire, voire d'une
forme de militance, où leur corps est
érigé en arme d'appoint des combattants.
Elles sont consentantes jusqu'à un
certain point et convaincues de
participer au djihad, par le simple fait
d'offrir à leurs compagnons d'armes, le
plaisir des sens dont ils ont besoin. Ce
phénomène a commencé par toucher les
Syriennes d'abord, avant de voir des
femmes d'autres pays musulmans se prêter
à ce type de " combat ". En amont du
passage à l'acte fut ce décret religieux
de Mohammed al-Arifi, un cheikh
saoudien, qui a appelé au " djihad
ennikah " afin " de permettre aux
combattants d'exercer leur droit aux
rapports sexuels " et de " renforcer
leur courage et d'augmenter leur
capacité et leur moral dans le combat ".
L'effet a été au-delà de toute
espérance, elles seront des milliers à
se porter volontaires, quitte parfois à
recourir à la fugue pour répondre à
l'appel de ce qui est vécu comme étant
un devoir. Une fois ce devoir accompli,
après un temps plus ou moins long, qui
se termine avec les signes d'une
grossesse qui les rendent inaptes au
service, elles rentrent chez elles. Nul
ne sait encore, à ce moment là, leur
état d'esprit. Toujours est-il qu'elles
auront souscrit à la pire aliénation de
leur statut d'être humain. Elles auront
cru à la licéité faite de ces " unions "
temporaires consacrées par la procédure
religieuse du mariage et de la
répudiation, de multiples fois
reproduite en passant des bras d'un
homme à un autre. Elles n'auront pas
perçu qu'elles sont exclues du djihad,
du combat, du port des armes, et
qu'elles sont réduites à leurs organes
génitaux. Elles auront obéi jusqu'au
bout de l'absurde à un conditionnement
savamment mené et démontré la force de
l'aliénation quand elle s'empare des
esprits. Une force qui atteint aux
limites extrêmes de l'asservissement
mental au pire des esclavages.
Article publié sur
Les Débats
© 2013 Les Débats
Le sommaire d'Ahmed Halfaoui
Le
dossier Syrie
Les dernières mises à jour

|