Opinion
Le «printemps» du
«marché»
Ahmed
Halfaoui

© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 14
septembre 2011
On ne sait
pas ce que se sont dit les membres du G8
sur les dizaines de millions de
chômeurs, de laissés-pour- compte et de
précarisés qui les bouillonnent et
s'impatientent dans leurs pays. Ceux-là
ils les traitent peut-être chacun pour
soi et ne tolèrent pas que quelqu'un se
mêle de la façon dont ils comptent gérer
leurs affaires intérieures. Par contre,
ils semblent préoccupés au plus haut
point par les Arabes et assimilés. Après
l'Egypte et la Tunisie, deux pays ont
été ajoutés en tant que candidats au
«printemps». Ce sont le Maroc et la
Jordanie. Les deux n'ont pas hésité à
approuver les bombardements
démocratiques en Libye et à «voter» pour
le CNT/OTAN à la tête de ce pays,
avant-même que ce dernier ait obtenu des
Libyens le droit de s'installer à
Tripoli ou, au moins, quelque part sur
le territoire qu'il est censé contrôler,
selon les médias qui sont censés nous
informer. Il y a ainsi, désormais,
quatre pays qui sont élus à la
sollicitude des puissants. Une enveloppe
de 38 milliards de dollars va leur être
distribuée d'ici à 2013. Juste avant que
les grands de ce monde ne décident de
cette aide, le Fonds monétaire
international (FMI) avait «élu» le
CNT/OTAN remplaçant de l'Etat libyen.
Honni soit qui mal y pense, en faisant
le rapprochement avec le fait que la
«nouvelle Libye» va être fortement
sollicitée pour contribuer aux milliards
qu'il faut verser. On ne sait pas s'il y
a eu concertation, mais tout porte à
croire que la gestion des richesses
libyennes a réellement changé de main.
Ceux qui ont décidé de leur gel
démontrent qu'ils procédaient de la
volonté de les gérer. Ils en ont obtenu
la légitimité grâce à cette
«révolution» inédite qu'ils sont en
train de vouloir faire. Avant, tout
dictateur qu'il était, Kadhafi donnait
beaucoup de cet argent à son peuple et
aux Africains les plus pauvres ensuite.
Le G8, pour montrer qu'il ne
«révolutionne» pas pour rien, va changer
le mode de distribution de l'argent
libyen. Dorénavant, il ira à certains
Etats et pas à d'autres et dans ces
Etats aux hommes d'affaires privés. Même
si, pour cette fois-ci, on ne sait pas
encore le volume des prélèvements. Pour
ce qui est du détail connu, voici le
décompte, qui comporte des prêts
bonifiés, des décaissements budgétaires,
des prêts relais, des effacements de
dettes, à hauteur de 10,7
milliards $ de la Banque mondiale, de
7,6 milliards de la Banque africaine de
développement, de 7,5 milliards de la
Banque européenne d'investissement, de 5
milliards de la Banque islamique de
développement, de 3,2 milliards $ du
Fonds arabe pour le développement
économique et social, de 2,7 milliards
d'euros pour la France, de 2,5 milliards
de la Banque européenne pour la
reconstruction et le développement et de
1,2 milliard du Fonds monétaire arabe,
sans compter la «nouvelle Libye».
Ne cherchons pas, dans cette liste, en
quoi le G8 est le décideur en chef.
Retenons, simplement, que les
conditionnalités les plus importantes
sont le «développement du secteur
privé» et «l'intégration régionale
et internationale». Comprenons qu'il
sera plutôt question de crédits qui
iront au «marché» et d'obligation de lui
laisser la porte grande ouverte. De
toute évidence, le développement social
ne fait pas partie du «printemps».
Article publié sur
Les Débats
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