Opinion
Algérie/France :
les raisons d'une accalmie
Ahmed
Halfaoui

© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 11 juillet 2012
Les dégâts
occasionnés par Nicolas Sarkozy aux
relations algéro-françaises seraient en
voie d'être réparés. Il faut dire que
Sarkozy ne s'est pas ménagé, tant il
était parti pour croire que sa
«victoire» en Libye était un prélude à
l'effondrement de l'Algérie et à son
retour sous la botte de la France. Il a
activé ses supplétifs, il a mobilisé ses
médias, il a travaillé à déstabiliser
comme il a pu, en vain, ne comprenant
pas que les Etats-Unis, sans lesquels
rien ne se fait, avaient d'autres
projets en tête, pour l'aider à la
tâche, et que les Algériens gardaient
toujours un chien de leur chienne au
colonialisme. Il est donc parti sans
accomplir son rêve de reconquête, sans
même avoir sauvé la face par un geste
d'apaisement. François Hollande, avant
même de lui succéder, avait compris ce
qu'il fallait faire et cela semble lui
réussir. Il a pu inverser la détestation
de l'opinion algérienne en sa faveur et
faire oublier l'ignominie de son
prédécesseur, sans qu'il en soit
foncièrement différent. Le pragmatisme a
payé, le climat se réchauffe au point
que le pouvoir algérien accepte d'aller
se fourvoyer dans une sulfureuse «amitié
avec le peuple syrien», rompant
magistralement avec ce «non-alignement»,
dont l'Algérie constituait l'un des fers
de lance et consentant à jouer le rôle
de comparse des pires ennemis de
l'humanité. Malgré cette compromission,
le gouvernement algérien devrait prendre
la juste mesure de son hôte parisien. A
moins qu'il ne se soit passé des choses
dans la stratégie nord-africaine de la
France. Des choses que l'on peut
soupçonner d'avoir précipité Mohammed VI
à Paris, juste après l'élection
présidentielle, et qui doivent provoquer
une certaine panique du côté du Makhzen.
Des choses annoncées par le voyage
électoral, à Alger, du futur président.
On pronostique, déjà, une
«reconsidération dans un sens plus
équilibré des rapports de la France avec
les deux puissances que sont l'Algérie
et le Maroc». Et, dans le tas, il y a
des petites phrases qui ne coûtent rien,
comme celle-ci : «La France considère
qu'il y a place désormais pour un regard
lucide et responsable sur son passé
colonial si douloureux et en même temps
un élan confiant vers l'avenir». Il
paraît même que François Hollande va
complètement revoir la copie
colonialiste pour adopter un autre
style, plus «normalisé» avec l'Afrique
en général, et l'Algérie, en
particulier. Ceci, en apparence. Car ce
serait curieux qu'il y ait un vrai
revirement sans réciprocité. A ce titre,
la présence de Mourad Medelci, le chef
de la diplomatie algérienne, à la
conférence occidentale contre la Syrie,
est un cadeau infiniment plus important
que l'adoption par la France d'une
attitude plus respectueuse des règles
qui doivent prévaloir dans les relations
entre Etats. On assiste à un virage
fondamental dans la politique étrangère
algérienne, qui intègre, ouvertement, le
pays dans la stratégie atlantiste et le
«normalise» aux yeux de la «communauté
internationale». Il restera à connaître
et à évaluer les concessions économiques
qui viendront et qui nous donneront la
pleine mesure du prix qui a été payé, en
soutien à une économie française à bout
de souffle.
Article publié sur
Les Débats
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