Opinion
Egypte : l'erreur
du grand Frère
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Samedi 1er décembre
2012
Maintenant
que les Frères égyptiens, soutenu par
les Etats-Unis et leurs satellites, ont
obtenu un cessez-le-feu des résistants ghazaouis, il s'agit, comme prévu, pour
les Palestiniens de tout négocier,
surtout le plus urgent, la question de
ce blocus qui dure depuis cinq ans,
imposé par Israël, aidé de l'Egypte,
même sous le règne des Frères. Un blocus
fait de restrictions draconiennes qui
continuent d'être appliquées dans toute
leur rigueur, dont la fermeture du
terminal de Rafah, côté égyptien.
Sachant la loyauté des sionistes en
matière d'accord, on peut deviner que
les «négociations» dureront aussi
longtemps qu'il faudra, à l'instar de ce
«processus d'Oslo» qui a fini par ne
plus être invoqué. Les Frères le savent
bien. Leur président, Mohamed Morsi,
doit avoir été instruit de toutes les
ficelles qui seront utilisées,
conformément à ce plan général pour la
région qui semble se mettre en place, à
commencer par la mise au pas du peuple
égyptien. Une condition essentielle à
l'implémentation de la nouvelle
configuration du Moyen-Orient, qui
comporte la normalisation des relations
avec l'entité sioniste et toutes ses
conséquences, le renforcement de
l'orientation libérale et de l'ouverture
des économies au marché mondialisé et la
consécration de la stratégie
étatsunienne. Pour ce faire, le Frère
musulman s'est mis à la tâche. Son coup
d'Etat «constitutionnel» et son érection
en tant que dictateur «provisoire» et
«défenseur de la révolution» sont une
réponse à l'incompatibilité de la
reconduction du système qui a conduit à
la chute de Hosni Moubarak, avec les
libertés arrachées par le peuple
égyptien. Preuve en est faite, Morsi
doit affronter une fronde populaire
beaucoup plus organisée et infiniment
plus cohérente que celle que l'Egypte a
connu lors du début de la révolution. La
constitution d'un Front de salut
national en est une illustration
éclatante. Le raïs devait avoir mesuré
son audace, puisqu'il maintient sa
détermination à faire cavalier seul,
envers et contre tout, pour faire
reconstruire l'Etat, selon les objectifs
d'exclure toute opportunité qui pourrait
contrarier la mainmise absolue sur les
institutions. La rédaction d'une
Constitution sur mesure en étant l'un
des moyens légaux. Le grand Frère
argumente en alléguant de sa volonté
«d'accélérer les réformes
démocratiques». Inquiets devant la
réaction de la rue égyptienne, les
Etats-Unis, qui ont l'habitude de ne pas
aimer les dictateurs, ne demandent rien
aux Frères et se contentent d'appeler
les Egyptiens en général à «résoudre
leurs différends pacifiquement et par le
dialogue démocratique». Le fait étant,
sauf pour les naïfs, que Morsi ne se
serait jamais risqué à ce coup de force
sans avoir l'assurance d'être soutenu
par la Maison-Blanche, très sourcilleuse
sur la notion de «révolution» et
fondamentalement allergique au cours
qu'elle ne maîtrise pas. Mais le
résultat est en train, déjà, de
démontrer que le peuple égyptien n'est
pas dupe de ce qui se trame contre lui.
Mieux, tout laisse croire que le nouveau
pouvoir a relancé la contestation et
remis à plat tous les enjeux économiques
et sociaux. Le peuple ayant décidé de
protéger lui-même la révolution.
Article publié sur
Les Débats
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