on ZNet, le 26 janvier 2009
http://www.zcommunications.org/znet/viewArticle/20364
Tout le monde s’accorde à reconnaître en
Barack Obama un homme à l’intelligence aiguisée, et un juriste
chevronné particulièrement précis dans le choix de ses mots. On
doit donc prendre Obama au sérieux – tant dans ce qu’il dit que
dans ce qu’il tait. D’une signification particulière, sa
première déclaration substantielle en matière d’affaires
étrangères, le 22 janvier, au Département d’Etat : il
intronisait alors George Mitchell, duquel il faisait son envoyé
spécial au Moyen-Orient.
On attend de Mitchell qu’il focalise son
attention sur le problème israélo-palestinien, au lendemain de
la récente invasion américano-israélienne de Gaza. Durant cet
assaut meurtrier, Obama est resté silencieux, n’émettant que
quelques platitudes, au motif, disait-il, qu’il n’y aurait eu
qu’un seul président des Etats-Unis – alors que cela ne l’avait
jamais incité à se taire sur bien d’autres questions. Sa
campagne, en revanche, avait lourdement insisté sur cette
déclaration du même Obama : « Si des roquettes tombaient là où
mes deux filles dorment, je ferais tout ce qui est en mon
pouvoir pour arrêter ça ! ». Il faisait allusion aux enfants
israéliens (est-il besoin de le préciser ?), et non aux
centaines d’enfants palestiniens en train d’être massacrés par
des armes de fabrication américaine, dont, évidemment, il ne
pouvait pas parler, puisque – combien de fois faudra-t-il vous
le répéter ? – il n’y avait qu’un seul président qui fût en
mesure de le faire (mais qui n’en avait nulle envie) ?!
Toutefois, le 22 janvier, le seul et unique
président des Etats-Unis est devenu un certain Barack Obama. Par
conséquent, celui-ci pouvait désormais parler librement de ce
genre de question – en évitant soigneusement, bien sûr,
l’agression contre Gaza, qui venait de prendre fin, par le plus
grand des hasards ( !). Juste à la veille de son intronisation !
Le discours d’Obama a mis l’accent sur son
engagement en vue d’un règlement pacifique. Il en a laissé les
délinéaments dans le vague, excepté une proposition spécifique :
« L’initiative de paix arabe », a dit Obama, « comporte des
éléments constructifs qui pourraient contribuer à faire
progresser ces efforts. Le temps est venu, pour les pays arabes,
d’agir selon la promesse de cette initiative en soutenant le
gouvernement palestinien sous la direction du président Abbas et
du Premier ministre Fayyad, en allant de l’avant dans la
normalisation de leurs relations avec Israël et en luttant
contre l’extrémisme qui nous menace tous. »
Obama, on le voit, ne falsifie pas tout de
go la proposition de la Ligue arabe, mais son entourloupe,
soigneusement, ciselée est hautement instructive.
La proposition de paix de la Ligue arabe
appelle effectivement à une normalisation des relations avec
Israël – dans le contexte – je répète : dans le contexte – d’un
solution à deux Etats dans les termes du consensus international
réuni de longue date, que les Etats-Unis et Israël bloquent
depuis plus de trente ans, dans un isolement international
total, chose qu’ils continuent à faire aujourd’hui. Le noyau de
la proposition de la Ligue arabe, comme Obama est ses
conseillers ès-Moyen-Orient le savent parfaitement, c’est son
appel à un règlement politique pacifique dans ces termes, bien
connus désormais, dont il est reconnu qu’ils sont la seule base
possible pour le règlement pacifique auquel Obama professe être
attaché. L’omission de ce fait crucial ne saurait être purement
accidentelle : elle signale de manière très claire qu’Obama
n’envisage nullement de se départir du rejectionnisme américain.
L’appel qu’il lance aux pays arabes, les exhortant à mettre en
actes un corollaire de leur proposition, tandis que les
Etats-Unis continuent à ignorer jusqu’à l’existence de son
contenu fondamental, qui bien entendu pré-conditionne le
corollaire, dépasse les bornes du cynisme.
Les actes les plus significatifs de nature
à saper tout règlement pacifique sont les agissements quotidiens
soutenus par les Etats-Unis dans les territoires occupés, tous
reconnus comme des agissements criminels : confiscations de
terres arables et de ressources et construction de ce que
l’architecte-en-chef du plan, Ariel Sharon, appelait des
« bantoustans » pour Palestiniens – ce qui était d’ailleurs une
comparaison injuste, car les bantoustans sud-africains étaient
autrement plus viables que les fragments de la Palestine
concédés aux Palestiniens dans la conception sharonienne des
choses, en train de se réaliser sur le terrain. Mais les
Etats-Unis et Israël vont même jusqu’à continuer à refuser un
règlement politique en pures paroles verbales, encore tout
récemment, en décembre 2008, les Etats-Unis et Israël (ah,
j’allais oublier… ainsi que quelques minuscules îles du
Pacifique) ayant voté contre une résolution de l’Onu soutenant
« le droit du peuple palestinien à l’autodétermination » (votée
à 173 voix pour, 5 contre, et le véto des Etats-Unis-Israël,
sous des prétextes évasifs).
Obama n’a pas eu un seul mot au sujet des
constructions de colonies et d’infrastructures (réservées aux
colons) en Cisjordanie, ni des mesures complexes visant à
contrôler l’existence des Palestiniens et conçues de manière à
saper les perspectives de toute solution pacifique à deux Etats.
Son silence est une réfutation sinistre de ses envolées lyriques
sur la manière dont il va « entretenir un engagement actif à
rechercher deux Etats vivant côte-à-côte, dans la paix et la
sécurité ».
Il n’a pas mentionné, non plus,
l’utilisation d’armes américaines à Gaza, en violation non
seulement du droit international, mais aussi de la loi
américaine. Ni l’expédition de nouvelles armes américaines par
Washington à
Israël, au plus fort de l’agression américano-israélienne, chose
que n’ignoraient certainement pas les conseillers es-questions
moyen-orientales d’Obama.
Sur un point, toutefois, Obama s’est montré
intraitable : la contrebande d’armes à destination de Gaza doit
être stoppée… Il avalise l’avis commun de Condoleezza Rice et de
la ministre israélienne des Affaires étrangères Tzipi Livni,
selon lequel la frontière entre la bande de Gaza l’Egypte doit
être hermétiquement scellée – remarquable exercice d’arrogance
impériale, comme l’a fait observer le Financial Times : « Se
congratulant mutuellement, à Washington, ces deux responsables
semblaient oublier le fait qu’elles étaient en train de conclure
un marché au sujet d’un commerce illégal à la frontière de
quelqu’un d’autre : en l’occurrence, des Egyptiens. Le
lendemain, un responsable égyptien qualifia leur mémorandum de
« fictionnel ». Mais cette objection égyptienne fut rejetée d’un
revers de main…
Revenons à l’allusion faite par Obama à la
proposition « constructive » de la Ligue arabe ; comme l’indique
le compte-rendu, Obama persiste à refuser de soutenir le parti
vainqueur [Chomsky écrit, par erreur : « defeated party », ndt]
des élections de janvier 2006 – les seules élections libres de
tout le monde arabe – auxquelles les Etats-Unis et Israël
réagirent, immédiatement et ouvertement, en punissant sévèrement
les Palestiniens de s’être opposés à la volonté des maîtres.
Mais il y a un
léger ‘hic’, c’est le fait que le mandat d’Abbas a pris fin le 9
janvier, et que Fayyad a été nommé sans avoir été confirmé par
le Parlement palestinien (dont beaucoup des membres ont été
kidnappés par Israël, où ils sont emprisonnés depuis lors). Le
quotidien israélien Ha’aretz qualifie Fayyad de « drôle d’oiseau
dans le monde politique palestinien. D’un côté, c’est l’homme
politique palestinien le plus estimé en Israël et en Occident.
De l’autre, toutefois, il n’a pas le moindre pouvoir électoral,
ni dans la bande de Gaza, ni en Cisjordanie ». Le rapport relève
par ailleurs « la relation intime de Fayyad avec l’establishment
israélien », et en particulier son amitié avec Dov Weisglass, un
conseiller extrémiste de Sharon. Bien que dépourvu de tout
soutien populaire, Fayyad est considéré compétent et intègre, ce
qui n’est pas courant dans les secteurs politiques sponsorisés
par les Etats-Unis.
L’insistance mise par Obama à ne jurer que
par les seuls Abbas et Fayyad ne fait que confirmer le mépris
constant de l’Occident pour la démocratie, dès lors que celle-ci
échappe à son contrôle.
Obama a fourni les raisons habituelles
« justifiant » qu’on ignore le gouvernement élu dirigé par le
Hamas. « Pour être un authentique partenaire de paix », a ainsi
déclaré Obama, « le quartette [Etats-Unis, Union européenne,
Russie et Onu] a fait savoir très clairement que le Hamas doit
répondre à des conditions très précises : reconnaître le droit à
l’existence d’Israël ; renoncer à la violence ; respecter les
accords déjà conclus. » Passé sous silence, comme d’habitude, le
fait gênant que les Etats-Unis et Israël rejettent fermement la
totalité de ces trois conditions. Seuls dans le monde, ils
empêchent un règlement à deux Etats, dont un Etat palestinien ;
bien entendu, ils ne renoncent pas à la violence ; et ils
rejettent la proposition centrale du Quartette, à savoir la
« feuille de route ». Israël l’a certes acceptée, pour la forme,
mais accompagnée de quatorze réserves qui, de fait, en éliminent
le contenu (en cela, Israël était soutenu, tactiquement, par les
Etats-Unis). C’est le grand mérite de l’ouvrage de Jimmy Carter,
Palestine : la paix, pas
l’apartheid !, d’avoir porté ces faits à la connaissance de
l’opinion publique pour la première fois – et à celle de
l’opinion politiquement correcte, consensuelle, « mainstream »,
pour la seule et unique fois…
Par un raisonnement élémentaire, il
s’ensuit que ni les Etats-Unis, ni Israël ne sont des
« partenaires de paix sincères». Mais ça, il ne le dira jamais.
Cette phrase ne doit même pas exister, en anglais !
Il est peut-être injuste de critiquer Obama
pour cette quintessence de cynisme, car elle est quasi
universelle, à la différence de son éviscération méticuleuse de
la composante centrale de la proposition de la Ligue arabe, qui
est vraiment un apport innovateur qui lui revient en propre et
qu’on ne saurait lui contester…
Quasi-universelles, elles aussi, ces
références convenues au Hamas : organisation terroriste, vouée à
la destruction d’Israël (à moins que ce ne soit à celle de tous
les juifs ?). Sont omis les faits gênants (sans doute) que les
Etats-Unis-Israël non seulement sont voués à la destruction de
toute forme viable d’Etat palestinien, mais ne cessent de mener
des politiques allant dans ce sens. Ou encore celui que,
contrairement aux deux Etats réjectionnistes, le Hamas a appelé
à une solution à deux Etats, dans les termes du consensus
international : publiquement, explicitement et de manière
répétée.
Obama a introduit ses observations
ainsi : « Permettez-moi d’être clair : l’Amérique est garante de
la sécurité d’Israël. Et nous soutiendrons toujours le droit
qu’a Israël de se défendre contre des menaces illégitimes. »
Au sujet du droit des Palestiniens à se
défendre contre des menaces bien plus extrêmes, comme celles qui
se produisent quotidiennement, avec le soutien des Etats-Unis,
dans les territoires occupés : rien ! Nada ! Mais, là encore,
c’est la norme à laquelle nous sommes « habitués »…
Normale, là encore, l’énonciation du
principe selon lequel Israël a le droit de se défendre. C’est
correct. Mais c’est vide : se défendre, dans l’absolu, tout le
monde en a le droit ! Mais dans son contexte, ce cliché est pire
que vide : c’est une tromperie cynique supplémentaire.
La question n’est pas de savoir si Israël a
le droit de se défendre, comme n’importe qui d’autre, mais s’il
a le droit de le faire par la force. Personne, y compris Obama,
ne pense qu’un pays puisse jouir d’un droit de valeur générale à
se défendre par la force : tout d’abord, il est nécessaire de
démontrer qu’il n’existe aucune alternative pacifique, que l’on
pourrait expérimenter. Dans le cas qui nous occupe, il y a des
alternatives, assurément.
Une alternative étriquée consisterait, pour
Israël, à respecter un cessez-le-feu, comme, par exemple, le
cessez-le-feu proposé par le chef politique du Hamas Khaled
Meshaal quelques jours avant qu’Israël ne lance son agression,
le 27 décembre. Meshaal a appelé à réinstaurer l’accord de
2005 ; cet accord préconisait une fin des violences et une
ouverture permanente des frontières, accompagnées d’une
garantie, par Israël, que les biens et les personnes pourraient
circuler librement entre les deux parties de la Palestine
occupée, à savoir la Cisjordanie et la bande de Gaza. Cet accord
avait été rejeté au bout de quelques mois par les Etats-Unis et
Israël, après que les élections libres de janvier 2006 eurent
« mal tourné ». Les autres cas, tout aussi hautement
significatifs, abondent.
Mais une alternative plus large et plus
significative consisterait, pour les Etats-Unis et pour Israël,
à abandonner leur isolationnisme extrême, et à rejoindre le
reste du monde – dont les pays arabes et le Hamas – dans le
soutien à un règlement à deux Etats conforme au consensus
international. Il convient de noter qu’au cours des trente
années écoulées, il n’y a eu qu’une unique occurrence d’abandon
de l’isolationnisme américano-israélien : les négociations de
Taba, en janvier 2001, qui semblèrent très proches d’une
résolution pacifique du conflit, lorsqu’Israël les fit capoter
prématurément. Il ne serait pas incongru, pour Obama, d’accepter
de rejoindre le reste du monde, fût-ce dans le cadre de la
politique américaine, encore faudrait-il que cela l’intéresse
vraiment ?
En résumé : la réitération quelque peu
forcée, par Obama, du droit d’Israël à l’autodéfense n’est rien
d’autre qu’un énième exercice de tromperie cynique – même si, il
faut le reconnaître, elle n’est pas quelque chose qui lui soit
propre, s’agissant d’une tromperie virtuellement universelle.
Si, dans ce dernier cas, la tromperie est
particulièrement frappante, c’est parce que l’occasion en fut la
nomination de Mitchell au poste d’envoyé spécial. Le principal
haut-fait de Mitchell fut son rôle éminent dans le règlement
pacifique en Irlande du Nord. Celle-ci prôna la fin du
terrorisme de l’IRA et de la violence britannique. Cela revenait
à reconnaître, implicitement, que, si la Grande-Bretagne avait
bien le droit de se défendre contre le terrorisme, elle n’avait
aucun droit à le faire par la force, car il existait une
alternative pacifique : la reconnaissance des griefs légitimes
de la communauté irlandaise catholique, qui étaient à l’origine
de la terreur de l’IRA. Dès l’instant où la Grande-Bretagne
adopta cette attitude raisonnable, la terreur cessa. Les
implications pour la mission de Mitchell, en matière de conflit
israélo-palestinien, sont tellement évidentes qu’il n’est nul
besoin de les rappeler. Et leur omission, là encore, est un
indice frappant de l’inscription de l’administration Obama dans
le rejectionnisme traditionnel des Etats-Unis et dans leur
opposition à la paix, à moins que ce ne soit à leurs propres
conditions extrémistes.
Par ailleurs, Obama a rendu hommage à la
Jordanie en raison de « son rôle constructif dans l’entraînement
des forces de sécurité palestiniennes et dans l’entretien de ses
bonnes relations avec Israël – ce qui contraste de manière
frappante avec le refus américano-israélien de traiter avec le
gouvernement palestinien démocratiquement élu, tout en punissant
sauvagement les Palestiniens pour avoir élu ledit gouvernement
pour des motifs qui, comme nous l’avons noté, ne soutiennent pas
un simple examen de quelques secondes. Il est vrai que la
Jordanie s’est jointe aux Etats-Unis dans l’armement et
l’entraînement des forces palestiniennes de sécurité, afin
qu’elles soient en mesure d’interdire toute manifestation de
soutien aux malheureuses victimes de l’agression
américano-israélienne contre Gaza, et aussi en arrêtant des
partisans du Hamas et l’éminent journaliste Khaled Amayréh, tout
en montant de toutes pièces leurs propres manifestations de
soutien à Abbas et au Fatah, dans lesquelles « la plupart des
participants étaient des fonctionnaires et des écoliers ayant
reçu de l’Autorité palestinienne l’ordre expresse d’y
participer », d’après le quotidien Jerusalem Post. Cela, oui,
d’accord : c’est le genre de démocratie qui est à notre goût…
Obama a fait un autre commentaire lourd de
sens : « Dans le cadre d’un cessez-le-feu à long-terme, les
points de passage à travers la frontière de Gaza devront être
ouverts afin de permettre le passage des aides et des
marchandises, avec un régime de surveillance adéquat… » Bien
entendu, il s’est bien gardé de mentionner que les Etats-Unis et
Israël avaient rejeté un accord quasi similaire après les
élections de janvier 2006 et qu’Israël n’avait jamais respecté
par le passé des accords du même type à ses frontières.
On notera aussi l’absence totale de
réaction à l’annonce par Israël de son rejet de l’accord de
cessez-le-feu, rendant du même coup toute perspective que ledit
accord soit « de longue durée » inutile. Comme cela a été
immédiatement rapporté par la presse, « le Ministre israélien
Binyamin Ben-Eliezer, qui assiste aux délibérations du Conseil
des ministres en matière sécuritaire, a déclaré à la Radio de
l’Armée, mercredi, qu’Israël ne laisserait pas les points de
passage vers Gaza rouvrir sans qu’ait été au préalable conclu un
marché en vue de la libération de Gilad Shalit, ce soldat
israélien prisonnier du groupe islamiste depuis 2006 (Financial
Times, 23 janvier) ; « En début de semaine, la ministre
israélienne des Affaires étrangères Tzipi Livni a déclaré que
des progrès en matière de libération du caporal Shalit seraient
un préalable à l’ouverture des postes frontière restés fermés,
la plupart du temps, depuis que le Hamas avait arraché le
contrôle de la bande de Gaza à l’Autorité palestinienne, en
2007 » (Christian Science Monitor, 23 janvier) ; « un
responsable israélien a déclaré que des conditions très dures
seraient mises à toute levée du blocus, qu’il a conditionnée
elle-même à la libération de Gilad Shalit » [Financial Times, 23
janvier]. ; entre bien d’autres éléments.
La captivité de Shalit est une question
prééminente en Occident : c’est là une énième « preuve » du
caractère criminel du Hamas. Quoi que l’on puisse en penser, il
est incontestable que la capture d’un militaire d’une année
d’agression est un crime bien moindre que la capture de civils
telle que la pratiquait exactement la veille l’armée
israélienne, qui avait fait prisonniers deux frères qu’elle
avait ensuite exfiltrés à travers la frontière, après quoi ils
avaient disparu dans un camp d’emprisonnement israélien.
Contrairement au cas beaucoup moins grave de Shalit, ce crime a
pratiquement été passé sous silence, et il a fini par être
oublié, en même temps que la pratique sur une base régulière,
par Israël, depuis des décennies, du kidnapping de civils au
Liban et en haute mer, suivie de leur dispersion dans diverses
prisons israéliennes, où ils sont bien souvent maintenus
prisonniers durant des années, en tant qu’otages. Mais la
capture de Shalit, elle, c’est autre chose : elle interdit la
conclusion d’un cessez-le-feu !
Le discours d’Obama, au département d’Etat,
consacré au Moyen-Orient, se poursuivit avec « la situation en
train de se dégrader en Afghanistan et au Pakistan… (deux pays
qui sont) le front central de notre lutte constante contre le
terrorisme et l’extrémisme ». Quelques heures plus tard, des
avions de guerre américains attaquaient un hameau principalement
peuplé de bergers. Des femmes et des enfants figurent parmi les
vingt-deux tués, ont-ils indiqué, d’après Hamididan Abdul
Rahmazai, le chef du conseil provincial. » (Los Angeles Times,
24 janvier).
Le premier message qu’adressa Karzai, le président afghan, à
Obama, après son élection, en novembre, fut une exhortation à
arrêter les bombardements contre des civils afghans, une
exhortation qu’il réitéra quelques heures avant qu’Obama ne
prête serment. Cela fut considéré comme un appel significatif de
Karzai au départ [de l’Afghanistan] des forces américaines et
des autres forces armées étrangères. Les riches et les puissants
ont leurs « responsabilités ». Parmi celles-ci, a écrit le New
York Times, il y a celle d’ « assurer la sécurité » dans le sud
de l’Afghanistan, un pays où « les insurgés sont formés sur
place et auto-entretenus ». Air connu. Cela ressemble mot pour
mot à ce que l’on pouvait lire dans la Pravda, dans les années
1980. Par exemple…
Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier