BDSF34
L’ONU et la question de l’apartheid
israélien
Vendredi 6 novembre 2020 L’apartheid est
défini dans la Convention internationale
pour l’élimination et la répression du
crime d’apartheid et le Statut de Rome
de la Cour pénale internationale (CPI)
comme un régime institutionnalisé de
domination raciale et d’oppression
systématique qui commet des actes
inhumains similaires à ceux commis en
Afrique du Sud dans le passé, dans le
but de maintenir ce régime.
Le droit
international étant rarement favorable
aux nations du Sud, la lutte du peuple
d’Afrique du Sud contre l’apartheid, et
le mouvement international
anti-apartheid qui a soutenu cette
lutte, représentent un succès politique
majeur des nations décolonisées et du
mouvement des droits humains. Pour les
Palestiniens, se reconnecter à cette
lutte et s’appuyer sur elle est une
nécessité stratégique pour sortir de
l’impasse actuelle de l’oppression et de
l’impunité.
Lisez le briefing
ci-joint sur la nécessité de rendre
compte de l’apartheid israélien au
niveau des Nations unies.
L’ONU et la
question de l’apartheid israélien
Bien qu’un ensemble
substantiel de conclusions d’éminents
experts des droits humains ait confirmé
que l’occupation illégale par Israël du
territoire palestinien de Gaza et de la
Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est,
fait partie d’un régime d’apartheid tel
que défini dans le droit international,
les Nations unies (ONU) ont échoué
depuis des décennies à enquêter sur la
perpétration par Israël du crime
d’apartheid.
L’apartheid est
défini dans la Convention internationale
pour l’élimination et la répression du
crime d’apartheid et le Statut de Rome
de la Cour pénale internationale (CPI)
comme un régime institutionnalisé de
domination raciale et d’oppression
systématique qui commet des actes
inhumains similaires à ceux commis en
Afrique du Sud dans le passé, dans le
but de maintenir ce régime.
Depuis son
admission comme membre des Nations unies
en 1949, Israël jouit de l’impunité pour
ses violations flagrantes du droit
international humanitaire (DIH) et des
droits humains des Palestiniens. Cette
impunité est principalement due à la
protection diplomatique, économique et
militaire fournie par les puissants
États du Nord, en particulier les
anciennes puissances coloniales et les
États qui, comme Israël, ont été établis
au moyen du colonialisme de peuplement
et du nettoyage ethnique des nations
indigènes.
Un exemple bien
connu de cette protection est
l’obstruction persistante des mesures
internationales, y compris les sanctions
ciblées, qui pourraient donner effet aux
résolutions des Nations unies concernant
les colonies, le mur et l’annexion des
territoires occupés par Israël. Ces
dernières ont été déclarées illégales et
condamnées dans de nombreuses
résolutions de l’ONU, mais des mesures
efficaces de reddition de compte ont
souvent été bloquées par les États-Unis
et, moins fréquemment, par des États
européens, le Canada et l’Australie.
Un autre exemple
important de protection d’Israël contre
la responsabilité est l’acceptation par
les Nations unies de la position selon
laquelle la présence continue d’Israël
dans le territoire palestinien occupé
(TPO) composé de la bande de Gaza et de
la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est,
constitue une « occupation
belligérante » temporaire soumise
aux règles du DIH, c’est-à-dire le seul
régime internationalement reconnu selon
lequel un État peut être légalement
présent dans un territoire saisi en
guerre.
Sur la base de
cette position, Israël est traité par
l’ONU et ses puissants membres comme un
État pacifique et une « puissance
occupante » légitime qui se trouve dans
« une situation de conflit armé/guerre »
avec le peuple palestinien (!) 1)
et est prêt à négocier et à mettre en
œuvre de bonne foi une solution
politique qui mettra fin à sa présence
et à son contrôle des TPO et permettra
la création d’un État palestinien
souverain dans ce territoire. Les
violations flagrantes du droit
international humanitaire et des droits
humains par Israël sont critiquées et
condamnées, mais son régime sur les
Palestiniens dans les TPO en tant que
tel n’a jamais fait l’objet d’une
enquête sur sa légalité ni été déclaré
illégal par les Nations unies.
Des experts
indépendants du droit international,
ainsi que la société civile, ont depuis
de nombreuses années soulevé auprès des
Nations unies et de ses membres la
nécessité de reconnaître qu’Israël
maintient un régime illégal et criminel
sur le peuple palestinien.
Le rapporteur
spécial des Nations unies, Michael Lynk,
a par exemple démontré de manière très
détaillée en 2017 que le régime
israélien dans les TPO constitue une
« occupation illégale », car il est en
contradiction avec tous les principes
fondamentaux d’une « occupation
belligérante » légale : i)
l’interdiction de l’annexion et le
respect du droit à l’autodétermination
de la population souveraine ; ii) le
caractère temporaire (à distinguer d’un
régime indéfini) ; et iii) le devoir
d’agir dans l’intérêt supérieur de la
population occupée 2) ).
Depuis 2007,
lorsque le rapporteur spécial John
Dugard a alerté pour la première fois
les Nations Unies sur le fait que
l’occupation israélienne présente de
nombreuses caractéristiques du
colonialisme et de l’apartheid 3)
, des conclusions d’experts sur
l’apartheid israélien ont été
présentées, entre autres, dans : les
rapports ultérieurs des rapporteurs
spéciaux des Nations unies sur les
droits de l’homme dans les TPO 4)
; une étude réalisée par la plus grande
coalition de la société civile
palestinienne, le Comité national du BDS
(BNC) 5) ; une étude
approfondie parrainée par le Conseil de
recherche en sciences humaines d’Afrique
du Sud (2009) 6) ; une
analyse ultérieure publiée dans la Revue
européenne de droit international (EJIL,
2013) 7) ; les conclusions du
Tribunal Russell sur la Palestine (2011)
8) ; une étude commandée par
la Commission économique et sociale des
Nations unies pour l’Asie occidentale
(CESAO, 2017) 9) ; et dans
les examens périodiques d’Israël par le
Comité des Nations unies pour
l’élimination de la discrimination
raciale (2007, 2012, 2020) 10)
.
La
reconnaissance de l’illégalité du
régime israélien sur le peuple
palestinien et l’enquête sur
l’apartheid israélien par l’ONU et
ses membres sont des étapes nécessaires
pour atteindre la liberté, la justice et
l’égalité pour le peuple palestinien. Le
mythe de l’existence – ou de la
possibilité – de véritables négociations
avec les gouvernements israéliens qui ne
sont pas disposés à abandonner
l’apartheid a permis à Israël de
poursuivre sa pratique de longue date
d’annexion de facto et de jure
du territoire palestinien occupé, et de
déplacement forcé, de ségrégation et
d’exil du peuple palestinien.
L’apartheid
israélien contre le peuple indigène de
Palestine ne sera cependant pas abordé
par la communauté internationale si les
États du Sud, qui sont sortis de
la lutte contre la domination coloniale
raciste, ne portent pas les conclusions
et les appels des experts indépendants
et de la société civile mentionnés
ci-dessus dans les forums officiels des
Nations unies et de ses membres, comme
ils l’ont fait dans le cadre des Nations
unies pour l’éradication de l’apartheid
en Afrique australe.
En effet, les
puissants gouvernements du Nord ont une
fois de plus démontré leur détermination
à tolérer le crime de l’apartheid
lorsqu’il est commis contre un peuple du
Sud par un État aligné sur ses intérêts
géopolitiques. Les conclusions
alarmantes sur l’apartheid israélien ont
été ignorées dans les capitales du Nord
global, tandis que brimades et pressions
politiques ont empêché l’étude et le
débat, sans parler de la punition, de
l’apartheid israélien par les organes
compétents des Nations unies, tels que
l’Assemblée générale et le Conseil des
droits de l’homme.
Un exemple parmi
tant d’autres de cette répression du
Nord global est l’étude susmentionnée,
« Pratiques israéliennes à l’égard du
peuple palestinien et la question de
l’apartheid », qui a été commandée et
publiée par la CESAO en mars 2017, puis
rapidement retirée du site officiel de
la CESAO deux jours après sa
publication, sur instruction du
Secrétaire général des Nations unies.
Tout aussi
inquiétantes sont les accusations
fausses, diffamatoires et intimidantes
d’antisémitisme et de « destruction de
l’État juif », lancées par des
responsables gouvernementaux, des
parlementaires, des partis politiques et
des médias pro-israéliens à l’encontre
de toute personne critiquant l’apartheid
israélien ou appelant à des sanctions
ciblées, telles que des embargos
militaires, pour y mettre fin. Ce
phénomène est particulièrement répandu
en Amérique du Nord, en Europe et en
Australie, où les élites politiques et
culturelles, souvent liées au complexe
militaro-sécuritaire-industriel, sont de
connivence avec les efforts incessants
du gouvernement d’extrême droite
israélien pour saper la liberté
d’expression et supprimer l’opposition
légitime à ses politiques illégales et
criminelles, y compris l’apartheid.
Le droit
international étant rarement favorable
aux nations du Sud, la lutte du peuple
d’Afrique australe contre l’apartheid et
le mouvement international
anti-apartheid qui l’a soutenu
représentent un succès politique majeur
pour les nations décolonisées et le
mouvement des droits de l’homme. Pour
les Palestiniens, se reconnecter à cette
lutte et s’appuyer sur elle est une
nécessité stratégique pour sortir de
l’impasse actuelle de l’oppression et de
l’impunité.
Alors que le
Conseil de sécurité de l’ONU reste
bloqué, principalement mais pas
seulement en raison du droit de veto des
États-Unis, l’Assemblée générale,
avec ses organes et ses mécanismes,
offre de nombreuses possibilités de
mettre l’apartheid israélien à l’ordre
du jour d’une communauté internationale
peu désireuse d’enquêter et d’examiner
les mesures internationales requises
pour son éradication, y compris des
sanctions ciblées et légales.
La présentation
de l’apartheid israélien à l’Assemblée
générale nécessite la mobilisation du
soutien nécessaire des États, des
groupes et des organisations
représentant le Sud global aux Nations
unies, ainsi que des parlementaires
progressistes, des partis politiques,
des organisations de la société civile,
des syndicats et des mouvements du Nord
global. L’éradication de l’apartheid en
Palestine et partout ailleurs est une
responsabilité juridique et morale pour
tous ceux qui se soucient de la liberté,
de la justice, de l’égalité et de l’État
de droit international.
Source :
BNC | Traduction : JPB
Références
↑ 1.
|
Les
Palestiniens n’étaient pas
partie prenante à la guerre de
1967 qui a abouti à la prise par
Israël de la Cisjordanie
palestinienne, y compris
Jérusalem-Est, et de la bande de
Gaza – ainsi que du plateau du
Golan syrien. Les parties dans
cette guerre étaient Israël,
l’Égypte, la Syrie et la
Jordanie.
|
↑ 2.
|
(Rapport du
rapporteur spécial des Nations
unies sur les droits de l’homme
dans les TPO, Michael Lynk,
A/72/43106 (23 octobre 2017
|
↑ 3.
|
Rapporteur
spécial des Nations unies, John
Dugard, Situation des droits de
l’homme en Palestine et dans les
autres territoires arabes
occupés, A/HRC/4/17 (29 janvier
2007), à l’adresse suivante :
https://unispal.un.org/DPA/DPR/unispal.nsf/1ce874ab1832a53e852570bb006dfaf6/b59fe
224d4a4587d8525728b00697daa?OpenDocument
|
↑ 4.
|
Rapporteur
spécial des Nations unies,
Richard Falk, Rapport au Conseil
des droits de l’homme,
A/HRC/16/72 (10 janvier 2011), à
l’adresse :
https://unispal.un.org/DPA/DPR/unispal.nsf/0/A72012A31C1116EC8525782C00547DD4
et Rapport A/HRC/25/67 (13
janvier 2014), à l’adresse :
https://www.refworld.org/docid/531439c44.html
|
↑ 5.
|
United
Against Apartheid, Colonialism
and Occupation : Dignity &
Justice for the Palestinian
People (2008), à l’adresse
suivante :
https://www.bdsmovement.net/news/united-against-apartheid-colonialism-and-occupation-dignity-justice-palestinian-people
|
↑ 6.
|
Occupation,
Colonialisme, Apartheid, Human
Sciences Research Council of
South Africa, (2009), à
l’adresse suivante :
http://www.hlrn.org/img/documents/HSRC%20study%20-%20Occupation,%20Colonialism,%20Apartheid%20-%20full.pdf
|
↑ 7.
|
John Dugard
et John Reynolds, « Apartheid,
International Law, and the
Occupied Palestinian Territory »,
EJIL 24 (2013), 867-913, à
l’adresse suivante :
http://www.ejil.org/pdfs/24/3/2421.pdf
|
↑ 8.
|
Tribunal
Russell sur la Palestine,
session du Cap (2011), à
l’adresse suivante :
http://www.russelltribunalonpalestine.com/en/sessions/south-africa/south-africa-session-%E2%80%94-full-findings
|
↑ 9.
|
UNESCWA, « Israeli
Practices toward the Palestinian
People and the Question of
Apartheid » (mars 2017),
ultérieurement retiré du site
web de l’UNESCWA sur instruction
du Secrétaire général de l’ONU.
Disponible à l’adresse suivante
:
https://electronicintifada.net/sites/default/files/2017-03/un_apartheid_report_15_march_english_final_.pdf
|
↑ 10.
|
CERD,
Observations finales – Israël ;
voir par exemple,
CERD/C/ISR/CO/14-16 (9 mars
2012), à l’adresse suivante :
https://www2.ohchr.org/english/bodies/cerd/docs/CERD.C.ISR.CO.14-16.pdf
|
Le dossier Salah Hamouri
Le
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