Rapport
La boulangerie et le four d’Abou Sanina
face à la vague coloniale
CPI
Photo: CPI
Dimanche 19 avril 2015
Al-Quds occupée – CPI
« C’est une boutique arabe. Quitte-la
tout de suite et n’y retourne
jamais ! », a crié une institutrice
israélienne à un de ses élèves, lorsque
le petit garçon avait essayé d’entrer
dans la boulangerie d’Abou Sanina, dans
l’ancien bourg d'Al-Quds.
L’enfer du racisme est plus brûlant
que ce four historique. « Nous avons
l’habitude d’entendre leurs cris et
leurs insultes discriminatoires
quotidiens », dit Abou Sanina.
La boulangerie d’Abou Sanina se
trouve dans le quartier d’Al-Charaf,
depuis plus de quatre-vingt-dix ans.
Quatre-vingt-dix ans plus tard, l’odeur
de son pain et de son gâteau remplissent
tout le ancien bourg d'Al-Quds. Cette
boulangerie est désormais la seule
boutique arabe dans tout le quartier. Ce
quartier, ses maisons, ses pierres, ses
boutiques sont dévorés par la vague
coloniale, depuis 1967.
Sur un petit feu, les occupants
sionistes travaillent pour déranger les
Palestiniens de la ville de Quds. Dans
ce quartier d’Al-Charaf, appelé
désormais « le quartier des juifs », il
ne reste que cette boulangerie résistant
contre l’occupation.
Mainmise sur la
boulangerie
Ziyad Abou Sanina est un des gérants
de la boulangerie. Il confie au
correspondant de notre Centre
Palestinien d’Information (CPI) que sa
famille a commencé à louer le local
avant la première guerre mondiale, en
1912, bien avant l’occupation sioniste.
Trois générations se sont succédé
dans la boulangerie. Son grand-père, son
père, puis lui et ses frères. Elle est
source de vie pour plus de soixante-dix
personnes.
« La boulangerie est toute ma vie.
Lorsque j’y entre, je sens l’odeur de
mon père et des trois frères qui nous
sont quittés », dit-il. La boulangerie
fabriquait la pâte et la distribuait aux
maisons. Maintenant, elle fabrique le
gâteau en sésame et le distribue dans
l’ancien bourg d'Al-Quds.
Les menaces des colons
En jetant un regard sur les murs
extérieurs de la boulangerie, on ne
remarque aucun espace vide, on remarque
les slogans racistes partout dont « La
mort pour les Arabes, les Arabes auront
la mort ». Abou Sanina avait été agressé
par les colons devant sa boutique ;
bizarrement, c’est lui qui a été détenu.
Les autorités de l’occupation sioniste
ont fermé la boulangerie pour une
semaine, sous prétexte qu’elle est près
du mur Al-Boraq.
Le cœur serré, Abou Sanina attire
l’attention sur le commerce en agonie
dans son quartier d’Ash-Sharaf. Beaucoup
ont peur d’y aller, peur des agressions
des colons et des fouilles pratiquées
abusivement par la police de
l’occupation, peur de l’humiliation et
du temps perdu.
Les occupants sionistes n’épargnent
rien pour gêner le travail de la
boulangerie. Durant les fêtes juives,
les colons écrivent sur son mur « La
boulangerie appartient aux Arabes, n’en
achetez pas ». Ils proposent du pain et
des gâteaux et des jus, devant la
boutique ; ils les distribuent
gratuitement pour briser, tuer,
assassiner le reste du semblant de
commerce.
Le travail est très difficile dans le
quartier. Il est très difficile
d’apporter la farine et le carburant à
la boulangerie et cela coûte cher. La
municipalité a imposé à la boulangerie
de se munir du gaz naturel, une
difficulté supplémentaire, un coût
supplémentaire.
Sommes exorbitantes
Les colons sionistes ont proposé au
grand-père et au père d’Abou Sanina des
sommes exorbitantes pour acheter la
boulangerie. Suite à leur refus, les
menaces ont commencé par les colons,
épaulés par la municipalité et le
gouvernement de l’occupation sioniste.
Le jeune Attef Abou Sanina travaille
depuis ses seize ans. Les occupants
sionistes ont interdit aux voitures de
se garer vers la boulangerie. Dès lors,
la vente a bien baissé.
Jadis, ajoute-t-il, dix personnes
travaillaient dans la boulangerie et
parfois ils avaient besoin de coups de
main supplémentaires. Actuellement, n’y
travaillent que trois personnes.
Attef conclut enfin : « Nous luttons
par tous les moyens pour préserver notre
boulangerie. Nous y resterons jusqu’au
dernier souffle de notre vie ».
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