Palestine
Patrick Le Hyaric interpelle M. Ayrault
concernant la situation en Palestine
Lundi 22 février 2016
De retour d’une mission en Palestine,
Patrick Le Hyaric, député au Parlement
européen, directeur de l’Humanité,
s’adresse à Jean-Marc Ayrault, ministre
des Affaires étrangères, pour l’inciter
à accélérer le processus de convocation
d’une conférence internationale et le
dépôt d’une résolution contre la
colonisation au Conseil de sécurité des
Nations-Unies :
Patrick LE HYARIC
Député au Parlement européen
Vice-président du Groupe de la
Gauche Unitaire Européenne –
Gauche Verte Nordique
Monsieur Jean-Marc AYRAULT
Ministre des Affaires
étrangères et du
Développement international
37 Quai d’Orsay
75007 Paris
Fait à Saint-Denis, le 17 février
2016
Monsieur le Ministre,
De retour d’une mission de
parlementaires européens en Palestine je
me dois de vous informer de ce que j’y
ai vu.
D’abord, comme vous le savez la
situation ne cesse de s’y aggraver du
fait de l’amplification de la
colonisation impulsée par le
gouvernement israélien. C’est le cas à
Jérusalem-Est et dans plusieurs endroits
des territoires dont le cœur de la
vieille ville d’Hébron où des rues
entières sont privatisées, les colons
israéliens y installent des barrières de
contrôle, accaparent des maisons, et
créent toutes les conditions pour que
les palestiniens quittent certains
quartiers dans la vieille ville
d’Hébron.
C’est le cas aussi dans tout l’espace
baptisé « zone C » où les « paysans
bédouins » sont chassés, leurs terres
volées, leurs maigres habitations et
bâtiments de ferme démolis dans une
violence aussi brutale que le silence
qui entoure ces vols punissables par le
droit international.
Tous les palestiniens de la rue que
nous avons rencontrés ne comprennent pas
cette impunité à l’égard du gouvernement
israélien. Ils le vivent comme une
injustice devenue de plus en plus
insupportable. Ils nous demandent
d’agir.
Tout aussi incompréhensible est pour
eux l’attitude de pays européens et de
l’Union européenne qui financent des
projets utiles à la vie dans les
villages ou les villes, pour l’accès à
l’eau, la santé ou l’éducation, détruits
par l’armée israélienne sans qu’aucun
compte ne soit demandé, sans qu’aucune
sanction ne soit prise.
Pourtant l’Union européenne dispose
d’un outil juridique contre les
démolitions israéliennes, les atteintes
répétées aux droits humains, le vol de
terres et de maisons : l’application de
l’article 2 de l’accord d’association
Union Européenne – Israël qui prévoit
que celui-ci est suspendu dès lors que
les principes de démocratie et de
respect des libertés sont violés.
Les responsables de l’URNWA en poste
à Gaza nous ont fait part de
l’insupportable dégradation de la
situation qu’ils constatent avec
notamment la difficulté persistante de
construire des logements détruits lors
de la dernière offensive guerrière de
l’armée israélienne.
Je dois aussi vous informer de
l’immense attente que suscitent les
propositions d’initiatives françaises
formulées ces derniers mois par votre
prédécesseur.
Tous les dirigeants qui comptent en
Palestine, le premier ministre, M. Nabil
SHAATH, M. Saeb EREKAT, Mme Samia Bamya,
Vice-ministre chargée des affaires
européennes au Ministère des Affaires
Etrangères, ont beaucoup insisté sur la
nécessité de réussir ces nouvelles
initiatives politiques et diplomatiques.
J’ai compris qu’ils comptent beaucoup
sur la France, donc sur vous-même
Monsieur le Ministre.
Ces deux actes forts seraient d’une
part le dépôt d’une résolution au
Conseil de sécurité condamnant la
colonisation et l’occupation
israélienne. D’autre part la relance
sous des formes nouvelles d’une
conférence internationale sur la base du
droit international pour parvenir à une
solution à deux Etats viables, en
sécurité, dans les frontières de 1967
avec Jérusalem-Est comme capitale de la
Palestine.
Dans l’esprit des dirigeants
palestiniens il s’agirait d’un
processus. Ils accepteraient pour
l’amorcer, un forum d’un format limité à
quelques pays européens, à des membres
du Conseil de sécurité de l’ONU, à
l’Egypte, à des représentants de
la ligue Arabe.
Ils nous ont également informés que
se tient actuellement à Doha des
réunions visant à une unité nationale
Palestinienne entre le Fatah et le Hamas
en prévision de la préparation
d’élections générales.
Ils refusent avec fermeté que les
mouvements terroristes utilisent la
cause palestinienne pour justifier leurs
crimes et souhaitent entamer un
processus démocratique en Palestine.
Celui-ci ne sera possible qu’avec
l’arrêt de la colonisation, un début de
négociation et la réconciliation
palestinienne.
Enfin, plusieurs de nos
interlocuteurs ont évoqué la nécessité
de déployer une force de protection
internationale du peuple palestinien qui
en même temps contribuerait à la
sécurité des populations israéliennes.
Les instruments juridiques existent
pour une telle initiative avec les
résolutions des Nations Unies dont la
605 de 1987, la 672 de 1990, la 904 de
1994.
Je suggère que la France soutienne
une telle proposition qui
permettrait dans un premier temps de
modifier le climat actuel et de
sécuriser les populations.
Si vous poursuivez les démarches
engagées, nul doute que vous trouverez à
vos côtés des élus, des parlementaires,
des forces politiques dans notre pays et
au-delà pour réussir, enfin, un
processus de reconnaissance de deux
Etats et la fin de l’occupation.
Tels sont les quelques éléments que
je souhaitais porter à votre
connaissance, en souhaitant ardemment
que vous puissiez porter rapidement sur
la scène internationale ces deux
initiatives sur lesquelles la diplomatie
française s’est déjà engagée.
Je reste évidemment à votre
disposition ou celle de vos services
pour un compte rendu plus exhaustif.
Dans l’attente, recevez, Monsieur le
Ministre, l’expression de ma haute
considération.
Patrick LE HYARIC
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