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Par Fériel Berraies Guigny. Paris

Richard Bohringer « prenez-moi avec vous, Président Wade » !

Nous avons rencontré Richard Bohringer, à l’issue de la sortie de son dernier ouvrage aux éditions Arthaud, «Bouts Lambeaux» nous avons découvert un homme passionnément épris de « Sa mama Africa »  et de son Sénégal. Récit de notre entretien.

Entretien avec Richard Bohringer :

Vous avez choisi le Sénégal comme votre nouvelle patrie, votre africanité vous la vivez comment ? Je la vis entre l’émerveillement et une forme de … enfin, je la vis tout simplement. Vous savez la passion est une chose normale pour moi. Et l’Afrique ne peut inspirer que de la passion et du respect. Les peuples du Sahel méritent notre respect, ce sont des gens dignes et courageux.

Qu'est ce qui inspire aujourd'hui votre création littéraire ? La vie c’est tout, c’est à la fois complexe et si simple à la fois, la vie. J’ai commencé ma vie sur la route, par l’écriture, j’ai écrit plein de nouvelles, de poèmes, j’étais très prolixe à une certaine époque, il m’arrivait d’écrire une nouvelle par semaine.

Au jour d’aujourd’hui, je ne sais pas si je pourrais toujours écrire autant de nouvelles, il y en a deux dont Bouts Lambeaux, elles font partie de la vingtaine que j’ai écrites, sans compter celles qui ont disparu avec le temps. Car l’écriture c’est aussi la mémoire. C’est biodégradable aussi l’écriture.

Puis ensuite le théâtre est venu plus tard. Le théâtre est venu car je devais penser qu’à ce moment de ma vie, il fallait que je me tourne vers cette autre forme d’expression. Des pièces ont été jouées, je suis métaphorique moi, je suis un peu africain la dessus, «j’écris ce que le vent me porte»! Je n’ai pas d’organisation dans mon écriture, c’est le feeling qui me motive.

Bouts Lambeaux votre dernier ouvrage évoque quoi ? Ce sont des bouts de vie, des bouts de la mémoire de l’humain, que j’ai voulu décrire dans cette nouvelle. La vie avec ses coupures, ses épisodes, ses histoires.

Parlez-nous de votre l'Afrique, qui est-elle ? Pour moi elle est avant tout la matrice du Monde, la mère nourricière, notre « Mama Africa « à tous car elle est le début et l’origine de tout.

Je dirais simplement, allez-y !

Je ne pourrais résumer en quelques mots ou en quelques lignes l’Afrique ce serait lui faire injure. Aujourd’hui je peux simplement vous dire que je ne pourrais pas parler de l’Afrique végétale, car mon Afrique à moi, celle que je connais et qui m’est familière, c’est l’Afrique de la Savane. Ce n’est qu’en Côte d’Ivoire que j’ai découvert le végétal, avec les arbres qui s’écrasent dans l’eau, et le grand fromager. Après, les deux seuls arbres que je connais son le Baobab et le Karité au Burkina.

L’Afrique de mon quotidien, c’est l’Afrique qui vit sous la poussière et la chaleur, les villages écrasés par le soleil. C’est l’Afrique très très rude. Cette Afrique là, qui m’a adoptée, c’est celle pour qui j’ai un respect immense, elle m’a accueilli à bras ouverts. L’Afrique on ne pourra jamais lui retirer sa grandeur. L’Afrique est immense, son âme est immense, sa palpitation est immense. Sa diversité et sa créativité sont immenses.

Vous avez joué dans « Toussaint » en 2006, film sur la thématique de l’esclavage, aujourd’hui avec le recul vous en pensez quoi de l’esclavage ? Le peuple africain est meurtri de l’esclavage, je regrette moi que mon coprésident, le Président Wade, ne fasse pas plus appel à moi, pour défendre à l’extérieur, les valeurs de l’Afrique !

Un jour j’ai déclaré que je n’étais pas d’accord avec lui sur tout, alors peut être qu’il en a pris ombrage. Moi, je juge un Président à ceux qui l’entourent, qu’ils soient blancs ou non. Moi je sais que je suis un rempart d’amour, d’estime, de respect et d’admiration, alors on ne peut pas me raconter de salades !

Toutes les salades, toutes les grimaces avec l’Afrique je les connais. L’Etat de l’Afrique aujourd’hui, est due à la corruption endémique des gouvernants africains mais aussi, la corruption des blancs qui se sucrent sur le dos de l’Afrique. Et les Africains cèdent à cette mécanique au lieu de construire leur Nation. Moi j’ai le droit de dire ce qui se passe dans cette Afrique. Je ne parle que d’amour ici, car je n’ai aucun intérêt dans cette histoire, je m’intéresse à la condition du peuple africain. Je connais les peuples burkinabé, malien et sénégalais, trois grands peuples, et ils méritent qu’on leur rende tout cet amour qu’ils m’ont donné. L’homme et la femme africaine vivent l’âpreté d’un quotidien, la tête haute.

Que voudriez-vous faire pour l’Afrique si l’occasion vous était donnée ? Je pense que je serai très naïf. Simplement, il faut faire faire attention aujourd’hui, que certains pays africains comme le Sénégal ne bascule pas dans l’intégrisme!

C’est vrai que la liberté dans son sens le plus absolu, n’existe nulle part, mais quelque soit le pays, la vraie démocratie n’existe pas non plus. Sur cela je peux même dire, que l’Occident n’a de leçons à donner à personne et encore moins à l’Afrique ! Quand on est honnête, nous les occidentaux on a du mal à partir «ailleurs» avec nos «principes à nous »

Je transcende de temps en temps cette Afrique, car j’ai envie d’éclairer ces ignorants qui la méconnaissent et la jugent sous leur prisme à eux. Qu’a-t-on fait de nos valeurs occidentales, avons-nous défendu la cause du démuni pour autant ?

L’Afrique c’est un monde de valeurs, comme le partage, la solidarité, ne sont-ce pas des vertus que nous aurions nous même perdues ?

Moi j’ai deux Présidents, Sarkozy et le Président Wade qui est homme important pour moi, c’est le président du pays qui m’a donné la nationalité et c’est vrai que dans un élan romanesque, certainement j’aimerai être à ses côtés pour surveiller certaines choses comme ces africains qui se remplissent les poches sur le dos de leur peuple. C’est sûr que moi, je ne serai pas le blanc de service !

Que pensez-vous de la Françafrique actuelle et de certains africains qui lui font encore allégeance ? Il y a des personnes qui pensent que la Françafrique est un crime de l’histoire et c’est vrai, à qui cela a servi ? Aux blancs de la Françafrique qui ont fait beaucoup de mal au Continent, aujourd’hui moi je refuse de me taire et encore je ne dis pas tout. Je viens de donner une interview où j’ai crié haut et fort ce que je pensais de la francophonie et de la Françafrique et des méfaits sur les peuples africains. Cela n’a pas plu à tout le monde et j’ai reçu une lettre d’un universitaire africain qui m’a reproché mes propos. En disant qu’il ne fallait pas tout reprocher à la France. Il y avait quelque chose qu’il ne comprenait pas comme ce rejet épidermique du rôle de la France en Afrique, pourtant je suis un « françaoui » !Il faut se garder d’aller en Afrique avec nos principes occidentaux et nos jugements de valeurs. Ces discours de surface, comme la phrase malheureuse du Président Sarkozy au Sénégal, sont à éviter. Les Africains ont senti un profond irrespect, il faut faire très gaffe avec les peuples d’Afrique, au Sénégal les Ouolofs sont très paumés, ils sont encore très meurtris par rapport à la colonisation. Il ne faut pas l’oublier.

Je vais même plus loin, moi quand je vois des « mecs » s’en mettent plein les poches, gratter le sol alors qu’il n’y a rien à gratter, cela m’insupporte. Et j’en ai rien à faire si les blancs ou les africains costard trois pièces me détestent!

 Le Panafricanisme mythe ou réalité à construire ? Oui j’y crois, c’est un projet magnifique qu’il faut réaliser. Moi je vois déjà un trio politique gagnant, Atété, Compaore et Wade, s’entendraient très bien ensemble car ce sont des leaders dont les peuples représentent des multitudes d’ethnies qui doivent s’unir. Ce sera le début d’une indépendance véritable ! Car l’Union africaine si elle est véritable, peut faire sa force. Rien qu’avec la création d’une monnaie africaine unique par exemple, l’Afrique pourra enfin décider de son avenir. Il ne faut jamais oublier la grandeur de l’Afrique : dès l’Antiquité, elle fut précurseur dans bien des domaines, mais on a tendance à passer sous silence cet aspect de l’histoire.

L’Afrique intéresse de plus en plus le Brésil et la Chine, vous en pensez quoi ? La visite du Président du Brésil à Ouagadougou, m’a beaucoup impressionné ; cet homme est un homme de bien et j’espère qu’il le restera. Par ailleurs, il sait très bien ce qu’il fait tout comme les chinois qui ont vu les potentialités d’un marché et des débouchés pour eux. Ils ne sont pas « cons » même la misère est un marché ! Nous les Français, nous y avons habité et aujourd’hui, on est incapables de garder des liens qui soient sains ou de préserver la suite dans les relations diplomatiques. Pourquoi ça ne serait pas nous les Français à la place des chinois ? Au lieu que les africains achètent les 100 millions de mobylettes chinoises, pourquoi cela ne serait pas les vélos français ou européens ? C’est parce que nous on a toujours une politique du dominant même quand on parle d’échange !

Faudrait-il changer les mentalités ? Le Nord considère à tort que l’Afrique est à la traîne, parce que c’est un peuple de « flemmards » mais le Nord n’est pas conscient des réalités climatiques et environnementales africaines qui font que pour l’africain la vie est un combat quotidien. Il faut cesser de croire que c’est une culture différente de nous, car à géographie ou latitude différente, on ne vit pas de la même façon. Le système de vie est rude, à une heure de l’après midi, à 45 degrés il est impossible de survivre. Les femmes et les hommes sont conditionnés par la géographie et le climat, et on devrait de se fait, être plus compréhensif. Il faut arrêter ce regard de mépris. L’Afrique et son climat font que les hommes disparaissent au fond de leur case pour se protéger des rigueurs de la nature. Le vrai visage de l’Afrique peu de personnes la connaissent. L’Afrique est brillante, c’est un grenier d’intelligence, la ruisselance de la mémoire. Aujourd’hui, l’Africain doit avoir confiance et être aimé et respecté. Essayons d’être meilleur aujourd’hui avec eux.

Faut-il aussi pour l’Afrique rompre avec son attitude de victimisation passive ? Absolument, il faut regarder de l’avant, cela ne sert à rien de mettre sur la table le passé. Mais il faut aussi que l’homme blanc se fasse pardonner et qu’il lui dise « Afrique, je t’aime et je vais t’aider sans intérêt » ! Car vivre sans toi est impossible. La cohabitation est la seule issue : mais restons pragmatiques, je veux 25 dispensaires dans les villages du Sahel. Alors oui, on donne l’argent mais on ne doit pas le donner à n’importe qui, et surtout il faut éviter de ne pas revenir l’année d’après pour voir ce qu’on en a fait.

Si vous deviez vous engager, pour quelles causes africaines le feriez-vous? Je suis très préoccupé et je voudrais dire très fort au Président Wade, que c’est inadmissible que la famine existe en Afrique. A l’heure d’aujourd’hui, en Afrique tout pousse, les Africains sont des paysans magnifiques, ce qu’il faut c’est de l’eau. Famine au Sénégal, c’est surréaliste avec 1000 kms de côtes maritimes J ’ai dit un jour qu’il fallait carrément dessaler la mer pour pouvoir irriguer les terres, l’universitaire africain qui m’avait écrit, avait aussi réagi par rapport à cette question en disant que c’est trop coûteux ! Mais il faudra bien un jour le faire, car le Sahel aura de moins en moins de l’eau. Dans quelques années, l’Occident ne laissera pas le Sahel lui prendre une seule goutte d’eau. La guerre pour le pétrole c’est une rigolade avec ce qui nous attend pour l’eau ! Il va falloir qu’on la protège notre flotte !

Que pensez-vous de la situation alimentaire actuelle en Afrique ? Est-ce que le Capital et l’enrichissement nous ont apporté la preuve du respect et l’éthique des autres et de nous même ? Aujourd’hui les sociétés agroalimentaires occidentales sont pleines jusqu’à ras bord, il faut arrêter de nous raconter des conneries, les greniers sont pleins. C’est inadmissible, si on ne veut pas que l’Afrique souffre de famine on a les moyens de l’en sortir ! Et puis il faut arrêter avec la colonisation du Francs CFA qui asphyxie les peuples africains, il faut arrêter cette colonisation financière ! Comment voulez vous que l’africain mange à sa faim dans un contexte pareil !

Avez vous à dire quelque chose au peuple d'Afrique? Oui, que l’Eldorado c’est l’Afrique et qu’il faut arrêter de rêver de l’Europe ! Il faut donner les moyens aux africains de rester chez eux. Il faut que les projets sur place soit viables, qu’ils soient suivis et maintenus. Il faut faire que l’auto alimentation devienne une réalité. Tout peut pousser, même dans le désert, regardez ce que font les mauritaniens, ils puisent l’eau de la mer. L’Afrique du Sahel, peut faire de grandes choses, le climat n’est pas une fatalité, tant qu’ il y a les hommes, et les moyens, l’espérance d’une terre nouvelle est possible. C’est un crime que déraciner un peuple et le porter à la misère du Nord, mais je comprends aussi le père de famille du Sud qui s’exile loin de sa famille pour nourrir les siens. C’est un drame familial inévitable, moi-même je franchirai les mers au risque de ma vie pour nourrir mes enfants. Sur le fonds, je comprends l’immigration sauvage, il faut que l’on arrête de se combattre les uns les autres. Les humains sont au bord du précipice et moi je crois à l’apocalypse car nous avons atteint des seuils d’inhumanité, il faut que cela finisse un jour où l’autre, nous sommes condamnés. Seules la pensée, l’intelligence, la volonté de nos principes, feront que nous pourrons peut être créer demain, un monde meilleur. Il faut arrêter les conneries, tout ça c’est pas très compliqué au fond.

Je voudrais juste dire, « prenez-moi avec vous Monsieur le Président, moi je suis le plus fidèle avec tout ce que vous m’avez donné » !

Crédits :
NEW AFRICAN PROPRIETE EXCLUSIVE
Article de presse Courtesy of Fériel B.G Rédactrice en chef www.africasia.com
Publié le 6 décembre 2008 avec l'aimable autorisation de Fériel Berraies Guigny



Source : Fériel Berraies Guigny


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