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Par
Fériel Berraies Guigny. Paris
Jean
Daniel « …J’ai toujours pensé que la route de Bagdad
passait par Jérusalem et que rien ne serait possible sans une
paix juste et durable entre les Israéliens et les Palestiniens …»
Jean Daniel - Photo TAO Paris
Journaliste
et écrivain français, Jean Daniel Bensaïd est né en 1920 à
Blida (Algérie) dans une famille juive et partira pour Paris, où
il fera carrière dans la presse sous le nom de Jean Daniel. Après
avoir dirigé une revue littéraire (« Caliban »),
parrainée par Albert Camus, il entre en 1954 dans l'équipe de
l'hebdomadaire L'Express, fondé par Jean-Jacques Servan-Schreiber
et Françoise Giroud. Il en en sera le rédacteur en chef. Il
quittera ensuite L'Express pour créer et diriger Le Nouvel
Observateur, hebdomadaire engagé à gauche. Il est l’auteur
d’une vingtaine d'ouvrages, dont deux romans («L'erreur» et
« L’ami anglais »), deux gros volumes de mémoires (« Avec
le temps » et « Soleils d’hiver ») et
plusieurs essais, dont notamment «La guerre et la paix. Israël -
Palestine (chroniques 1956-2003)», et «Cet étranger qui me
ressemble» (entretiens avec Martine de Rabaudy), Des œuvres de
Jean Daniel ont été traduites en italien, en espagnol, en grec,
en chinois, en japonais, en anglais (américain) - et en arabe. Il
a présenté, ce mois de février 2007, son dernier ouvrage, «Avec
Camus. Comment résister à l'air du temps» à l’occasion du 13e
Maghreb des livres à Paris.
Fériel Berraies Guigny l’a rencontré pour la première
fois à la 13e édition du Maghreb des livres, ce mois
de février 2007. Lors de la signature de son dernier ouvrage :
Avec Camus, comment résister à l’air du temps (éditions
Gallimard, 2006).
Instant magique, et croisée des chemins, qui nous ont amenée
sur les pas d’une véritable légende vivante. Affabilité et
courtoisie au rendez vous, l’éminent journaliste et écrivain,
père fondateur du Nouvel Observateur, grand ami de la Tunisie, a
accepté de se confier à la journaliste tunisienne.
C’est dans son bureau, antre de ses plus grandes réalisations
journalistique et littéraires, peuplé de portraits des plus
grands rencontrés lors de sa carrière exemplaire, que nous avons
devisé avec beaucoup d’émotion et de gravitésur un parcours
exceptionnel, une vie touchée par la magie de rencontres humaines
inoubliables. Une discussion s’est également nouée sur le
journalisme et son état actuel, les élections présidentielles
en France, la politique d’immigration de Sarkozy, les souvenirs
tunisiens, pour finir par une petite pensée pour l’ami
Camus, à qui il a dédié sa dernière réflexion.
Rencontre
avec Jean Daniel :
Après plus de cinquante ans de journalisme, ayant interviewé
et côtoyé les plus grands (de JFK à Castro), on peut dire que
vous avez donné les lettres de noblesse au journalisme
intellectuel, que répondez vous? Le passage du journalisme à
l’écriture, est ce un passage logique ou une vocation ?
C’est Régis Debray, qui a décidé, il y a longtemps,
que j’avais créé un « journalisme culturel »
pareil à aucun autre. Mais cette dimension particulière de mon métier
n’est pas forcément présente dans les rencontres avec les
« grands hommes ». En revanche, il est vrai que pour
le reste, je n’aurais pas pu faire « le journalisme des
autres » non seulement du fait de mon tempérament littéraire,
mais parce que j’observais l’état dans lequel se trouvait la
plupart des journaux, ce qui n’a d’ailleurs pas beaucoup changé.
En fait, je n’aurais pas fait de journalisme non plus
s’il n’y avait pas eu mon désir de m’engager dans les
luttes anti-colonialistes et dans le désir d’accompagner l’émancipation
des peuples colonisés. Longtemps je n’ai vu la politique et le
monde qu’au travers de la décolonisation. Mais pour revenir aux
rencontres avec des hommes et des femmes d’exception, il est
vrai que j’ai eu le privilège de m’entretenir, et même
parfois de nouer des liens avec celles et ceux qui font
l’Histoire. Pas d’équivoque. Je déteste le phénomène de
« poepolisation » et de vedettisation. Pour moi il y a
les héros qui font l’Histoire, les peuples qui la subissent et
les témoins qui l’accompagnent. J’ai voulu être l’un de
ces témoins. J’ajouterai à cela, que je fais parti d’une génération
où l’on ne séparait pas l’engagement politique, de la littérature,
de la philosophie ou sciences humaines, du journalisme. Il n’y
avait pas cette obligation, qui touche aujourd’hui les jeunes
gens, et qui consiste à se spécialiser pour faire ce métier. En
faisant mes premières armes de journaliste sur le terrain
ou à travers les voyages itinérants, je savais qu’à tout
moment je pouvais me remettre à enseigner la philosophie ou à écrire
des livres. J’étais journaliste et pourtant je gardais cette
liberté de penser que je pouvais faire autre chose. Au moment de
la Libération, nos grands maîtres étaient les journalistes américains
mais en même temps de grands romanciers comme Hemingway,
Caldwell, Steinbeck, Dos Pasos. Surtout Dos Pasos car il était très
engagé politiquement, nous rêvions tous de l’imiter.
C’est comme ça que dans le journalisme, j’ai eu
plusieurs besoins, plusieurs exigences. D’abord le besoin de ne
pas jamais m’éloigner de la culture. Pour moi, il ne me
viendrait jamais à l’idée d’aller dans un pays sans
jamais connaître les écrivains du pays que je visite, car ils
expriment l’âme du peuple.
Pour revenir à l’univers maghrébin, j’ai toujours
recherché, mais sans jamais pouvoir malheureusement lire
l’arabe, la familiarité de l’univers des écrivains
maghrébins. Cela m’était facile, car je suis né le même jour
et la même année qu’un grand écrivain algérien, du nom de
Mohamed Dib. J’étais aussi l’ami proche d’un autre grand écrivain,
Kateb Yacine. Au Maroc, je fréquentais les essayistes, les
penseurs de l’islam. En Tunisie, à partir de Sidi Bou Saïd et
guidé par Latifa et Jellal Ben Abdallah, j’ai pénétré dans
l’univers des peintres. Il y a une belle école de peinture
depuis un demi-siècle en Tunisie. Cette familiarité
culturelle m’a aidé à restituer des mentalités, des
comportements et des aspirations.
Que pensez vous de l’état de la presse actuelle, de
l’avancée de la télévision et des médias et de l’Internet?
Je ne peux que vous donner des commentaires généraux.
Avec l’âge je n’ai pas tellement ressenti, au cours de ma
longue carrière, des choses qui m’étaient étrangères.
D’abord parce que j’avais une expérience plus grande que ceux
qui la pratiquaient, sur les méthodes de l’écriture, sur la
radio, y compris sur une partie de la télévision. La seule
vraie rupture, cela a été avec l’internet. C’est une
question de rapport personnel avec la civilisation technologique.
Est-ce que cela modifie l’état de la presse ? Alors oui,
effectivement. Curieusement, l’Internet a ressuscité l’écrit
mais un écrit de base, au détriment de la langue. L’état de
la presse vient simplement du fait qu’elle dépend de facteurs
qui ont sans doute toujours plus ou moins existé, mais qui ont
pris désormais une ampleur dévastatrice, à commencer par la
publicité. Le second phénomène décisif est évidemment le règne
de l’image qui a tout transformé dans la façon de voir, d’écrire
et de transmettre. L’image télévisée impose un mouvement qui
ne connaît pas d’arrêt. Pour retenir l’attention et, comme
on dit, stimuler l’audimat, il faut être obsédé par la
vitesse. La peur du zapping harcèle les producteurs et les réalisateurs.
D’autant que l’on peut savoir à chaque instant si le téléspectateur
zappe ou non. C’est la suppression du temps, indispensable à la
réflexion. C’est un changement radical dans l’histoire de
l’écriture et de l’humanité. L’écriture, c’est l’idée
de prendre le temps, avec la télévision c’est le contraire.
Qu’attendez
vous de la future gouvernance Française ? Pour vous Ségolène
c’est la real démocratie participative ou un coup de bluff médiatique ?
Et Sarkozy, faut il le craindre ou l’espérer ?
Il y a quelque chose de nouveau qui vient d’arriver en
France et dont on est pas encore conscients. Depuis Mendés
France, il n’y avait pas eu de candidats qui se liaient par des
pactes. Or Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy depuis le début de
leur campagne, se référent fréquemment au terme « pacte »
c'est-à-dire le contrat. La démocratie participative a de
positif qu’elle dit au citoyen « je vous écoute »
mais qu’en même temps « vous serez là » pour
« contrôler si je tiens mes promesses ». Ce pacte est
parlé mais il laisse des traces. C’est une nouveauté qui a été
inauguré par Mendés France, quand il a promis aux français la
paix en Indochine et l’indépendance de la Tunisie, par exemple.
Et qu’ensuite il a rendu compte, naturellement, il l’a fait
car il avait réussi. Mais cette idée venue des deux candidats
est nouvelle et reste positive car c’est un moyen de lutter
contre la dépolitisation. C’est l’un des grands dangers de la
démocratie. Lorsque les régimes sont despotiques et que
l’esprit d’insoumission n’est ni toléré ni efficace, cette
dépolitisation tend à devenir une situation normale. On vit
avec, on s’en accommode et on l’apprivoise. Mais au moins il y
a une circonstance atténuante, tandis qu’en démocratie la dépolitisation,
c’est le renoncement à une liberté dont la conquête a coûté
si cher dans le passé et qui est constamment enviée par
les victimes des régimes despotiques. Le phénomène de Ségolène
Royal est qu’il a repolitisé les sceptiques et les démissionnaires.
Il faut ajouter que depuis Catherine de Médicis, il n’y a
jamais eu de femme à la tête de l’Etat français. S’agissant
de Sarkozy, c’est un homme dont les impulsions sont imprévisibles
mais dont les propos demeurent démocratiques. On peut redouter
son arrivée au pouvoir tout en reconnaissant qu’il n’est
absolument pas raciste. Ce qu’il a fait est souvent dans
le bon sens, il a été contre la double peine, il a régularisé
les sans papiers, il a favorisé l’intégration des musulmans de
France. Bien que je regrette cette dernière initiative car l’on
on ne définit par un citoyen par sa religion. Bien sûr, il a
tenu des propos malheureux s’agissant des banlieues et il n’y
est pas très populaire.
Que pensez vous de la politique d’immigration actuelle, et
des projets de Sarkozy dans les domaines de la prévention de la délinquance ?
L’immigration et la délinquance, il ne faut surtout
pas les présenter en même temps, car sinon vous faites le jeu de
Le Pen. Sarkozy n’échappe pas à ce piège lorsqu’il observe,
même avec sympathie, que si l’on visite les prisons ou les hôpitaux
de France, on y trouve un énorme pourcentage de maghrébins. Cela
veut dire que l’immigration va plus vite que la possibilité
d’accueillir les immigrés. L’histoire de l’immigration est
un phénomène planétaire, les frontières disparaissent et rien
ne pourra plus jamais empêcher cette partie de l’humanité qui
n’a rien de frapper à la porte de celle qui a quelque chose. Ce
mouvement est inévitable et il déjoue les calculs de tous les prévisionnistes,
de tous les démographes et de tous les économistes.
La France se démarque des Etats-Unis et a des difficultés
à imposer ses vues en Europe. Peut –elle retrouver son aura par
la mise en œuvre d’une grande politique « méditerranéenne » ?
Je vais être très brutal. La France seule ne peut rien
faire, et les ambitions qu’on prête à la France sont bien
au-dessus de ses moyens actuels. La France par son vote récent
s’est mis en marge de l’Europe. A condition de s’entendre
avec certains pays et non pas de s’attendre à une majorité
totale, je crois alors qu’on peut s’attendre à un noyau dur
aux décisions restreintes. Un des principaux problèmes que nous
avons, car moi-même j’ai milité en ce sens avec Jacques
Delors, c’est que les méditerranéens de l’autre rive
n’arrivent pas à s’entendre entre eux. Ils préfèrent avoir
affaire directement avec la France ou avec l’Europe. Le nombre
d’échange entres les pays maghrébins est ridicule et honteux.
Il n’y a pas de front commun malgré l’esprit de fraternité
entre ces pays, songez quelle force ils pourraient constituer, si
la méditerranée musulmane de l’autre rive avait un front
commun. En ce moment, la politique méditerranéenne française
peine à aboutir, car malgré tous ces efforts, il n’y a
pas d’interlocuteur viable.
Le Moyen Orient et le Proche Orient sont le théâtre des
combats sanglants depuis des décennies. Humiliations et
attentats, répression et injustice, misère et détresse sont le
lot quotidien des peuples qui y survivent. D’où peut venir le
salut ?
Il faudrait un miracle ! D’autant que la guerre
d’Irak n’a fait que décupler les tragédies et les complexités
en ressuscitant les affrontements entre sunnites et chiites.
J’ai toujours pensé que la route de Bagdad passait par Jérusalem
et que rien ne serait possible sans une paix juste et durable
entre les Israéliens et les Palestiniens. A la rigueur, il y a eu
plusieurs moments durant ma longue vie, entre Israéliens et
Palestiniens, où il y a eu des occasions, des lueurs d’espoir ,
des moments privilégiés. Jimmy Carter et Bill Clinton ont été
deux grands présidents sur ce plan. Personnellement, je pense que
s’agissant de Ségolène, les deux termes qu’elle a employés
sont à la fois simples et définitifs : « Justice
pour les palestiniens et sécurité pour les israéliens ! »
On vous voit comme un homme de gauche dans sa plus grande
noblesse, vous voyez vous ainsi? Avez-vous perdu certaines
illusions après l’exercice du pouvoir par la gauche française ?
Ce qu’il y a de plus beau dans la France, à mes yeux,
c’est le fait d’être les héritiers de la grande Révolution
de 1789. La Révolution française issue des Lumières des
encyclopédistes, représente un moment de bonheur civilisationnel,
de renaissance de l’humanité.
Bien sûr, il y a beaucoup eu d’antagonismes dans le
passé, mais maintenant je peux dire que la droite républicaine
tout comme la gauche socialiste sont des héritiers de la Révolution.
Désormais, chacun se sent tenu, par exemple de dénoncer le
racisme, la xénophobie et même l’intolérance. Cela ne veut
pas dire qu’il n’y a plus de racisme, cela veut dire que
c’est devenu un concept marqué par la culpabilité. La distance
entre la gauche et la droite s’est de plus en plus estompée et
cela fait d’eux de vrais héritiers de 1789. En ce moment, il
est évident que s’agissant des problèmes locaux, je suis très
déçu par le manque de courage des hommes d’Etat à résister
contre les revendications corporatives. Il y a une dispersion des
énergies, une contradiction des réalisations, une sorte de résignation
des responsabilités. Les hommes d’Etat sont figés par
l’impuissance devant les forces de revendication, c’est une
chose très handicapante pour un pays désireux de faire des réformes.
Nous avons des promesses de la part des deux candidats, mais pour
quelqu’un comme moi qui est social démocrate et Blairiste, mais
Blairiste à condition de récuser la guerre en Irak, on est loin
du compte.
Vous avez combattu pour la libération de certains pays
maghrébins ; car vous aviez une idée de l’Algérie et de
la Tunisie, connaissez la Tunisie d’après Bourguiba ?
J’ai passé en Tunisie des heures d’une intensité
dont je garde encore l’empreinte. Très tôt j’ai célébré,
dans une prose qui se voulait lyrique et poétique,
l’enchantement et la tendresse des paysages maritimes. J’ai été
amoureux de Sid Bou Saïd, mais aussi de Mahdia, de Gabes et de
Tamerza. Et puis j’ai noué avec bien des Tunisiens des liens
qui ressemblent à des racines. J’ai trouvé le pays admirable,
et grâce au grand historien Paul Sebag, j’ai aimé son
histoire. Et puis j’ai surtout connu deux hommes de l’époque,
c’était Mendés France et Bourguiba. Je voyais Mendès
France à Paris et puis Bourguiba m’avait en quelque sort adopté.
J’avais des rapports privilégiés avec Bourguiba, j’avais
appris à l’approcher mais aussi à prendre mes distances. Par
exemple, s’agissant de la question palestinienne, les deux
hommes qui m’ont influencé sont Mendés France et Bourguiba.
Ils ont dit les mêmes choses au même moment, le fameux de
discours de Jéricho de Bourguiba était pareil à l’appel de
Paris, de Mendés France. Sur ce sujet, les deux hommes s’étaient
retrouvés. Il y a eu ensuite, la dimension despotique de
Bourguiba, qui m’a beaucoup peiné. Il était despote par manque
de confiance en son peuple, il se croyait « grand
instituteur » éternel. Il refusait d’accepter que son
peuple ait mûri.
Quant à la Tunisie d’aujourd’hui, moi qui ai connu
l’ancienne, il est vrai que je ne la connais que très peu.
J’ai rencontré récemment, chez Dominique de Villepin, le
premier ministre tunisien. Et le Président Ben Ali m’a reçu
deux ou trois fois avec élégance en évoquant mon aventure de
Bizerte. Mais il y a des choses que je sais même de loin, car
Paris est un faubourg de la Tunisie. J’ai encouragé le combat
de nombreux révolutionnaires. Quelquefois, j’ai même été
leur complice. Mais quand ils obtenaient l’indépendance, je réalisais
qu’ils étaient devenus des hommes de pouvoir. Souvent, je les
ai sévèrement jugés. Mais j’ai lentement appris depuis
qu’il faut renoncer au jugement absolutiste et lui préférer le
jugement comparatif. Il y a des degrés dans la démocratie et
dans le despotisme. Souvent, quand on regarde un seul pays, on est
désespéré. Et puis, quand on le compare, on est rassuré. Dans
le cas de la Tunisie, je ne peux faire l’impasse sur les audaces
du statut de la femme et sur les avancées économiques et
sociales. Mais je ne me sers pas de cela pour excuser autre chose.
En tant que journaliste, je ne peux accepter qu’il n’y ait pas
de liberté de la presse. C’est une injure aux gens que j’aime
et qui vivent là bas.
S’agissant de Camus, l’ami et pour lequel, vous dédiez
toute une réflexion, qu’est ce qui a été à l’origine de la
rupture ?
Camus et moi nous nous entendions en tout, s’agissant
de l’Algérie, et sur le fait que la colonisation était une
sorte de barbarie, mais le trucage constant et répété des élections
en Algérie qui ont empêché que des hommes comme Bourguiba
puissent devenir des interlocuteurs. Camus souhaitait créer une fédération
franco algérienne avec un certain nombre d’interlocuteurs laïques.
Après l’indépendance de la Tunisie et du Maroc, après la décolonisation
de tous les pays arabes, je considérais que c’était au peuple
algérien de décider s’il voulait s’allier à une quelconque
fédération ou pas. Quand la guerre est arrivée, c’est le
terrorisme et la répression qui a fait que Camus ne pouvait pas
accepter qu’au nom de l’idéal même le plus absolu, on puisse
s’attaquer aux civils. Et on peut dire que le fait d’être obsédé
par l’idée que lui, sa famille, sa mère, ses amis puissent être
victimes du terrorisme, avait pris des proportions effrayantes. Et
cela l’avait amener à me séparer de moi, car je disais qu’il
fallait faire cette révolution même au prix du terrorisme.
Etre vous à l’épreuve du temps, Jean Daniel ?
Oui. Absolument
Crédits :
Source : Hebdomadaire
Réalités Tunisie
Article de presse : Courtesy
of Fériel Berraies Guigny pour F.b.g Communication. France
www. fbg-communication.com
Photo : Tao. Paris
Publié avec l'aimable autorisation de Fériel Berraies Guigny
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