Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (113)
La raison de notre combat
Photo CPI
Vendredi 28 janvier 2011
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam
Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision
du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le
département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a
donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
Annexe I
La raison de notre combat
(Memorandum préparé par le
bureau politique du Hamas à la fin des années 1990 à la demande
de diplomates occidentaux dans la capitale jordanienne Amman)
Le mouvement de la résistance islamique (Hamas) est un mouvement
de libération nationale palestinienne qui lutte pour la
libération des territoires palestiniens occupés et pour la
reconnaissance des droits légitimes palestiniens. Bien qu’il ait
été créé peu après l’éruption de la première Intifada
(soulèvement) palestinienne en décembre 1987 pour exprimer la
colère du peuple palestinien contre la continuation de
l’occupation israélienne du territoire palestinien et la
persécution du peuple palestinien, le Hamas prend ses racines de
manière bien plus profonde dans l’histoire.
La motivation de la lutte du mouvement est exprimée par son
fondateur et leader Sheikh Ahmad Yassine : « Le mouvement se bat
contre Israël car c’est l’Etat agresseur, usurpateur et
oppresseur qui brandit le fusil devant nos fils et nos filles,
jour et nuit ».
Le Hamas se voit comme une extension d’une ancienne tradition
qui remonte à la lutte du début du 20ème siècle contre le
colonialisme britannique et sioniste en Palestine. Les
fondements desquels le Hamas tire sa légitimité se reflètent
dans le nom même qu’il se choisit. Son islamisme signifie qu’il
prend ses principes directeurs des doctrines et des valeurs de
l’islam. En d’autres termes, l’islam est le cadre de référence
idéologique du Hamas. C’est des valeurs de l’islam que le
mouvement recherche l’inspiration dans son effort de
mobilisation et pour compenser l’énorme différence dans les
ressources matérielles entre le peuple palestinien et ceux qui
le soutiennent d’une part et Israël et ses soutiens d’autre
part.
Il est en ce moment inconcevable de penser que le mouvement
commencera ou accepter un dialogue avec Israël, à cause du
mauvais équilibre des forces entre les Palestiniens et les
Israéliens. Sheikh Yassine dit lui-même : « Il ne peut y avoir
de dialogue entre un parti qui est fort et oppresseur et un
autre qui est faible et opprimé. Il ne peut y avoir de dialogue
qu’après la fin de l’oppression ».
Les formes de résistance adoptées par le Hamas découlent des
mêmes justifications sur lesquelles le mouvement de résistance
nationale palestinienne basa sa lutte pendant plus d’un quart de
siècle. Au moins les dix premiers articles de la Charte
Nationale Palestinienne sont totalement compatibles avec le
discours du Hamas comme noté dans sa propre charte et dans
d’autres déclarations. Les mêmes justifications pour la
résistance étaient, avant l’émergence du Hamas en décembre 1987,
reconnues ou approuvées par plusieurs corps régionaux et
internationaux comme la Ligue Arabe, l’Organisation de la
Conférence Islamique, le Mouvement des Non-Alignés et les
Nations Unies. On peut clairement lire dans les résolution 242
et 338 du conseil de sécurité de l’ONU qu’il est reconnu que
l’occupation israélienne de la Cisjordanie et de Gaza en 1967
est illégale.
En dépit de l’initiative des négociations de paix et de la
signature conséquence des accords d’Oslo entre l’OLP et Israël,
le Hamas continua sa lutte, ayant reconnu l’échec du processus
de paix à mettre un terme à l’occupation. Le Hamas croit que la
majorité du peuple palestinien arrivèrent à la même conclusion
et qu’ils ne sont donc pas satisfaits de la voie emprunte par
l’OLP pour établir la paix avec Israël.
Les défenseurs d’Oslo déclarèrent pendant des mois après sa
signature qu’il allait mettre fin à l’occupation et que les
Palestiniens n’ont donc plus besoin de se lancer dans une lutte
armée contre les Israéliens. Mais des années après Oslo, voici
les résultats de la paix :
-
Les territoires occupés en 1967 sont toujours occupés.
-
Comme jamais auparavant, la Cisjordanie et Gaza furent
détruits, mutilés et transformés en des îles et cantons
densément peuplés et isolés, administrés pour les
Israéliens par l’autorité palestinienne.
-
Les colonies juives existantes continuèrent à s’étendre
et de nouvelles furent érigées.
-
Jérusalem est agrandie et désarabisée.
-
De grandes zones de terres furent confisquées pour
permettre la construction de routes de déviation
réservées exclusivement aux Israéliens, notamment aux
colons qui vivent illégalement sur les terres arabes
confisquées.
-
Des milliers de Palestiniens continuent à être détenus
dans les prisons israéliennes.
-
Divers formes de punition collective continuent à être
adoptées, dont la démolition de demeures, la fermeture
complète de régions et l’imposition de blocus
économiques, la destructions de l’infrastructure
palestinienne et le déracinement d’arbres et de
récoltes.
-
La situation économique est bien pire que jamais
auparavant.
En d’autres termes, le
processus de paix n’a pas amélioré les conditions des
Palestiniens sous occupation et ne semble pas promettre un
avenir meilleur. Par conséquent, la réalité du terrain rejette
les dires prétendant que la lutte armée n’est plus nécessaire
(et il est ici à noter que personne du camp palestinien ne la
déclara illégale). Cela donne du crédit à l’argument du Hamas
(qui n’est pas différent de l’argument adopté avant Oslo par le
mouvement nationaliste dans son ensemble et qui continue à être
adopté par nombre de factions palestiniennes opposées à Oslo)
qui dit que la lutte armée est le seul véritable moyen de
libération.
En dépit de l’image
militante dominante que de nombreuses personnes en occident ont
du Hamas, le Hamas n’est pas une simple faction militaire. C’est
une organisation politique et culturelle, dont la base est
populaire, et qui comporte une aile militaire spécialisée dans
la lutte armée contre l’occupation israélienne. A part son aile
militaire clandestine, toutes les autres sections du Hamas
fonctionnent via des plateformes tout à fait publiques. L’aile
militaire a sa propre direction et son mécanisme de recrutement.
Les activités sociales et
éducatives dans les territoires occupés sont si établies dans la
communauté palestinienne que ni les Israéliens ni leurs
partenaires de paix dans l’autorité palestinienne ne purent les
éradiquer. Le fait est que le Hamas, contrairement à ce
qu’affirme Israël, agit comme une infrastructure, pour les
nombreuses institutions culturelles, éducatives et sociales à
Gaza et en Cisjordanie, qui rend des services inestimables et
irremplaçables pour le public. En d’autres termes, c’est le
Hamas qui donne vie à ces institutions, non pas l’inverse. Les
Israéliens dirent à maintes reprises à l’autorité palestinienne
de les fermer. L’autorité palestinienne essaya mais échoua.
Réprimer ces institutions revient à une déclaration de guerre
non pas contre le Hamas, mais contre la communauté palestinienne
dans son ensemble.
Contrairement à l’expérience
de la plupart des autres factions palestiniennes durant les
années 1970, la lutte armée du Hamas prend son origine en
Palestine et se restreint à son territoire, que le Hamas
considère comme le champ de bataille légitime. En limitant sa
lutte armée à la résistance face à l’occupation, le mouvement
évita avec succès les tentatives israéliennes visant à
l’entraîner dans un conflit à l’extérieur de la Palestine. La
tentative de l’assassinat contre Khaled Meshaal, chef politique
du Hamas, était clairement destinée à entraîner le mouvement
dans une guerre d’usure à l’extérieur de la Palestine, une
bataille que le Hamas essaye à tout prix d’éviter. En adhérant à
cette position, le Hamas rendit difficile aux Israéliens et à
leurs alliés, notamment les Etats-Unis, de convaincre l’opinion
publique mondiale que le Hamas est un groupe terroriste. A tous
les niveaux, le Hamas est un mouvement de libération nationale
dont l’effort militaire est seulement et exclusivement dirigé
vers les occupants étrangers.
L’aile militaire du Hamas,
les brigades du martyr Ezzeddine Al-Qassam, planifia et
accomplit plusieurs opérations martyres qui sont souvent
décrites dans les médias occidentaux comme des opérations
suicides. Ces opérations sont en principe dirigées contre des
cibles militaires. La position fondamentale du Hamas, qui est de
ne frapper que des cibles militaire, trouve aberrant de prendre
des civils en cible. Cela représente une exception rendue
nécessaire par l’insistance d’Israël à prendre en cible des
civils palestiniens et par le refus d’Israël à accepter un
accord interdisant de tuer les civils des deux côtés, un accord
comparable à celui auquel parvinrent Israël et le Hezbollah au
sud du Liban. Il est important de rappeler que la première
opération martyre fut une réponse au massage de fidèles
musulmans qui se prosternaient en prière dans la mosquée
Al-Ibrahimi à l’aube du quinzième jour de jeûne du mois sacré de
Ramadan (25 février 1994).
Sheikh Yassine, qui proposa
à plusieurs reprises des offres de trêve aux Israéliens qu’ils
rejetèrent toujours, explique que le Hamas n’approuve pas la
mise à mort de civils. C’est néanmoins parfois la seule option
restante au Hamas en réponse à la mise à mort de civils
palestiniens et l’assassinat avec sang-froid d’activistes
palestiniens.
En dépit de son désaccord
avec l’OLP et l’autorité palestinienne, le Hamas considère tous
les Palestiniens comme victimes de l’occupation israélienne, et
on ne l’entraînera donc pas dans un conflit factionnel
inter-palestinien. Le Hamas croit que nombreux sont ceux qui,
après avoir placé leurs espoirs en Oslo, dont une grande section
de la propre faction de Yasser Arafat, le Fatah, furent déçus.
Ils virent la futilité de l’exercice et réalisèrent qu’ils n’ont
d’option si ce n’est de reprendre le combat jusqu’à ce que
l’occupation prenne fin.
Le Hamas considère tous les
peuples du monde comme des amis et soutiens potentiels du peuple
palestinien dans leur combat légitime pour la liberté, qui est
la seule garante de la réalisation de la paix. Le Hamas croit
qu’une paix permanente n’est possible que si elle est basée sur
la justice et la dignité humaine égale.
Le Hamas est conscient que
l’équilibre des forces dans le monde n’est aujourd’hui pas en sa
faveur, mais réalise que cela fut toujours le cas lorsqu’un
peuple opprimé commença sa longue lutte pour se libérer d’une
occupation et d’une tyrannie étrangères. Nous croyons donc
fermement qu’en fin de compte, les Israéliens vont essayer de
comprendre la réalité et réaliser qu’ils n’ont pour choix que de
délivrer le peuple palestinien de la servitude qui lui est
imposée par l’occupation. Cette occupation viole toutes les
conventions et déclarations internationales que l’on connaît,
dont les diverses résolutions du conseil de sécurité de l’ONU
sur la question.
Le Hamas est prêt à
considérer un accord de cessez-le-feu avec les Israéliens s’ils
acceptent de mettre fin à leur occupation de tous les
territoires occupés suite à la guerre de six jours en 1967. Cela
entraînerait la cessation des hostilités de la part du Hamas en
échange des concessions suivantes de la part d’Israël :
-
Le retrait des soldats d’occupation israéliens de la
Cisjordanie et de la bande de Gaza.
-
L’évacuation de toutes les colonies juives illégalement
érigées par la force en Cisjordanie et dans la bande de
Gaza.
-
La libération de tous les prisonniers palestiniens
retenus par les Israéliens.
-
La reconnaissance du droit du peuple palestinien à
disposer de lui-même.
Le Hamas reconnaît
l’importance du rôle de la communauté internationale pour qu’un
tel accord ait lieu. Il tend donc la main, avec bonne foi et
gratitude, à tous les gouvernements et communautés qui
voudraient prendre part à ce processus pour le bénéfice de
l’humanité et pour réaliser une paix basée sur la justice.
Cependant, le Hamas
n’entrera dans les négociations des détails de l’accord
seulement lorsque les Israéliens auront acceptés les termes
susmentionnés qui sont destinés à entraîner un retrait total de
tous les territoires occupés en 1967.
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
Hamas: son
histoire de l'intérieur (112)
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