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Centre Palestinien d'Information

Hamas : son histoire de l'intérieur (13)


Photo CPI

18 janvier 2009

Dr. Azzam Tamimi

            L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète, diffusée régulièrement en de nombreuses parties.

Du prêche au djihad (2)

 L’Université Islamique

            Vers 1978, comme un nombre croissant de diplômés des Ikhwan très qualifiés retournaient de l’étranger après avoir terminé leurs études en Egypte et ailleurs, l’idée de mettre en place une université à Gaza fut débattu. Depuis le début des années 1970, la Cisjordanie avait vu l’établissement d’universités, certaines d’entre elles créées à travers la transformation d’écoles et de lycées particuliers. La première initiative fut prise en 1972 par l’Ecole de Birzeit, qui annonça un plan pour s’élever au rang d’université avec le lancement d’un programme en quatre ans menant à des diplômes de licence en littératures et en sciences. En 1975, l’Ecole de Birzeit changea son nom en l’“Université de Birzeit”, tenant sa première cérémonie de remise de diplômes le 11 juillet 1976. La seconde institution à se mettre totalement au rang d’université était l’Université de Bethléem de la Terre Sainte, une institution mixte chrétienne catholique d’éducation supérieure. Fondée en 1973, cette institution prend ses racines en 18893, lorsque les Frères Chrétiens De La Salle ouvrirent des écoles à Bethléem, à Jérusalem, à Jaffa et à Nazareth, ainsi qu’en Jordanie, au Liban, en Egypte et en Turquie. L’Université Al-Najah à Naplouse, qui avait à la base été établie comme l’Ecole Al-Najah en 1918, fut fondée en 1977. L’Université d’Al-Khalil (Hébron) se mit en place en 1980 en conséquence d’une mise à niveau de l’Ecole de la Shari’ah, qui avait été mise en place en 1971. En plus des études islamiques, l’université élargit rapidement sa portée pour inclure diverses disciplines scientifiques et littéraires.

            La première université à être établie dans la bande de Gaza fut l’Université Islamique. Ses membres du conseil fondateur étaient principalement des membres des Ikhwan qui étaient aussi impliqués dans Al-Mujamma’ Al-Islami (le Centre Islamique), alors présidé par Sheikh Yassine. La naissance de l’université eut le droit à quelques difficultés. L’organisation locale du Fatah, qui était déjà tourmentée par l’inquiétude de voir l’influence croissante des Ikhwan à Gaza, était prête à tout pour empêcher la réalisation du projet, sauf si le Fatah pouvait complètement le contrôler. Pour éviter la menace potentielle envers leur projet, les Ikhwan demandèrent au président de l’OLP et leader du Fatah Yasser Arafat de soutenir le document fondateur de l’université et de publier un décret désignant un comité fondateur. Il se pouvait qu’il n’ait pas été averti qu’au moins la moitié des membres du comité étaient des figures majeures des Ikhwan de la Palestine et de la Jordanie, alors que l’autre moitié était composée d’officiels du Hamas choisis pour leur sympathie envers les Ikhwan. D’autre part, il se peut que le président de l’OLP ait souhaité remporter la confiance et le soutien des Ikhwan en leur offrant une concession. Il avait toujours nourri l’idée qu’il était le père de la nation et le leader de tout le peuple palestinien, dont les islamistes. Ces derniers, toutefois, n’acceptèrent jamais son commandement, en dépit de son insistance, lorsqu’il les rencontrait, à dire qu’il avait lui-même été pendant un temps un membre des Ikhwan.

            Les quelques premières années de l’université furent accompagnées de sérieuses disputes, au début à l’intérieur du comité fondateur, puis au sein du conseil d’administration. Un des points majeurs de désaccord était sur qui allait remplir la position de président de l’université. Les Ikwan voulaient un des leurs, alors qu’Arafat n’aurait permis qu’un de ses propres supporters. Parfois, les disputes se diffusaient dans les rues de Gaza sous la forme de violence entre les partisans du Fatah et les membres des Ikhwan. La direction des Ikhwan, toutefois, était déterminée à imposer son entière autorité et à maintenir le contrôle total de l’université, même si son seul recours était de répondre de la sorte à l’intimidation et à la violence. La fondation de l’Université Islamique à Gaza était un repère important dans l’histoire du mouvement islamique en Palestine. Il éleva à de nouvelles hauteurs la capacité du mouvement à tendre la main à la communauté et fournit bien plus de services nécessaires dans l’emploi, la formation et l’éducation. Le résultat allait apporter un énorme prestige aux Ikhwan et renforcer leur rôle en tant qu’influence majeure dans la bande de Gaza. En même temps, elle accorda au mouvement islamique une opportunité unique pour célébrer ses dates importantes en les concrétisant dans un calendrier universitaire auquel tous les étudiants devaient adhérer. L’université attira des milliers d’étudiants, aussi bien des hommes que des femmes, de toute la bande de Gaza et de la Cisjordanie, et dans les années qui suivirent, elle fournit une éducation de haute qualité combinée à une orientation islamique. Ceci donna à la société palestinienne une préparation sans précédent pour son soulèvement populaire massif contre l’occupation israélienne.

            A l’extérieur de la Palestine, l’effort de mener le projet de l’Université Islamique à bien généra un sens de responsabilité pour lui fournir le soutien financier, politique et moral nécessaire. Les Ikhwan d’entre la diaspora palestinienne, en Jordanie, au Koweït, en Arabie Saoudite et dans le reste du Golfe, resserrèrent leurs rangs pour une nouvelle unité. Jusqu’en 1978, tout membre palestinien des Ikhwan provenant de la Cisjordanie, qui était bien sûr sous l’autorité jordanienne jusqu’en 1967, était affilié avec l’organisation basée en Jordanie. Ceux de la bande de Gaza était des membres de l’organisation dirigée par les Palestiniens. En 1978, le produit de l’unification était une organisation appelée Tanzim Bilad Al-Sham (l’organisation de la terre de la grande Syrie) sous la direction du leader des Ikhwan jordaniens Abd Ar-Rahman Khalifah, basé à Amman. Le nom impliquait que l’organisation recouvre toutes les terres faisant partie de la grande Syrie historique, à savoir la Syrie, le Liban, la Jordanie et la Palestine. On sentit cependant que l’unification, bien qu’étant une étape dans la bonne direction, était insuffisante toute seule en réponse aux développements rapides et surprenants dans et autour de la Palestine. Les membres palestiniens de la nouvelle organisation pressèrent donc pour la création d’un corps au sein de Tanzim Bilad Al-Sham spécialement pour soutenir les besoins des Ikhwan palestiniens à l’intérieur des territoires. Un “Comité de la Palestine” fut créé dans cette intention par le premier meeting de la shura (conseil) de Tanzim à s’être réuni après l’unification des diverses branches des Ikhwan.

            L’année 1979 vit un élargissement significatif du soutien aux Ikhwan, avec le recrutement de nouveaux membres à travers la région. L’appel et la popularité des Ikhwan étaient encouragés par la réactivation de leur organisation mère en Egypte. Les leaders emprisonnés des Ikhwan égyptiens avaient été libérés dans le début des années 1970, et certains d’entre eux s’étaient mis à voyager, à l’intérieur du monde arabe et au-delà. Les leaders libérés des Ikhwan égyptiens étaient perçus comme des héros qui avaient supporté des années de persécution, résistant à toute pression pour qu’ils renoncent à leurs principes ou à leur affiliation. Aux yeux de nombres de jeunes hommes et femmes dans le monde musulmans, ils étaient les reflets contemporains de la toute première génération de musulmans dans les années après le décès du prophète Mohammed, qui avaient persévéré dans leurs efforts afin que l’islam puisse réussir et se répandre. Les étudiants des Ikhwan palestiniens, que ce soit au Koweït ou en occident, avaient lu les écrits de figures majeures des Ikhwan comme Hassan Al-Banni, Abd Al-Qadir Awdah et Sayyid Qutb. Ces Palestiniens étaient particulièrement émus de rencontrer des hommes qui avaient connu ces figures presque légendaires, afin d’entendre directement d’eux des histoires des Ikhwan et de leurs fondateurs.

            1979 fut aussi une année d’événements significatifs sur la scène internationale. L’ayatollah Khomeyni dirigea une révolution en Iran qui fit tomber le régime pro-américain et pro-israélien du Shah. Khomeyni abolit la monarchie, installant une république islamique qui s’exprima en une rhétorique anti-israélienne et anti-américaine qui était une musique aux oreilles du public palestinien. La même année vit le commencement du djihad pour libérer l’Afghanistan de l’occupation soviétique. Le défi de l’Iran islamique au “Grand Satan”, comme elle qualifiait les Etats-Unis, ainsi que les histoires encourageantes des victoires du djihad en Afghanistan, attisèrent des sentiments dans les rues de Gaza et de Cisjordanie, tout comme ailleurs dans le monde musulman. Entre-temps, cependant, le propre projet de résistance nationale des Palestiniens trébuchait. Le long des années 1970, l’OLP avait montré des signes de fatigue sous la pression de la politique régionale et internationale, et avait été de plus en plus touchée par la corruption et la mauvaise gestion. L’OLP avait commencé à montrer une tendance à plonger dans des jeux politiques mortels, et une inclination vers des compromis coûteux qui ne répondaient vraiment pas aux aspirations nationales déclarées du peuple palestinien. En 1982, Israël envahit le Liban, suite à sept années de guerre civil intermittente dans ce pays. Les forces israéliennes avancèrent jusqu’à la capitale même du Liban, Beyrouth, avec pour résultat l’éviction de l’OLP du Liban. Alors que Beyrouth était assiégée par les forces israéliennes, commandées par le ministre de la défense d’Israël d’alors, Ariel Sharon, entre deux mille et trois mille civils palestiniens non protégés et non armés dans les camps de Sabra et Shatila furent massacrés par l’allié d’Israël, les Forces Libanaises Chrétiennes. Les populations palestiniennes à travers le monde ressentirent un sens étouffant de colère, d’impuissance et de frustration.

            Parmi tous ces événements dramatiques, la pression montait sur les Ikhwan en Palestine pour qu’ils agissent au nom de leur cause. Leur programme de réforme sociale avait semblé absorber tous leurs efforts à un moment où les développements à l’intérieur et autour de la Palestine appelaient à une réponse plus drastique. Ayant pris avec succès le dessus sur les forces nationalistes et de gauche au sein de la société palestinienne, les islamistes se firent alors critiqués, car pendant que d’autres faisaient des sacrifices en résistance à l’occupation, ils s’étaient restreints à des services sociaux et éducationnels. Leurs détracteurs allaient si loin qu’ils les accusaient d’avoir un accord avec les autorités de l’occupation, ce pourquoi leurs activités étaient tolérées et leurs projets autorisés. Les ennemis des islamistes s’embarquèrent dans une propagande démodée du style de Nassir, disant que les Ikhwan sont une invention de la Grande-Bretagne ou des Etats-Unis, ou les qualifiant de laquais des Sionistes.

Hamas: son histoire de l'intérieur (12)
Hamas: son histoire de l'intérieur (14)

Traduction réalisée par le Centre Palestinien d’Information (CPI)



Source : CPI
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