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Politique
Denis ou la malice syndicale
Philippe Randa
Philippe Randa
Mercredi 17 octobre 2007
Travaillez-en paix, braves travailleurs, les
syndicats veillent sur vos droits, vos acquis et, au passage, sur
votre argent. Jusqu’à présent, il fallait être inconscient ou
passablement réactionnaire, vipère lubrique du Grand Capital,
pour oser émettre quelques doutes sur le bien-fondé, l’utilité
ou l’honnêteté des syndicats français. À peine pouvait-on
oser faire remarquer que leur représentativité était quelque
peu sujette à caution, mais que leur importait, puisque « la
question de la représentativité ne se pose pas pour les
syndicats qui adhèrent aux cinq confédérations reconnues par
arrêté “représentatives au niveau national” (CGC, CGT, FO,
CFTC et CFDT). Ils n’ont pas en effet à faire, au niveau de
l’entreprise ou de l’établissement, la démonstration de leur
représentativité. Elle est acquise en application de l’article
L.412-4 du Code du travail par le simple fait de cette adhésion
confédérale. »
Et puis, ce droit de représentativité existe bien pour les députés
: sans élections au scrutin proportionnel, impossible d’accéder
à l’Assemblée nationale si on n’appartient pas aux grandes
formations ou alors de façon bien insignifiante…
La Ve République française est décidément la France des droits
acquis, des régimes spéciaux, des monopoles… Toutes ces sortes
de choses qu’on nommait jadis « privilèges » et auxquels une
sanglante Révolution mit fin brutalement. Au nom des droits de
l’homme et du citoyen. Deux siècles et quelques années plus
tard, l’homme et citoyen français rebaptisé contribuable
commence à ruer dans les brancards et les médias ne peuvent plus
le dissimuler : 61% des Français jugent le mouvement de grève de
demain jeudi injustifié(1) et 77 % estiment qu’il est urgent de
réformer les systèmes de retraite.
Mieux vaux tard que jamais. Ainsi, assiste-t-on depuis quelques
temps au grand déballage des scandales syndicaux, qu’ils soient
celui de la CCAS (caisse centrale d’activité sociale), le comité
d’entreprise d’EDF-GDF, contrôlé totalement par la CGT pour
financer ses activités ou celles du Parti communiste… ou depuis
une semaine celui des importants retraits en espèces sur le
compte de l’Union de la métallurgie (UIMM) par Denis
Gautier-Sauvagnac, l’un des dirigeants du Medef.
La présidente du syndicat patronal, Laurence Parisot, assure pour
toute défense qu’il s’agit là d’un « secret de famille »
et qu’elle est bien soulagée que tout soit désormais répandue
sur la place publique… Que n’a-t-elle déclenché le scandale
elle-même pour apaiser sa conscience, mais la pauvre femme n’était
pas au courant, assure-t-elle. Comment peut-elle alors parler de
« secrets de famille », c’est-à-dire ce que tout le monde
sait, mais dont personne ne parle ?
En tout cas, cela prouve que si le moindre chef d’entreprise vit
dans l’angoisse permanente d’un contrôle fiscal où il devra
justifier de la plus petite somme d’argent entrée ou sortie sur
les comptes de son entreprise, voir de ses comptes personnels, le
MEDEF, lui, ne craignait guère de tels contrôles jusqu’à présent.
Quant à savoir où est passé l’argent de cette caisse noire
patronale, on se perd en conjectures. Denis Gautier-Sauvagnac a
indiqué tout d’abord qu’il était utilisé pour des « œuvres
sociales » de l’UIMM, évoquant l’aide aux salariés et
retraités nécessiteux, mais quelles obligations avait-on bien de
les financer « en espèces » ?
Finalement, Denis la malice a expliqué avoir utilisé l’argent
pour « fluidifier les relations sociales », sans autre précision.
Tout est donc possible : soutien aux entreprises mises à mal par
les grèves à répétition… ou bakchichs pour arroser les
fameux syndicats représentatifs ? Une enquête le dira, nous
promet-on…
Verra-t-on alors les responsables syndicaux – qui doivent leurs
privilèges à l’épuration de 1944 – déshabillés, tondus et
promenés dans les rues pour avoir couché avec l’ennemi
patronal ?
Note
(1) Selon un sondage IFOP-Metro, tandis que selon BVA pour Le
Figaro, 55 % disent que la grève n’est pas justifiée…
Mais selon CSA-L’Humanité, 54 % « seulement » des
sondés y seraient favorables…
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