Le Proche-orient est une terre aride. Si l’on se
limite aux trois régions où le problème de l’eau se pose avec
le plus d’acuité, à savoir la Jordanie, Israël et les
Territoires palestiniens, on constate que l’exploitation réelle
des ressources, pour satisfaire à la demande actuelle, est très
proche, voire supérieure à ce qui est effectivement disponible.
Ainsi, en 1994, la consommation d’eau en Israël dépasse les
2.000 millions de mètres cube/an alors que les ressources
renouvelables n’excédent pas les 1500 millions de mètres
cube/an.
Historique
Déjà en 1919, Chaim Weizman, dirigeant de l’Organisation
Sioniste Mondiale, écrit au 1er ministre anglais Lloyd George
que "l’ensemble du futur économique de la Palestine est
dépendant de son approvisionnement en eau pour l’irrigation
et l’énergie électrique". Les frontières demandées
englobent, en plus de la Palestine, le Golan et les Monts Hermon
en Syrie, le sud Liban et la rive est du Jourdain.
Un an plus tard, en octobre 1920, le même C.
Weizman écrit au secrétaire du Foreign Office : "Si
la Palestine était amputée du Litani, du Haut Jourdain et du
Yarmouk, sans même parler de la bordure ouest de la (mer de)
Galilée (Lac de Tibériade), elle ne pourrait être économiquement
indépendante. Et une Palestine faible et appauvrie ne serait
d’aucune utilité pour aucune puissance".
En 1941, D. Ben Gourion déclare :
"Nous devons nous rappeler que, pour parvenir à enraciner
l’Etat juif, il faudra que les eaux du Jourdain et du Litani
soient comprises à l’intérieur de nos frontières". Ben
Gourion et Moshe Dayan étaient dès le début partisans
d’envahir le sud-Liban jusqu’au Litani.
Dayan proclamait en 1954 : "La seule
chose qui est nécessaire est de trouver un officier (libanais),
même seulement un Major....Nous pourrions soit le convaincre
soit l’acheter pour qu’il se déclare lui-même le sauveur
de la population maronite (chrétienne). Ensuite l’armée israélienne
entrerait au Liban, occuperait les territoires nécessaires et
mettrait en place un régime chrétien qui s’allierait à Israël.
Le territoire au sud du Litani serait totalement annexé et tout
serait parfait".
Dès 1953, Israël commence à dériver les eaux
du Lac de Tibériade pour irriguer la côte et le Néguev, sans
consulter la Syrie ni la Jordanie, et prélève une partie des
eaux du Jourdain. En 1964 le "National Water Carrier"
(transport de l’eau par canalisations) est opérationnel.
La Syrie et la Jordanie entreprennent alors la
construction de barrages sur le Yarmouk et le détournement du
Baniyas pour retenir l’eau en amont du Lac Tibériade et ainsi
empêcher Israël de l’y siphonner. Israël les accuse alors
de l’agresser et bombarde les travaux jusqu’au déclenchement
de la guerre des 6 jours.
Le Liban suspecte aussi Israël de pomper son
eau souterraine depuis le Bassin de Hasbani River.
La guerre de 1967 permet à Israël
d’accaparer les ressources de Gaza, de la Cisjordanie et du
Golan.
L’annexion du Golan, surnommé le "château
d’eau", permet le contrôle du bassin d’alimentation
amont du Jourdain, et se traduit par l’expulsion de la majorité
de la population (100.000 personnes), ce qui, du même coup,
permet à Israël de récupérer l’eau qui n’est plus
localement consommée.
En 1994, Israël et la Jordanie signent un traité
de paix avec un volet sur l’eau défavorable aux Jordaniens.
Avec la Syrie qui propose de tout négocier, notamment l’eau,
contre un retrait total de l’occupant du Golan, les
discussions reprises en 1999 sont brusquement interrompues par
Ehoud Barak.
Quant aux accords d’Oslo de 1993, s’ils
reconnaissent (formellement) "les droits de l’eau des
Palestiniens", ils renvoient leur négociation aux
discussions finales sur le statut des territoires
Palestiniens..... !
Même des responsables israéliens dits modérés
ont refusé de s’engager sur l’eau dans le protocole de Genève.
Dès 1936, Walter Clay Lowdermilk s’inspira
des grands travaux, menés alors dans la Tennessee Valley aux
Etats-Unis, pour proposer la mise en place d’une "Jordan
Valley Authority" placée sous surveillance internationale.
Cette idée fut reprise en grande partie par le
plan Johnston pour la vallée du Jourdain, du nom d’un envoyé
du Président américain Eisenhower, en vue de créer une
autorité régionale en 1954-1955, fondée sur une coopération
inter étatique des Etats riverains du Jourdain, visant à
allouer et gérer au mieux les ressources en eau.
La loi sur l’eau d’Israël
Mais Israël en décida autrement. Sa loi sur
l’eau de 1959 fait des ressources hydrauliques "une
propriété publique (...) soumise au contrôle de l’État".
Le contenu légal, la valeur économique et sociale de la propriété
foncière et des ressources qu’elle contient sont alors
profondément modifiés.
Cela initie un système qui empêche les
Palestiniens de disposer librement de leurs ressources
hydrauliques, instaurant une discrimination systématique.
Mais la politique mise en oeuvre depuis 1967 à
Gaza et en Cisjordanie est d’un autre ordre de grandeur. Dès
les premiers jours de l’invasion de la Cisjordanie et de Gaza
en 1967, deux mesures sont prises :
1. interdiction de toute nouvelle infrastructure
hydraulique, forages et puits sans autorisation,
2. confiscation des ressources en eau qui sont déclarées
propriétés d’Etat conformément à cette loi israélienne
sur l’eau de 1959 qui a nationalisé la ressource.
Pour y appliquer sa loi sur l’eau, Israël use
à outrance de décrets militaires. Le domaine principal de
discrimination est celui des entraves imposées aux forages des
puits.
350 puits palestiniens fonctionnent actuellement
en Cisjordanie, 23 d’entre eux, représentant 6,5 % de
tous les puits, ont été forés depuis le début de
l’occupation, au profit exclusif des colonies de peuplement.
Le droit de creuser de nouveaux puits nécessite
un permis, délivré à la discrétion des autorités israéliennes.
Depuis 1975, des quotas sont imposés et leur dépassement entraîne
de lourdes amendes (des compteurs ont été installés). Ils
n’ont été augmentés que quatre fois...
La quantité d’eau disponible pour les
agriculteurs de Cisjordanie est gelée depuis 1967 : le
plafond est fixé à 90-100 millions de mètres cube par an pour
400 villages. Inversement, la quantité d’eau allouée aux
colonies juives a augmenté de 100% au cours des années 1980.
Utilisation de la "Loi
des Absents"
Sous des prétextes sécuritaires, la "loi
des absents" est renforcée par la proclamation de
"zones ou régions spéciales".
Conformément à l’ordonnance militaire sur la
"propriété abandonnée", Israël prend possession de
ces terres, expropriant de cette façon un nombre inconnu de
puits qui étaient utilisés par les Palestiniens ayant subi
l’exode de 1948 et depuis considérés comme
"absents".
De même, la législation israélienne soumet
certaines régions de Cisjordanie à des réglementations
renforcées : "régions soumises à
rationnement", "districts de drainage", "régions
de sécurité militaire".
C’est le cas d’une bande de terre le long du
Jourdain, déclarée "zone militaire", que les
Palestiniens utilisaient à des fins d’irrigation. Ces mesures
limitent davantage encore l’accès des Palestiniens à
l’eau, laquelle est achetée au prix fort - celui de l’eau
potable - par les agriculteurs palestiniens pour les besoins de
l’irrigation.
Avant 1967, cette pratique était inconnue des
populations palestiniennes : pour la Cisjordanie, les
autorisations concernant l’utilisation des eaux étaient généralement
accordées par l’autorité jordanienne. Dans la bande de Gaza,
aucun système de permis n’existait avant 1967 et
l’utilisation de l’eau relevait du droit coutumier.
Ainsi, par les ordonnances militaires n° 450
et 451 de 1971, le droit d’octroyer des licences
d’utilisation de l’eau, prérogative du Directeur du
cadastre jordanien, a été transféré aux autorités israéliennes.
Selon diverses sources, 5 à 10 permis ont été concédés
depuis 1967.
De même, depuis 1975, la réfection et le
nettoyage des puits sont soumis à des autorisations israéliennes,
pratiquement jamais accordées. Israël a reconnu sa politique
de limitation de nouveaux permis pour les Palestiniens sous les
prétextes d’économie d’eau et d’amélioration des méthodes
d’irrigation permettant une productivité accrue de
l’agriculture locale !
La Mékorot
Ces pratiques discriminatoires sont
institutionnalisées : le gouvernement israélien, l’Agence
juive et le Fonds national juif (FNJ) contrôlent la Mékorot
(Compagnie de gestion israélienne) et la Tahal (Compagnie de
planification des ressources en eau d’Israël), dont
l’objectif commun est le soutien exclusif des intérêts israéliens.
L’intégration des services israéliens, en
imposant une centralisation de ces compagnies et en supprimant
la participation des populations locales, place les territoires
palestiniens dans une situation de dépendance juridique et
administrative.
La Mékorot a développé dès 1967 des réseaux
au profit quasi-exclusif des colonies. Le développement et
l’entretien des systèmes municipaux palestiniens ont été
laissés à l’abandon, alors que la Mékorot contrôlait et étendait
son réseau de distribution.
Dans les secteurs Palestiniens desservis par la
Mékorot, l’état d’entretien est tel que jusqu’à 40% de
l’eau transportée en Cisjordanie est perdue en ligne. Le système
hydraulique palestinien est resté à son niveau de 1967.
À Tulkarem, ces pertes s’élèvent à 60%, à
Ramallah à 20%. Et la création d’infrastructures
hydrauliques, qui relient les colonies de peuplement entre
elles, enserre les territoires palestiniens dans un quadrillage
serré.
A Gaza, la situation est plus dramatique encore,
car l’aquifère côtier surexploité s’infiltre maintenant
d’eau de mer.
Pour le futur État palestinien, l’éventuel découplement
du réseau hydraulique s’avérera difficile et onéreux.
Inégalité d’accès et
de prix
Mais il ne suffit pas que la ressource existe,
encore faut-il y avoir accès et les couvre-feux et blocus
continuels conduisent à des situations dramatiques.
Les destructions de réseaux et réservoirs
obligent à faire venir l’eau en camions-citernes, renchérissant
son prix qui peut atteindre jusqu’à 40 NIS/mètre cube (plus
de 8 euros), soit près de 10 fois plus que le prix initialement
demandé par la municipalité.
Dans les Territoires Occupés Palestiniens de
1967, les réseaux étant fréquemment sous le contrôle direct
des colons, ceux-ci ferment les vannes de distribution des
antennes en direction des villages palestiniens quand bon leur
semble.
Si les Israéliens bénéficient de l’eau
courante toute l’année, les palestiniens sont victimes de
coupures arbitraires, en particulier pendant l’été. Quant au
prix payé par un consommateur palestinien, il est en principe
le même qu’un israélien, alors que le PIB est 20 fois plus
élevé en Israël qu’en Cisjordanie.
En réalité l’eau est fortement subventionnée
pour les colonies juives alors qu’un palestinien doit payer 4
fois plus cher qu’un colon pour y accéder.
Ainsi une famille palestinienne peut dépenser
plusieurs centaines de shekels/mois alors que ses revenus
n’excèdent pas 1500 NIS mensuels. (1 NIS = 0.21 euro = 1.37
FF ; 1 euro = 4,7 shekels).
Etat des lieux hydrogéologiques
et répartition de la consommation d’eau
La consommation moyenne et annuelle d’un Israélien
(357 mètres cube) est quatre fois plus élevée que celle
d’un Palestinien de Cisjordanie (84,6 mètres cube). La
consommation domestique d’un citoyen israélien est trois fois
supérieure à celle d’un Palestinien.
La consommation agricole est également
largement plus forte, et la politique israélienne de
subventions encourage, de fait, une consommation élevée.
Douloureux handicap pour l’agriculture
palestinienne : les colonies irriguent 60% de leurs terres
cultivables, contre 45 % en Israël et 6% en Cisjordanie.
La législation décrite ci-dessus permet à
Israël de satisfaire ses besoins en eau grâce à des détournements
qui s’apparentent à de véritables spoliations.
Depuis 1967, la conquête du Golan a permis à
Israël de disposer du Baniyas ainsi que des nappes et cours
d’eau qui parcourent le Mont et lui donnent son surnom de
"château d’eau". Le Golan apporte à Israël plus
de 250 millions de mètres cube d’eau par an. Le Golan et le
Yarmouk fournissent ainsi près du tiers de la consommation
totale israélienne. En conséquence, 75% des eaux du Jourdain
sont détournés par Israël avant qu’elles n’atteignent les
Territoires.
En Cisjordanie, trois aquifères fournissent un
autre tiers des réserves hydrauliques à Israël, qui consomme
près de 86 % de l’eau de la région. Les Palestiniens en
utilisent 8 à 12%, et les colons israéliens 2 à 5%. Après
plus de trente années d’occupation, quelque 180 villages de
Cisjordanie ne sont toujours pas raccordés à un système de
distribution. Le contrôle des sources d’eau est aux mains de
la compagnie israélienne Mekorot qui distribue chaque année
110 millions de mètres cube aux 1,5 million de Palestiniens
(soit 73 mètres cube par habitant), 30 millions de mètres cube
aux 140.000 colons (soit 214 mètres cube par colon), tandis que
460 millions de mètres cube partent vers Israël.
Cette compagnie pratique une distribution, mais
aussi des tarifs discriminatoires. Elle fait payer 0,7 $ le mètre
cube pour usage domestique et 0,16 $ pour l’agriculture aux
Israéliens, tandis qu’il n’existe pas de prix différencié
pour les Palestiniens qui doivent payer, eux, 1,20 $ le mètre
cube. Heureusement, cette nappe se régénère facilement grâce
à des précipitations abondantes.
A Gaza, la superficie territoriale est petite et
les précipitations sont faibles. On estime que seulement 35
millions de mètres cube pénètrent le sol pour gagner la nappe
phréatique. Vu l’accroissement de la population (de 50.000
personnes avant 1948, elle est passé à 1,2 million
aujourd’hui, ce qui correspond à 29 mètres cube d’eau par
habitant et par an !), cette nappe d’eau est surexploitée,
et 70% de ses ressources sont endommagées.
Les Israéliens pompent de façon trop
importante près de la bande de Gaza et assèchent les puits
palestiniens où l’eau disponible est saumâtre et désormais
polluée. Il n’existe pas de rivière dans la bande de Gaza,
mais un wadi qui rassemble les eaux de plusieurs wadi dans la région.
Les Israéliens ont établi de petites digues sur ces wadi et la
seule eau qui coule désormais dans le Wadi Gaza est celle usée
et non recyclée de la ville de Gaza.... La Bande de Gaza a
d’ores et déjà reçu un certain soutien international pour résoudre
en partie la crise de l’eau (dessalage, importation d’eau et
lutte contre la pollution), mais cela reste insuffisant par
rapport à la demande locale.
Conséquences sur
l’environnement
Tous usages confondus, la consommation moyenne
en eau des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza représente
environ 150 mètres cube par personne et par an, alors que les
colons de Cisjordanie en consomment, eux, entre 700 et 800 mètres
cube. En conséquence, les eaux souterraines ont été
surexploitées.
Depuis l’occupation en Cisjordanie et à Gaza,
70 à 80% des villes et villages palestiniens ne reçoivent que
quelques heures d’eau par semaine, obligeant la population à
faire des réserves dans des bidons, soit dans des conditions
d’hygiènes hasardeuses, tandis que les postes militaires israéliens
et les colonies sont alimentés 24 heures sur 24.
Ces dernières vivent comme si elles étaient
dans un pays européen, alors que la population palestinienne a
toujours géré son eau en connaissant l’aridité de la région.
De plus le développement agricole israélien se
fait en contradiction avec les ressources en eau disponibles.
Les Palestiniens n’ont pas le doit de forer des puits, alors
que les colons le peuvent et sur de grandes profondeurs (300 à
500 mètres).
Ainsi, non seulement il est interdit pour les
Palestiniens de forer de nouveaux puits sans autorisation
militaire israélienne, mais surtout leurs puits ne doivent pas
dépasser 140 mètres de profondeur, alors que ceux des colons
peuvent atteindre 800 mètres.
Aggravation de la situation
Depuis la deuxième Intifada, la situation
s’est encore dégradée, puisque l’armée israélienne et
les colons attaquent de manière presque systématique les
puits, empêchent les Palestiniens d’accéder à l’eau et à
terme essaient de les pousser à partir. De ce fait, le coût de
l’achat de tanks d’eau a considérablement augmenté,
passant de 3 $ par mètre cube à 7 $.
Les hélicoptères israéliens bombardent les
tanks sur les toits des maisons ainsi que les puits importants,
comme ce fut le cas à Rafah.
L’eau des aquifères de Cisjordanie est
revendiquée par les Palestiniens, qui soulignent qu’Israël
exploite par ses puits profonds et à 80-90% des nappes qui
devraient leur revenir, car elles sont situées sous les
collines de Cisjordanie. Ils estiment de plus que l’État israélien
a violé la Convention de Genève (stipulant le statu quo des
sols de territoires occupés) en creusant des puits pour ses
propres implantations, tandis qu’il gelait l’exploitation
palestinienne de l’eau. Par ailleurs ces puits auraient asséché
ceux moins profonds de villages traditionnels.
Pour Gaza, le problème provient des puits creusés
dans la nappe phréatique. Selon l’Autorité palestinienne,
les Israéliens ont pompé dans les nappes aux abords immédiats
de la bande de Gaza, causant ainsi la forte salinisation
actuelle des puits.
Ajoutons que 31% des communautés palestiniennes
ne sont pas raccordées : dépendant du Mékorot, qui fait
ce qu’il veut, elles se retrouvent souvent non alimentées,
soit du fait de camions citernes bloqués aux check points, soit
parce que l’eau est saumâtre, comme à Gaza et sur l’aquifère
oriental en Cisjordanie.
Le vrai rôle du Mur et la
politique d’annexion
Le tracé du Mur suit une logique délibérée :
maximum de terres, minimum de population, en vue de l’annexion
et de l’expansion future des colonies. Le tracé de ce dernier
suit soigneusement les principales colonies, mais est aussi calé
sur la mainmise des meilleures terres et sur la récupération
optimale des accès à l’eau.
Séparer les puits des terres conduit d’abord
à assécher ces dernières, à la perte des investissements et
des récoltes, puis à l’abandon et donc à la récupération
par Israël au titre de la "loi" sur les
"terrains non cultivés".
Par exemple, dans les régions de Qalqiliya et
Tulkarem, en juin 2003, plus de 50 % des terres irriguées
sont isolées et plus de 5 % détruites, 50 puits sur 140
et 200 citernes se retrouvent isolés ou en zone tampon, 30 Km
de réseau d’irrigation et 25 puits et citernes ont été détruits,
affectant 51 communes, soit plus de 200.000 personnes, dont 40%
sont maintenant sans ressources.
Un rapport de l’ONU indique qu’entre la
signature des accords d’Oslo en 1993 et 1999, 780 puits
fournissant de l’eau à usage domestique et pour
l’irrigation ont été détruits. Quant aux secteurs, où,
malgré tout, subsistent quelques productions, comme les serres
à Qalqiliya, la fermeture des voies de communication rend
impossible toute commercialisation.
L’enfermement concentrationnaire, déjà
effectif à Gaza depuis plus de 10 ans, s’accélère
aujourd’hui avec la construction du Mur en Cisjordanie. A
Rafah, dans la bande de Gaza, où la démolition systématique
de centaines de maisons a été menée par l’armée
d’occupation, les infrastructures correspondantes :
citernes, réseau et réservoirs publics ont été détruits.
Cela a été le cas, en particulier, au début
2003, de la station de pompage de deux puits fournissant l’eau
à 50% des habitants de la ville. Ces deux puits fournissaient
6.000 mètres cube d’eau par jour (de bonne qualité et non
saumâtre) sur les 13.000 journaliers consommés par les 130.000
habitants. L’un de ces deux puits avait été bâti en 2001
par l’Autorité Palestinienne avec l’aide de fonds du
gouvernement canadien.
En mars 2003 et depuis le début de la 2ème
Intifada, les dommages dans les Territoires occupés s’établissaient
comme suit : 151 puits, 153 sources, 447 citernes, 52
citernes mobiles (tankers), 9.128 citernes de toit, 14 réservoirs,
150 Km de canalisations desservant plus de 78.000 maisons.
L’avenir ?
Israël refuse à ce jour toute (re)négociation
sur ce sujet, tant avec l’Autorité Palestinienne qu’avec
ses voisins, comme le prouve sa politique au sud-Liban et au
Golan.
La politique internationale de l’eau, qui
avait été initiée dans les années 50 avec le Plan Johnston,
a été mise sous le boisseau par Israël. Il serait temps que,
sous l’égide de l’ONU, se tienne une Conférence
internationale avec les pays alentour, tout en étant conscient
que le règlement politique sur la base des résolutions de l’ONU
et le partage équitable de l’eau sont indissociables.
Il est aussi évident que si, en Palestine, un
seul pays laïque permettait à l’ensemble de la population de
vivre sous les mêmes lois, la résolution du problème de
l’eau serait plus facile.
En attendant, le statu quo mène directement à
une catastrophe annoncée.
* André Rousseau est membre du Collectif
Girondin de Soutien au Peuple Palestinien