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Nouvelles d'Irak
Législatives
2010 en Irak (suite)
Match retour IRAN 1 - USA 0
Gilles Munier
Gilles Munier
Lundi 10 mai 2010
Sans attendre la publication officielle des résultats des
élections législatives du 7 mars, Ibrahim al-Jaafari, en tête du
referendum organisé par Moqtada al-Sadr donnant les Premiers
ministres chiites (1) qui lui conviennent, a annoncé la
formation d’une majorité parlementaire regroupant les partis
pro-iraniens (2), une formule souhaitée par Téhéran
depuis le début de la campagne électorale. Fin avril, Hassan
Kazemi-Qomi, ambassadeur d’Iran à Bagdad, avait demandé aux
partis gravitant dans l’orbite du régime des mollahs de mettre
de côté leurs différends et de s’unir. C’était pour l’Iran, leur
avait-il dit : « une question de sécurité nationale » (3).
Mais, avec 159 sièges, il leur en faut quatre autres pour
obtenir la majorité au Parlement (325 sièges).
L’apport des 43 sièges de l’Alliance kurde
(Barzani-Talabani) leur semble acquis, tout dépend des
concessions qu’ils lui consentiront à Kirkouk et dans les
« régions contestées ».
Fuite en avant des pro-iraniens
Pour se maintenir au pouvoir, Nouri al-Maliki et les
pro-iraniens n’y sont pas allés par quatre chemins. Ils ont
invalidé rétroactivement 52 candidats pour leurs liens supposés
avec le parti Baas irakien (4), avec, parmi eux, deux
parlementaires élus, ce qui a permis de réduire un peu l’avance
d’Iyad Allaoui (91 sièges) sur Al-Maliki (89
sièges). Un des députés particulièrement visés était
Ibrahim al-Mutlaq, élu à Bagdad. Son frère, Saleh al-Motlaq,
chef du Front du dialogue national et « bête
noire » de Téhéran avait été éliminé pour le même motif,
avec 511 autres candidats, avant les élections (5).
Comme si cela ne suffisait pas, le régime est même allé jusqu’à
annuler les voix de leurs électeurs, une première mondiale en
matière de « démocratie ».
L’obligation constitutionnelle de proposer au bloc arrivé en
tête du scrutin la désignation du Premier ministre, n’a pas été
respectée. Pressée d’en finir, la nouvelle majorité
pro-iranienne ne cache pas que les candidats ayant déposé des
recours « ont peu de chance d’être repêchés ».
Ali al-Lami, directeur du
comité de débaassification, l’a dit avec d’autant plus de hargne
qu’il a été battu aux élections.
Le
recomptage manuel des 2,5 millions suffrages exprimés à Bagdad,
dont les résultats seront inévitablement contestés, ne devrait
guère avantager Al-Maliki, mais lui permettre de « sauver la
face » (6). A l’heure de l’informatique, il s’est aperçu
trop tard qu’il ne suffisait pas de bourrer les urnes pour
l’emporter. Avec un bon logiciel, des outils de reconnaissance
optique spécialement configurés, Sandra Mitchell – surnommée
Madame CIA - conseillère technique
en chef de la mission de l’ONU chargée de superviser les
législatives, aurait rétabli un semblant d’équilibre entre
partisans de l’Iran et des Etats-Unis, en laminant les listes
indépendantes au profit d’Iyad Allaoui.
La muraille de la peur
Face au coup de force iranien, Iyad Allaoui se démène comme un
beau diable, mais en pure perte. Il revendique le droit de
former le prochain gouvernement, déclare que le recomptage des
voix doit avoir lieu dans toutes les provinces où des fraudes
ont été constatées: Bassora, Nadjaf, Qadissiya, Diwaniya,
Nassiriya, Mossoul, Kirkouk. Quant à Bagdad, il veut savoir qui
gardait les urnes depuis un mois et demi, et exige que soit
prises en compte celles qui ont mystérieusement disparues le 7
mars. Si ses revendications ne sont pas satisfaites, il
demandera à l’ONU d’organiser un nouveau scrutin « pour
sauver le processus politique »… Qui peut croire que les
Nations unies, ayant déclaré que les élections sont un succès,
répondront favorablement à sa demande ; ou que les Etats-Unis
seront prêts à affronter l’Iran sur ce terrain là ?
Comme en 2005, l’Iran sort vainqueur de la mascarade électorale.
Mais, le vrai combat est celui livré sur le seul terrain
important : celui de la résistance du peuple irakien. Dans cette
perspective, Nouri al-Maliki a pris ses dispositions au cas –
aujourd’hui improbable - où il serait réélu Premier
ministre : une muraille de sécurité en béton surmontée de
caméras et de dispositifs ultra modernes de surveillance,
ceinturant l’ensemble de Bagdad, est en construction. Elle sera
achevée mi-2011. Huit portes contrôleront l’accès à la capitale…
comme au Moyen-âge. Ainsi, a dit le général Qassim Atta,
porte-parole du Commandement des Opérations à Bagdad, « les
terroristes ne pourront plus entrer dans la ville ». On
n’arrête pas le progrès !
Lire : Elections législatives en Irak - Match
aller : USA : 1 - Iran : 0
http://www.france-irak-actualite.com/article-legislatives-2010-en-irak-usa-1-iran-0-47306856.html
Notes :
(1)
Lire : Moqtada Sadr et la
« démocratie
participative » (AFI-Flash- n°103- avril 2010)
http://www.france-irak-actualite.com/article-moqtada-al-sadr-et-la-democratie-participative-48850603.html
(2)
Participaient à cette réunion, organisée au domicile d’Ibrahim
al-Jaafari (Islah – scission
d’Al-Dawa), selon l’Iranian
News Agency (IRIB): Tareq Najm
(Dawa - Maliki)
- Ali al-Adib (Dawa- Maliki)
- Abd al-Halim al-Zuhayri (Dawa
- Maliki) - Hasan al-Sunayd
(Dawa - Maliki)
- Khudayr al-Khuzai, (Dawa,
courant Tanzim al-Iraq) - Ahmad
Chalabi (Congrès National Irakien - INC) - Humam Hamudi
(Conseil suprême islamique en Irak –
ISCI de Ammar al-Hakim) - Falah
al-Fayyad (Islah/Jaafari)
- Qusay al-Suhayl (Mouvement
sadriste) - Hassan al-Shammari
(Fadila).
(3)
Teheran’s coup in Iraq (Part III),
par Robert Dreyfuss
http://www.thenation.com/blog/tehrans-coup-iraq-part-iii
(4)
Le coup de force post électoral a été mené par le
Comité Responsabilité et Justice,
dirigé par Ahmed Chalabi et
Ali al-Lami. Il fait la chasse aux baasistes avec le soutien
de Nouri al-Maliki.
(5)
Législatives 2010 : la grande manip’,
par Gilles Munier (Afrique Asie
– avril 2010)
http://www.france-irak-actualite.com/article-legislatives-2010-la-grande-manip-47766505.html
(6)
La province de Bagdad est représentée par
70 parlementaires. Le 7 mars, le bloc de l'État
de droit de Nouri al-Maliki a
remporté 26 sièges et Iraqia
de Iyad Allaoui 24.
© G. Munier/X.Jardez
Publié le 10 mai 2010 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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