Nouvelles d'Irak
Scandale
sexuel à la Haouza de Nadjaf
Gilles Munier
Gilles Munier
Mercredi 7 juillet 2010
La communauté chiite irakienne est en émoi depuis la diffusion
sur le site You Tube des ébats sexuels d'un proche
collaborateur du Grand ayatollah Ali al-Sistani (1),
avec son épouse, sa muta’a (2), et dix-huit
femmes venues solliciter un avis religieux. Hamdan Naji al-Mousavi
- c'est son nom - se cache, tandis que ses conquêtes
féminines sont en danger de mort. Dans la région, en effet, on
ne badine pas avec la Zinâ, terme désignant l'adultère
et le fornication dans le Coran. Les femmes accusées d'actes
sexuels illicites, ou qui en sont simplement soupçonnées, sont
généralement tuées par leur famille.
Hamdan al-Mousavi qui, depuis onze ans, jouissait de la
confiance du Grand ayatollah, était considéré comme un saint
homme à Amara - ville à majorité chiite, située sur
l'Euphrate - où il récoltait la zakat -
impôt religieux destiné aux nécessiteux
–
et le khums,
dîme représentant le 5ème des revenus d’une famille
(4). A la stupéfaction de ses disciples, amis et
voisins, il filmait avec son téléphone portable ses activités
sexuelles, conduite inadmissible pour un religieux qui doit être
irréprochable.
Certes, le Grand ayatollah Sistani a démis Al-Mousavi de ses
fonctions à la Marjaya (5) et le gouvernorat de la
province de Maysan menace d’arrestation les personnes surprises
à visionner les vidéos ou à les diffuser. Mais, le mal est
fait : l’omniscience attribuée à Ali Sistani et à la Haouza
(6) de Nadjaf est mise en doute. Les religieux chiites
subalternes font figure d’hypocrites, voire d’obsédés sexuels.
Aujourd’hui, toute la question est de savoir qui a diffusé les
vidéos, et si le scandale fait partie des intrigues ourdies par
l’Iran dans la perspective de la succession du Grand ayatollah,
âgé de 83 ans, connu pour son opposition à la velayat-e-faqih,
un concept développé par Rouhollah Mousavi Khomeiny, instaurant
à Téhéran la dictature du guide religieux à vie.
Note:
(1) Sex Scandal Rocks Iraqi Shia Establishment,
par Yusuf al-Jezani (Institute
for War & Peace Reporting IWPR – 5/8/10).
(2)
Muta'a:
contrat de mariage tempotaire qui aurait été autorisé à deux
reprises deux reprises par le
Prophète Muhammad et pour un temps
restreint, puis formellement interdit. Les chiites duodécimains
affirment le contraire, imputant l’interdiction au calife Omar
(634-644),
dont ils ne reconnaissent pas l’autorité.
(3)
Zinâ :
relations sexuelles hors du cadre du mariage, un des péchés
capitaux selon le Coran :
"Ne vous approchez pas de la fornication. C'est une abomination
et une voie pleine d'embûches"
(verset 32 – sourate 17).
(4)
La
Zakat
est un des cinq piliers de l’islam. Le
Khums,
aboli par le Prophète Muhammad, était la part du butin qu’il se
réservait après les batailles pour ses besoins et ceux de la
communauté musulmane. Les mollahs perçoivent également le
Radd,
taxe versée par les croyants à qui ils ont pardonné les
mauvaises actions.
(5)
Marjaya :
Autorité spirituelle collective exercée en Irak par les quatre
ayatollahs de Nadjaf.
(6) Haouza :
école théologique chiite.
© G. Munier/X.Jardez
Publié le 7 juillet 2010 avec l'aimable
autorisation de Gilles Munier
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