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Réseau Voltaire
L’Irak occupée
cédera-t-elle son pétrole aux « majors » ?
Arthur Lepic*
Employés de la société états-unienne
Boots & Coots
travaillant sur un puits de pétrole en Irak (2003)
Photo Réseau Voltaire
20 juin 2007 Après avoir renversé le seul
gouvernement au monde qui prétendait ne plus libeller ses
contrats pétroliers en dollars, la Coalition anglo-saxonne tente
de contraindre l’Irak occupée à céder ses revenus pétroliers
aux compagnies occidentales. Une grève générale du secteur pétrolier
irakien a retardé la signature des contrats les plus déséquilibrés
du siècle.
Quatre ans après l’invasion de
l’Irak par les troupes anglo-saxonnes, Washington, Londres et
Canberra tentent de régulariser au regard du droit international
le pillage auquel ils se livrent. Les conventions internationales
sont formelles : des troupes d’occupation ne peuvent
confisquer à leur profit les richesses d’un pays en général
et le pétrole en particulier. Aussi, après une première période
de mise en coupe réglée par une société privée habilement dénommée
« Autorité provisoire de la Coalition » [1],
le pouvoir a été remis durant une seconde période à un
gouvernement fantoche, retranché dans la zone verte de Bagdad. Il
répondait à une double fonction : d’une part créer des
forces de sécurité capables de soulager les troupes
d’occupation et, d’autre part, fermer les yeux sur l’évaporation
quotidienne de 200 000 à 300 000 barrils de pétrole. Le moment
est venu d’entrer dans une troisième période au cours de
laquelle les forces d’occupation pourront laisser aux
Collaborateurs la responsabilité de l’ordre public et
concentreront leur activité sur la protection des puits pétroliers,
tandis que des contrats léonins légaliseront le pillage pour les
décennies à venir.
C’est dans ce contexte qu’une
grève des ouvriers du secteur pétrolier irakien, lancée le 4
juin 2007, a paralysé la principale zone productrice au Sud du
pays et a interrompu les exportations légales de pétrole durant
plusieurs jours. Celles-ci atteignent officiellement jusqu’ici 2
millions de barils par jour ; une catastrophe pour les
compagnies étangères en comparaison des 3,5 millions de barils
quotidiens avant l’invasion de mai 2003.
Parmi ses revendications, outre
l’annulation de mesures ayant sérieusement dégradé les
conditions de travail et augmenté le taux de chômage dans le
secteur, la Fédération irakienne des syndicats du pétrole, qui
représente 26 000 travailleurs, demande à être consultée à
propos du très controversé projet de Loi sur les hydrocarbures [2].
Elle demande également que soit annulée l’augmentation générale
du prix des carburants à l’intérieur du pays, qui aggrave une
situation économique déjà pénible pour la population.
Les responsables syndicaux affirment agir au nom du peuple irakien
et dénoncent en particulier, dans le projet de loi, la
privatisation des revenus pétroliers de leur pays dans des
« conditions scandaleusement profitables » pour les
compagnies étrangères.
Dès le début de la grève, le gouvernement de Nouri Al Maliki a
fait encercler les grévistes par ses troupes et lancé des
mandats d’arrêt contre les leaders syndicaux, les accusant de « saboter
l’économie », pendant que des avions de chasse états-uniens
survolaient les manifestations [3].
Les miliciens ont jusqu’ici refusé de mettre en application ces
mandats d’arrêt.
Inquiet de voir se tarir la fontaine à dollars, Nouri al-Maliki a
finalement formulé quelques promesses aux grévistes pour
qu’ils reprennent le travail, mais ces derniers savent
pertinement que le combat est loin d’être terminé.
Deux avis de grève avaient été
successivement reportés au mois de mai, suite à des tentatives
de négociation avec les syndicats initiées par le gouvernement
Maliki. Ce dernier tente depuis le mois de février de faire
passer cette loi conçue sous la supervision du département d’État
états-unien malgré l’opposition d’un grand nombre de
parlementaires, d’un groupe de 60 experts irakiens du secteur pétrolier
et de l’ensemble des syndicats, bref contre l’avis de la
population qui vit maintenant depuis quatre ans sous occupation
militaire étrangère.
L’enjeu : 10 % des réserves mondiales de
pétrole
Avec 10 % des réserves mondiales
de pétrole, l’Irak aiguise les appétits des principales
compagnies d’autant plus que les coûts d’exploitation y sont
parmi les plus bas au monde. Les déclarations de l’actuel
vice-président des États-Unis, Dick
Cheney, alors qu’il était pdg de la société Halliburton
et les travaux de la commission secrète sur l’énergie qu’il
avait dirigée en 2001 ne trompaient guère sur ses intentions,
une fois Saddam Hussein renversé et les réserves pétrolières
irakiennes de nouveau accessibles aux compagnies anglo-saxonnes [4].
Inquiétée par la stagnation du cours de ses actions et par la
diminution des retours sur investissements, l’industrie pétrolière
anglo-saxonne redoutait à l’époque d’être définitivement
exclue de la plus riche zone pétrolifère au monde. Le discours
de Dick Cheney fit alors figure de promesse qu’une fois parvenu
à la Maison-Blanche, grâce aux dons des majors,
il remettrait celles-ci dans la course.
Dès l’invasion du pays par la coalition pétrolière, le cours
des actions d’Exxon, BP-Amoco et Shell repartit à la hausse de
manière spectaculaire et sans autre explication que la
perspective de gras dividendes pour leur actionnariat, dont elles
étaient privées depuis la nationalisation du secteur pétrolier
par Saddam Hussein en 1972 [5]
Dans le cadre du projet Future
for Iraq lancé par le département d’État états-unien en
avril 2002, soit un an avant l’invasion, le groupe « Pétrole
et énergie », convoqué quatre fois entre décembre 2002 et
avril 2003 et dont faisait partie M. Bahr al-Ulhoum, qui
deviendra ultérieurement ministre du pétrole dans le pays
« libéré », exprimait ses conclusions comme suit :
l’Irak « doit être ouvert aux compagnies
internationales aussi rapidement que possible à l’issue de la
guerre » ou encore « Le pays doit
instaurer un environnement commercial propice de manière à
attirer les investissements dans les ressources pétrolières et
gazières ».
En effet l’argument le plus
souvent avancé pour justifier la privatisation des revenus pétroliers
irakiens (en cours) ou iraniens (ardemment souhaitée pour
l’avenir), dans la presse liée aux grands groupes financiers,
est celui du besoin d’investissements massifs, que les pays en
question ne sauraient débloquer, en vue d’augmenter la
production pour répondre à la demande toujours croissante des
pays consommateurs. Or ce raisonnement entre en conflit direct
avec les intérêts des États producteurs : à la différence
des compagnies qui doivent maximiser leurs profits à court terme
pour verser dans l’année des dividendes à leurs actionnaires,
les États doivent gérer leurs ressources nationales en pensant
à leurs ressortissants et aux générations futures.
Dans le contexte du désormais certain déclin de la production
globale de pétrole dans les prochaines années, les compagnies pétrolières
privées ont intérêt à tout pomper tout de suite, puis à vivre
de la pénurie. Au contraire, les États producteurs ont intérêt
à étaler la production dans le temps.
L’intervention de BearingPoint
Dans le but d’organiser la
privatisation de l’économie irakienne, le département d’État
des États-Unis a fait appel à la société BearingPoint.
Celle-ci a été créée en 2002, à l’issue du scandale Enron,
en fusionnant les branches consulting de KMPG aux États-Unis (qui
avaient « réorganisé » les économies des États
post-soviétiques dans les années 90) et d’Arthur Andersen en
France. Cette nouvelle société mène ses activités
conjointement avec l’USAID
dans plus de 60 pays, principalement en Afghanistan et en Irak,
mais aussi en Serbie et en Égypte [6].
La SEC (Security and Exchange Commission), organisme états-unien
de contrôle des activités financières, examine de près ses
comptes depuis quelques années, sans que toutefois la procédure
n’aboutisse. Cette commission lui a même récemment confié la
réorganisation de son système de fichiers, ce qui en dit long
sur les liens de BearingPoint avec l’administration [7].
En Irak l’USAID attribue tout
d’abord à Bearingpoint, dès 2003, un contrat de plus de 200
millions de dollars pour aider à développer le « secteur
privé compétitif », contrat que BearingPoint a elle-même
rédigé pour l’USAID, ce qui lui a valu d’être épinglée
par le Center for Corporate Policy de Ralph Nader comme l’un des
principaux profiteurs de guerre [8].
Ce contrat consiste à organiser, sous la supervision d’une
autre entreprise privée, la Coalition Provisional Authority,
l’attribution des revenus pétroliers aux entreprises états-uniennes
chargées de la reconstruction comme Halliburton [9].
Tandis que les dix premiers milliards de dollars du fonds des
revenus pétroliers irakiens sont dépensés en contrats de
reconstruction, quatre autres milliards disparaissent dans la
nature. Et ce n’était qu’un début.
Ce vide juridique et cette opacité
étaient nécessaires pour le pillage du pays tant que les
objectifs nobles de l’invasion occupaient toujours le devant de
la scène, car les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie se
sont toujours défendus d’avoir envahi le pays pour ses
ressources pétrolières. Le 18 mars 2003, le Premier ministre
britannique Tony Blair déclarait que « Les
revenus pétroliers, que certains désignent à tort comme notre
objectif de guerre, devraient être placés dans un fonds destiné
au peuple irakien et administré par l’ONU ». Paul
Wolfowitz, grand architecte de la destruction de l’État irakien
et secrétaire adjoint à la Défense au moment de l’invasion, déclarait
pour sa part « Il s’agit là d’un pays
qui peut véritablement financer sa propre reconstruction assez
rapidement. ».
Si le premier exprimait un souhait qui ne l’engageait à rien
dans les faits, le second mentait par omission : certes l’Irak
pouvait financer sa reconstruction, mais pas se reconstruire lui-même,
alors la véritable question était plutôt de savoir qui
reconstruirait l’Irak, encaissant au passage les revenus pétroliers.
Après avoir dilapidé les fonds
existants de manière spectaculaire [10],
Paul Bremer se chargea de trancher en faveur de… Halliburton et
consorts, réputés pour leur surfacturation systématique des
contrats publics, et courroies de transmission de l’endettement
des pays riches en ressources vis-à-vis de la Banque mondiale,
dont Wolfowitz héritera plus tard la présidence, en guise de récompense
peut-être.
Maintenant que l’occupation du pays s’auto-justifie, à savoir
qu’elle vise officiellement à stabiliser la situation chaotique
qu’elle crée elle-même, la priorité pour les puissances de la
Coalition est de profiter de l’atmosphère de terreur pour faire
passer la loi sur les hydrocarbures (Iraq Hydrocarbon Law) qui
permettra de déplacer les revenus pétroliers de l’État vers
les compagnies pétrolières étrangères.
Cette fois encore c’est
BearingPoint qui est chargée par le département d’État de la
rédaction de la proposition de loi. Une première version a été
aussitôt adoptée par le gouvernement de collaboration de M. Maliki
en janvier 2007. [11].
Parallèlement, une importante opération
de lobbying auprès des décisionnaires irakiens est organisée.
Des représentants des principales compagnies pétrolières étrangères
(BP,
Shell,
ExxonMobil,
Chevron,
Total et Eni), réunies au sein d’une organisation appelée
Centre International des Taxes et Investissements (ITIC,
International Tax and Investment Centre), font part de leurs doléances
au gouvernement britannique dès 2004. Ce dernier, après leur
avoir indiqué sa stratégie visant à influencer le gouvernement
irakien, transmet ces doléances au ministère des Finances
irakien et organise une rencontre à Beyrouth, en janvier 2005,
entre les représentants des majors et les
ministères irakiens du Pétrole, des Finances et du Plan. Par
ailleurs, un ancien cadre de BP est chargé dès 2003 de rédiger
un cahier des charges destiné au gouvernement irakien afin que
celui-ci prenne des décisions conformes aux attentes de BP. Il
est probable que les autres pays impliqués dans ces négociations
en aient fait de même, mais les documents déclassifiés depuis
ne permettent pas de l’établir avec certitude [12].
L’invitation faite à Total pour participer à ces décisions
peut expliquer au moins en partie le fléchissement de la position
de la France concernant l’occupation de l’Irak à partir du début
2005.
Les parlementaires irakiens, pour
leur part, ne prennent connaissance du projet de loi qu’en
janvier 2007, au moment de son adoption par l’administration de
M Maliki. Est-il alors surprenant qu’une telle proposition, rédigée
par un cabinet de consultants spécialisé dans le démantèlement
des services publics, et appuyée par une campagne de lobbying des
compagnies étrangères auprès d’un gouvernement fantoche,
rencontre une telle opposition de la part des parlementaires et
syndicats ?
La méthode : les contrats PSA
Le plus inquiétant reste la
nature même de ce projet de loi. Basé sur un type de contrat
appelé « contrat de partage de production » (production
sharing agreement, ou PSA) qui n’a plus cours au
Moyen-Orient depuis les nationalisations des années 70, elle
garantit aux compagnies étrangères des retours sur
investissements anormalement élevés sur une période
exceptionnellement longue, termes que les intéressés justifient
par la situation sécuritaire du pays !
De fait, durant une période d’amortissement des investissements
indéfinie, les PSA assurent à l’investisseur étranger un
pourcentage des recettes, alors que le type de concession le plus
répandu dans les pays producteurs prévoit un retour fixe, calculé
en fonction du coût de production et non du prix de vente final,
sur une période définie. Très souvent la compagnie nationale
prend même le contrôle intégral des opérations et empoche tous
les revenus après la période d’amortissement, comme c’est le
cas en Iran pour de nombreux gisements (contrats « buyback »).
Lorsqu’un contrat PSA est en vigueur, la compagnie étrangère
n’a plus qu’à prétendre cumuler les investissements, réels
ou non, et prolonger ainsi ses prérogatives. C’est la situation
que connaît actuellement la Russie, le seul pays ayant
d’importantes réserves mais ayant signé des PSA. Ces contrats
furent négociés sous l’administration corrompue de Boris
Yeltsine dans les années 90, ce que l’administration Poutine
actuelle regrette amèrement. Elle a néanmoins réussi à en révoquer
certains (Shell sur les gisements de Sakhaline, pour des raisons
environnementales) et à limiter les investissements étrangers
dans les futures concessions.
Les termes des PSA qui seront
conclus par l’Irak avec les majors, en vertu
de la loi proposée, porteront la part revenant aux majors à une
tranche comprise entre 60 à 70 % des revenus dans une période
d’amortissement allant jusqu’à 40 ans, et les majors
empocheront 20 % des profits à l’issue de cette période. Pour
comparaison, le contrat PSA négocié - mais non appliqué pour
cause d’embargo - par Saddam Hussein avec Total en 1992 pour
l’exploitation du gisement géant de Majnoun était à 40 % et
10 %, pour une période de retour sur investissements de 20 ans,
ce qui reste dans la moyenne des PSA.
Les conditions exceptionnellement avantageuses pour les majors
dans la proposition de loi irakienne sont officiellement justifiées
par la situation sécuritaire du pays. Ne voulant pas exposer leur
personnel, les majors exigent de solides
garanties de retours sur investissements.
Coïncidence, l’escalade militaire décidée par George W. Bush
a aggravé la situation sécuritaire et renforcé les arguments
des majors pour exiger des marges toujours
plus extravagantes.
Il est d’ailleurs intéressant
de noter que BearingPoint affirme travailler en tenant compte du
pic pétrolier [13].
En effet, pour les grandes compagnies pétrolières, signer
aujourd’hui des PSA dans un pays comme l’Irak constitue une
garantie de garder la tête hors de l’eau une fois le déclin
global entamé, et contribue à maintenir à flot leurs économies
nationales respectives. Ici, les intérêts des compagnies pétrolières
anglo-saxonnes et des États de la Coalition se rejoignent. De
plus, les retours sur investissements calculés en proportion des
revenus du pétrole priveront l’économie irakienne de milliards
de pétrodollars à mesure que les prix augmenteront, ce qui est
une certitude d’avenir compte-tenu du pic de production. Dans le
scénario habituel, les revenus pétroliers restant au pays
producteurs sont finalement consacrés en grande partie au
paiement de contrats surfacturés par Halliburton et consorts pour
la construction d’infrastructures civiles, ainsi qu’au
remboursement des dettes.
Qu’adviendra-t-il de ces
milliards de bénéfices supplémentaires récoltés grâce à
l’augmentation du prix du baril ? La loi irakienne sur les
hydrocarbures prévoit bien entendu qu’ils puissent être
rapatriés à l’étranger, contrairement à d’autres législations
pétrolières qui en obligent le réinvestissement dans l’économie
nationale. Le chapitre intitulé « Régime fiscal »
stipule ainsi que « les compagnies étrangères
ne sont soumises à aucune restriction pour ce qui est de sortir
les profits du pays, et ne sont soumises à aucune taxe pour cela ».
En outre, tout litige entre l’État irakien et une compagnie étrangère
doit être arbitré par une cour internationale et non pas
irakienne. De fait, si le gouvernement irakien demande un jour des
comptes sur les cargaisons fantômes qui n’ont pas cessé de
quitter les terminaux de Bassorah depuis la période d’embargo
de l’ONU, la « communauté internationale » se réserve
le droit d’être juge alors que c’est elle qui profite de ces
cargaisons, sans quoi elle aurait déjà imposé un système de
mesure [14].
Finalement, sur les 80 gisements découverts en Irak, seuls 17
resteront sous contrôle majoritaire de l’État central irakien
avec le passage de cette loi.
Jusqu’à présent les obstacles
au passage de cette loi par l’Assemblée nationale irakienne
sont de plusieurs ordres. Aux résistances des syndicats évoquées
ci-dessus viennent s’ajouter la réticence de la minorité kurde
du Nord (deuxième région productrice du pays après le Sud
majoritairement chiite) qui entend gérer ses ressources pétrolières
de manière autonome. Ainsi les autorités kurdes ont déjà
attribué plusieurs contrats de partage de production et même déclaré
la mise en place de leur propre ministère du Pétrole, sous le
regard bienveillant des puissances occupantes, qui affirment
pourtant souhaiter l’unité du pays et le partage de la rente pétrolière.
S’étant vus promettre une rapide émancipation en échange de
leur collaboration avec l’occupant, les Kurdes réalisent un peu
tard qu’au lieu de devoir partager la rente pétrolière avec
leurs compatriotes sunnites et chiites, ils vont devoir en céder
une bonne partie aux majors occidentales, ce
qui n’est pas forcément pour leur plaire.
Ces derniers jours, l’amiral
Fallon, puis John Negroponte, numéro deux du département d’État,
se sont rendus à Bagdad pour faire pression sur le gouvernement
Maliki afin qu’il accélère l’adoption du projet de loi sur
les hydrocarbures. Car George W. Bush n’a pas plus l’intention
d’exposer encore ses troupes que de les retirer du pays.
Simplement, il souhaite imposer une privatisation de ses revenus pétroliers
à un État irakien en situation de faiblesse et sous la menace
des baïonnettes, puis replier ses troupes dans des bases
permanentes selon un « modèle coréen » souvent évoqué
ces temps-ci à Washington. Mais avant, les parlementaires
irakiens doivent décider du sort de leur économie nationale pour
les 40 prochaines années. Autour d’eux, pour les aider à
prendre leur décision, se tiennent 120 000 GI’s et autant de
mercenaires armés jusqu’aux dents, prêts à déclarer
accomplie la deuxième mission de la Coalition du pétrole en
Irak. La première consistait à inverser le mouvement initié par
Saddam Hussein et Hugo Chavez au sein de l’OPEP en rétablissant
le dollar comme monnaie de transaction pétrolière en Irak et
sauver ainsi l’économie états-unienne. La deuxième consiste
à assurer, pour 40 ans au moins et donc bien au-delà du pic pétrolier,
le monopole des majors occidentales sur le pétrole
irakien et mitiger ainsi le
déplacement du pouvoir pétrolier vers les pays du Moyen-Orient.
Arthur
Lepic
Journaliste français, spécialiste des
questions énergetiques et militaires.
[1]
« Qui
gouverne l’Irak ? », par Thierry Meyssan, Réseau
Voltaire, 13 mai 2004.
[2]
« Iraq
Federation of Oil Workers strike demands », Iraqi
Federation of Oil Unions, 5 mai 2007.
[3]
« Irak’s
workers strike to keep their oil », par David Bacon, Truthout,
9 juin 2007.
[4]
Voir les articles « Dick
Cheney, le pic pétrolier et le compte à rebours final »,
par Kjell Aleklett, Voltairenet, 9 mars 2005
et « Les
ombres du rapport Cheney », par Arthur Lepic, Voltairenet,
30 mars 2004.
[5]
Dans ce contexte il faut distinguer la notion de privatisation des
gisements de celle de la privatisation des revenus. En effet, un
seul pays au monde a privatisé ses gisements, les États-Unis. En
revanche la nature des contrats attribués aux compagnies étrangères
peut varier grandement dans les pays qui pourtant restent propriétaires
en théorie de leurs ressources, mais pas des revenus qui en sont
tirés.
[6]
« Shock and Oil : Iraq’s Billions and The White House
Connection », par Stephen Foley, The
Independent, 15 janvier 2007.
[7]
« SEC
Hires a Company It’s Investigating », par Marie Leone,
cfo.com, 27 septembre 2006.
[8]
« The
Center for Corporate Policy’s Ten Worst War Profiteers of 2004 »,
Center for Corporate Policy, 2004.
[9]
« Halliburton,
profiteur de guerre », par Arthur Lepic, Réseau
Voltaire, 23 septembre 2004.
[10]
Sur ce point et les autres milliards du pétrole irakien disparus,
voir l’article « So,
Mr Bremer, where did all the money go ?, The
Guardian, 7 juillet 2005.
[11]
La dernière version soumise aux parlementaires de l’assemblée
de collaboration irakienne, mais toujours pas approuvée, est
consultable ici : version
Anglaise et version
Arabe.
[12]
« Exposed :
British government pushing oil interests in Iraq », Platform,
9 mars 2007.
[13]
Voir la présentation
des activités de la société BearingPoint dans le domaine des
hydrocarbures .
[14]
Pour une analyse plus détaillée du projet de loi irakien sur les
hydrocarbures, consulter le très bon rapport de l’organisation
britannique PLATFORM : « Crude
Designs : The rip-off of Iraq’s oil wealth »
(uniquement en Anglais et Arabe)
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