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Corse
Evénements de Bastia: la voix des légumes
Jean-Guy Talamoni
Jean-Guy Talamoni - Photo Alta Frequenza
Lundi 13 avril 2009
« Instrumentalisation de la jeunesse ». L’accusation a été
maintes fois répétée sur les médias, s’agissant de ceux qui ont
appelé à la manifestation de Bastia. Certes, l’angle d’attaque
n’est pas nouveau : déjà, la CFR l’utilisait il y a quelques
décennies, notamment contre Edmond Simeoni. À l’époque, les
jeunes c’étaient nous ! Je dois à la vérité de dire que nous
n’avons jamais été instrumentalisés, ni par Edmond ni par
personne d'autre, et que nous avons fait ce que nous avons jugé
bon de faire. Avec nos maladresses et nos excès, mais également
avec notre sincérité.
Mais revenons en à aujourd’hui : vendredi 27 mars, le verdict
tombait dans l’affaire Yvan Colonna. Dès le lundi matin,
c’est-à-dire dès qu’ils ont pu, les lycéens et collégiens
bastiais sortirent des établissements pour affronter les forces
dites « de l’ordre ». Personne ne leur avait demandé de le faire
et personne n’en était informé. Ils avaient entendu répéter,
durant plusieurs semaines, à la radio et ailleurs, qu’un
innocent allait être condamné, avant d’en avoir la confirmation.
Le comité de soutien et les avocats d’Yvan avaient communiqué à
ce sujet de façon claire et énergique. Pour un jeune, cette
chronique d’une injustice annoncée était encore plus
insupportable que pour un adulte. Donc, le lundi matin eurent
lieu les premiers incidents puis le drame ayant frappé Xavier
Orsini. Dans les heures qui suivirent, la mauvaise foi des
autorités françaises au sujet de ce drame faisait encore monter
la tension. C’est à ce moment qu’à l’initiative de Corsica
Libera était créée une cellule de crise. Le lendemain matin
défilaient dans les rues de Bastia des centaines d’enfants prêts
à se jeter sur les gardes mobiles. Les responsables de la
cellule de crise estimèrent de leur devoir de ne pas les laisser
faire, et les accompagnèrent au commissariat où ils avaient
l’intention de se rendre pour exiger la libération d’un des
leurs. En leur demandant de rester à distance des gardes
mobiles, puis en obtenant de ces derniers qu’ils reculent
également, les adultes présents ont, de toute évidence,
désamorcé la tension et, très certainement, évité un nouveau
drame.
Pendant ce temps, au lieu de chercher à intervenir dans le même
sens, un certain nombre de donneurs de leçons et autres
consciences morales auto proclamées s’installaient devant les
micros pour crier à la manipulation des jeunes.
Alors, que les choses soient bien claires : s’il n’y a plus eu
d’enfants blessés, c’est grâce à l’intervention de Corsica
Libera et de la « cellule de crise ». Ceux qui se sont affrontés
le samedi suivant n’étaient pas des enfants mais des hommes
ayant librement choisi de le faire. Les uns étaient payés pour
cela et les autres ont agi par conscience politique.
Quant à nos donneurs de leçons qui sont restés dans leurs salons
ou dans les studios de radio pour délivrer des messages
venimeux, qu’ils comprennent bien qu’en nous accusant de
manipuler les jeunes, à savoir nos propres enfants, ils ne sont
plus dans le commentaire politique mais dans l’injure. Si nous
voulions leur répondre sur le même registre, nous leur ferions
observer que la plupart des hommes défendent leurs enfants
lorsqu’ils sont en danger, ce qu’ils n’ont pas jugé bon de
faire. Nous ajouterions que les animaux eux-mêmes protègent leur
progéniture. Font-il alors partie du règne végétal ? Sont-ils
des légumes, des plantes vertes, des pots de fleurs ?
Voilà ce que nous pourrions leur répondre.
S’ils valaient une réponse.
Jean-Guy
Talamoni
Dossier Corse
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