Bil'in village
Comment la Shabak se sert des enfants de Palestine
Comité populaire de Bil'in
Yasser Awad Yasin - Photo : Hamde Abu Rahma
Jeudi 15 avril 2010
Je m’appelle Yasser Awad Yasin. J’ai 27 ans et je suis de
Bil’in. Je suis marié et j’ai deux fils et une fille. Avant que
l’armée n’envahisse ma maison, la Shabak (les services du
renseignement israélien) m’avait téléphoné pour me demander de
venir à leur bureau. Je n’y suis pas allé et l’armée a fait un
raid sur ma maison.
Nous dormions, ma femme et mes enfants, lorsqu’ils sont
arrivés. Je leur ai demandé ce qu’ils voulaient, parce que je
n’avais rien fait. Ils m’ont demandé ma carte d’identité et
m’ont dit d’aller le lendemain au bureau de la Shabak. Je leur
ai demandé pourquoi ils ne m’arrêtaient pas tout de suite, puis
les soldats m’ont remis une convocation.
Lorsque j’y suis allé, ils m’ont d’abord fouillé à nu et
m’ont demandé si j’avais une arme. Je leur ai répondu que
j’avais une poche de nourriture et ils me l’ont prise. Puis ils
m’ont emmené au chef de la Shabak, qui m’a dit des tas de choses
sur moi et ma famille, pour me faire peur et pour me faire
croire qu’il savait tout. Ils m’ont dit qu’ils savaient qu’un de
mes fils avait des problèmes rénaux, « Nous voulions donc que tu
viennes ici pour t’aider. Tu peux l’envoyer à l’hôpital en
Israël et nous pouvons faire le nécessaire pour qu’il reçoive
toute l’aide dont il a besoin. Je comprends ta situation parce
que j’ai des enfants moi aussi et que je les aime. »
Quand j’ai entendu ça, je lui ai dit que j’avais deux fils
malades, pas un. Alors il m’a demandé quel était le problème
avec le second, et je lui ai dit qu’il avait des problèmes
cardiaques. Il m’a demandé à quel hôpital il allait, et je lui
ai dit à Ramallah. « Pourquoi ne l’envoies-tu pas dans un
hôpital israélien, où il aura un meilleur traitement ? Nous
pouvons t’aider à organiser ça. » Je savais qu’il me demanderait
quelque chose en échange de cette offre. Il m’a dit « Nous
pouvons faire tout ce que tu veux si tu nous aides et si tu
travailles pour nous, au Shabak » et je lui ai dit que le
traitement de mon fils ici était ok, et qu’il n’avait pas besoin
d’aller dans un hôpital israélien. Il m’a répondu, pour me faire
peur, que mon fils risquait de mourir s’il n’était pas mieux
soigné. Je lui ai répondu : « S’il meurt, ce sera à cause de vos
armes et de vos gaz tous les vendredis. J’habite près du mur et
tous les vendredis, nous devons quitter notre maison pour
protéger nos enfants de toutes ces choses, sinon ils
mourraient. »
Là, il a essayé une autre tactique. Il m’a demandé si j’avais
une maison, et si peut-être j’avais besoin d’argent. Je lui ai
dit : « J’ai une maison et un travail, et je n’ai besoin de
l’aide de personne. »
Après ça, il est revenu au problème de mon fils qui a besoin
d’un traitement en Israël, parce qu’il savait que là j’ai un
vrai problème et que c’est là-dessus qu’il pouvait essayer
d’obtenir ma coopération et que je devienne un informateur
contre mon propre peuple. Il m’a demandé ce que je ferais s’ils
refusaient de me donner l’autorisation de passer le checkpoint
pour emmener mon fils à l’hôpital, et je lui ai dit que sa mère
l’accompagnerait. « Et si nous refusons le permis à elle
aussi ? » Je lui ai dit : « Sa grand-mère ira. » « Et si nous
refusons à sa grand-mère ? » J’ai dit que je l’emmènerai en
Jordanie. « Et si nous t’arrêtons à la frontière ? » J’ai
répondu : « Je l’emmènerai à Ramallah – et que Dieu nous aide. »
Source :
Bil’in FFJ
Traduction :
ISM
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