Communiqué
La
victime, le lampiste et les
intouchables :
ce que révèle le meurtre
d’Abdel Fattah al-Sharif
UJFP
Samedi 25 février 2017
Le 26
mars 2016, le soldat franco-israélien
d’origine marocaine Elor Azaria
assassinait d’une balle dans la tête
Abdel Fattah al-Sharif, Palestinien de
21 ans, qui avait brandi un couteau
contre son unité opérant au cœur de la
Palestine occupée, à Al-Khalil/Hébron.
Rien
ne justifiait ce meurtre : l’assaillant
avait été arrêté, blessé et immobilisé
au sol, et donc mis hors d’état de
nuire. C’était un acte de revanche, un
message envoyé à l’ensemble des
Palestiniens vivant sous le joug de la
dictature militaire israélienne : la
soumission ou la mort.
Si
l’assassinat n’avait pas été filmé, Elor
Azaria n’aurait sûrement jamais été
inquiété. Il aurait continué sa mission
de sous-traitance de l’occupation :
raids nocturnes, cassages de
manifestations, protection des
« propriétés » de colons, gestion
humiliante des check-points.
Mais
le fait est qu’Elor Azaria a été jugé.
Et condamné. Le verdict est une insulte
à l’humanité des Palestiniens. Leur vie
vaudrait à peine dix-huit mois de
prison…
D’ailleurs, de nombreux responsables
politiques israéliens ont déjà indiqué
que l’emprisonnement serait revu et
aménagé par la justice militaire.
Toutefois, dans le contexte israélien,
la condamnation d’un soldat est un fait
rarissime. On ne compte plus le nombre
d’exécutions extra-judiciaires restées
impunies, et dont les auteurs sont
ensuite portés aux nues et considérés
comme des protecteurs de la nation.
Seulement voilà : elles sont menées par
des membres d’unités d’élite. Y faire
ses armes est une garantie de s’insérer
ensuite dans les strates sociales les
plus élevées de la société. Et lorsqu’on
les regarde de plus près, à de rares
exceptions quoique notables, seuls des
ashkénazes les intègrent. On voit ici la
ligne de fracture ethnique qui divise
non seulement la société entre
Israéliens juifs et Palestiniens
d’Israël, mais aussi les Israéliens
juifs eux-mêmes entre ashkénazes et
juifs orientaux « mizrahim ».
Aux
ashkénazes, les postes plus gradés, les
honneurs et l’impunité ; aux mizrahim,
les sales besognes, le maintien de
l’occupation raciste sur le terrain et
la prison. C’est peut-être là l’un des
paramètres d’explication du soutien
excédé de ceux qui constituent la
majorité de la population israélienne.
Le
racisme est un élément indissociable du
colonialisme. Il fait partie de son ADN.
Le jugement d’Elor Azaria le prouve une
fois encore. L’establishment militaire
israélien, ashkénaze, s’en tire une fois
de plus sans égratignure : en condamnant
le soldat à une peine de prison – certes
à une peine minimum –, il donne des
gages à bien peu de frais aux
organisations de défense des droits
humains et à la communauté
internationale afin que « Tsahal »
continue d’être appréhendé comme une
« armée morale » capable de se réformer.
La
France s’enferme dans un silence
assourdissant qui confine au mutisme.
N’a-t-elle rien à dire lorsque l’un de
ses citoyens est reconnu coupable d’un
crime aussi odieux ? Va-t-elle ainsi
valider la légèreté de la condamnation ?
Nous aimerions qu’elle affirme haut et
fort qu’aucun de ses citoyens –
fussent-ils également militaires ou
colons israéliens – n’est au-dessus des
lois et risque un jour de répondre de
leurs actes devant la justice française.
Un peu de courage politique à la fin de
votre mandat, monsieur le Président…
Pendant ce temps, l’occupation se
poursuit, et son lot d’injustices avec :
les victimes palestiniennes continuent
de tomber, les lampistes mizrahim sont
encore et toujours des variables
d’ajustement, tandis que l’establishment
politique et militaire ashkénaze reste
intouchable et conserve ses privilèges.
Le
Bureau de l’UJFP, le 25 février 2017
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